ou toute modification éventuelle devait être déférée à la congrégation des Rites et
Cérémonies. Celle-ci réglementait la question par voie de réponses aux demandes des
évêques, de rescrits, de résolutions, de déclarations et de décrets
, considérés comme
s'imposant à toute l'Église et ayant une validité permanente. Collationnés, ils étaient publiés
par décision du Souverain Pontife. Les évêques perdaient de ce fait toute possibilité
d'initiative, si tant est qu'ils eussent voulu en prendre.
Certains le firent pourtant. Et ce, dans notre pays, à l'instigation du roi, toujours jaloux des
« libertés de l'Église de France »
. C'est ainsi qu'à la fin du XVIIe siècle et tout au long du
XVIIIe siècle, des évêques français publièrent leur propres livres liturgiques. Tant et si bien
qu'avant la révolution, fort de leur autorité quatre-vingt-dix évêques sur les cent trente-neuf
alors existants
utilisaient des livres liturgiques « néo-gallicans ». Le saint-siège laissa faire.
Cet exemple fut suivi dans certains diocèses d'Allemagne et d'Autriche.
Ceci étant, la réaction à la tourmente révolutionnaire prit la forme de l'esprit ultramontain
.
Presque tous les diocèses adoptèrent de nouveau les livres romains. Dom Prosper Guéranger
(1805-1875) contribua à ce mouvement pour ce qui est de l'unification de la liturgie en
France
, unification qui connaît toutefois des entorses, car la congrégation des Rites et
Cérémonies autorisa plus d'une fois des suppléments diocésains comportant des rites locaux
anciens.
Mais l'uniformité tant décriée n'était pas aussi absolue qu'il y paraît. La congrégation des Rites
approuva, le 28 novembre 1947, un rituel bilingue pour la France, étendu par la suite à des
diocèses non français au moyen d'indults
. Ce rituel comportait certains rites extraits
textuellement du Rituale romanum. Mais le décret ne portait aucune disposition supprimant
l'emploi de rites particuliers canoniquement légitimes, qu'ils provinssent des rituels en vigueur
ou ex consuetudine. La question se pose de savoir comment des rites non conformes au
Rituale romanum pouvaient être légitimement en usage. Ce rituel romain a été promulgué par
Paul V, le 17 juin 1614. Mais, contrairement à ce que son prédécesseur saint Pie V avait fait
pour le bréviaire et le missel, il n'en rendit pas l'usage obligatoire, se limitant à exhorter les
évêques et les curés à l'adopter. Et, dans bien des cas, l'adoption du Rituale romanum s'est
accompagnée de l'approbation, par la Congrégation des Rites, d'un Supplément diocésain
laissant, en fait, en vigueur sur certains points bon nombre de rites provenant des anciens
Rituels locaux »
. Noirot fait remarquer que « dans bon nombre de cas, on rencontrera des
rites pratiqués dans les paroisses, non pas conformément au Rituel romain - pourtant
Un décret de la S. Congr. des Rites, du 14 février 1632, avait interdit de publier ses décisions sans son
accord. Pas moins de 4400 documents firent l'objet d'une publication officielle en 7 vol., de 1898 à 1927,
couvrant la période 1807-1926.
Cf. D. Le Tourneau, L'Église et l'État en France, Paris, Presses Universitaires de France, coll. « Que sais-
je ? », 2000.
L'on sait que le concordat de 1801 a réduit le nombre de circonscriptions ecclésiastiques, le nombre des
diocèses notamment passant de à ( ).
Du latin ultra montem « outre-mont ». L’Italie et Rome, vues de France. Corps de doctrines et d’attitudes
favorables à la primauté du pape, pasteur suprême de tous les catholiques. Il se développe en réaction contre
le gallicanisme, qui revendique la supériorité de l’Église de France sur le pape, et la prétention à l’autonomie
des Églises nationales et à l’intervention du pouvoir civil dans les affaires religieuses. Le concile Vatican I
(1869-1870) ayant défini l’infaillibilité pontificale, selon laquelle le pape est assisté par l’Esprit Saint pour ne
pas enseigner d’erreurs dans la foi, l’ultramontanisme, préparé par un Joseph de Maistre (1753-1821) ou un
Félicité de Lamennais (1782-1854), connaît un regain de vigueur avec des hommes tels que le cardinal Pie
(1815-1880), Louis Veuillot (1813-1883).
Son ouvrage L'Année liturgique fait date. Cf. Dom P. Delatte, Dom Guéranger, abbé de Solesmes, rééd.
Abbaye Saint-Pierre de Solesmes, 1984 ; Dom G.-M. Oury, Dom Guéranger. Moine au cœur de l'Église,
Solesmes, Éditions de Solesmes, 2000.
Cf. M. Noirot, « Les rituels diocésains : leur position canonique », RDC 2 (1952), p. 433-438.
M. Noirot, « Les rituels diocésains : leur position canonique », RDC 2 (1952), p. 435.