Croissance ou décroissance ?
Le débat qui s’est tenu mercredi 20 octobre à Valbonne était introduit par Benoît Borrits,
militant altermondialiste, et Patrick Mignard, professeur d’économie à l’université de Toulouse.
Benoît Borrits a tout d’abord rappelé que les conditions actuelles de la croissance du PIB
(Produit Intérieur Brut) se heurtent de plus en plus aux limites naturelles de notre planète
(dérèglements climatiques dus aux émissions de gaz à effet de serre, épuisement des réserves
d'eau, …). Au-delà du fait que le PIB ne prenne pas en compte la destruction de biens à long
terme (on n’enregistrera que la reconstruction des dégâts d’une tornade...), il est impossible de
valoriser l'épuisement des ressources naturelles de notre planète, car ils n’ont aucune valeur
monétaire. Il est donc possible qu’une modification des modes de production dans un sens plus
environnemental se traduise comptablement par une décroissance alors qu’il est synonyme d’un
mieux-être généralisé pour la population.
La situation de chômage dans les pays occidentaux, la marginalisation économique de pans
entiers de la population des pays du sud impose une réinsertion de ces millions de personnes
dans le processus de production nécessaire à la satisfaction des besoins humains. Cela implique
une extension des services publics, une évolution des secteurs marchands et des règles de
commerce international. Cette extension d'activité humaine contrecarre la "décroissance". C'est
pour cela que les altermondialistes préfèrent parler d'une croissance respectueuse de
l'environnement permettant le développement de l'humanité. Cette autre forme de croissance
suppose que les choix démocratiques de la population s’imposent face aux marchés.
Pour Patrick Mignard, on parle aujourd’hui de la croissance comme on parlait de
l’existence de Dieu au moyen âge : la remettre en question, c’est une hérésie. Nos emplettes font
nos emplois, on est un bon citoyen que lorsque l’on consomme, et on a intégré le fait que plus on
va produire, mieux on ira, quitte à créer des besoins qui n’existent pas. Or cette dynamique de
croissance n’est plus viable écologiquement et socialement ; nous avons donc une responsabilité
vis à vis du reste de l’humanité, car s’il adopte notre mode de vie la terre deviendra invivable.
Pour autant le terme de décroissance fait peur, car il est porteur de fantasme et de mauvaise
interprétation. Mais selon Patrick Mignard, la décroissance, ce n’est pas « un retour à la nature,
vêtus de peaux de bêtes et avec une torche pour s’éclairer » ; cela signifie simplement que dans
l’avenir on ne pourra pas produire et consommer de la même manière et en si grande quantité.
Peut-on alors parler de croissance douce et écologique plutôt que de décroissance ? Pour
Patrick Mignard ce qui est important ce ne sont pas les termes, mais les alternatives que l’on
construit ensemble. Selon lui il ne faut pas attendre qu’elles viennent d’en haut, mais mettre en
place localement des modes de fonctionnement alternatifs, qui s’imposeront ensuite aux
politiques. Benoît Borrits pense que des alternatives isolées ne suffisent pas, et qu’une régulation
économique est nécessaire : l’action citoyenne et l’action politique doivent donc être
concomitantes.
Différentes alternatives ont été présentées à l’occasion de cette conférence :
Dominique Petry Amiel, architecte bioclimatique, nous a présenté un concept de maison
s’éclairant et se chauffant par le toit : son projet permet de faire des économies d’énergie et
des économies d’espace.
Véronique Jourde nous a présenté l’AMAP de la ferme Saint Jean, Association pour le
Maintien d’une Agriculture Paysanne située à Valbonne. Le principe de cette association est
l’achat à l’avance de la récolte d’un agriculteur par un groupe de familles, qui se répartissent