Analyse des mutations des gènes cibles de l`instabilité microsatellite

publicité
IN MEMORIAM PR D. CHOPIN
Progrès en Urologie (2005), 15, Supp. N°1, 1286-1292
Analyse des mutations des gènes cibles de l’instabilité
microsatellite dans les tumeurs urothéliales du
haut appareil urinaire
Pierre Mongiat-Artus1, Catherine Miquel2, Madelon van der Aa3, Olivier Buhard4,
Richard Hamelin4, Hany Soliman5, Chris Bangma6, Anne Janin7, Pierre Teillac1,
Theodorus van der Kwast 3, Françoise Praz4
1Service d’Urologie, Université Paris VII, Hôpital Saint-Louis, Paris, France.
2Service d’anatomopathologie, INSERM, U752; Université Paris V, Hôpital Sainte-Anne, Paris, France.
3 Department of Pathology, Erasmus Medical Center, Rotterdam, The Netherlands.
4 INSERM, U762 ; Université Paris VI, Paris, France
5Service de Biochimie, CNRS UPR 9051, Hôpital Saint-Louis, Paris, France
6 Department of Urology, Erasmus Medical Center, Rotterdam, The Netherlands.
7 Service d’anatomopathologie, INSERM U728, Hôpital Saint-Louis, Paris, France
RÉSUME
dans des voies cellulaires clés (ATR, DNA-PKcs,
MBD4, TCF-4, MSH6 et BLM), ont été aussi
détectées. Les mutations de BAX et de MRE11
étaient présentes de façon homogène au sein des
3 tumeurs. Une analyse immunohistochimique a
confirmé la perte d’expression d’une des protéines du système MMR dans chaque tumeur
(MLH1, MSH2 et MSH6). Elle a aussi montré qu’une mutation de MRE11 ou de RAD50 induit la
perte d’expression conjointe des deux protéines,
qui font partie d’un même complexe protéique
(MRE11/RAD50/NBS1).
Un certain nombre de tumeurs urothéliales du
haut appareil urinaire (UUC pour urothelial cell
carcinoma), sporadiques ou qui se développent
dans le cadre du syndrome du cancer colorectal
héréditaire sans polypose (HNPCC pour hereditary non polyposis colorectal cancer), présentent
une instabilité des microsatellites (MSI pour
microsatellite instability). Cette instabilité des
microsatellites est le reflet d’un défaut du système
de réparation des mésappariements de bases de
l’ADN (MMR pour mismatch repair). Ainsi, les
tumeurs MSI accumulent des mutations dans de
nombreux gènes qui comportent dans leurs
séquences codantes des séquences répétées ;
ces mutations conduisent à un décalage du cadre
de lecture et sont responsables de la synthèse
d’une protéine tronquée. Après avoir évalué l’incidence du phénotype MSI dans 58 UUC à l’aide
des deux panels de marqueurs recommandés par
le National Cancer Institute, nous avons étudié la
distribution intra-tumorale des mutations secondaires de la mutagenèse MSI dans 13 gènes
cibles potentielles.
Les UUC avec un phénotype MSI sont rares et les
mutations de RAD50 et de MRE11 y sont fréquentes et probablement précoces, suggérant
leurs rôles clés dans la genèse de ces tumeurs.
MOTS CLES
Tumeur urothéliale, haut appareil urinaire, syndrome HNPCC, instabilité des microsatellites, gènes
cibles.
I. INTRODUCTION
Les tumeurs urothéliales sont un des cancers les
plus fréquents, responsables de 10% de la mortalité par cancer. La majorité de ces tumeurs se
développe dans la vessie, mais 5% apparaissent
dans le haut appareil urinaire, calices, bassinet et
uretère. Actuellement, le diagnostic de tumeur
Parmi les 58 UUC évaluées, 4 (7%) présentaient
un phénotype MSI. Deux patients étaient atteints
d’un syndrome HNPCC. Trois des 4 tumeurs comportaient des mutations de MSH3, BAX, MRE11 et
RAD50. Des mutations d’autres gènes, impliqués
1286
urothéliale du haut appareil urinaire (UUC) est
généralement porté à l’occasion du suivi d’une
tumeur urothéliale de vessie. Les UUC apparaissent de façon sporadique, mais des facteurs héréditaires peuvent aussi présider à leur développement, certains cas survenant dans le cadre du
syndrome du cancer colorectal héréditaire sans
polypose ou syndrome HNPCC [3]. Le syndrome
HNPCC est une maladie héréditaire de transmission autosomique dominante due à une mutation
germinale dans un des gènes du système MMR,
généralement MLH1 ou MSH2 et plus rarement
MSH6 ou PMS2 [25]. Ce syndrome est caractérisé par un risque élevé de cancer colorectal (82%),
de cancer de l’endomètre (60%), ainsi que de cancer de l’estomac (13%), ovarien (12%), urothélial
du haut appareil urinaire (4%), cérébral (3,7%) et
hépato-biliaire (2%) [1, 30, 33, 34].
tumeurs de façon erronée en MSI-High. Ainsi, la
dernière réunion de consensus a récemment
recommandé, comme une alternative au panel
original de Bethesda, l’utilisation de 5 marqueurs
mononucléotidiques quasi-monomorphes couplés
dans une seule PCR dite « pentaplex » [7, 31, 32].
Cette PCR permet un dépistage rapide d’un grand
nombre d’échantillons tumoraux avec une grande
spécificité et une grande sensibilité et une interprétation univoque des résultats sans avoir
recours à l’ADN normal des patients.
Les études portant sur le statut MSI des tumeurs
urothéliales du haut appareil urinaire sont rares et
l’incidence du phénotype MSI déterminé en utilisant le panel de Bethesda classique dans ces
tumeurs varie de 4 à 31% [5, 8, 12, 17, 29]. Ces
variations peuvent résulter de problèmes d’interprétation des marqueurs dinucléotidiques, de l’utilisation de critères moins stringents que ceux exigés par la conférence de consensus et de populations d’étude différentes. Les UUC MSI-H ont
été décrits comme survenant plus volontiers dans
l’uretère, présentant une croissance inversée et
un taux d’envahissement musculaire plus faible
par rapport aux UUC MSI-L et MSS [8, 16, 17].
Les cancers colorectaux MSI possèdent aussi des
caractéristiques cliniques et pathologiques spécifiques : un risque métastatique moindre, une
meilleure survie et une réponse spécifique à la
chimiothérapie [13, 27]. Il paraît ainsi important de
pouvoir identifier avec certitude les UCC MSI.
L’instabilité des microsatellites (MSI) est un phénotype tumoral révélateur d’un défaut du système
MMR, caractéristique des tumeurs HNPCC et de
15% des cancers colorectaux sporadiques. Les
mutations germinales des gènes du système
MMR sont la cause principale du syndrome
HNPCC, alors que la méthylation du promoteur de
MLH1 est le mécanisme dominant de l’inactivation
du système MMR dans les tumeurs sporadiques
[18, 20]. Les microsatellites sont de courtes
séquences répétées de l’ADN, dispersées dans
tout le génome, particulièrement sujettes aux
mutations de type insertion ou délétion qui surviennent durant la réplication. De nombreux marqueurs microsatellites et critères diagnostiques
ont été utilisés pour déterminer le phénotype MSI
des tumeurs, conduisant à des résultats extrêmement variables et contradictoires. Le consensus
de Bethesda a été un point de repère important
pour standardiser l’analyse du phénotype MSI
dans les tumeurs colorectales ; il a recommandé
l’utilisation d’un panel de 5 marqueurs (2 mononucléotidiques et 3 dinucléotidiques) dans la tumeur
et l’ADN normal pour classer les tumeurs en MSIHigh (MSI-H, MSI sur 2 loci ou plus), MSI-Low
(MSI-L, MSI sur 1 locus) ou MSS (MS stable, sans
instabilité) [6]. Seul le phénotype MSI-H caractérise les tumeurs HNPCC ou sporadiques qui comportent un défaut du système MMR. Cependant,
l’utilisation du panel original de Bethesda n’est
pas exempte de difficultés techniques en particulier, l’utilisation d’un trop grand nombre de marqueurs dinucléotidiques a conduit à classer des
La carcinogénèse des tumeurs MSI est un processus évolutif dans lequel l’instabilité des microsatellites provoque l’accumulation et la sélection
d’un grand nombre de mutations secondaires
inactivatrices dans des régions codantes de
gènes, dits cibles, qui peuvent promouvoir la carcinogenèse [9, 36]. La plupart des études réalisées sur les gènes cibles ont été effectuées dans
des cancers du côlon, de l’endomètre et de l’estomac ; elles suggère une spécificité tissulaire, la
fréquence de mutation d’une gène cible donné
étant variable selon l’organe où les tumeurs se
développent [9, 22, 26]. Aucune étude exhaustive
des mutations des gènes cibles dans les UUC
MSI n’a été réalisée.
Après avoir établi avec précision l’incidence du
phénotype MSI dans les tumeurs urothéliales du
haut appareil urinaire sur une série de 58 patients,
nous avons recherché dans les tumeurs MSI la
1287
présence de mutations dans un grand nombre de
gènes cibles candidats (n=13) impliqués dans des
voies cellulaires clés. Afin d’identifier les gènes
cibles de la carcinogenèse MSI dans les tumeurs
urothéliales, de multiples sites tumoraux ont été
analysés simultanément pour chaque tumeur afin
d’évaluer l’hétérogénéité des mutations des
gènes cibles dans les tumeurs.
Patients.
tumeur primitive d’une patiente (#4) était fixée au
Bouin, ainsi seules les 2 récidives ont pu être analysées (#4-R1, #4-R2).
Détection des mutations dans les gènes
cibles.
Treize gènes ont été sélectionnés en raison de
leur implication dans des voies cellulaires clés. A
l’exception de MRE11, la séquence répétée
microsatellite de tous ces gènes est située dans
leur séquence codante (Tableau 2). Seul MRE11
comporte une répétition microsatellite qui se situe
dans une séquence intronique. La technique de
détection des mutations dans les répétitions
mononucléotidiques de ces 13 gènes a déjà été
détaillée [23]. Chaque PCR avec des profils anormaux a été réalisée au moins 2 fois de façon indépendante pour confirmer la présence de mutations.
II. MATERIEL ET METHODES
Les patients ont été sélectionnés à partir d’une
cohorte de 58 patients présentant une tumeur urothéliale primitive du haut appareil urinaire prise en
charge entre 1988 et 2004 soit à l’Erasmus Medical Center de Rotterdam, soit à l’hôpital SaintLouis de Paris. Le statut MSI a été établi en utilisant la PCR pentaplex de 5 marqueurs mononucléotidiques quasi-monomorphes récemment
recommandée par le NCI du fait de sa fiabilité
prouvée dans l’évaluation des cancers colorectaux MSI (BAT-25, BAT-26, NR-21, NR-24 et NR27) [6,31,32]. Le phénotype MSI était retenu en
cas d’instabilité de 3 marqueurs ou plus. Les
résultats ont été confirmés à l’aide du panel original de Bethesda (BAT-25, BAT-26, D5S346,
D2S123 et D17S250) [23]. Afin d’identifier, les
gènes cibles de la carcinogenèse MSI dans les
tumeurs urothéliales, nous avons recherché la
présence de mutations des gènes cibles dans les
tumeurs provenant de 7 patients : quatre tumeur
MSI et trois tumeurs qui comportaient des variants
dans 1 des 5 marqueurs microsatellites utilisés
pour détecter le phénotype MSI.
III. RESULTATS
Caractéristiques cliniques et pathologiques
des tumeurs MSI (Tableau 1).
Deux des 4 patients ayant une tumeur MSI étaient
atteints d’un syndrome HNPCC (#1 et #4). Leur
tumeur présentait une perte d’expression immunohistochimique conjointe de MSH2 et MSH6. Les
deux autres tumeurs présentaient une perte d’expression de MLH1. L’âge au moment du diagnostic des tumeurs MSI était significativement plus
jeune que celui des tumeurs MSS (42 versus 65
ans). Contrairement aux patients dont les tumeurs
étaient de phénotype MSS, aucun des patients
avec des tumeurs MSI n’avait présenté de tumeur
vésicale avant la tumeur du haut appareil urinaire,
mais cette différence n’était pas significative. Les
tumeurs MSI, de répartition hétérogène en grade
et stade, étaient localisées dans le bassinet chez
1 patient, l’uretère chez 2 patients et le bassinet et
l’uretère chez 1 patient. Le suivi des patients porteurs de tumeurs MSI variait de 18,2 à 142,1 mois.
Un patient était décédé lors de l’étude.
Les données cliniques et anatomopathologiques
ont été collectées dans le Tableau 1. La classification des tumeurs a été réalisée selon les critères de l’OMS et l’IUAC de 1998 [11].
Sélection des tumeurs et extraction de l’ADN.
L’ADN tumoral et normal a été extrait à partir de
blocs tissulaires inclus en paraffine à l’aide du kit
DNeasy™Tissue Kit (Qiagen, Germany). Le
parenchyme rénal ou la couche musculaire urétérale ont été sélectionnés pour l’extraction d’ADN
normal. Les zones tumorales comprenant plus de
80% de cellules cancéreuses ont été sélectionnées pour être microdisséquées sous un microscope inversé (x40). De 2 à 5 zones tumorales ont
pu être microdisséquées pour chaque tumeur. La
Altérations des gènes cibles (Tableau 2).
La majorité des 13 gènes analysés ont déjà été
décrits comme des cibles fréquentes de mutations
secondaires de la mutagenèse MSI [9, 36]. A l’exception de MRE11, les mutations sont situées
dans la séquence codante de ces gènes et
conduisent à la synthèse d’une protéine tronquée
non fonctionnelle. Les mutations de MRE11
1288
Tableau 1. Caractéristiques clinico-pathologiques des patients porteurs d’une tumeur urothéliale du haut
appareil urinaire avec un phénotype MSI.
(a) Nombre de sites analysés pour le statut MSI
(b) M : masculin ; F : féminin
(c) B : bassinet ; U : uretère
Tableau 2. Analyse multi-site des mutations des gènes cibles. Pour chaque gène, les mutations sont présentes (case noire), absente (case grise) ou non déterminée (case blanche). La fréquence de mutation de
chaque gène correspond au pourcentage de tumeurs présentant une mutation dans au moins un site sur
le nombre total de tumeurs. La fréquence de mutation de chaque tumeur correspond au pourcentage de
mutations des gènes étudiés après exclusion de BRCA1 et de BRCA2.
1289
entraîne un défaut d’épissage conduisant à la synthèse d’une protéine tronquée rapidement dégradée responsable d’une diminution importante de
l’expression protéique [15]. Les 4 tumeurs MSI de
notre étude présentaient 2 à 7 gènes mutés parmi
les 13 gènes analysés (18% à 63% de gènes
mutés). Aucune des trois tumeurs avec des
variants dans un des cinq marqueurs utilisés pour
le type MSI (classées MSI-L) ne présentait de
mutations dans les gènes cibles. Quatre tumeurs
MSI avaient une mutation de MSH3, 3 une mutation de BAX, RAD50 et MRE11, suggérant que
ces gènes sont des gènes cibles fréquents dans
les UUC MSI. De plus, deux tumeurs MSI avaient
des mutations de TGFb-RII, TCF-4, MSH6, MBD4
et ATR. Nous n’avons trouvé qu’une seule tumeur
porteuse de mutation de DNA-PKcs ou BLM.
Parmi les 13 gènes étudiés, seuls BRCA1 et
BRCA2 n’étaient pas l’objet de mutation et ont
donc été exclus des calculs de taux de mutation.
celle rapportée dans la majorité des publications
antérieures, en dehors d’une d’entre elle, fixant
cette incidence à 4% après utilisation d’une
méthodologie identique à la nôtre [12].
Les tumeurs avec un défaut du système de réparation des mésappariements de bases, accumulent des mutations dans des répétitions mononucléotidiques situées de régions codantes de
gènes dits cibles [9, 36]. Ces mutations peuvent
être sélectionnées et contribuent à l’initiation ou la
progression des tumeurs par l’intermédiaire d’une
perte de la régulation de la croissance cellulaire,
d’un échappement à l’apoptose ou d’un défaut de
réparation de l’ADN. Il est intéressant de noter
que la sélection des mutations des gènes cibles
dans les tumeurs MSI semble spécifique du tissu
dans lequel les tumeurs se développent, avec des
profils de mutations des gènes cibles distincts
dans les cancers de l’endomètre et cancers colorectaux [9, 36]. L’examen de 13 gènes cibles
potentiels de l’instabilité des microsatellites dans
les UUC MSI avait pour but d’obtenir des informations supplémentaires sur l’impact potentiel de
leur inactivation. A notre connaissance, l’analyse
de gènes cibles dans les UUC MSI n’a été réalisée qu’une fois sur 15 tumeurs et sur 5 gènes
[16]. Des altérations de MSH6 (38%), TGFb-RII
(23%), BAX (23%) et MSH3 (15%) ont ainsi été
rapportées. Nous avons observé des altérations
fréquentes de MSH3, MRE11, RAD50 et BAX et
décrit des mutations dans d’autres gènes impliqués dans le maintien de l’intégrité du génome
comme ATR, DNA-PKcs, MBD4 et BLM. Notre
étude souligne l’intérêt de pratiquer une recherche
mutationnelle sur de multiples sites tumoraux, plutôt que sur un seul site. Premièrement, une telle
approche nous a permis de détecter des mutations ne survenant que dans une seule partie de
la tumeur. Deuxièmement, cette procédure identifie les mutations survenant de façon homogène
au sein de la tumeur, ce qui reste un argument en
faveur de leur survenue précoce au cours de la
carcinogenèse. Plusieurs études se sont intéressées dans les cancers colorectaux MSI à l’homogénéité et la précocité des mutations de TGFbRII, et dans une moindre mesure de celles de
BAX [2, 4]. La faible fréquence et l’hétérogénéité
des mutations de TGFb-RII observées dans notre
étude plaident contre une implication précoce de
ce gène dans la transformation initiale dans les
UUC MSI [16, 35]. A l’opposé, les mutations de
Nous avons voulu évaluer la distribution intratumorale de ces mutations en analysant plusieurs
sites tumoraux pour chaque tumeur. Parmi les
mutations les plus fréquentes, les mutations de
BAX et de MRE11 étaient présentes dans de multiples sites étudiés, contrairement aux autres
mutations, dont les distributions étaient beaucoup
moins uniformes. La comparaison du profil des
mutations survenues dans les deux récidives
tumorales successives du patient #4 a permis de
mettre en évidence une accumulation des mutations dans les gènes cibles au cours du temps,
BAX et MRE11 étant les plus précoces.
Afin d’évaluer la signification biologique des mutations observées dans les gènes MRE11 et de
RAD50, nous avons étudié l’expression immunohistochimique de deux protéines MRE11 et
RAD50. Dans le tissu normal, leur expression était
ubiquitaire, de localisation nucléaire et de forte
intensité. Dans les tumeurs, les mutations de
MRE11 ou de RAD50 s’accompagnaient d’une
extinction concomitante de l’expression immunohistochimique des deux protéines.
IV. DISCUSSION
L’objectif de cette étude était de caractériser dans
des UUC MSI les mutations de 13 gènes cibles
potentielles de l’instabilité des microsatellites .
L’incidence du phénotype MSI que nous avons
trouvée dans les UUC (7%) est plus faible que
1290
RÉFÉRENCES
BAX et MRE11, deux gènes fréquemment altérés
et de façon homogène au sein des tumeurs, semblent être sélectionnées précocement et participer
à la carcinogenèse urothéliale MSI. BAX est un
gène pro-apoptotique de la famille Bcl-2. C’est un
des gènes les plus souvent mutés dans les cancers colorectaux MSI et ces mutations sont associées à une accélération de la croissance tumorale et une diminution de l’apoptose [16, 19, 28, 36].
MRE11 forme avec RAD50 et NBS1 un complexe
protéique qui joue un rôle majeur dans la signalisation et la réparation des dommages de l’ADN
[14, 21]. Comme cela a déjà été décrit dans d’autres organes, nous avons montré qu’une mutation
des gènes MRE11 ou RAD50 est associée à une
diminution d’expression conjointe des protéines
MRE11 et RAD50, suggérant une inactivation du
complexe MRE11/RAD50/NSB1 dans les UUC
MSI [14, 15, 24].
1. AARNIO M, SANKILA R, PUKKALA E, SALOVAARA R, AALTONEN LA, DE LA CHAPELLE A, PELTOMAKI P, MECKLIN
JP, JARVINEN HJ. Cancer risk in mutation carriers of DNAmismatch-repair genes. Int J Cancer. 1999;81:214-218.
2. ABDEL-RAHMAN WM, GEORGIADES IB, CURTIS LJ,
ARENDS MJ, WYLLIE AH. Role of BAX mutations in mismatch repair-deficient colorectal carcinogenesis. Oncogene.
1999;18:2139-42.
3. ABEN KK, WITJES JA, SCHOENBERG MP, HULSBERGENVAN DE KAA C, VERBEEK AL, KIEMENEY LA. Familial
aggregation of urothelial cell carcinoma. Int J Cancer.
2002;98:274-8.
4. BARNETSON R, JASS J, TSE R, ECKSTEIN R, ROBINSON
B, SCHNITZLER M. Mutations associated with microsatellite
unstable colorectal carcinomas exhibit widespread intratumoral heterogeneity. Genes Chromosomes Cancer.
2000;29:130-6.
5. BLASZYK H, WANG L, DIETMAIER W, HOFSTADTER F,
BURGART LJ, CHEVILLE JC, HARTMANN A. Upper tract
urothelial carcinoma: a clinicopathologic study including
microsatellite instability analysis. Mod Pathol. 2002;15:790-7.
6. BOLAND CR, THIBODEAU SN, HAMILTON SR, SIDRANSKY D, ESHLEMAN JR, BURT RW, MELTZER SJ, RODRIGUEZ-BIGAS MA, FODDE R, RANZANI GN, SRIVASTAVA
S. A National Cancer Institute Workshop on Microsatellite
Instability for cancer detection and familial predisposition:
development of international criteria for the determination of
microsatellite instability in colorectal cancer. Cancer Res.
1998;58:5248-57
7. BUHARD O, SURAWEERA N, LECTARD A, DUVAL A, HAMELIN R. Quasimonomorphic mononucleotide repeats for highlevel microsatellite instability analysis. Dis Markers.
2004;20:251-7.
8. CATTO JW, AZZOUZI AR, AMIRA N, REHMAN I, FEELEY
KM, CROSS SS, FROMONT G, SIBONY M, HAMDY FC,
CUSSENOT O, MEUTH M. Distinct patterns of microsatellite
instability are seen in tumours of the urinary tract. Oncogene.
2003;22:8699-706.
9. DUVAL A, HAMELIN R. Mutations at coding repeat sequences
in mismatch repair-deficient human cancers: toward a new
concept of target genes for instability. Cancer Res.
2002;62:2447-54.
10. DUVAL A, REPERANT M, COMPOINT A, SERUCA R, RANZANI GN, IACOPETTA B, HAMELIN R. Target gene mutation
profile differs between gastrointestinal and endometrial
tumors with mismatch repair deficiency. Cancer Res.
2002;62:1609-12.
11. EPSTEIN JI, AMIN MB, REUTER VR, MOSTOFI FK. The
World Health Organization/International Society of Urological
Pathology consensus classification of urothelial (transitional
cell) neoplasms of the urinary bladder. Bladder Consensus
Conference Committee. Am J Surg Pathol. 1998;22:1435-48.
12. ERICSON KM, ISINGER AP, ISFOSS BL, NILBERT MC. Low
frequency of defective mismatch repair in a population-based
series of upper urothelial carcinoma. BMC Cancer.
2005;5:23.
13. FALLIK D, BORRINI F, BOIGE V, VIGUIER J, JACOB S,
MIQUEL C, SABOURIN JC, DUCREUX M, PRAZ F. Microsatellite instability is a predictive factor of the tumor response
to irinotecan in patients with advanced colorectal cancer.
Cancer Res. 2003;63:5738-44.
14. GIANNINI G, RINALDI C, RISTORI E, AMBROSINI MI,
CERIGNOLI F, VIEL A, BIDOLI E, BERNI S, D’AMATI G,
Nous suggérons donc que BAX et MRE11 puissent être des gènes cibles valides, jouant un rôle
prédominant dans la progression des UCC MSI à
l’opposé des autres gènes que nous avons étudiés. De façon cohérente avec cette hypothèse,
seuls les gènes BAX et MRE11 présentaient des
mutations dans la première récidive d’une patiente, alors que la seconde récidive avait accumulé
des mutations dans d’autres gènes cibles.
V. CONCLUSION
L’étude conjointe dans plusieurs sites tumoraux
d’un grand nombre de gènes cibles potentielles de
l’instabilité des microsatellites dans les tumeurs
urothéliales devraient permettre d’identifier des
gènes cibles, notamment BAX et MRE11, dont l’inactivation pourrait favoriser la carcinogenèse de
ces tumeurs et, par là-même, suggérer des cibles
thérapeutiques spécifiques.
REMERCIEMENTS
Pour mener à bien ce travail, Pierre Mongiat-Artus
a bénéficié d’une bourse d’étude de l’Association
Française d’Urologie et Catherine Miquel d’une
bourse d’étude de la Fondation pour la Recherche
Médicale.
Les auteurs remercient la revue Oncogene de leur
avoir permis d’utiliser dans cet article les données
publiées pages 2113 à 2118 dans le numéro 14 du
volume 25 de mars 2006 [23].
1291
SCAMBIA G, FRATI L, SCREPANTI I, GULINO A. Mutations
of an intronic repeat induce impaired MRE11 expression in
primary human cancer with microsatellite instability.Oncogene. 2004;23:2640-7.
15. GIANNINI G, RISTORI E, CERIGNOLI F, RINALDI C, ZANI
M, VIEL A, OTTINI L, CRESCENZI M, MARTINOTTI S,
BIGNAMI M, FRATI L, SCREPANTI I, GULINO A. Human
MRE11 is inactivated in mismatch repair-deficient cancers.
EMBO Rep. 2002;3:248-54.
16. HARTMANN A, DIETMAIER W, HOFSTADTER F, BURGART LJ, CHEVILLE JC, BLASZYK H. Urothelial carcinoma
of the upper urinary tract: inverted growth pattern is predictive of microsatellite instability. Hum Pathol. 2003;34:222-7.
17. HARTMANN A, ZANARDO L, BOCKER-EDMONSTON T,
BLASZYK H, DIETMAIER W, STOEHR R, CHEVILLE JC,
JUNKER K, WIELAND W, KNUECHEL R, RUESCHOFF J,
HOFSTAEDTER F, FISHEL R. Frequent microsatellite instability in sporadic tumors of the upper urinary tract.
Cancer Res. 2002;62:6796-802.
18. HERMAN JG, UMAR A, POLYAK K, GRAFF JR, AHUJA N,
ISSA JP, MARKOWITZ S, WILLSON JK, HAMILTON SR,
KINZLER KW, KANE MF, KOLODNER RD, VOGELSTEIN B,
KUNKEL TA, BAYLIN SB. Incidence and functional consequences of hMLH1 promoter hypermethylation in colorectal
carcinoma. Proc Natl Acad Sci U S A. 1998;95:6870-5.
19. IONOV Y, YAMAMOTO H, KRAJEWSKI S, REED JC, PERUCHO M. Mutational inactivation of the proapoptotic gene
BAX confers selective advantage during tumor clonal evolution. Proc Natl Acad Sci U S A. 2000;97:10872-7.
20. KANE MF, LODA M, GAIDA GM, LIPMAN J, MISHRA R,
GOLDMAN H, JESSUP JM, KOLODNER R. Methylation of
the hMLH1 promoter correlates with lack of expression of
hMLH1 in sporadic colon tumors and mismatch repair-defective human tumor cell lines. Cancer Res. 1997;57:808-11.
21. KIM NG, CHOI YR, BAEK MJ, KIM YH, KANG H, KIM NK,
MIN JS, KIM H. Frameshift mutations at coding mononucleotide repeats of the hRAD50 gene in gastrointestinal carcinomas with microsatellite instability. Cancer Res. 2001;61:36-8.
22. KUISMANEN SA, MOISIO AL, SCHWEIZER P, TRUNINGER
K, SALOVAARA R, AROLA J, BUTZOW R, JIRICNY J, NYSTROM-LAHTI M, PELTOMAKI P. Endometrial and colorectal
tumors from patients with hereditary nonpolyposis colon cancer display different patterns of microsatellite instability. Am J
Pathol. 2002;160:1953-8.
23. MONGIAT-ARTUS P, MIQUEL C, VAN DER AA M, BUHARD
O, HAMELIN R, SOLIMAN H, BANGMA C, JANIN A,
TEILLAC P, VAN DER KWAST T, PRAZ F. Microsatellite
instability and mutation analysis of candidate genes in urothelial cell carcinomas of upper urinary tract. Oncogene.
2006;25:2113-8.
24. OTTINI L, FALCHETTI M, SAIEVA C, DE MARCO M, MASALA G, ZANNA I, PAGLIERANI M, GIANNINI G, GULINO A,
NESI G, MARIANI COSTANTINI R, PALLI D. MRE11 expression is impaired in gastric cancer with microsatellite instability. Carcinogenesis. 2004;25:2337-43.
25. PELTOMAKI P, VASEN HF. Mutations predisposing to hereditary nonpolyposis colorectal cancer: database and results
of a collaborative study. The International Collaborative
Group on Hereditary Nonpolyposis Colorectal Cancer. Gastroenterology. 1997;113:1146-58.
26. PLANCK M, WENNGREN E, BORG A, OLSSON H, NILBERT M. Somatic frameshift alterations in mononucleotide
repeat-containing genes in different tumor types from an
HNPCC family with germline MSH2 mutation. Genes
Chromosomes Cancer. 2000;29:33-9.
27.POPAT S, HUBNER R, HOULSTON RS. Systematic review of
microsatellite instability and colorectal cancer prognosis. J
Clin Oncol. 2005;23:609-18.
28. RAMPINO N, YAMAMOTO H, IONOV Y, LI Y, SAWAI H,
REED JC, PERUCHO M. Somatic frameshift mutations in the
BAX gene in colon cancers of the microsatellite mutator phenotype. Science. 1997;275:967-9.
29. ROUPRET M, CATTO J, COULET F, AZZOUZI AR, AMIRA N,
KARMOUNI T, FROMONT G, SIBONY M, VALLANCIEN G,
GATTEGNO B, MEUTH M, HAMDY FC, CUSSENOT O.
Microsatellite instability as indicator of MSH2 gene mutation
in patients with upper urinary tract transitional cell carcinoma.
J Med Genet. 2004;41:e91.
30. SIJMONS RH, KIEMENEY LA, WITJES JA, VASEN HF. Urinary tract cancer and hereditary nonpolyposis colorectal cancer: risks and screening options. J Urol. 1998;160:466-70.
31. SURAWEERA N, DUVAL A, REPERANT M, VAURY C, FURLAN D, LEROY K, SERUCA R, IACOPETTA B, HAMELIN R.
Evaluation of tumor microsatellite instability using five quasimonomorphic mononucleotide repeats and pentaplex PCR.
Gastroenterology. 2002;123:1804-11.
32. UMAR A, BOLAND CR, TERDIMAN JP, SYNGAL S, DE LA
CHAPELLE A, RUSCHOFF J, FISHEL R, LINDOR NM, BURGART LJ, HAMELIN R, HAMILTON SR, HIATT RA, JASS J,
LINDBLOM A, LYNCH HT, PELTOMAKI P, RAMSEY SD,
RODRIGUEZ-BIGAS MA, VASEN HF, HAWK ET, BARRETT
JC, FREEDMAN AN, SRIVASTAVA S. Revised Bethesda
Guidelines for hereditary nonpolyposis colorectal cancer
(Lynch syndrome) and microsatellite instability. J Natl Cancer
Inst. 2004;96:261-8.
33. VASEN HF, WATSON P, MECKLIN JP, LYNCH HT. New clinical criteria for hereditary nonpolyposis colorectal cancer
(HNPCC, Lynch syndrome) proposed by the International
Collaborative group on HNPCC. Gastroenterology.
1999;116:1453-6.
34. VASEN HF, WIJNEN JT, MENKO FH, KLEIBEUKER JH,
TAAL BG, GRIFFIOEN G, NAGENGAST FM, MEIJERSHEIJBOER EH, BERTARIO L, VARESCO L, BISGAARD ML,
MOHR J, FODDE R, KHAN PM. Cancer risk in families with
hereditary nonpolyposis colorectal cancer diagnosed by
mutation analysis. Gastroenterology. 1996;110:1020-7.
35. WANG J, SUN L, MYEROFF L, WANG X, GENTRY LE,
YANG J, LIANG J, ZBOROWSKA E, MARKOWITZ S, WILLSON JK, ET AL. Demonstration that mutation of the type II
transforming growth factor beta receptor inactivates its tumor
suppressor activity in replication error-positive colon carcinoma cells. J Biol Chem. 1995;270:22044-9.
36. WOERNER SM, BENNER A, SUTTER C, SCHILLER M,
YUAN YP, KELLER G, BORK P, DOEBERITZ MK, GEBERT
JF. Pathogenesis of DNA repair-deficient cancers: a statistical meta-analysis of putative Real Common Target genes.
Oncogene. 2003;22:2226-35.
1292
Téléchargement