qu’il n’est pas possible de décrire le monde sans contradiction si l’on suppose, par exemple, qu’une
chaise existe dans une pièce même si on n’est pas là pour l’observer.
Albert Einstein, et d’autres avec lui, n’aimait pas cette description de la réalité. Il pensait que la
théorie quantique n’était qu’une méthode effective, efficace dans beaucoup de situations, comme
en mécanique des fluides où, par exemple, l'eau est censément continue, mais pas fondamentale.
Selon lui, le flou probabiliste inhérent à la théorie quantique doit pouvoir être éliminé grâce à une
théorie plus profonde, faisant intervenir des paramètres cachés et redonnant à un objet des
propriétés bien déterminées avant une mesure. Selon ce point de vue, l’interprétation de
Copenhague et l’usage du calcul des probabilités n'étaient que le reflet d’un manque de
connaissance sur ces paramètres cachés.
Pour le montrer, Einstein et deux de ses collègues développèrent une expérience de pensée qui
allait devenir célèbre sous le nom de paradoxe EPR. Elle fut analysée plus finement par le physicien
irlandais John Bell. En 1964, il montra que cette expérience conduisait à une inégalité avec les
résultats de certaines mesures, permettant ainsi de départager les conceptions de Bohr et
d’Einstein ou, plus précisément, de savoir si la théorie quantique pourrait être remplacée par une
certaine classe de théories à variables cachées.
Niels Bohr et Albert Einstein étaient en désaccord sur le statut de la mécanique quantique. Le père
de la Relativité générale ne pensait pas qu'elle était fausse, mais simplement qu'elle se limitait à
une description effective de la dualité onde-corpuscule. Avec le paradoxe EPR, il avait tenté de
montrer que les idées de Bohr conduisaient à admettre l'existence de signaux plus rapides que la
lumière, en contradiction avec la théorie de la relativité. © Ehrenfest, Wikipédia
Du paradoxe EPR à l’expérience d’Aspect en passant par l’inégalité
de Bell
Pour comprendre cette idée, considérons une machine capable de fournir des paires de boîtes
initialement fermées. On sait que chaque boîte contient une boule noire ou une boule blanche et
qu’il y a toujours une boule noire et une boule blanche dans chaque paire de boîtes. Il n’est pas
possible de prédire à l’avance dans laquelle se trouve l’une des boules, la répartition semblant tirée
au sort. Supposons que la machine se trouve à Paris et que l’une des boîtes soit emportée à
Montréal par Alice qui peut l’ouvrir sur place et envoyer un SMS à Bob, resté à Paris, pour lui dire
d’ouvrir l’autre boîte après elle. Si Alice trouve une boule noire, elle peut prédire avec certitude que
Bob trouvera une boule blanche et inversement.
La physique classique admet que la répartition des boules était déterminée avant l’ouverture, dans
la machine. La théorie quantique fait toutefois des prédictions plus sophistiquées, comme l’a
montré Bell. En dressant la liste de multiples résultats obtenus par Alice et Bob pour un grand