L'organisation et la corrélation des espaces
Jacques Blanc
On a trouvé récemment un texte écrit par un juif, enfermé dans un ghetto. Ce texte, on ne peut le lire que
d'une façon discrète, fragile, cet exemple montre qu'il faut des lieux où l'on raconte des petites choses, et
d'autres lieux pour en raconter des grandes. Tous ces espaces sont importants. Écouter, regarder, ce
sont des actes de participation essentiels. Le rapport de l'un à l'autre, de l'être à l'être doit se passer dans
des espaces, préservés du bruit de la marchandise, pour que l'être humain puisse se retrouver en lui
même, pour méditer ... Pour le spectacle du cirque Romanès, cette petite choses fragile, sans exploits, en
contradiction avec l'encore plus fort et l'encore plus beau, l'univers dégageait une sensibilité
exceptionnelle.
Michèle Kerhoas, actrice (s'adressant du public plus particulièrement à Michèle Bosseur)
Pendant la création, l'artiste est dans un état de solitude, de non perception au monde, puis les personnes
viennent voir sa mise au monde, tout d'un coup une espèce de soumission à la chose s'opère. Avec des
conseils, on discute avec un public qui ne critique pas mais qui accompagne dans un désir de faire. Ces
paroles m'ont aidée considérablement, elles ne sont pas jugeantes, et tout d'un coup l'artiste commence à
penser, à se dilater, je trouve ça extraordinaire, on se sent aimée, on est dans un espace d'amour
discursif .
Alain Guiho : pouvez vous m'expliquer l'évolution de votre écriture dans la rue ?
Jean-Raymond Jacob
Je cherche les ingrédients qui tendent à l'universalité. J'écris d'abord une poésie, ce que je ressens, puis
s'opère la fabrication, dans le spectacle vivant. En fait, le théâtre se calcule dans le temps, comme le vin,
il lui faut une certaine maturité, puis avec le temps, on accède à une écriture. Tout d'un coup c'est une
chose qui peut être reprise par d'autres. Transhumance est une machine monumentale qu’il faut arrêter,
on retrouve avec les Trottoirs (Les Trottoirs de Joburg, mirage, dernière création de la compagnie
Oposito, ndr) et les voyages en Afrique qui nous ont nourris, une traduction des émotions que l'on a eues.
C'est une réminiscence, après l'expérience Africaine, on y retrouve les aventures artistiques croisées avec
d'autres compagnies, on se nourrit des autres, on additionne les expériences et les rencontres.
Pierre Berthelot
Moi je suis plutôt du genre colère, contre le Tour de France (La petite Reine), contre le délit de sale
gueule (Délit de sale gueule), sur le lien social et les rues qu'il fallait rendre propre (Le fil harmonique), sur
le chômage et le luxe (Taxi), puis il y a les concepts ou les contextes avec les commandes, en ce moment
c'est pour le Tramway, le Wagon de la colère. Pour écrire, mes textes passent par les paroles, et la
musique. Ce qui m'intéresse c'est que le public ne rencontre jamais les mêmes spectacles, j'aime les
finals inachevés, je laisse les gens dans la merde, il n'y a pas de Loft Story et du Happy End. L'artiste est
là pour pointer, et quand on décide de vivre dans une ville, on passe des caps avec des politiques
différents, on passe à droite, puis à gauche, ce qui m'intéresse c'est de prendre rendez-vous à chaque
fois pour dire aux élus : est-ce que vous voulez de nous ? Puis je travaille avec des gens compétents, on
essaye d'avoir une aventure, sans tricher, sans piocher sur d'autres énergies, la pensée est en
mouvement, et s'il y a un manque , on fait appel a des gens.
Michèle Bosseur, co directrice du Fourneau, en conclusion
Claude Morizur est à la Villette, pour la Première des Métalovoice, car nous avions deux choses
importantes à faire ce soir au même moment. Je vous remercie, euh non, je nous dis bravo. Pour les
mots, et ce qui a été dit ce soir. Pour nous en tout cas ce débat est important, et si l'UBO aborde les Arts
de la Rue dans son DESS, cela montre bien le chemin que l'on a fait en 20 ans. Si on parle d'exigence
artistique ce soir c'est que le Théâtre de rue acquiert ses lettres de noblesse, il faut que ça continue,
comme à Morlaix, qui réunit dans sa politique culturelle de à la fois, le théâtre, le théâtre de rue, et
beaucoup d'autres énergies, et qui est en parfaite concordance avec la situation actuelle.
Bravo à tous.