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UMR 7136 - ARCHITECTURE, URBANISME, SOCIÉTÉS
COMPTE-RENDU DE LA DEUXIEME RÉUNION DE L'ATELIER ARCHITECTURE DE LA
MAISON ET PRODUCTION DE lHABITAT PERIURBAIN
L'URBANITE PERIURBAINE EN QUESTION.
L'EXEMPLE DES LOTISSEMENTS PRIVES A ACCES RESTREINT EN
ILE-DE-FRANCE
(24 mars 2006)
Présents : Philippe Bonnin (philippe.bonnin@paris-belleville.archi.fr) ; Delphine Callen ; Eric
Charmes (eric.charmes@univ-paris8.fr) ; Maïté Clavel (maite.clavel@free.fr) ; Agnès
Deboulet (ad.ara@wanadoo.fr) ; Philippe Gresset (grephi@club-internet.fr) ; Vincent Hervouet
(vince.hervouet@wanadoo.fr) ; Sonia Kellenberger (sonjak@club-internet.fr) ; Jean-Michel
Leger (jean-michel.leger@paris-belleville.archi.fr) ; Renaud Le Goix
(Renaud.Le-Goix@univ-paris1.fr) ; Béatrice Mariolle (BeatriceMariolle@bresmariolle.fr) ; Lionel
Rougé (lrouge@numericable.fr) ; Hélène Subremon (hsubremon@hotmail.com) ; Jean-Pierre
Traisnel (jean-pierre.traisnel@univ-paris8.fr) ; Maria Veltcheva (cleliap@tiscali.it).
Auteur du compte-rendu : Eric Charmes.
DEBAT AUTOUR DES INTERVENTIONS DE
Renaud Le Goix (maître de conférences à Paris 1, UMR Géographie-cités 8504) et Delphine
Callen (doctorante, UMR Géographie-cités 8504) : Les lotissements privés de la vallée de la
Bièvre.
Éric Charmes (maître de conférences à l'IFU/Paris 8, UMR Architecture urbanisme socié
7136) : Les enjeux des lotissements privés clos pour l'urbanité périurbaine
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1. MISE EN PERSPECTIVE HISTORIQUE
Renaud Le Goix, relayé lors du débat par Philippe Gresset, s’attache à mettre en perspective
historique les phénomènes de fermeture et de privatisation des rues. Il souligne donc que les
rues privées et les lotissements sont depuis longtemps des formes banales d’initiation de
l’urbanisation (il évoque notamment les exemples de Bordeaux et de Paris). Il souligne le
grand nombre de voies privées qui subsistent aujourd’hui dans Paris (d’après un recensement
de la Mairie de Paris, il y aurait 1500 voies, passages, cités et autres villas privés). Vue sous
cet angle, les formes actuelles de la périurbanisation n’ont rien de très original, à ceci près,
comme le souligne Jean-Pierre Traisnel, que la prédominance depuis quelques décennies de
la desserte en impasses et en voies en boucle bloque les processus de mutations urbaines.
Elles empêchent les lotissements de se densifier et de s’intégrer dans la trame urbaine.
Toujours dans le registre des continuités historiques, Renaud Le Goix souligne que les
fermetures de domaines résidentiels ne sont pas nouvelles, notamment pour les lotissements
chics. Cela était d’autant plus fréquent que beaucoup de ces lotissements naissaient du
démantèlement de réserves forestières ou du démembrement de parcs de châteaux et que
l’on conservait à la fois le portail d’entrée et le mur d’enceinte. Il évoque notamment le Parc de
Montretout créé en 1832 à partir du domaine du Château de Saint-Cloud. Aujourd’hui, cette
pratique perdure, comme l’a montré Delphine Callen à partir de son étude de la vallée de la
Bièvre.
Cependant, si la fermeture des domaines chics est ancienne, Renaud Le Goix estime que leur
dimension sécuritaire est récente. Ainsi, dans le règlement de copropriété du Parc de
Montretout, il n’est à aucun moment fait mention du portail à l’entrée. C’est seulement à la fin
des années 1980 que des dispositifs renforcés de contrôle des allers et venues ont été mis en
place, par percolation en Europe des théories associées à l’urbaniste américain Oscar
Newman. D’une certaine manière ici, la forme de la fermeture précède son usage sécuritaire
Cette interprétation est toutefois discutée par Philippe Gresset qui estime que la sécurité est
une préoccupation déjà présente au dix-neuvième siècle, même si cela était sous une forme
différente.
2. A PROPOS DU MODELE DU LOTISSEMENT PRIVE ET FERME
Concernant la période plus récente, Renaud Le Goix insiste sur la circulation internationale
des modèles d’ensembles pavillonnaires et sur le poids du marketing. On trouve des
réalisations très similaires à travers le monde, mettant en avant des valeurs très proches (lien
social local de type villageois ou communautaire, jouissance d’un cadre de vie verdoyant,
magnification de la vie familiale). En France, le discours mis en avant par les promoteurs des
nouveaux villages ” des années 1970 s’est pleinement inscrit dans ce cadre.
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Le développement des ensembles résidentiels privés et sécurisés est, pour Renaud Le Goix,
une déclinaison récente de ce modèle. Dans la région de Los Angeles, la question de la
sécurité n’apparaît ainsi dans les discours promotionnels que dans les années 1970 (suite aux
grandes émeutes de la fin des années 1960). Les dispositifs sécuritaires existent auparavant,
mais ne sont pas mis aussi systématiquement en avant par les promoteurs. Cette mutation est
plus tardive en France et se fait largement sous l’influence des acteurs anglo-saxons du
marché immobilier.
Accessoirement, l’adjonction de dispositifs de sécurisation au modèle de l’ensemble
pavillonnaire périurbain est aussi promue par les acteurs du marché immobilier parce qu’elle
est avantageuse financièrement : vendre autre chose qu’une maison en l’accompagnant de
services et d’équipements divers est pour les promoteurs une manière de faire de la
plus-value.
3. LES RELATIONS ENTRE LE PUBLIC ET LE PRIVE
Renaud Le Goix conteste les critiques radicales des gated communities qui voient en elles des
ferments d’une sécession urbaine. Revenant sur les cas étasuniens qu’il a étudiés, il souligne
que les lotissements clos et privés sont loin de toujours s’opposer à la puissance publique et à
l’intérêt public. D’une part, aux Etats-Unis, certaines gated communities ont été transformées
en municipalités (par le processus d’incorporation), d’autre part certaines municipalités
encouragent le développement des gated communities. En effet, les ensembles pavillonnaires
clos sont avantageux fiscalement et ceci pour deux raisons : la première est que les maisons
implantées dans ces ensembles ont généralement une valeur supérieure et garantissent donc
des rentrées fiscales plus élevées (la valeur augmente de 10 à 15 %). La seconde est que les
habitants de ces ensembles prenant à leur charge la fourniture de certains services collectifs
et la gestion de certains équipements, cela allège le budget municipal !
Sur tous ces points, la situation française n’est pas aussi éloignée qu’on pourrait le penser de
la situation étasunienne. Renaud Le Goix souligne notamment que les lois françaises venues
encadrer la procédure de lotissement dans les années 1920 visent avant tout à faire supporter
par les lotisseurs privés la production de services et d’équipements collectifs (rues, trottoirs,
éclairage, réseaux, etc…). Il souligne également que les municipalités du Chesnay et du
Vésinet étaient au départ des ensembles résidentiels privés avant de devenir, à la fin du
dix-neuvième siècle, des municipalités : il parle de municipalisation d’une enclave de droit
privé ”.
Sur cette distinction entre le public et le privé, une discussion a eu lieu autour de la notion de
gouvernance privée, avec notamment des interventions d’Agnès Deboulet et de Maïté Clavel.
En effet, certains défenseurs de la copropriété voient dans celle-ci une forme de démocratie
(Agnès Deboulet évoque notamment la manière dont les promoteurs vantent la copropriété
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dans la ville nouvelle du 6 octobre au Caire). Certains rapprochements entre gouvernance
privée et gouvernance publique sont troublants : après tout, les habitants d’une copropriété
élisent des représentants et les décisions sont prises sous forme de vote. Les membres de
l’assistance s’accordent cependant pour souligner les limites de ce discours. Comme le note
Renaud Le Goix, les analystes relèvent souvent que, dans la copropriété, la démocratie
locale repose sur une participation des shareholders (ceux qui possèdent des parts) et non
sur une participation de l’ensemble des stakeholders (ceux qui sont concernés par le mode de
gestion locale, propriétaires, locataires ou simples usagers…). Ainsi, le suffrage est censitaire
et le poids du vote est proportionnel aux millièmes possédés. En même temps, sur ce plan, la
démocratie communale n’est pas exempte de tous reproches : les étrangers, qui peuvent
parfois représenter plusieurs dizaines de pourcents de la population, n’ont pas le droit de vote.
De même, Eric Charmes note qu’au dix-neuvième siècle, seuls les propriétaires avaient le
droit de voter dans les communes françaises et qu’aujourd’hui, les habitants de certaines
communes périurbaines considèrent leur municipalité comme un syndic de copropriété.
Renaud Le Goix estime que ce qui distingue le mieux la copropriété de la municipalité est
l’horizon temporel de gestion. Dans un cas, on gère à court terme, dans un autre on se projette
dans un avenir plus lointain. Dans ses enquêtes récentes auprès de maires de petites
communes, Eric Charmes dit avoir fait un constat similaire et note que l’école est un élément
clé de cette projection dans un horizon temporel à moyen ou long terme (il faut gérer le
peuplement pour éviter les fermetures de classes ou, pire, la fermeture de l’école).
4. A PROPOS DES DROITS DE PASSAGE ET DE LA CONTINUITE DES
ESPACES PUBLICS
Les trois intervenants montrent, à partir de divers exemples, la complexité des rapports entre
le public et le privé quant à la question de la libre circulation dans les rues pavillonnaires.
Renaud Le Goix évoque ainsi le cas de Magny le Hongre près d’Eurodisney. Cette
municipalia en effet accordé dans un premier temps des permis de construire pour des
lotissements fermés avant de se rétracter (l’équipe municipal n’a pas changé entre temps). La
municipalia ainsi négocié avec les propriétaires pour obtenir la suppression des portails à
l’entrée des ensembles pavillonnaires. Elle semble avoir été préoccupée par une excessive
fragmentation de son territoire et par la mauvaise image des ensembles pavillonnaires fermés.
Des recherches restent toutefois à mener sur ce point.
Eric Charmes souligne une logique inverse dans le cas du Grand Lyon. En effet, dans le
secteur du Grand Large (à la périphérie du Grand Lyon) de nombreux riverains demandent le
reversement de leur rue pavillonnaire dans le domaine public, principalement pour faire
supporter le coût de leur réfection par la collectivité. Seulement, l’acception du classement
dans le domaine public est soumise à d’importantes restrictions : la communauté urbaine du
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Grand Lyon estime en effet qu’une voie qui n’a d’intérêt que pour ses riverains n’a pas à faire
partie du domaine public. Résultat, les lotissements fermés se développent, les gens se
disant : “ puisque c’est notre rue, autant qu’elle soit fermée ”.
Delphine Callen évoque également deux cas très intéressants des habitants d’ensembles
pavillonnaires de la commune de Bièvre ont tende supprimer le passage de personnes
extérieures. Dans les deux cas, ce passage est engendré par la présence d’espaces verts à
proximité du lotissement. Dans le premier cas, passer au travers du lotissement est le moyen
le plus rapide d’aller d’un parking à un parc. Le seul autre accès piétonnier passe par une voie
rapide dangereuse. Les habitants ont toutefois apposé une barrière à l’entrée de leur
ensemble pavillonnaire pour bloquer le passage piétonnier, jugé gênant. Il y avait une
servitude publique, mais la municipalité n’a pas réagi pendant les 10 ans qui ont suivi (la
présence d’habitant de l’ensemble pavillonnaire dans le conseil municipal n’a
vraisemblablement pas été étrangère à cette apathie). Le résultat est qu’aujourd’hui, le parc
n’est presque plus utilisé par les non-riverains et qu’il est devenu une sorte d’extension du
domaine privé de l’ensemble pavillonnaire voisin. La situation est d’autant plus ironique que
cet ensemble pavillonnaire avait été réalisé pour financer la rénovation et la remise en état du
parc et de son château.
Le second cas évoqué par Delphine Callen est assez similaire au premier, à ceci près que la
municipalité, instruite par l’expérience précédente, a cette fois-ci fait valoir ses droits et a
réussi à préserver la servitude de passage.
Eric Charmes souligne que ces questions de droit de passage sont très fréquemment derrière
les fermetures de voies. Il évoque notamment le cas d’un projet de ligne de bus dans le
quartier du Grand Large à Meyzieu (en périphérie est de Lyon). La municipalité prévoyait en
effet de faire circuler un bus sur un circuit viaire à l’intérieur du quartier. Ce circuit devait
emprunter une voie nouvellement réalisée par des aménageurs privés. Le problème est que la
municipalité a fait circuler le bus sans attendre la rétrocession de la voie réalisée par
l’aménageur (ainsi que le prévoyait la convention ad hoc). Or le passage de ce bus a suscité la
mobilisation des riverains qui ont bloqué le processus de rétrocession et qui ont posé des plots
au milieu de la voie pour empêcher tout trafic de transit.
5. L’INSERTION DES LOTISSEMENTS PRIVES ET/OU FERMES DANS LEUR
ENVIRONNEMENT : LE ROLE DETERMINANT DE LA COMMUNE
Dans son travail sur trois communes de la vallée de la Bièvre, Delphine Callen a étudié
11 lotissements au caractère privatif marqué. Ce caractère privatif peut se manifester par des
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