
de l’Assemblée, c’était avec une attention peu soutenue que ses pairs suivaient ses 
déclarations. Au contraire, ceux-ci ne prenaient jamais au sérieux ses diatribes 
contre le système colonial en Oubangui-Chari. Toutes ses déclarations n’avaient 
aucun écho dans les médias français. 
 
Le médecin Louis-Paul Aujoulat, député du premier collège du Cameroun, l’un des 
rares parlementaires de peau blanche dont le tempérament aurait été façonné 
probablement par sa formation, prêtait de temps en temps une oreille attentive aux 
révélations de son collègue Boganda et s’apitoyait parfois sur le sort des peuples 
opprimés de l’Oubangui-Chari. Celui-ci conseilla à Boganda d’adhérer au MRP ( 
Mouvement Républicain Populaire ) dirigé par Georges Bidault, principal parti 
politique français d’obédience démocrate-chrétienne dont les membres étaient en 
majorité composés d’anciens résistants à l’occupation allemande et dont certains 
avaient même participé aux différents gouvernements de la IVe République. 
 
Le jeune député de l’Oubangui-Chari, en adhérant en 1947 à ce parti, espérait 
obtenir sans faille et sans hésitation le soutien des autres membres de l’Assemblée 
dans la lutte implacable qu’il voulait mener contre le colonialisme, le racisme, 
l’injustice et l’oppression dans son pays. Il estimait que l’idéal du MRP dont il 
avait pris connaissance dès son arrivée à Paris répondait parfaitement à sa 
conviction politique et à son aspiration chrétienne. 
  
Jouissant désormais de la « double casquette », député à l’Assemblée nationale et 
militant  du  MRP,  Boganda  se  montrait  grand  avocat  des  peuples  de 
l’Oubangui-Chari.  Dans  l’espoir  de  se  faire  entendre  et  comprendre  dans  les 
milieux français de la métropole sur les atrocités et les brutalités commises sur les 
pauvres  paysans,  il  devait  multiplier  dans  le  5ème  Arrondissement  de  Paris,  à 
Meaux,  Grenoble,  Strasbourg  et  Lille  des  conférences  portant  sur  les  pratiques 
odieuses et dégradantes du système colonial en Oubangui-Chari attestées par le 
non  respect  de  la  dignité  humaine  et  de  la  liberté,  l’injustice,  le  racisme,  les 
arrestations  arbitraires,  les  assassinats,  etc.  Saisissant  l’occasion,  il  réclama  la 
stricte application de la loi du 11 Avril 1946 abolissant le travail forcé et le code de 
l’indigénat,  sources  des  mauvais  traitements  dont  était  souvent  victime  la 
population oubanguienne. En outre, il exigeait du gouvernement français, les droits 
et  l’égalité  de  tous  les  « Blancs  et  Noirs »  devant  la  loi  sur  la  terre  de 
l’Oubangui-chari.  D’où  l’expression  « zo  kwé  zo » ;  traduite  littéralement  en 
français elle donna : « toute personne est une personne ». 
 
Travailleur infatigable, assidu et ponctuel à l’Assemblée française, il participait 
activement à tous les travaux de la commission ; il avait déposé plusieurs