« Le Père Varillon est de ceux qui ont le mieux exprimé ce que l’Evangile peut apporter de vie et de dynamisme aux femmes et aux hommes d’aujourd’hui » (René Rémond). Ses conférences regroupées dans un livre : « Joie de croire, joie de vivre », Bayard Editions / Le Centurion, Paris (réédition septembre 2000), 299 p., 17,07 euros – 112 FF constituent un exposé lumineux et chaleureux de le vie spirituelle pour celles et ceux qui veulent comprendre et aimer tout au long de leur vie, sous le regard de l’Evangile du Christ. 1er thème : L’essentiel de la foi. La vie a-t-elle un sens ? Question : pourquoi y a-t-il quelque chose et non pas rien ? Au plan pratique : pourquoi faut-il qu'il y ait un accroissement, une puissance, un plus-être ? A quoi cela mène-t-il ? C'est toute la question du sens et du non-sens de la vie. Le christianisme se présente comme une réponse à cette interrogation qui nous définit comme homme. Etre chrétien c'est croire à la réponse que Dieu donne en Jésus-Christ à cette interrogation humaine… Etre chrétien, c'est pouvoir donner un deuxième sens, beaucoup plus profond, à ce qui a déjà un sens (comme l'amitié, l'amour, la culture, la musique, même la toute simple camaraderie) et c'est pouvoir donner un sens à ce qui n'en a pas. (p 12-14) Le sens ultime de l'existence humaine est que nous sommes appelés à devenir Dieu. Comment ? Telle est la question qu'il faut approfondir. (p. 20) L’essentiel de l’essentiel " Dieu est devenu homme pour que l'homme devienne Dieu " (Irénée, évêque de Lyon, + 200). Explication : Les deux vérités sont rigoureusement corrélatives, l'incarnation de Dieu et la divinisation de l'homme. Cela est absolument traditionnel, c'est le noyau de la foi, le permanent, l'immuable, ce qu'aucun contexte culturel nouveau ne peut modifier, ce que l'Eglise ne mettra jamais en question, même si elle remet en question la manière de la formuler. (p 16-20) Qu’est-ce qu’un mystère ? Saint Augustin n'a jamais défini le mystère comme ce que l'on ne peut pas comprendre mais comme ce que l'on a jamais fini de comprendre. Exemples : comprendre un ami, son mari, son épouse, l'autre quel qu'il soit… En fait, le sens de la vie est notre relation à Dieu, une relation telle que nous vivrons éternellement de sa vie. Le christianisme est essentiellement la vérité d'une relation. C'est le Christ, celui qui s'est fait homme pour que l'homme soit fait Dieu, qui nous révèle qui est l'homme et qui est Dieu. (p 20-22) Qui est l’homme ? Si vous me demandez ce qu'est l'homme, je vous réponds ceci : l'homme est du divinisable. C'est la réponse la plus profonde, au-delà de toutes les choses si intéressantes que peuvent nous dire les sciences humaines… Divinisable ? Tout simplement parce qu'il y a un homme qui est Dieu. Un homme pleinement homme : l'Evangile et saint Paul nous répètent que le Christ est pleinement homme sauf le péché, ajoute-t-on. Mais c'est précisément parce qu'il n'est pas pécheur que le Christ est pleinement homme. Ce qui nous empêche nous d'être parfaitement hommes, c'est que nous sommes pécheurs. Si vraiment il y a un membre du genre humain, de l'espèce humaine qui est Dieu, c'est donc qu'il y a dans tous les hommes une capacité à devenir ce qu'est Dieu. Si un homme est Dieu, c'est que tous peuvent le devenir. Le mystère de tout homme, le sens de l'homme, la signification de la vie humaine, c'est l'aptitude essentielle de l'homme à devenir ce qu'est Dieu. (p 22-23) Qui est Dieu ? Jésus nous révèle qui est Dieu : Dieu est Amour. Nous le savons, oui ; mais prenons-nous cette affirmation au sérieux ? Il est bien évident que s'il y a un homme qui est Dieu, c'est que Dieu est Amour. On imagine mal l'incarnation si Dieu n'est pas Amour. En effet, la tendance profonde, le mouvement profond de l'amour est de devenir l'être aimé, non seulement d'être uni à lui mais d'être un avec lui. C'est un mouvement qui existe déjà dans l'amour humain mais qui n'est pas réalisable pleinement… Dieu est amour. Toute la Bible développe ce point. (p 24) Qu’est-ce que l’amour ? Toute l'histoire de la Révélation est la conversion progressive d'un Dieu envisagé comme puissance à un Dieu adoré comme amour. C'est avec cette perspective-là qu'il nous faudrait relire la Bible et étudier l'histoire des religions… Il y a moyen d'imaginer un regard d'amour où il n'y aurait que de l'amour car je pense que, dans l'expérience de l'amour humain (qu'il s'agisse de l'amour conjugal, de la sympathie fraternelle, de l'amour paternel ou maternel, de la charité et du dévouement aux autres, etc.), il y a suffisamment d'amour même mêlé de beaucoup d'égoïsme, pour que nous comprenions ce qu'est l'amour quand il est vécu en Dieu, en toute pureté et en toute plénitude. Le Dieu en qui nous croyons n'est pas le Dieu des philosophes, d'Aristote ou de Platon, il est le Dieu révélé par Jésus Christ… Nous sommes loin de Jupiter, du paternalisme et du triomphalisme ! C'est ce Dieu-là (Amour) que nous révèle Jésus-Christ. (p 24-32) 2ème thème : Transformation de l’homme Croissance humaine On ne devient pas ce qu'est Dieu en avançant tranquillement le long d'un plan incliné. On ne débouche pas tel que l'on est dans la vie même de Dieu. Il y faut une transformation radicale (j'entends ce mot en son sens le plus strict, il vient de radix qui signifie racine). Pour devenir ce qu'est Dieu, il faut que l'homme soit radicalement transformé. Le P. Varillon propose des exemples : la petite fille qui devient femme, la chenille qui devient papillon, le grain de blé qui devient épi… Ainsi, le seul Dieu qui existe est celui qui nous fait croître, passer d'une condition simplement humaine à une condition d'homme divinisé … Il n'y a pas de croissance sans transformation, il n'y a pas de transformation sans mort et nouvelle naissance (mourir et ressusciter, mourir et se réveiller dans une autre condition). (p 35-40) La Pâque des Hébreux Elle nous est racontée au livre de l'Exode dont tout chrétien devrait avoir lu au moins quelques chapitres, d'autant plus que ce livre se lit comme un roman… Peuple qui cherche à se libérer de l'esclavage et qui est toujours tenté de revenir en arrière, de retourner à l'esclavage. On ne peut, sans être transfiguré, devenir un homme libre de la liberté même de Dieu. (p 40-42) La Pâque du Christ Jésus-Christ revit pour son propre compte ce qu'avait vécu son peuple. Il revit d'abord symboliquement en passant quarante jours au désert, au seuil de sa vie publique (quarante jours qui rappellent les quarante ans de l'exode) puis, non plus de façon symbolique mais de façon bien réelle, en montant au Calvaire : il va vers la mort, en réalité il va vers la vraie vie qui est la vie ressuscitée au cœur de la Trinité, la vie même de Dieu. La première pâque n'était qu'une image, celle du Christ est la Pâque centrale de l'histoire. (p 42-43) Notre Pâque La troisième pâque est la nôtre et il n'y en a pas qu'une, je veux dire que chacune de nos décisions est une pâque, c'est-à-dire est une forme de mort et de résurrection. Commençons par comprendre que ce qui importe dans notre vie, ce sont nos décisions. Ma vie réelle d'homme ou de femme ou, si vous préférez, ce qu'il y a d'humain dans ma vie est un tissu de décisions. Ce qui dans ma vie n'est pas décision n'est rien, ne construit rien. Saint Augustin a une comparaison plus poétique : " Nous sommes comparables, dit-il, à une harpe et la seule chose importante dans la harpe, ce sont les cordes. Il y a certes un bâti mais ce sont les cordes qui vibrent ". Dans ma vie, ce qui vibre, ce qui me constitue, ce sont mes décisions petites ou grandes. Le Christ est présent dans notre liberté car c'est par la liberté que nous sommes véritablement des hommes, que nous émergeons de la nature… S'il est présent, il est actif…S'il est actif, il est transfigurant… S'il est transfigurant, il est divinisant…, en nous faisant devenir ce qu'Il est. Le Christ donne à nos décisions humaines humanisantes une dimension divine. En d'autres termes, il divinise ce que nous humanisons… Car l'Homme n'est pas, l'Homme est à faire. Nous sommes des commencements d'homme, dit saint Jacques… Nous sommes des hommes en devenir, ce sont nos décisions qui contribuent à faire que nous soyons des hommes. Et nos décisions ne sont vraiment humaines que si elles sont humanisantes… On devient soi-même un homme libre quand on travaille à libérer ses frères. On devient plus homme en travaillant à ce que le monde soit plus humain. - Ces décisions humanisantes, il est rare qu'elles ne soient pas des sacrifices, des morts à l'égoïsme, on ne peut pas à la fois se donner et se garder pour soi. Tout le monde sait par expérience qu'il n'y a pas de vie humaine humanisante authentique sans sacrifice… Le Christ ressuscité qui est vivant-présent-actif-transfigurant-divinisant au cœur de nos décisions humaines humanisantes leur donne une dimension de Royaume éternel, proprement divine. (p 43-49) 3ème thème : Relire la Bible sous le regard de l’Amour Donner comme Dieu donne Du discours sur la montagne se dégage incontestablement une unité (saint Mathieu, chap. 5, 6 7 et saint Luc, chap. 6, 12-49). Unité de ton et unité de logique. La pensée du Christ est conduite selon une logique intérieure qui est celle du christianisme. Logique du style de vie, de la qualité d'existence que vient instaurer Jésus. D'un mot, la logique même de l'amour. Donner, dit le Père Guillet, constitue l'un des grands refrains du Discours sur la Montagne : " Ne refuse pas… ne réclame pas… prête sans rien attendre… donne et il te sera donné ". Mais il faut prendre garde : donner, ce peut être encore un moyen de conquérir et de se valoriser (on se valorise beaucoup en étant généreux). La pure joie de donner, la joie de s'unir à celui qui reçoit, seul le pauvre est en état de la connaître, c'est-à-dire celui qui a fait l'expérience des Béatitudes et découvert comment Dieu donne. (p 53-105) Appel à la liberté Ce qui caractérise la Loi nouvelle apportée par Jésus, c'est à la fois le radicalisme de ses exigences et l'appel à la liberté par rapport à la lettre. Liberté par rapport à la lettre de la Loi, cela ne veut pas dire affranchissement ou émancipation : Jésus précise qu'il n'est pas venu pour " abolir " la loi mais pour l'accomplir "… C'est parce que l'amour est un absolu que ses exigences sont radicales, en même temps que la liberté seule peut déterminer comment, en pratique et selon les circonstances, l'amour doit être vécu… C'est pourquoi Il marque vigoureusement l'opposition entre : " On vous a dit… " et " Moi je vous dis… ". (p 53-105) Mourir à soi-même Le fond des choses, c'est qu'en Dieu la mort est au cœur de la vie. Dieu est Amour. Or aimer, c'est mourir à soi-même, non seulement en préférant les autres à soi, mais (quand on est Dieu et qu'on aime en plénitude, qu'on réalise éternellement la perfection de l'amour), en renonçant à exister pour soi et par soi afin d'exister uniquement par les autres et pour les autres. Dieu est Trinité : le Père n'est que mouvement vers le Fils et l'Esprit ; le Fils n'est que mouvement vers le Père et l'Esprit ; l'Esprit n'est que mouvement vers le Père et le Fils. Ce "ne que" sur lequel j'insiste, car c'est ce "ne que" qui exprime le mystère de Dieu, veut dire que le fond de Dieu est la mort identique à la vie. Sortir de soi, c'est bien mourir à soi. Vivre, c'est aimer, mais aimer, c'est mourir, car c'est n'être que par les autres et pour les autres… Aimer l'autre, c'est vouloir qu'il soit, et non pas vouloir lui passer devant pour qu'il soit moins : telle est la puissance de l'amour. (p 53-105) Le pardon Le pardon n'est pas l'indulgence mais une re-création. C'est la re-création de la liberté de celui qui a laissé dépérir sa liberté par le péché. Il faut plus de puissance à Dieu pour pardonner que pour créer. Car recréer, c'est plus que créer. La puissance de re-création est au cœur de la puissance créatrice, comme une sur-puissance. En créant des libertés, Dieu s'engage dans un redoublement d'amour à leur restituer ce pouvoir qu'il leur donne de se créer elle-mêmes… C'est donc en mourant que le Christ participe à la Puissance suprême, re-créatrice, pardonnante de Dieu… Le sang versé est le signe d'un amour qui va jusqu'au bout. Jusqu'au bout, c'est-à-dire au par-don ou don parfait. (p 53-105) Notre immortalité Parce que dire à quelqu'un : "Je t'aime", c'est équivalemment lui dire : "Tu ne mourras pas". Dans le "Je t'aime" authentique (et certes il faut souligner "authentique", car nous savons assez que "je t'aime" est bien souvent prononcé à la légère, au niveau des fibres les plus superficielles de l'être), est inscrit d'une écriture énigmatique un "Tu ne mourras pas" qui résiste mystérieusement au désespoir de la perte et à l'évidence sensible de la mort. Notre corps, dit le Père de Lubac, n'est pas destiné, par l'effet de la résurrection qui nous est promise, à un recommencement sans fin de son existence terrestre et charnelle, plus ou moins sublimée seulement par des propriétés miraculeuses ; notre corps est promis, non à une quelconque réanimation, mais à une totale métamorphose, qui doit faire de lui, comme dit saint Paul, un "corps spirituel". Or ce qui est vrai de notre corps individuel n'est pas moins vrai de ce vaste corps collectif que l'humanité construit à travers les générations. Sa forme actuelle (sa "figure" actuelle) est provisoire… L'Univers est promis, lui aussi, dans l'Esprit Saint, à la grande Métamorphose (le Père Teilhard écrivait "Métamorphose" avec une majuscule, tant le mot avait pour lui d'importance). (p 53-105) La vraie présence Ce que les chrétiens appellent "ciel", ce n'est pas un lieu éternel, supra-terrestre, un domaine métaphysique. Ce n'est pas Dieu seul. Le ciel est le contact de l'être de l'homme avec l'être de Dieu, la rencontre intime de Dieu et de l'homme… Le départ du Christ est un nouveau mode de présence, non plus extérieure et localisée, mais intérieure et universelle. La vraie présence, sur le mode de l'absence. Si Jésus n'était pas "monté" au ciel, il serait encore parmi nous, au milieu de nous, mais à côté de nous, extérieur à nous, comme je vous suis extérieur et comme vous m'êtes extérieur. Mais, dit saint Paul, il est monté au ciel "afin de tout remplir" (Ep. 4, 10). (p 53-105) 4ème thème : Vivre en chrétien… L’Eglise Pour pénétrer le mystère de l'Eglise jusqu'à sa réalité profonde qui est donc le Christ ressuscité nous donnant son Esprit d'amour, nous devons nous rendre compte qu'il n'y a pas de différence entre la phrase fondamentale de Jésus : "A ceci, tous vous reconnaîtront pour mes disciples : à cet amour que vous aurez les uns pour les autres" (Jn 13, 35) et ce que nous disons dans le Credo : "Je crois à l'Eglise une, sainte, catholique et apostolique". Car l'amour est un mot très vague, facilement superficiel, sentimental. On peut toujours se tromper sur ce qu'est le véritable amour. Ce sont les quatre notes ou caractéristiques de l'Eglise qui nous disent comment elle doit être animée par l'amour et comment elle doit travailler à rassembler les hommes dans l'amour. Dire que l'Eglise est une, sainte, catholique et apostolique, c'est dire qu'elle est un mystère d'amour. (p 115-125) Dieu – Trinité Dans les manifestations de l'amour on voit des signes, on ne voit pas l'amour comme le dit saint Augustin : "Elle le voit, il la voit, personne ne voit l'amour"… Dans la Trinité, où la réciprocité est parfaite, l'Amour lui-même est une personne, le SaintEsprit : Amour du Père pour le Fils, Amour du Fils pour le Père. Baiser commun, si l'on veut. La réciprocité de l'amour faite personne… L'amour est vécu en plénitude ; il y a l'Aimant, l'Aimé et l'Amour. L'Aimant est aimé, l'Aimé est aimant et l'Amour est le dynamisme de cet élan par lequel les deux ne sont qu'un, tout en étant distincts. (p 132-142) La Vierge Marie L'Eglise a prié Marie, elle a formulé dogmatiquement la grandeur de Marie, mais toujours uniquement comme un accompagnement de sa prière au Christ et de sa réflexion sur le Christ. Un accompagnement, non arbitraire, mais nécessaire… Les Pères de l'Eglise ont toujours vu en Marie la figure de l'Eglise, la figure de l'homme croyant qui ne peut arriver à la réalisation plénière de lui-même que par le don de l'amour, ce que la théologie appelle la Grâce. Le Christ est le Don donné, Marie, le Don accueilli. Elle a accueilli le Don de Dieu. (p 109-113) L’Evangile L'Evangile n'est pas seulement un message. Certes, il y a un message chrétien mais l'Evangile, avant d'être un message, est une personne, la personne même de Jésus-Christ. Vous savez que le mot "évangile" signifie "Bonne Nouvelle". Cette Bonne Nouvelle n'est pas d'abord ce que le Christ nous dit mais ce qu'Il est. C'est la Bonne Nouvelle de l'Incarnation : Dieu aime tellement l'homme qu'il devient l'homme. Aimer, c'est vouloir devenir celui qu'on aime, ne faire qu'un avec lui. La motivation la plus profonde de ma foi est qu'on ne peut pas dépasser l'Incarnation. Il n'est pas possible à un Dieu d'aimer davantage l'homme qu'en devenant lui-même un homme… En bref, l'Evangile est la révélation de la "liberté libérante" de Dieu. C'est la définition même de l'amour. Aimer les hommes, c'est vouloir qu'ils soient (au sens fort). Vouloir que l'autre soit, c'est la justice, donc le respect qui est au cœur de la justice. Mais l'autre n'existe que s'il est libre, car c'est par la liberté que l'homme est homme… Quand on compris l'identité ou la liaison intime, étroite, de l'amour et de la liberté, on a compris vraiment l'essentiel de la foi. (p 226-245) Prier La Révélation est la confidence de Dieu à l'homme (c'est ainsi d'ailleurs que l'on peut définir la Bible) ; la prière, en retour, est la confidence de l'homme à Dieu… Si je vous aime, je vous ferai la confidence de mon être profond mais je ne vous ferai cette confidence que si je vous aime. Il n'y a pas de confidence sans amour… et réciproquement il n'y a pas d'amour sans confidence… Rien n'est plus émouvant, d'ailleurs, que le passage de la camaraderie à l'amitié qui se fait précisément par l'échange des confidences ; et, au-delà de l'amitié, dans l'amour, la confidence s'approfondit jusqu'à la transparence. Aimer n'est pas seulement donner, c'est aussi accueillir. La prière est l'accueil du baiser divin. Le baiser est un symbole magnifique. C'est dans le baiser qu'on voit ce qu'est la réciprocité, dans l'amour humain, de l'accueil et du don. Un psaume dit : dilate ta bouche et je la remplirai. J'accueille ton souffle en moi et je verse mon souffle en toi. L'échange des souffles avec la réciprocité de l'accueil et du don signifie l'échange profond des âmes. Cela est d'autant plus vrai que c'est le même mot latin (anima) qui signifie souffle et âme. C'est bien pourquoi il ne faut pas prostituer le baiser qui est une chose magnifique ". (p 246-263) L’Eucharistie L'Eucharistie est le sacrement du Christ qui se donne en nourriture aux hommes pour les transformer en Lui-même et ainsi constituer son Corps mystique qui est l'Eglise ("mystique" ou "réel"). Pour comprendre cela, il faut toujours revenir à ce qui a été dit précédemment : le dessein fondamental de Dieu est de s'unir tous les hommes dans l'amour et de leur faire partager sa Vie propre. Dieu a partagé notre humanité pour que nous partagions sa divinité… Le Christ ne vient pas se substituer au pain . Le mot du Concile de Trente est celui de "conversion eucharistique"… Cela veut dire que si je porte ce pain sur l'autel, le Christ en fait son propre Corps, il divinise ce que moi, j'ai humanisé… "Nous te présentons ce pain, fruit de la terre et du travail des hommes : il deviendra le pain de la vie. Nous te présentons ce vin, fruit de la vigne et du travail des hommes : il deviendra le vin du Royaume éternel"… (p 279-294)