© Hervé BERNARD 1980-2007
INTRODUCTION
L’IMAGE
Physiquement, l’image est un amas, un treillis de points lumineux collecté par la rétine.
Dans ce sens le monde est toujours une image pour l’homme car toute notre perception
visuelle devient une image au fond de l’œil.
Étymologiquement l’image est ce qui imite, “ qui prend la place de ”, dans le sens de
remplacer ; tandis que le sens latin de ce mot désigne la statue. Mettre en image, c'est
donc immobiliser, figer et regarder une chose qui est à la place d’une autre.
Que l'on photographie filme ou peint, on fige non seulement les évènements : objets,
personnages (…) mais aussi le point de vue physique adopté. Cette immobilisation est
donc spatiale et temporelle mais aussi le point de vue physique adopté comme le montre
notamment le travail de Rodtchenko (vues de Moscou…). Doublement spatiale : prise
de position physique qui donnera l’angle et “ prise ” de champ visuel en fonction de la
focale peu importe que celle-ci soit une focale réelle dans le cas de la photographie et
du cinéma ou une focale imaginée dans le cas de la peinture ou du dessin. Ces deux
immobilisations spatiales produiront le cadre qui, en tant que découpage ou encore
fenêtre sur la réalité –ce n’est là encore qu’une question de point de vue– est lui aussi,
un échantillonnage spatial. Ces deux questions sont, à mon sens, commune à la peinture
qu’elle soit figurative ou abstraite comme je le montrerais dans la première partie.
Selon le Petit Robert, en français, le premier sens du mot image (1170) est :
« reproduction inversée qu’une surface polie donne d’un objet qui s’y réfléchit ».
Toujours selon ce dictionnaire, le second sens (1597) est : « reproduction exacte ou
analogique d’un être, d’une chose » et c’est seulement au XVIe siècle que ce mot
désignera la « représentation mentale d’origine sensible ».
Plus généralement donc, l’image désigne avant tout ce qui appartient au domaine de la
représentation, vaste domaine, d’une imprécision totale quant aux modes, aux moyens
de cette représentation. Ainsi, le domaine de l’image concerne aussi bien la peinture, le
dessin que la photo, la télévision ou encore, une image mentale ou verbale comme
l’allégorie. Une image figure donc une chose différente d’elle-même. Pourtant, cette
représentation se fait avec le minimum de similarité –avec l’objet ou l’idée exprimée–
nécessaire à l’identification qui, dans ce cas là, est du type A=B ou A=±B. Avec ces
deux égalités extrêmement restrictives toutes les autres définitions et notamment les
images verbales, sont écartées. Cependant, ces deux égalités sont erronées comme le
montre David Marr pour qui une image, ne représente jamais la réalité (cf. deuxième
partie de cet ouvrage).
Cette réplique, dans le sens copie de la réalité, n’existe pas car elle passe toujours par le
filtre d’un système d’interprétation :
- la perspective,
- le noir et blanc, la couleur…
- le réalisme, la poésie ou la langue… Cette dernière est d’ailleurs
extrêmement imprécise quand il s’agit de décrire les couleurs.
Leurres supplémentaires, quelques uns de ces filtres, comme le noir et blanc et la
couleur auraient, selon certains praticiens de l’image, des valeurs naturelles. Où peuvent
se situer les valeurs naturelles du noir et blanc qui n’existe pas, isolé, dans la perception
visuelle humaine, sauf déficience de notre système perceptif. Quant aux valeurs de la
couleur, elles changent avec l’éclairage ambiant et la technique de reproduction… À
ces filtres viennent s’ajouter les grilles de lecture appliqués sur l’image par des
professions : physiciens, médecins, chercheurs ou encore par les différentes cultures et
époques.
VITRAIL DE L’ÉGLISE DE LADON, LOIRET