8. Marie, Mère de Dieu Cette expression n’est pas facile à comprendre. Marie, Mère de Jésus-Christ, mère du Fils de Dieu, d’accord, mais mère de Dieu… N’est-ce pas la placer à un niveau supérieur, antérieur à Dieu ? Est-elle vraiment mère de Dieu ? Cette expression remonte aux premiers siècles de l’Eglise. Les débats portent sur JésusChrist : est-il vraiment homme, vraiment Dieu, deux natures distinctes dans l’unité d’une personne ? Nestorius, évêque de Constantinople de 428 à 431, veut éviter la confusion de l’humain et du divin en les maintenant séparés en Jésus-Christ. Pour lui, il y a deux personnes en Jésus-Christ : le Verbe éternel et Jésus de Nazareth et on ne peut attribuer au Verbe éternel ce qui s’est passé pour Jésus. Cyrille, évêque d’Alexandrie, s’oppose fortement à Nestorius pour défendre l’unité de Jésus-Christ. S’il n’y a pas union de la nature humaine et divine en Jésus-Christ, il ne vient pas vraiment habiter notre nature humaine et il ne peut donc pas nous sauver. Déjà, Athanase d’Alexandrie, un prédécesseur de Cyrille d’Alexandrie, disait « Dieu s'est fait homme pour que l’homme devienne Dieu ». Ce débat va se cristalliser autour d’une affirmation de la piété populaire qui prie Marie comme theotokos (en grec), c’est-à-dire mère de Dieu. Le concile d’Ephèse, en 431, tranche en faveur des théologiens d’Alexandrie : Si le Christ est un, Dieu et homme, il reste Dieu en se faisant homme, donc on peut dire Marie, mère de Dieu. Pourquoi ce détour par les débats des premiers temps de l’Eglise ? Pour réaliser que lorsque nous affirmons Marie, mère de Dieu, ce n’est pas d’abord pour dire quelque chose sur Marie mais d’abord pour affirmer le mystère de l’incarnation : en Jésus-Christ la nature divine et la nature humaine sont vraiment unies. Jésus, Christ et Seigneur, vrai Dieu, est vraiment né d’une femme de Galilée. Il a pris chair de cette chair. Cette affirmation n’est pas accessoire mais au cœur de notre foi. Dieu, l’infiniment grand, se fait tout petit, dépendant, à tel point qu’il choisit d’être enfanté, mis au monde par une femme. C. Péguy va jusqu’à dire : « Le Créateur a besoin de sa créature. Il ne peut rien faire sans elle…» Renversement inouï de toutes nos représentations sur Dieu qui, dans son désir de rejoindre l’humanité, va jusqu’à demander à l’une d’entre nous d’être sa mère. Vatican II nous appelle à « reconnaître la dignité éminente de la mère de Dieu » (LG 67). Dignité éminente de celle qui, en disant oui à l’incarnation, est devenue la mère de notre Seigneur. Dignité éminente qui n’enlève rien à son humanité, au contraire. Parce qu’elle est toute humaine, elle ouvre un chemin à tout homme. Contemplant Marie, nous savons que notre humanité est appelée accueillir la venue du Fils de Dieu jusqu’en sa chair. Bénédicte Boisseau – Les mots de la foi.