chapitre 2: les theorie explicatives des taux de change

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CHAPITRE 2:
LES THEORIE EXPLICATIVES DES TAUX DE CHANGE
I. Approches réelles versus approches financières
1. La situation de la balance des transactions courantes
L'analyse théorique la plus utilisée jusqu'au début des années 70 se base
sur la situation des balances commerciales ou des balances courantes pour
expliquer les mouvements des taux de changes. Mudell (1960) et Fleming
(1962), deux auteurs d'inspiration keynésienne, ont développé des modèles
dans lesquels la dynamique des taux de change est fonction principalement
de l'état du solde des échanges extérieurs, lui- même relié au niveau de la
demande domestique et à celui des taux d'intérêt. L'observation empirique
montre en effet, qu'en moyenne période, les pays à monnaie faible sont ceux
dont la balance courante a tendance à être déficitaire. De manière
symétrique, les pays à devise forte sont ceux dont le solde extérieur est
positif. Le cas typique est celui du Japon qui a accumulé des excédents
structurels au cours des décennies 80 et 90, notamment vis-à-vis des ÉtatsUnis. Le yen s'est fortement apprécié par rapport au dollar.
Cette théorie néo keynésienne soutenir que les cours de change sont
déterminés par l'équilibre sur le marché des biens. On considère ici le
marché des changes comme un simple marché de biens: le cours est
déterminé par l'offre et la demande de devises. D'après cette théorie, les
devises sont demandées essentiellement pour acheter des biens et services
étrangers. L'offre de devises correspond alors aux revenus d'exportation.
Cette théorie est donc basée sur les paiements courants avec l'étranger.
Cette vision du cours de change a prévalu dans le système de Bretten
Woods de l'après- guerre. Celui-ci établissait implicitement un lien étroit
entre les ajustements des cours de changer et les déséquilibres des
opérations courantes recensées sans la balance des paiements. Cependant,
le passage aux changes flottant a estompé le lien entre les opérations
courantes et le cours de change. Cette approche a suscité plusieurs
réflexions
théoriques
et
travaux
empiriques,
dont
la
majorité
s'est
concentrée autour des relations entre les prix et les volumes dans les
équations d'importations et d'exportations. Ces réflexions se résument dan le
théorème des élasticités critiques, ou conditions de Marshall- Lerner, et qui
fixe les conditions à partir desquelles les variations de parité permettent
effectivement de rétablir l'équilibre des échanges extérieurs.
2. Les prix relatifs et la parité des pouvoirs d'achat (PPA)
Introduite par David Ricardo (1817), la théorie de la PPA défend l'idée que
"la valeur de la monnaie est partout la même". Autrement dit, à l'équilibre, le
cours de change doit refléter l'égalité du pouvoir d'achat des deux devises
considérées. Dans un régime de change fixe, si le prix réel des biens diffère
d'un pays à l'autre, le demande supplémentaire de biens dans le pays où ils
sont « le moins cher » va engendrer un accroissement des prix: il y a
ajustement au taux de change par les prix. Dans un système de changes
flottants, il y a ajustement au différentiel de prix par la variation des cours
de changes: les variations du taux de change reflètent le différentiel
d'inflation.
En 1922, Gustave Cassel propose se définir le niveau du taux de change
nominal d'équilibre comme celui qui assure ma parité de pouvoir d'achat
entre deux monnaies. Ce principe simple se décline traditionnellement en
deux versions: la PPA absolue et la PPA relative
La version absolue de la PPA. Dans cette version la PPA absolue prévaut en
l'absence de toute forme d'entrave au commerce international (taxes
douanière, barrières non tarifaires...) et en négligeant les coûts de transport
ainsi que les coûts d'information. Elle postule que pour un pays donné, le
taux de change d'équilibre vis-à-vis d'une monnaie tierce S est égal au
rapport de ses prix intérieurs P sur les prix étrangers P*. Cette définition
dérive de la loi prix unique, qui stipule que le prix d'un bien échangeable doit
être le même quelle quoi la monnaie dans laquelle il s'exprime, le respect de
cette loi pour tous les biens élémentaires échangés n'est cependant pas une
condition suffisante au respect de la PPA; la méthode d'agrégation des
indices de prix utilisés doit en outre être identique. Sa réalisation suppose
des taux de change réels bilatéraux (EP*/P) toujours égaux à 1:
E= P/P* (1)
où E est le taux de change.
La loi prix unique ne s'applique plus dès lors qu'il existe des barrières au
commerce international. Si elles-ci restent stables au cours du temps,
l'équation (1) devient E=k (P/P*) où k est une constante. Le principe de la
PPA continue alors de prévaloir mais sous une forme dite relative.
La version relative de la PPA. Cette version découle de la version absolue,
tout en étant moins restrictive. Elle n’implique pas, en effet, que le niveaux
du taux de change soit égal au rapport du niveau absolu des prix
domestiques et étrangers, mais plutôt que les variations du taux de change
soient égales à l’écart entre les variations relatives des prix domestique et
étrangers. En d’autres termes, les variations relatives du taux de change se
déduisent de l’écart d’inflation entre pays
e =p- p*, où e est la variation relative du taux de change, p et p* sont les
variations relatives des prix domestique et étrangers.
La théorie de la PPA repose sur trois hypothèses:
i-
Les marchés financiers sont parfaits. Cette perfection implique une
absence de contrôles administratifs, de coût de transaction et de
fiscalité.
ii-
Les marchés des biens sont parfaits. Cette perfection implique une
absence de droits de douane, de coûts de transaction et de
réglementation de quelque nature que ce soit.
iii-
La structure de la consommation des agents économiques est
identique dans les différents pays.
La caractère contraignant des hypothèses présentées explique la théorie de
la PPA est difficilement vérifiée.
II. Approches financières des taux de change
1. La théorie moderne des actifs financiers
1.1
Le modèle monétaire à prix flexibles
L'approche monétariste se différencie fortement des analyses " réelles" du
change: selon celle-ci, la détermination du taux de change reflète d'abord
l'équilibre du marché de la monnaie. Développée au cours des années 70 par
Frenkel (1976), la théorie monétariste se situe sans le cadre du régime de
changes flexibles dont elle cherche à montrer la supériorité sur celui des
changes fixes qui vient d'être abandonné.
Le point de départ du raisonnement monétariste est la demande de
monnaie, considérée comme la relation macroéconomique la plus stable et la
plus importante. Cette fonction dépend du revenu, des prix et du taux
d'intérêt:
(1) M
= P. L (Y,i)
(2) M* = P*. L(Y*,i)
où:
- M et M* sont les stocks de monnaie domestique et étranger,
- P et P* sont le niveau général des prix domestique et étranger,
- Y et Y* sont le niveau du revenu réel domestique et étranger,
- i et i* sont les taux d'intérêt réels domestique et étranger.
Les équation (1) et (2) décrivent l'équilibre sur les marchés monétaire
domestique et étranger à partir des stocks de monnaies offerts (M et M*),
considérés comme exogène (contrôlés par les autorités monétaires), du
niveau des prix P et P*), et des fonctions de demande d'encaisses réelles L
supposées identiques dans les différents pays.
Les hypothèses retenues pả le modèle sont les suivantes:
- Les agents économiques ne possèdent que de la monnaie nationale.
- Les opérations d'arbitrage s'effectuent entre actifs monétaires nationaux
d'une part, et actifs réels et financiers domestiques et étrangers d'autre part.
- Il y a absence de substituabilité entre les actifs monétaires domestiques et
étrangers, mais cette substitution est parfaite entre les actifs réels et
financiers domestiques et étrangers.
Le taux de change est introduit dans le modèle de base en postulant la
PPA:
(3) P = E . P*
où : E est le cours d'un unité de devise étrangère en monnaie nationale
(cotation à l'incertain : une hausse de E correspond à une dépréciation de la
monnaie nationale)
En combinant les équation (1) et (3), et par élimination des prix, on a:
(4) E= M/M* . [L (Y*,i*) / L (Y,i)]
La relation (4) fait ainsi que le taux de change des offres er demandes de
monnaie, la détermination du taux de change étant expliquée par évolutions
relatives entre pays des masses monétaires, des revenus réel et des taux
d'intérêt. Le taux de change, qui est le prix relatif des monnaies, est
déterminé par l'offre de monnaie contrôlée par les autorités monétaires,
d'une part, et par les comportements des détenteurs d'encaisses monétaires,
d'autre part.
Il ressort en particulier que, pour des taux d'intérêt et des revenus réels
donnés, le taux de dépréciation de la monnaie nationale est égal à la
différence entre les taux de croissance des masses monétaires. En
conséquence, toutes choses égales par ailleurs, une augmentation du revenu
réel national engendre un supplément de demande de monnaie nationale et
se traduit par une appréciation de la monnaie nationale. En effet, pour en
stock nominal de monnaie (M) donné, la demande d'encaisse réelle
supplémentaire ne peut être satisfaite que par une baisse des prix
domestiques, ce qui amène une appréciation de la monnaie nationale, par
suite de la PPA ( relation (3)). Ce résultat s'oppose à la logique de modèle "
keynésien", dans lequel un accroissement du revenu réel intérieur amène,
toutes choses égales par ailleurs, une dépréciation de la monnaie nationale
par suite de l'augmentation induit des importations. Cette différence provient
de ce que, dans l'analyse des déterminant du change, les monétaristes
mettent l'accent sur le rôle de la demande de monnaie tandis que les
keynésiens privilégient la propension à importer.
L'une des principales conclusions de l'approche monétaire des taux de
change, défendue notamment par Johnson (1977), est que tout déséquilibre
de change peut être résorbé par une politique strictement monétaire, suivant
le paradigme monétariste qui postille que toute la sphère réelle peut être
contrôlée par l'intermédiaire de la monnaie.
La plupart des vérifications empiriques de l'approche monétaire du taux de
change, effectuées sur la relation (4) pour un grand nombre de pays, se sont
révélées décevantes, comme le montrent Baillie et McMahon (1990). Une des
raisons principales est l'instabilité de la fonction de demande de monnaie:
c'est une limite bien connue des modèles monétaristes. Sur le plan
théorique, le modèle monétaire peut également être critiqué pour ses
hypothèses peu réalistes de PPA et de parfaite substituabilité des actifs
financiers.
Le principal mérite de cette approche a été de mettre en lumière
l'importance des variables de stocks (les actifs monétaires et financiers) et
de leur relation avec les variables de flux (les revenus notamment) dans la
détermination des taux de change. Le modèle monétaire a ainsi ouvert la
voie à une approche plus générale du change en termes de demandes
d'actifs proposée par les modèles de choix de portefeuille.
1.2 Les modèles de choix de portefeuille.
Les modèles de portefeuille représentent aujourd'hui le cadre théorique de
référence pour la plupart des théoriciens du change. L'économie mondiale est
prise comme étant un ensemble de marchés d'actifs, principalement
monétaires et financiers. Les opérateurs sont supposés échanger sur ces
marchés afin de maximiser l'utilité de leurs portefeuilles d'actifs. L'évolution
du taux de change relève donc d'une logique patrimoniale ; elle reflète les
arbitrages permanents entre actifs transitant nécessairement par le marché
des changes. S'inspirant de la théorie des choix de portefeuille initiée par
Tobin et Markowitz au cours des années 1950, ces modèles expliquent la
répartition optimale des portefeuilles individuels en fonction des rendements
et des risques relatifs à chaque type de placement. L'introduction de risques
différenciés sur les actifs financiers permet de lever l'hypothèse trop
restrictive, retenue par l'approche monétaire du change, de parfaite
substituabilité des actifs financiers.
Les premiers modèles d'équilibre de portefeuille ont été développés par
McKinnon (1969), Branson (1975) et Kouri (1976). Dans la version la plus
simple, on postule un modèle à un pays, sans lequel les agents économiques
ne peuvent pas détenir de devises étrangères, et dont les équations de base
sont les suivantes:
(5) M = a (i, i*, r, r*) W
(6) B = b (i, i*, r, r*) W
(7) E F = c (i, i*, r, r*) W
(8) W = M + B+E F
où:
- M est le stock de monnaie nationale,
- B est l'offre d'actifs nationaux
- F représente les détentions nettes d'actifs en devises étrangères
- W est la richesse totale,
- E est le cours des devises étrangères exprimé en monnaie nationale
- i et i* sont les taux d'intérêt des titres domestiques et étrangers
- r et r* sont les risques sur les titres domestiques et étrangers
Les équations (5) à (7) décrivent les conditions d'équilibre de marché et
les comportements de demande de monnaie nationale, de titres nationaux et
de titres étrangers qui sont les trois actifs à la disposition des agents.
Les demandes de ces trois actifs sont une fonction positive de la richesse
existante.
Par ailleurs, il est supposé que la demande de monnaie nationale (donné
par l'équation (5)) décroît avec les hausses de taux d'intérêt soit nationaux,
soit étrangers.
La demande de titres nationaux (donnée par l'équation (6)) augmente
avec le taux d'intérêt domestique et le risque sur les titres étrangers. Elle
décroît avec le taux d'intérêt étranger et le risque sur les titres nationaux.
Symétriquement la demande de titres étrangers (décrite par l'équation (7))
s'accroît avec les taux d'intérêt étrangers et les risques des titres nationaux.
Elle diminue avec les taux d'intérêt nationaux et les risques sur les titres
étrangers.
La relation comptable (8) définit la contrainte budgétaire des investisseurs,
mesurée par leur richesse globale. D'après cette relation, on doit avoir: a+
b+ c =1, de telle sorte que les équations de comportements (5) et (7) ne
sont pas indépendantes. Par ailleurs, F peut être positif ou négatif, selon que
le pays considérés est créditeur ou débiteur net par rapporter à l'étranger.
En combinant les équations (5) et (8), on obtient la forme réduite suivante
du modèle:
(9) E F = (1 - a - b) W = f (i, i*, r, r*) W
Cette relation peut être réécrite sous la forme
(10) E = f (i, i*, r, r*) W/ F
La relation (10) fait apparaître le taux de change comme une variable
déterminée par le processus des choix de portefeuille, qui permet une
répartition de la richesse entre monnaie nationale, titres nationaux et
étrangers, conforme aux désir des investisseurs. Autrement dit, le taux de
change est le prix qui assure l'équilibre sur les différents marchés d'actifs
nationaux et étrangers.
Les tests empiriques visant à vérifier le bien fondé des modèles de choix
de portefeuille, sont peu concluants et se heurtent à l'obstacle majeur que
constitue le manque de données statistiques fiables, relatives à l'estimation
de la richesse, et notamment les détention d'actifs étrangers. Cependant,
l'apport principal de cette théorie est de permettre une vision large du
processus de détermination des taux de change, tout en ayant des
hypothèses plausibles telle que l'imparfaite substituabilité des actifs.
Le modèle de choix de portefeuille et le modèle monétariste supposent
que les réticents de chaque pays ne détiennent que leur monnaie nationale,
ce qui revient à poser l'hypothèse de non- substituabilité entre les monnaies.
Avec
la
mondialisation
des
échanges,
cette
hypothèse
apparaît
peu
pertinente. En effet, les banques et les entreprises détiennent une trésorerie
multidevises dont elles cherchent en permanence à optimiser la composition
et le rendement. Cet état de fait a amené McKinnon (1982) à développer un
modèle de substitution des monnaies et à raisonner en termes de demande
mondiale de monnaie, du fait que celle-ci est stable tandis que les demandes
de monnaies nationales ne peuvent pas l'être à cause des mouvements de
substitution entre les devises.
2. L'hypothèse d'efficience des marchés et anticipations des agents.
Plus récemment, l'accent a été mis sur le rôle des taux d'intérêt et des
anticipations pour expliquer la dynamique des taux de change. Le processus
d'intégration des marchés internationaux de capitaux qui s'est accéléré au
cours des années 1980, a amené les théoriciens à prendre l'hypothèse
d'efficience du marché des changes comme modèle de référence. Une façon
de définit l'efficience (Fama, 1970) est de considérer que la taux de change à
la période t contient toute l'information disponible en t.
L'efficience du marché des changes implique que deux hypothèses soient
satisfaites:
Les opérations d'arbitrage sont parfaites. C'est-à-dire que les actifs
financiers sont parfaitement substituables. Les opérateurs sont supposés être
indifférents quant aux risques présentés par les différents titres entre
lesquels ils arbitrent, c'est-à-dire que les rendements anticipés des actifs en
différentes monnaies sont égaux. Par exemple, si l'euro bénéficie de
taux
d'intérêt supérieurs de 2% à ceux du VND, il faut que la devise vietnamienne
soit anticipée comme devant s'apprécier de 2% en rythme annuel par
rapport à l'euro, pour qu'un placement soit aussi rémunérateur dans les deux
devises. Autrement dit, il faut que la condition de parité non couverture des
taux d'intérêt soit vérifiée:
(11) e't+n - et = it – i*t
où:
- e't+n est le logarithme du taux de change anticipé pour la période t+n
- et est le logarithme du taux de change observé pour la période t
- it et i*t sont les taux d'intérêt domestique et étranger en t
L'existence d'un écart durable entre les deux membres de l'égalité (11),
signifie que pour les investisseurs, les actifs ne sont pas parfaitement
substituables. L'actif dont le rendement anticipé est le plus élevé, et qui
pourtant n'entraîne pas d'achats plus importants, souffre d'une prime de
risque.
La deuxième hypothèse, impliquée par l'efficience des marchés est que les
opérateurs font des anticipations rationnelles. Ils utilisent toute l'information
économique disponible, d'une part, et connaissent la "vraie" loi d'évolution
de la variable qu'ils prévoient, d'autre part; cela revient à considérer, en
quelque sorte, que les opérateurs ont en tête le "bon" modèle de
détermination du change et qu'ils savent le faire fonctionner avec les
données pertinentes. La principale conséquence des anticipations rationnelles
est que les agents ne font pas d'erreurs de prévisions systématiques. En
d'autres termes, les écarts entre le taux de change constaté à la période t
(et) et le taux de change anticipé pour cette période (e't), compte tenu de
l'information disponible à la période précédente (It-1), ont une espérance
mathématique E () nulle. Formellement, ce résultat s'exprime en écrivant:
(12) et = (e't / It-1) + ut avec E (ut) = 0
En combinant les relation (11) et (12), on obtient une autre formulation de
la parité non couverture des taux d'intérêt:
(13) et+n - et = (it - i*t) + ut
où les différentes variables, exprimées en notations logarithmiques, ont la
même signification que précédemment.
La relation (13) donne la condition d'efficience du marché des changes.
Cette condition a été testée sous la forme suivante:
(14) et+n - et = a+ b (it - i*t) + ut
Artus
(1988)
et
Stein
(1990)
rejettent
l'hypothèse
d'efficience
respectivement pour le franc et pour le dollar. Les tests ont donné des
valeurs significativement différentes de zéro pour (a), et significativement
différentes de 1 pour (b); par ailleurs les termes d'erreurs (ut) ne sont pas
indépendants, ce qui contredit la relation (14)
Le rejet de l'hypothèse d'efficience du marché des changes a été
généralement analysé comme le signe d'une substitution imparfaite entre les
actifs libellés dans les différentes devises. Plusieurs facteurs sont avancés
pour expliquer ce résultat:
- Le premier est l'existence de primes liées à la volatilité des taux de
change d'une monnaie est instable, plus celle-ci apparaît risquée
- Le second facteur explicatif de la prime de risque se base sur le fait que
le SMI est hiérarchisé et qu'il existe de profondes asymétries entre les
devises, notamment par rapport au dollar. Ainsi, par exemple, la hausse du
dollar entre 1980 et 1985 a été expliquée par l'existence d'une prime de
risque fortement négative.
III. Explications théoriques de l'instabilité des changes.
La fin du système de Bretton Woods, qui a amené à l'abandon des régimes
de change fixes au début des années 70, a entraîné une forte instabilité des
taux de change qui ont interpellé les économistes. Deux types de modèles
ont été élaborés pour tenter d'expliquer cette instabilité:
- La première approche décrit la " surréaction" des taux de change par les
différences de vitesses d'ajustement entre les marchés des biens et services
et les marchés des actifs financiers
- Une seconde catégorie de travaux mer l'accent sur le rôle des facteurs
psychologiques et des anticipations. La théorie "psychologique" du change
confine un rôle essentiel aux rumeurs et aux comportements mimétiques
dont Keynes avait parlé quelques années auparavant.
1 La théorie de la surréation des taux de change.
Cette approche, présentée en 1976 par Dornbusch, a eu un grand
retentissement car elle propose la première analyse cohérente de l'instabilité
des taux de change et constitue une synthèse des approches réelles et
financières de la détermination du taux de change.
L'instabilité
des taux de change provient de ce que les vitesses
d'ajustement sont différentes sur les marchés financiers et les marchés des
biens et services. Dornbusch fait en effet l'hypothèse que les prix des
marchés financiers s'ajustent instantanément aux variations de l'offre et de
la demande alors que les prix de biens et services sont rigides à court terme.
À long terme, le sentier d'équilibre du taux de change est défini par la
parité du pouvoir d'achat (PPA) : l'évolution du cours de change est
gouvernée par le différentiel d'inflation entre les pays.
À court terme, la marché des changes est dominé par les mouvements de
capitaux et son équilibre suppose la vérification de la parité des taux
d'intérêt (PTI) : l'écart de taux d'intérêt entre deux monnaies est égal au
taux anticipé de dépréciation du taux de change. Les anticipations de change
sont fondées sur la PPA et ramènent donc le taux de change vers son niveau
de long terme ; la PPA joue donc le rôle " de point d'ancrage" au système.
La dynamique des changes selon Dornbusch est alors la suivante: à court
terme un choc monétaire, prenant par exemple la forme d'un accroissement
de l'offre de monnaie, entraîne une baisse du taux d’intérêt national; celle-ci,
s’ajoutant à l’anticipation d’une dépréciation de la monnaie liée au laxisme
monétaire, déclenche une dépréciation instantanée du taux de change allant
au –delà de sa nouvelle valeur de long terme respectant la PPA. Il y a ainsi
surréaction (overshooting) du taux de change, au sens où le mouvement
immédiat du change est trop fort et doit être compensé par la suite. En effet,
dans un second temps, à la suite de la dépréciation initiale de la monnaie, les
échanges de biens et services réagissent par une amélioration de la balance
courante qui amène une appréciation de la monnaie jusqu’à ce que la norme
de PPA soit à nouveau respectée.
La
conclusion
centrale
des
modèles
de
surréaction
est
que
les
déséquilibres qui prennent place sur le marché des changes ne se résolvent
pas nécessairement par un processus de convergence régulière vers
l’équilibre. La théorie de « overshooting » a marqué une étape importante
dans la compréhension des changes flexibles en proposant un cadre
d’analyse permettant d’expliquer la volatilité des changes. Cette approche a
d’ailleurs fourni un argument théorique de poids pour montrer les effets
pervers du flottement des monnaies.
Les modèles de surréaction connaissent cependant d’importantes limites
liées aux hypothèses sous-jacentes. En particulier, les résultats du modèle
dépendent crucialement du rôle joué par les anticipation : en principe, la
surréaction résulte uniquement de vitesses d’ajustement différenciées sur les
marché des biens et des actifs financiers ; elle se produit en l’absence de
toute anticipation. En fait, c’est l’incapacité des agents à prévoir le taux de
change à long terme qui les amène à surajuster leurs portefeuilles ; et la
convergence du change vers son équilibre de long terme est liée au fait que
les anticipations sont supposées stabilisantes, car elles ramènent les parités
sur le sentier d’équilibre, ce qui est loin d’être vérifié dans la réalité.
2. Théorie des bulles spéculatives
La forte appréciation enregistrée par le dollar entre 1980 et 1985, et le
krach boursier d’octobre 1987, ont suscité d’autres analyses théoriques de
l’instabilité. L’idée de départ est qu’il peut exister des écarts durables entre
le taux de change (ou les prix des actifs financiers) observé sur le marché et
sa valeur d’équilibre correspondant aux fondamentaux économiques (balance
des paiements, inflation, taux d'intérêt…). Cet écart est appelé « bulle
spéculative », car il tend à se gonfler, pour se résorber ensuite brutalement.
Formellement, on a :
(15) E = E* + B
Où
-
E est le taux de change du marché,
-
E* est le taux de change d’équilibre
-
B est la bulle spéculative
Blanchard et Watson (1984) ont montré que les bulles pouvaient être
compatibles avec l’hypothèse d’efficience des marchés, et en particulier
l’hypothèse d’anticipations rationnelles. Cette théorie des bulles rationnelles
a
permis
d’établir
trois
résultats
qui
semblent
correspondre
au
fonctionnement récent des marchés des changes :
-
à court terme, le marché peut connaître une multiplicité de situation
d’équilibre.
-
l’écart
entre
le
taux
de
change
du
marché
et
sa
valeur
« fondamentale » peut être croissant
-
le taux de change dépend de sa propre valeur anticipée : les
anticipations sont alors « auto- réalisatrices »
Le mécanisme de la bulle de change est le suivant : la plupart des agents
prévoient l’appréciation d’une devise sans intégrer les fondamentaux ; il en
résulte un excès de demande en faveur de cette monnaie, dont le taux de
change s’apprécie et s’écarte de sa valeur économique fondamentale. Les
anticipations s’autoréalisent et le marché est efficient au sens où il prévoit
correctement
versatiles
l’évolution
l’emportent
du
sur
change.
les
Cependant,
calculs
comme
rationnels,
on
les
rumeurs
enregistre
un
retournement des anticipations et la bulle finit par éclater.
Cette notion de « bulle rationnelle » est en fait fortement antinomique, car
les notions de bulle et de rationalité sont incompatibles. L’étude des
phénomènes de bulles de change suggère en effet que les opérateurs ne
semblent pas intégrer toute l’information disponible dans de telles situations.
Le cas de la bulle constatée sur le dollar au début des années 80 est
édifiant : comme l’a précisé Krugman (1986), « le marché n’a pas bien fait
ses comptes » ; les agents qui misaient sur un dollar haussier n’ont pas
utilisé
les
informations
disponibles
sur
le
caractère
insoutenable
de
l’appréciation durable du dollar, en particulier avec l’augmentation des
déficits «jumeaux » (budgétaire et extérieur) des Etats-Unis.
3. Hétérogénéité des comportements et anticipations mimétiques.
Il existe une autre explication des bulles et de la volatilité des taux de
change a été avancée. Elle fait appel aux différentes stratégies des acteurs
du marché d’une part, et à des comportements d’anticipation plus conformes
à la logique du marché des changes d’autre part (Cartapanis, 1996). Il
existe, en effet deux grandes catégories d’acteurs sur le marché des
changes : d’une part les opérateurs qui prennent leurs décisions sur la bases
des fondamentaux, comme par exemple les commerciaux, et d’autre part les
gestionnaires financiers (traders) qui ont un horizon très court et qui
cherchent les moindres occasions de profit. Le poids de ces derniers n’a
cessé de grandir. Il peut alors être rationnel d’ignorer les fondamentaux dans
le très court terme si les parités sont effectivement déterminées par les
stratégies décidées heure par heure par ces traders
Ces professionnels forment un milieu très hermétique où « tout le monde
pense la même chose au même moment ». Les moindre informations ou
«news » prennent alors une dimension considérable de fait de la « myopie »
des opérateurs. Dans un tel cadre, les anticipations de forment selon un
mécanisme mimétique. Chaque agent forme ses prévisions, non pas sur la
base de la valeur « économique » du taux de change, mais sur la base de ce
que sera l’opinion dominante du marché.
Keynes avait déjà définit la spéculation comme étant « l’activité qui
consiste à prévoir la psychologique
du marché ». Dans le contexte
d’incertitude totale dans lequel il se plaçait, le mimétisme était un
comportement rationnel dans la mesure où il permettait de tirer avantage de
l’information détenue par des opérateurs informés. L’analyse récente des
bulles spéculatives reprend cette idée keynésienne. Comme l’a indiqué
Orléan (1989), les bulles spéculatives peuvent être analysées en partant du
processus de contagion mimétique des anticipations. Lorsque les opérateurs
ont le choix, pour former leurs anticipations, entre acquérir une information
payante ou obtenir celle-ci gratuitement, en se basant sur le prix du marché,
c’est généralement la seconde solution qui sera retenue. Si on se trouve
dans une situation d’imitation généralisée, dans laquelle chacun copie l’autre
en croyant qu’il détient l’information, alors qu’aucun agent n’est informé, le
prix qui se forme ne reflète que la « psychologie du marché » et ne contient
aucune autre information. On est en présence d’un processus d’anticipations
« autoréalisatrices » dans lequel
un prix va s’autoconfirmer, même s’il
s’écarte de plus en plus de son niveau d’équilibre fondamental. C’est de la
sorte que se développent les bulles de change, entretenues par des
comportements mimétiques.
Il existe donc deux paradigmes concurrents du marché des changes : d’un
côté, on trouve une approche d’inspiration walrasienne, basée sur trois
postulats : l’homogénéité des comportements, l’équilibre général et les
anticipations rationnelles. A cette école se rattache les théories de l’efficience
et des bulles rationnelles. D’un autre côté, on trouve une approche théorique
d’inspiration keynésienne, qui introduit les comportements mimétiques et
met en avant l’hétérogénéité des opérateurs et leurs interactions. Cette
seconde approche apparaît plus conforme à la réalité, car elle fournit un
fondement microéconomique mieux adaptée pour expliquer l’instabilité des
changes. Plusieurs analyses, notamment par De Grauwe (1993), ont ainsi
montré
que
l’interaction
entre
opérateurs
« fondamentalistes »
et
« chartistes » engendre une dynamique de marché instable, de type
« chaotique », dont les caractéristiques sont très proches de celles converge
pas spontanément vers un équilibre général ; il y a une multiplicité
d’équilibres possibles selon les configurations du marché et les anticipations.
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