comprendre l’attitude désabusée de nombreux élèves qui ne se sentent en rien concernés par
les paroles qu’on leur profère. Alors, oui, l’intérêt que l’on portera à la philosophie dépendra
fortement du charisme du professeur, oui, il sera question d’être plus ou moins doué pour
cela ( comme on a ou pas la « bosse des maths » ), et oui, c’est le « bidouillage rhétorique »
qui fera la différence. Par conséquent, il serait effectivement absurde de vouloir infliger cela à
des enfants dès l’école primaire, vues les difficultés que rencontrent déjà les lycéens.
Cependant, un renversement copernicien pourrait bouleverser ces idées reçues. Tout
comme on a pu penser à propos du bilinguisme au primaire qu’il était bien assez compliqué
d’apprendre une seconde langue au collège, alors qu’en fait la plasticité du cerveau à l’enfance
est un terrain tout à fait propice à l’apprentissage de phonèmes et de structures linguistiques
les plus diverses, essayons de considérer l’enfance et ses caractéristiques comme un terreau
fertile à la PRATIQUE DU ‘PHILOSOPHER’.
En effet, tout le problème, comme de coutume en philosophie, est de définir l’objet
dont nous parlons. La philosophie telle que l’on propose de la pratiquer depuis déjà trente ans
au primaire ( et pourquoi pas ailleurs !) est avant tout un art de vivre comme elle se voulait à
ses origines. La philosophie, « amour de la sagesse » n’était qu’exercice, pratique en vue du
Souverain Bien : le Bonheur (ARISTOTE , Ethique à Nicomaque). De même, c’est une
philosophie non plus seulement évoquée mais vécue, pratiquée, que l’on essaie de faire
germer chez les enfants en profitant du fait qu’ils ne sont pas encore totalement vernis de leur
culture, et grâce à quoi ils font preuve d’un étonnement fondamental pour la quête de sens
que représente la philosophie. Par conséquent, il s’agira avant tout d’apprendre à ces bambins
un comportement cognitif, intellectuel et social et non pas des connaissances qui leur sont
étrangères et vides de sens.
C’est ainsi que nous allons explorer ce nouveau champ pédagogique mis à l’essai un
peu partout dans le monde en examinant ses présupposés, ses buts, sa mise en pratique et ses
résultats, afin d’en dégager la pertinence et les limites. Nous essaierons, par ce biais, de