fournie par l'un corresponde une prestation fournie par l'autre et, aussi, que chacune présente pour celui à qui elle
est faite la même somme d'utilité. Pour qu'il en soit ainsi les choses doivent être comparables. La valeur d'échange
dérivant de la valeur d'usage, cette dernière a pour cause le besoin. L'échange mesure alors le besoin respectif des
échangistes ; la qualité commune à toutes choses, et qui les rend comparables, consiste dans leur aptitude à
satisfaire les besoins.
L'autre est celui de l'enrichissement. L'acquisition des biens dépend, certes, du motif de vivre bien, mais on ne peut
négliger le motif de l'enrichissement où l'argent est recherché pour lui-même et apparaît comme une fin et non plus
seulement comme un moyen. Il est donc deux modes d'obtention des richesses, l'économique et la chrématistique
(Aristote). La première a pour objet la prise de possession directe ou la transformation, par le travail, des richesses
(fruits, animaux, esclaves) que la nature destine aux usages de l'individu ; elle a pour but la satisfaction des besoins
essentiels ; elle rencontre des limites en ce sens que les instruments qu'elle utilise n'existent pas en quantité illimitée
; elle est légitime ; elle comprend l'agriculture, l'élevage, la chasse et la pêche. La seconde présente des
caractéristiques totalement opposées : elle transforme en sources de gains des choses - la monnaie et les facultés
de l'âme - auxquelles la nature n'avait pas donné cette destination ; elle a pour but l'accroissement infini de la
richesse ; les moyens qu'elle utilise - le prêt à intérêt (la monnaie engendre la monnaie), le louage de travail manuel,
le négoce (qui produit de la richesse en déplaçant de la richesse) - lui permettent de poursuivre ce but ; elle est
illégitime, et condamnable en ce sens qu'elle résulte d'une perversion de la vente ; elle manifeste son activité par
l'accumulation incessante de la monnaie qui ne rencontre aucun obstacle.
Les jugements sont allés de pair avec l'analyse. Si, pour Xénophon, l'enrichissement individuel paraît un but
souhaitable, il est loin d'en être ainsi pour Platon et Aristote. Aristote ne propose pas, comme le fera Platon,
d'abandonner les monnaies employées, facteur de dissolution de la Cité, mais condamne l'acquisition des biens "
imaginaires " comme but de toute activité : estimant que les matières d'or et d'argent n'ont pas de valeur par
elles-mêmes, il pense qu'il est absurde de rechercher leur possession.
Par extension le crédit est condamné. Ainsi Platon souhaite-t-il interdire les prêts gratuits et les ventes à terme.
Quant au commerce, si Xénophon préconise l'octroi de primes aux navires et Platon la liberté du commerce, mais
assortie de prohibitions complètes d'entrée pour certains produits (ceux destinés à la consommation) ou de sortie,
Aristote, de son côté pense à une réglementation destinée à prévenir l'excessif développement du commerce
internationale, et spécialement maritime, par la désignation limitative des citoyens ayant le droit de s'y livrer.
L'évolution
Outre le fonctionnement de l'économie, son évolution a été étudiée et ses facteurs ainsi que son sens dégagés. Les
premiers sont d'ordre économique mais aussi psychologique, sociologique et même démographique. Chacun
influence les autres et, en retour, se trouve influencé par eux. Comme le montre Platon (La République) les besoins
des individus augmentent et se diversifient, la dimension de la Cité s'accroît, le nombre de produits fabriqués hausse
ainsi que la richesse, la psychologie des individus se transforme, la répartition de la richesse entre les individus se
modifie.
Le sens de l'évolution est simple. Un cycle doit être parcouru. Les régimes politiques se succèdent dans un certain
ordre - aristocratie, démocratie, oligarchie, démocratie, tyrannie - et, une fois terminé, le cycle est prêt à
recommencer.
Une telle évolution peut être considérée comme le fruit du hasard, de l'incertitude, de l'imprévoyance des individus et
de la difficulté à se faire obéir des magistrats de la Cité. En effet, dans la Cité idéale chaque individu possède des
aptitudes particulières qui conduisent à lui assigner une place au sein d'un groupe (dirigeants, gardiens, artisans et
laboureurs). Si une telle affectation se trouve parfaitement réalisée, la Cité fonctionne sans heurts, mais comme il ne
peut en être ainsi pour les raisons indiquées, elle sera soumise à une évolution remplie de vicissitudes et s'exprimant
par le cycle précédemment mentionné.
La répartition
Ici également on trouve des vues partielles. Plus exactement les auteurs se sont intéressés à la légitimité et à l'utilité
de la propriété individuelle et à la recherche des différents systèmes qui pourraient la remplacer.
D'une part, il existe des propositions visant à restreindre la propriété. Pythagore et ses disciples ont le dédain des
biens matériels poussé au plus haut point et il s'en est suivi une sorte d'abandon de l'idée de propriétaire (mais dans
leur secte la communauté des biens n'était pas établie). Hippodamos de Milet aurait d'après Aristote, proposé une
cité divisée en trois classes (artisans, laboureurs et soldats), un territoire divisé en trois parts (terres réservées au
culte, terres publiques destinées à l'entretien des guerriers, lot des laboureurs, ces dernières terres étant seules
susceptibles d'appropriation individuelle), mais, en même temps, il borne la tâche de l'État à assurer la sécurité
matérielle et morale des individus. Platon, dans la République, avance que guerriers et magistrats ne doivent rien