Notes de lectures du livre de Rachel Moran

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Notes de lecture : « Paid For », de Rachel Moran
Notes et traduction par JS Mallet, septembre 2014
Document original écrit entre 2002 et 2012
Voici mes notes de lecture d'un livre d'une survivante de la prostitution. « Paid for » de
Rachel Moran. Il m'avait été conseillé à New York par une autre d'entre elles qui le
considérait comme une très bonne description de ce que pouvait vivre une personne dans
la prostitution.
De nombreuses discussions avec des sénateurs au printemps m'ont fait prendre
conscience à quel point nous sommes encore loin d'une bonne appréhension du
phénomène par les responsable politiques, même parmi les plus humanistes. Il n'y aura
d'évolution des mentalités et des comportements qu'après être passé par cette phase.
Ce travail et ce témoignage de Rachel Moran sont d'une force et d'une précision que j'ai
rarement rencontrées sur ce sujet. Il nous permet d’enrichir notre connaissance du sujet
et notre capacité d’argumentation. Rien n’est laissé de côté.
La traduction du livre en français est sans doute le meilleur travail à faire. En attendant,
ces notes retravaillées ou mises en forme, avec l’accord de l’auteure, pourraient être un
outil de sensibilisation et d’introduction au livre, utilisable par tous.
Si ce premier travail, fait rapidement, encore incomplet, vous semble intéressant, utilisez
le, sélectionnez parmi cette matière ce qui vous plaît, diffusez le.
Par ailleurs, j'accueillerai volontiers toutes les remarques et suggestions que vous
voudrez bien me faire pour l’améliorer.
Cordialement
NB : Certaines phrases sont en gras, elles m’ont parues intéressantes, d’autres en gras
et soulignées, elles m’ont parues alors très intéressantes. L’italique n’a été utilisé que pour
marquer quelques citations fortes mentionnées par l’auteure. Une lecture très rapide
consiste donc à ne lire que ce qui est en gras et souligné.
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Table des matières
Chapitre 1 : la première question
Chapitre 2 : une exclusion sociale à l'enfance
Chapitre 3 : la maladie de ma mère
Chapitre 4 : sans abri
Chapitre 6 : le premier jour
Chapitre 7 : submergée dans la prostitution
Chapitre 8 : couche de négativité
Chapitre 9 : l'interférence de la dépravation
Chapitre 10 : le mythe de l'escorte de première classe
Chapitre 11 : Le malheur de la prostitution, le viol
Chapitre 12 la violence inhérente à la prostitution
Chapitre 13 : stratégies de survie
Chapitre 14 : la dissociation la séparation de soi
Chapitre 15 : le mythe de la prostituée heureuse
Chapitre 16 : le mythe du plaisir sexuel des prostituées
Chapitre 17 : le mythe du contrôle sur les prostituées
Chapitre 18 : les pertes de la prostitution
Chapitre 19 : concepts faux sur la prostitution
Chapitre 20 : légalisation et décriminalisation
Chapitre 21 : la normalisation de la prostitution
Chapitre 22 : intégration dans la société
Chapitre 23 : dépression et tentative de suicide
Chapitre 24 : les conséquences pour les relations et la sexualité
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Chapitre 25 : contrecoups
Chapitre 26 : la dernière question
Chapitre 27 : Epilogue
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Chapitre 1 : la première question
Chaque personne a une histoire unique. Le mieux nous la connaissons le mieux nous
pouvons comprendre pourquoi ils firent ce qu'ils firent.
Prostituée à 15 ans, 7 ans en prostitution, 14 ans dehors depuis.
Il faut aussi insister sur le décalage entre les fantasmes du client et la réalité de ce
que la personne vit pour comprendre.
A eu une mère addicte à la drogue et un père addicte aux jeux.
Déconnectée du monde dès l'adolescence.
La prostitution : un moyen de continuer à vivre hors du normal.
Dans la prostitution on rentre dans un monde secret. On ne peut discuter de façon
ouverte de ce qu'on fait qu'avec des gens du même monde.
Il n'y a que là où on a un langage honnête entre nous
On vit la nuit, on boit, on fume, on se drogue, ce sont d'autres échappatoires encore.
On finit par se sentir totalement différent des autres personnes de la société.
C'est encore plus vrai pour des personnes qui n'ont jamais eu d'autres revenus que par
la prostitution.
Les attitudes et les opinions envers les prostituées ne sont jamais positives.
Si on tente d'écrire un CV on prend conscience qu'on a pris un chemin qu'on ne peut
jamais refaire en arrière.
On est alors encore plus exclue et séparée de la société. La spirale dépressive continue.
Par chance mon image de moi que ce soit comme escorte ou au début avec un nombre
dégoûtant de clients par jour je n'imaginais pas être dans la société autour de moi.
j'avais un sens très clair de qui j'étais.
Les mots les plus crus s'appliquent à vous dans leurs sens le plus total.
En fait tout ceci n'est qu'une perception des autres et si vous arrivez à accorder peu
d'importance à cette perception alors cela va pour vous.
Il ne peut pas y avoir de plus grande différence entre une relation sexuelle avec
quelqu'un que vous aimez et celle que vous avez avec un client ou un proxénète.
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On développe des capacités particulières dans cette activité comme un sens des intentions
de l'autre.
On retrouve souvent dans la prostitution des gens ayant eu des manques dans
l'éducation et sans domicile.
La question d'écrire ce livre de façon anonyme s'est posé d'un côté oublié de l'autre marqué
pour dépasser la vérité est probablement dans les deux.
Révéler son identité est pour moi ma famille et les miens un signe d’honnêteté
Chapitre 2 : une exclusion sociale à l'enfance
Nous ne connaissons le monde qu'à travers notre relation à lui.
Un contexte familial fragiles, 2 parents souvent malades et à l’hôpital. Rejet à l’école, rejet
du voisinage. La prostitution a souvent pour origine désavantages économiques et
exclusion sociale…
Chapitre 3 : la maladie de ma mère
Une famille de 5 enfants, des parents pauvres et exclus. Un amour familial, mais une mère
atteinte de schizophrénie.
Chapitre 4 : sans abri
Quitte la maison à 16 ans
Quand on est sans abri, on est considéré comme une personne qui ne vaut rien et
en plus qui n'est pas désirée par personne. On gêne. Vous êtes seule et votre
signification sociale est égale à zéro.
On se retrouve à plusieurs sans abri. On commence à voler. Il est évident que la
prostitution est la conséquence de cette situation sociale de sans abri.
Le lien entre fugues et prostitution a été repris dans un rapport du ministère de l'Intérieur.
On fugue parce qu'on est dans une situation qu'on ne peut pas supporter.
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Par ailleurs être sans abri conduit à accepter n'importe quelle autre solution pour
sortir de cette situation elle même traumatique.
Pour sortir de la situation de sans abri certaines personnes peuvent prendre des risques
pouvant conduire à la mort rien que pour une nuit sous un toit. J'ai vu des personnes
prendre des doses excessives de drogue pour être conduit à l'hôpital ne serait-ce qu'une
nuit.
Quand vous êtes sans abri, vous êtes pas invisible mais ne valant pas la peine d'être
regardée.
Même si on aime lire on ne peut pas s'acheter un livre quand on est sans abri, le peu
d'argent que l'on peut avoir sert seulement à acheter de la nourriture.
Chapitre 6 : le premier jour
Ai-je changé pendant la nuit ? Je me suis réveillé un petit peu différente.
Je pourrais peut-être être cette femme me disais-je. Je pourrais être assez forte pour faire
cela. Cela mettrait une fin à cette vie errante.
Benburb street. Le client avait 45 ans et à la fenêtre mon petit ami lui a dit : fais attention
c'est la première fois.
Le prix était 15 euros la pipe et 20 euros la passe. Il me donna 30 euros pour quelque
chose de plus compliqué. J'appris dès la première fois que les pervers payeront plus cher
et que c'est là qu'était l'argent.
Je décidai que je ne pourrais pas avoir des relations totales. Je commençais par des
masturbations manuelles et quelques fellations progressivement.
J'avais encore l'odeur de son sexe dans ma main et l'expérience avait été à peine
supportable.
C'était en 1991, j'ai fourni ce genre de prestations pendant deux ans avec préservatifs.
Je ne comprenais pas à cette époque le lien entre le comportement d'aujourd'hui et
les conséquences pour demain.
Les partisans de la prostitution utilisent souvent le terme d’adultes consentants.
Ceci mérite d'être examiné avec attention :
D'abord il n'est pas possible de consentir un style de vie que vous n'appréhendez
pas. C'est seulement possible de consentir un style de vie tel que l'on imagine qu'il
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est et il n'est pas possible d'avoir une compréhension juste de la prostitution avant
d'être immergée dedans.
Deuxièmement beaucoup de prostituées ne sont pas adultes, elles ne sont pas dans
une position de consentir.
La difficulté aujourd'hui de parler de cette époque et que je vis avec une réalité qui est
différente de celle-ci. Je ne me raconte plus les mensonges qui sont nécessaires
pour une prostituée pour se protéger.
On comprend l'environnement de la prostitution mais on s'efforce de ne pas trop y
penser.
Repenser son histoire dans la prostitution force à y réfléchir plus qu'on l'a fait quand on y
était
Par ailleurs il est maintenant bien connu que l'être humain a des capacités d'anesthésie
dans des circonstances où il est menacé ou traumatisé. Quand nos émotions sont
particulièrement douloureuses, nous avons la capacité de nous anesthésier.
Avant même la fin de ce premier jour, j'avais déjà activement engagé un processus de me
couper de la réalité que j'étais en train de vivre. Avant même d'arriver Bendurd Street
j'avais déjà engagé un processus de me couper de cette réalité, de mettre une image
différente une image qui était acceptable pour moi.
Parce que je n'avais pas de rapport sexuel complet et que les prix étaient très bas j'avais
souvent plus de 10 relations sexuelles par jour. C'est difficile de décrire cette sensation
de vide qu’éprouve une femme après avoir été utilisée par 10 hommes différents la même
journée. Même si un homme a accepté de ne pas enfoncer son pénis en vous, il y mettra
ses doigts ou d'autres choses
Il vous mettra en pièces vous mordra, il essaiera d'enfoncer sa langue dans votre gorge
et autre part.
J'ai connu un de mes clients à quel point il pouvait aimer mordre et sucé mes mamelons
jusqu'à ce qu'il jaillisse du sang.
Ils n'avaient rien d'ordinaire ces hommes en ce qui me concerne.
J'ai sympathisé avec une jeune femme bien présentée. Elle se dégrada excessivement
rapidement. C'était la conséquence de cette activité intrinsèquement destructive.
Partie 2
Chapitre 7 : submergée dans la prostitution
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Pour presque tout, il est plus facile d'y entrer que d 'en sortir.
Quels que soient les efforts que vous fassiez pour vous adapter à votre nouvelle peau des
incidents se produisent qui vous font réaliser à quel point les choses ont changé.
Je vis assez cette fille portant le même uniforme de l'école que je fréquentais un an avant
cela me parut tellement lointain. Les choses avaient perdu leur innocence.
Dans mes moments de conscience je compris que toutes les choses que j'avais aimé,
comme la littérature, étaient toujours là mais ne m'étaient plus accessibles en tant que
prostituée.
J'étais différente maintenant et toutes ses pensées dévastatrices. (page 58)
En revenant à la maison les premières heures du jour j'aurais voulu j'aurais voulu
aimer l'atmosphère du canal mais c'était impossible.
Je pu me réfugier au début dans la littérature et me reconnecter à moi-même. Impossible
de se connecter au monde social on est seul, On garde son secret pour soi.
Les seules complicités peuvent être avec d'autres filles elle-même prostituées, de courts
moments.
Je ne voyais pas de fin à tout cela. Il y en aurait sûrement une fin de la prostitution ou fin
de moi.
J'utilise le terme submergée par la prostitution parce qu'on est complètement
immergé dedans au point qu'on sent que c'est le seul chemin de vie ouvert à vous.
C'est vrai d'ailleurs pour tous les moyens illicites de gagner de l'argent.
Il y a ce qui est acceptable socialement et ce qui est inacceptable.
Il y a également un manque d'estime de soi.
Les éléments de bonheur de vivre, que toute personne peut attendre dans la vie, paressent
dans la prostitution impossibles.
Devenir heureuse me sembla inatteignable. Il n'y a pas de prostituées heureuses.
La prostitution envahit toutes mes habitudes de sommeil, les vêtements que j'achète,
les conversations que j'ai, les choses que je ne fais pas autant que les choses que je fais.
Je mesurais le temps pas en heures ou en minutes mais le temps avant de devoir
travailler.
J'entendis le terme enfants prostitués longtemps après. Je n'avais que quinze ans mais je
ne me sentais plus comme un enfant à cette heure-là, j'avais toujours eu le sentiment
d'être plus âgée.
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J'ai toujours dit mon âge au client à cette époque, cela les faisait venir plus
rapidement, ce qui était une bonne nouvelle pour moi.
Je voulais peut-être tout ce qu’une jeune fille de mon âge veut être à cet âge, modèle ou
actrice.
Est-ce que mon sexe ou mes seins étaient déjà matures à 15 ans? Comme chacun sait
on ne définit pas la maturité d'une personne par ces éléments.
Chapitre 8 : couche de négativité
Toutes les femmes parlent de tentatives de se garder elle-mêmes séparées de l'acte
et d'identification dans la prostitution.
J'ai été photographié pour de la pornographie.
C'est encore difficile à dire aujourd'hui. Si je revoyais ses photos je grimacerais sans doute
à la vue de l'image de femme sexuelle qu'il fallait prendre et qui n'est pas moi.
J'écris cela car cela peut-être utile à d'autres.
La prévalence de la violence en dehors de la prostitution de rue est supérieure à
celle-ci selon certaines études (voir page 68).
Dans la rue on choisit même en une seconde un client.
Ce n'est pas vraiment possible au téléphone.
La loi contre le racolage en Irlande a eu dans ce sens des conséquences néfastes.
En ce qui me concerne on ne peut pas dire par téléphone qu'on refuse certains actes ou
le client va téléphoner à une autre personne, alors que c'était possible dans la rue parce
que j'étais jeune et jolie.
Un rapport sexuel complet pour moi était traumatisant. Je le fis le minimum de fois possible
pendant 4 ans.
Je préférais les jeux de domination ou demande particulières. (Bondage)
L'expérience du bordel: s’il y a quelque chose de plus dégradant pour une femme
que de vendre son corps à un homme, c'est celle de vendre son corps au bénéfice
d'un autre homme.
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Les strip-teases : les hommes s'y comportaient comme des d'animaux: paris,
commentaires, insultes sur nous.
Certains considèrent le striptease comme un moindre mal. Ce n'est pas le cas. Les
dernières frontières qui restent entre eux et vous qui sont vos vêtements
disparaissent petit à petit. C'est une invasion psychologique profonde.
Dans certains cas je fus photographiée. Là encore cela a des conséquences.
Pour conclure ce chapitre. Ces décisions ne sont pas des décisions de libre
consentement sexuel car ce sont des décisions économiques, gagner de l'argent.
Chapitre 9 : l'interférence de la dépravation
Nous avons une meilleure connaissance de la sexualité aujourd'hui sans pour
autant être capable de mieux la contrôler. Nous savons mieux comment cela est
fragile et complexe et cela peut avoir mystérieusement des conséquences
dommageables. Malgré les utopies sexuelles des années 60, le sexe n'est pas une
valeur libre sans conséquences humaines et émotionnelles. Richard Holloway
Peu d'anciennes prostituées parlent de l'interférence en termes de dépravation entre elles
et leurs clients.
Ces interférences entre le client et la prostituée prennent des formes multiples et des
nuances aussi nombreuses.
Dans la relation de domination la prostituée doit évaluer ce que le client demande et ce
dont il a besoin parce que ces deux points sont très importants et souvent très distincts
même si le client en est pas conscient. C'est le seul moyen pour garantir que le client soit
satisfait et revienne régulièrement.
(Voir p 80 l’explication sur l'équilibre dans le rapport sado-maso)
Dans certains cas, le masochiste n'a pas besoin d'une prostituée mais plutôt d'un
psychologue.
Le paiement pose pour les clients parfois un problème. Au fond, la difficulté pour eux est
de reconnaître la réalité de ce qu'ils font.
Ces hommes doivent reconnaître que leur désir ne sera pratiquement jamais
réciproque avec la femme qu’ils payent.
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Quand une femme simule, c'est pour le bénéfice de son proxénète.
Difficile de savoir quelle est la pratique la plus perverse se faire uriner dessus ou enfoncer
son pénis dans le corps d'une autre ?
Les personnes ayant des pratiques perverses ne sont pas forcément les plus violentes.
Les travestis, ils sont souvent à la recherche de pratiques sexuelles avec les prostituées
sans qu'il n'y ait de rapport, sans doute parce que cela les mettraient dans un rôle masculin
Chapitre 10 : le mythe de l'escorte de première classe
Certains voudraient faire la différence entre l'escorte et la fille dans la rue. C'est une
erreur il n'y en a pas dans les deux cas c'est de la bouche du vagin ou de l'anus
donc il s'agit. Andrea Dworkin.
Être humilié dans la rue ou dans un 5 étoiles cela ne change rien c'est avant tout de
l'humiliation.
Parmi les pires expériences que j'ai eues, certaines eurent lieu dans les plus grands
hôtels de luxe.
Parfois certains clients vous font sentir que vous êtes privilégiée d'être là.
Ils disposent d'un droit du à chaque euro qu'ils ont payé pour que vous soyez le
réceptacle de leur sperme.
Beaucoup de femmes travaillent à la fois dans les hôtels et aussi dans la rue ou des salons
de massages.
Il y a des avantages et des inconvénients dans chaque situation, les escortes ont des
temps d'attente interminables. Elles dépensent également énormément d'argent pour
maintenir leur style de vie. Il ne reste pas grand-chose à la fin.
Les critères de danger, de stress, de profit, sont très différents entre les deux formes
mais à la fin l’acte est le même.
Beaucoup de mots sont utilisés pour tenter de mettre un peu de respectabilité sur
ce que l'on fait dans la prostitution. Il vaut mieux avoir le courage de regarder la
réalité en face et d appeler un chat un chat.
Le mythe de l’escorte de luxe persiste parce qu'il convient aux hommes. Appeler
une agence et voir arriver une classe de vagin supérieur chez soi.
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Le mythe de l’escorte est aussi transmis par tous ceux qui en profitent pour
maximiser le marché et les bénéfices.
Pourquoi la prostitution devrait être différente dans un cas ou dans l'autre ?
Beaucoup de femmes qui commencent par le haut le font par désespoir alors que celles
qui commencent par la rue le font souvent par destitution.
Beaucoup d’agences d'escortes fonctionnent comme des bordels.
On rencontrait chez les escortes un certain nombre de femmes qui auraient eu des
choix viables, à l'université, qui auraient pu rentrer dans le commerce des parents mais
elles étaient là à faire des choses qu'elles haïssaient et cela les rendait misérables,
pourquoi ?
J'en ai connu une qui avait été abusée sexuellement jeune et ne connaissait pas de sérénité
sexuelle.
Toutes les escortes n'ont pas été abusées. Certaines situations sont absurdes.
Les escortes qui ont travaillé dans la rue avant de devenir escortes ont un sens de la réalité
et de la dérision beaucoup plus fort que celles qui n'ont connu que le rôle d'escorte.
L'utilisation des seins et du vagin d'une autre reste le même.
Chapitre 11 : Le malheur de la prostitution, le viol
La pratique de la dissociation chez les femmes prostituées est la même que chez
les enfants victimes d'abus sexuels ce qui prouve que l’abus est de même nature.
Shelley Jeffrey.
Il y a trois grandes formes de perception chez les hommes de la violence qu’ils produisent
à travers la prostitution.

Ceux qui préfèrent croire qu'il n'y a pas de violence dans la prostitution.

Ceux qui savent que cette violence existe, mais qui ne peuvent pas ou ne
veulent pas intégrer cette connaissance de leur comportement.

Enfin, ceux qui savent que cette violence existe et pour lesquels cela produit
un grand plaisir sexuel.
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Une personne qui agit violemment pour son plaisir émet une fréquence sombre
reconnaissable. Les prostituées développent une capacité pour l'anticiper.
Pour les pédophiles, en corrompant ce qui est incorruptible, c'est l'équivalent de
prendre un jeune adorable et de lui pisser dessus. Ceci est l'expression physique
d'un manque absolu d'amour. Pourtant pour certains cela produit du plaisir sexuel.
(P 104)
Dans le cas des pédophiles, je pense qu’ils savent exactement ce qu’ils font. C’est
le sens du tabou, de l’interdit, qui les excite.
Notre sérénité sexuelle est fragile. Une femme n'a pas besoin qu’on la touche pour
se sentir violée sexuellement.
On peut atteindre le sens de la sécurité sexuelle de quelqu'un, par des pensées exprimées
ou des intentions. Quand cela se produit c'est une violence à notre esprit sexuel. (sexual
mindset)
Voilà la véritable vulnérabilité sexuelle d'une personne. Il faut la comprendre pour
mesurer le tsunami de viols qu’une personne prostituée doit subir.
La personne prostituée est considérée comme un être sans émotions et sentiments
humains.
Il y a 3 catégories d’hommes qui usent de personnes prostituées :

Ceux qui considèrent l'autre comme quelqu'un sans émotions humaines.
cela représente probablement un tiers.

Il y a ensuite ceux qui sont conscients de votre humanité mais décident
volontairement de l'ignorer. sans doute 40 pour cent des clients.

Il y a enfin ceux qui veulent réduire l'humanité des femmes pour leur plaisir.
ce sont eux qui disent par leur action vous n'êtes rien.
(Page 106)
Il y a un mot qu’on n'utilise pas pour les personnes prostituées, c’est le mot viol. Pourtant
se prostituer, c est accepter un paiement pour le viol de son propre corps.
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Vous avez littéralement vendu votre droit d'expression.
Devoir garder pour soi la répétition d'un viol est aussi une forme de violence.
Comment pourrait-il en être autrement ?
Si on lui dit qu'elle ne peut pas se plaindre pour avoir été prise d'assaut puisqu'elle
a accepté l'argent, est-ce que cela rend l'assaillant qui paya de l'argent moins
abusif?
La prostituée vit avec un silence qui la ronge chaque jour et qui produit des
dommages psychologiques.
Cela est courant et accepté de façon générale par les prostituées.
Le sentiment d'avoir été abusée a été discuté plusieurs fois entre nous, mais pas les
conséquences de cet abus. Nous avions assez à faire chaque jour pour garder la tête
hors de l'eau physiquement et mentalement.
Je n'ai jamais mais jamais rencontré une femme prostituée contente de devoir
vendre son corps.
On doit constamment mettre dans la balance avoir une relation sexuelle dans le
noir avec un inconnu ou manquer d'argent pour payer l'école à son fils le
lendemain?
C'est le genre de dilemmes que se posent régulièrement la plupart des personnes
prostituées.
Oprah Winfrey parlant de son abus sexuel. « Vous ne pouvez pas dire que vous avez été
abusé parce que vous avez eu du plaisir. »
Il y a plusieurs images de la prostituée dans la société
 L'adolescente addicte qui se prostitue dans une contre-allée
 L'escorte d'une trentaine d'année, professionnelle, autonome, femme se
contrôlant.
La prostitution en général n'est ni l'un ni l'autre de ces deux extrêmes. C'est un
mélange de ces deux formes et de bien d'autres encore.
Le degré de contrainte ou d'humiliation qui est exercé n’est jamais une moyenne.
Il faut signaler que le niveau d'humiliation dans la prostitution est complètement
sous-évalué par les prostituées et pas apprécié dans son ensemble par la société. Il
n'est pas compris parce qu'il n'a pas été vécu par les personnes.
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Son existence n’est même pas reconnue par une majorité de personnes.
Il faut dire à tous ceux qui pensent ainsi, que l'humiliation n'est pas d'un niveau sexuel
parce qu'elle dépasse la sphère sexuelle.
Elle concerne toute une vie, particulièrement si celle-ci et répétitive et ritualisée. Addiction
à la drogue et à l’alcool, perte de confiance en soi, violence physique, idées de suicide.
Tous les éléments qu'on voit dans le viol on les retrouve dans la prostitution.
Quoi qu'on puisse dire, quand une personne doit se refermer sur elle-même pour
supporter un acte sexuel c'est qu'elle est abusée.
Il y a des prostituées qui ne vont pas aimer ses propos. Je le sais parce que si je
les avais entendu quand j'étais prostituée je ne les aurais pas aimé non plus.
Il y a une pratique bizarre dans la prostitution, c'est de penser qu'on est très forte pour
être prostituée. On contrôle tout cela beaucoup plus qu’on est violée.
Si j'applique ça à moi, je n'aurais pas du tout aimé qu'on me dit cela quand c’était en train
de se passer. Cela aurait rendu beaucoup plus difficile de croire le mythe que l'on est fort
et que l'on contrôle.
Ce mythe est important pour les personnes prostituées. Il leur permet de
fonctionner dans la sphère dans laquelle elles se trouvent.
La prostitution est-elle un viol ? Ce n'est pas facile de répondre à cette question car on ne
sait pas où se situent les paramètres. Aux yeux de la société et aux yeux de la loi où sontils ?
Dans la prostitution, vous ne fixez pas vraiment les limites de votre expérience
sexuelle.
La prostituée accepte de l'argent avant le rapport donc elle ne sait pas vraiment ce que ce
rapport va être. Vous devez faire face à des situations qui vont bien plus loin que ce sur
quoi vous vous êtes mis d'accords.
J'ai éprouvé par ailleurs le même sentiment de nausée et de panique quoi qu'il se soit
passé de ce qui avait été convenu.
Certaines fois, j'aurais préféré être une victime officielle plutôt que devoir garder ce
silence pour lequel le client avait payé pour son acte.
On éprouve rarement des sentiments plus forts de vide et de solitude qu’à ces
moments-là.
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On différencie souvent viol et prostitution parce qu'une chose est de voler et une autre
d'acheter.
Kathleen Berry l'exprime ainsi : « Agir sur le corps d'une femme qui pour l'homme
n'existe pas comme être humain, c'est ce que nous considérons comme
profondément traumatisant pour la femme dont le corps est utilisée. Quand nous
comprenons que le sexe payé dans la prostitution partage autant de
caractéristiques avec le sexe volée dans le viol cela prend sens qu’autant de
prostituées fassent un parallèle aussi clair entre ces deux expériences. »
De fait, la prostitution c'est la commercialisation du viol. Ce fait est caché car il n'est
pas reconnu et c'est pourquoi il n'est pas nommé. Ce livre vise à porter l'attention à
sa véritable nature puis à le désigner par son vrai nom.
Un sentiment de malheur accompagne le viol.
Un jour un client me reconnut. Il connaissait mon père ma famille. Je pensant qu’il
allait repartir... Au lieu de ça il se colla contre moi commença à m'embrasser. Ce
jour-là je fis l’expérience physique comment la sexualité peut conduire à la
monstruosité. Comment des personnes peuvent déraper ainsi ? Comment un acte
aussi monstrueux peut conduire à une excitation sexuelle ?
Que mon corps soit le réceptacle de cette monstruosité est encore plus
dommageable que je n'arrive pas à l'exprimer.
Le malheur est le cancer psychologique de la prostitution. De la même façon que l'amiante
pour les travailleurs du bâtiment. Les effets de l'amiante sont mieux connus maintenant
on les évite. Ils ne sont plus acceptables. Pas ceux de la prostitution. On n'agit pas dessus
parce que le plaisir que la prostitution apporte aux hommes est plus important que le
devoir pour l'humanité de traiter les femmes avec égalité.
Ce dont nous avons besoin, c'est d'une prise de conscience. (P117). Il y a un long
chemin à faire.
Beaucoup de femmes non prostituées acceptent la prostitution comme la pornographie
comme quelque chose auquel elles n'osent pas s'opposer de peur de paraître frigides.
Aucune construction sociale ne sera capable de retirer la vérité à propos de la
prostitution quelle qu'elle est vécue par ceux qui la subissent.
Parce que le malheur est tellement présent sur ceux qui sont prostituées ou anciennes
prostituées, le processus pour s'en sortir est de première importance.
Celles qui sont dans la prostitution doivent savoir qu’elles ne s’échapperont pas de ce
malheur tant que la source sera présente dans leur vie. Nous, anciennes prostituées
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devons nous rappeler comment nous avons réagi aux sentiments qui décidaient si
cela allait améliorer ou abîmer notre vie.
Il n'y a pas d'autres façons de gagner sa vie qui comporte autant de malheurs.
Quand quelqu'un est traité avec manque de respect de façon routinière, la réponse
humaine la plus naturelle est de perdre contact avec notre sens interne de la dignité.
Le malheur est la réponse inévitable à de telles circonstances.
Chapitre 12 : la violence inhérente à la prostitution
Les propriétaires de bordel et les avocats de la prostitution sont tout à fait au courant des
dangers même si les reconnaissent rarement publiquement.
Melissa Farley
Chaque prostituée rencontre des cas de violence. La peur de la violence et encore plus
fréquente que la violence elle-même elle est constante.
Au bout d'un moment la violence physique ne fait plus peur on sait comment cela va se
terminer quelques jours ou semaines pour s'en remettre physiquement.
Éviter les gens saouls est une constante nécessité.
Coalition against trafficking in women 2005 résume : la prostitution est une violence. Les
femmes ne se réveille pas un matin et décide devenir prostituée. Choisis pour nous par la
pauvreté des abus sexuels passé des proxénètes qui tire avantage de nos vulnérabilité et
des clients qui achètent du sexe.
Il faut éviter les dangers comme aller avec plus d'un seul homme à la fois.
Chapitre 13 : stratégies de survie
Les stratégies de survie sont nombreuse,s elles peuvent marcher un certain temps mais
pas pour toujours elles ont un prix et des conséquences à long terme
Ruhama report.
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P130
À 16 ans interviewée par un journaliste, Rachel Moran déni tout problème à se prostituer.
Ne pas dire la vérité c'était une façon de se protéger soi-même.
Aujourd'hui elle est consciente que c'était une responsabilité de dire la vérité aux media
qui allaient répéter les propos.
La stratégie de survie était de protéger sa dignité qui allait être attaquée.
Alcool et drogue étaient des éléments utilisés pour la survie. Ils étaient cependant
inutiles.lls ne fonctionnaient qu'un moment et avaient un effet retour.
On ne contrôle pas ses finances. C'est ainsi qu'on devient esclave de la prostitution.
Je me rends compte aujourd'hui de la fantaisie qu’est ce fameux contrôle de la
prostitution. On ne contrôle rien du tout.
On utilise aussi beaucoup d'humour pour rendre à la situation plus supportable et on
compte aussi les unes sur les autres pour un support pratique et émotionnel.
Les stratégies de survie n'apportent pas un soutien total mais seulement partiel.
Chapitre 14 : la dissociation la séparation de soi
La dissociation est un système complexe pour créer une barrière pour protéger le réel soi.
Il est utilisé par les prostituées les femmes qui ont été violées ou les prisonniers de guerre
qui ont été torturés.
Ruhama report
Nous avons tous un pseudonyme. Le fait d'utiliser un faux nom est une première
protection.
La dissociation est quelque chose de nécessaire mais de dangereux. Elle coupe des
réalités de sa situation avec des conséquences désastreuses pour sa santé mentale
et émotionnelle.
C'est comme dans un mariage abusif la femme qui se dit ce n’est pas si mal que çà.
Être dans un déni permanent conduit à se séparer de son propre moi.
La dissociation force à nier la réalité de la situation.
18
Quand une femme sent que son psyché est abusé, elle se protège et utilise la
dissociation comme un outil.
Si au contraire elle n'arrive pas à ressentir qu'elle est abusée, et elle échouera toujours
parce que ce n'est pas possible de se dissocier complètement d'une influence à laquelle
on est en permanence exposé, le degré de sa capacité à se dissocier de la prostitution
directement reflète le degré dont elle est séparée d'elle-même (voir page 132)
Elle est coupée d'elle-même comme des deux côtés d'une lame d'épée,
psychologiquement polluée par la prostitution, soit à la mesure dont elle se dissocie,
soit à la mesure donc elle en est proche.
Là est tout le paradoxe de la dissociation : s’en séparer et s’en détourner.
Se déconnecter est crucial pour garder un espace de pensée, et en même temps
polluant parce que cela force à nier la réalité.
La prostituée ne peut pas garder son identité ou son esprit sain pour cela mais ce lien
double au niveau psychologique est une trahison du soi.
Elle est condamnée si elle le fait, condamnée si elle ne fait pas au niveau les plus profonds.
Chaque fois qu’une prostituée ferme son intimité contre le sentiment de mains non
voulues sur son corps, elle emploi à la fois la dissociation et souffre de la séparation
d'elle-même.
Dans les pratiques sadomasochistes chaque fois que je me suis enfui et n'ai pas réagi
aux assauts violents de mon client, celui-ci m en a voulu car il ne voulait pas que je me
laisse faire, il voulait que je lui résiste.
Cela vaut le coup de répéter qu’une prostituée n'a pas le droit de fixer les limites de son
expérience sexuelle. Son corps et là pour s'accommoder aux expériences sexuelles d’un
autre quelles que soient les anxiétés que cela lui procure, quel que soit ce qu'il demande
et quel que soit le niveau de dommages et de dégradation quelle subisse.
Ce qui vient d'être décrit est une agression passive. La prostituée en sera souvent
réprimandée par l'auteur.
Il y a plusieurs catégories de sadiques. Les moins violents d'entre eux n'ont pas besoin
d'avoir les mains si pressées contre les seins qu'ils en brûlent. Il suffira de les malmener
pour éjaculer.
J'ai toujours réagi dans cette situation de la même façon : je prétendais qu'elles ne s'étaient
pas passées.
A l’analyse, c'était évident que quelque chose qui à l'origine force quelqu'un se mentir ne
peut pas être positif.
19
Dans la prostitution, puisque continuellement vous niez vos propres sentiments,
vous arrivez à une relation très traumatique avec vous-même et cela est la cause
d’un moi profond qui deviendrait obscure. Cela représente un véritable danger
parce que quand vous devenez obscure à vous-même, vous avez perdu la capacité
de vous poser des questions sur vous-même.
Dans la prostitution vous avez d'un côté ce besoin de vous imaginez-vous même dans une
distance de la situation et en même temps dans une distance de vous par rapport à l'autre.
Cela conduit à une séparation à soi.
Ce n'est pas le seul processus par lequel cette séparation ce produit mais c'est le plus
important.
Cette dissociation est ce qui rend la prostitution possible pour une femme au départ.
Une femme doit d'abord dissocier sa répugnance à la prostitution avant de l'intégrer dans
sa vie.
La première chose qu'apprend la prostitution est cette méthode de déconnexion
personnelle.
Cette déconnexion de soi se passe avant le premier rapport pour la majorité des femmes
et c'est la seule façon pour que la prostitution soit possible.
C'est à ce moment où une femme ignore sa révulsion naturelle quelle et qu'elle le fait
cependant que la séparation de soi commence. Cela commence avec la non prise en
compte de ses propres sentiments. Cette séparation de soi manifeste la non cohérence
entre son instinct naturel et son comportement externe.
Ce divorce entre ce que l'on désire et ce que l'on fait est le début. La prostitution n’est pas
la seule situation où cela se produit. Beaucoup de femmes non prostituées se forcent
à se mettre en sommeil pour satisfaire des demandes sexuelles d'hommes avec
lesquels elles vivent.
Elles font cela pas pour leur plaisir mais pour le plaisir de l'autre. Elles y sont
encouragées par des mentalités qui imposent un choix entre une libération sexuelle
ou du puritanisme comme s'il n'y avait pas de place pour des choix intermédiaires.
Il y a ici un manque de reconnaissance de ce qu’est la libération sexuelle qui en aucun
cas consiste à donner son accord à des comportements sexuels qui vous sont dictés par
d'autres.
Il est intéressant et important de noter que cela se passe également comme réponse à un
rapport sexuel non voulu même quand il n'y a pas eu d’échange d'argent.
Lire le témoignage de Jane Fonda page 142.
Elle parle ici de fragmentation et de confusion par rapport à soi.
Ce processus de fragmentation est parfois non perçu par la personne prostituée et il faudra
de nombreuses années après pour qu'elle apprenne à le reconnaître.
20
Une des façons dont j'avais de me protéger dans la prostitution était de me séparer en
deux personnalités, l'authentique et la version imaginaire. La première était réservée
aux personnes qui ne paient pas pour un rapport sexuel avec moi et l'autre crée une
distance avec ceux qui le faisaient.
Poussée à l'extrême, quand un client me demandait quel fruit je préférais je lui répondais
n'importe lequel, sauf celui que je préfère vraiment.
Certains ont pu me demander quels bijoux je préférais et je répondais autre chose que
mes goûts car la protection de moi-même avait plus de valeur que n'importe quel bijou
qu'il puisse m'acheter.
Je n'ai jamais rencontré ni entendu parler de prostituées qui était contente de permettre à
des clients d'entrer dans toutes les facettes de leur vie privée.
Une minorité de personnes prostituées crée une relation avec des clients. Même dans ce
cas elle garde une certaine distance. La distance qu'elle ne peut pas avoir
physiquement, elle la garde mentalement. Cette extrême réticence à rapprocher la
valeur de son identité avec la perception son client, c'est la meilleure preuve de son
refus de participer à la prostitution.
Quels que soient ses succès dans ses tentatives pour concilier son identité avec
ses clients, le sens de soi est altéré par la participation dans la prostitution.
Cela se passe parce qu'elle est influencée mentalement et émotionnellement par ce qu'elle
fait et que cela altère son image personnelle mais aussi par la perception par les autres
en dehors de sa sphère quand ils apprennent son implication dedans.
Apprenant cela plus tard, et souvent à travers des expériences plus amères la plupart des
prostituées garderont les faits de ce que cela fait pour elles. Ceci est une tentative pour
éviter les attitudes de jugement. Il est aussi évident qu’elles espèrent être jugées.
C'est un mécanisme cruel et une source de confusion pour les prostituées qui doivent
arriver à comprendre que la protection de leur propre identité n'est possible que par les
mensonges qu'elles disent à leurs clients tandis que la dignité de cette même identité est
diminuée par les vérités inconnues de ceux qui lui sont intimes.
Elle est laissée à se dépatouiller avec les différents aspects d'elle-même dont elle considère
qu'ils ont de la valeur au-delà de tout mais qui sont sous attaques constantes. C'est bien
peu de se demander pourquoi autant de prostituées souffrent de problèmes permanents
d’image personnelle et de diminution d'estime de soi. Ces sentiments bien sûr ne
disparaissent pas en quittant la prostitution. Cela prend beaucoup plus de temps.
Quand j'ai quitté la prostitution je me suis demandé : que suis-je encore ? Qui suis-je
maintenant ? Qu'est-ce qui reste de moi?
Ce questionnement introspectif incessant est un autre prix encore de la prostitution.
21
Quand vous prenez l'argent, ce pour quoi vous êtes payée réellement est la partie la
plus profonde et la moins déclarée du contrat. Rechercher ce que vous êtes.
Ce parcours est long. Comment est-il possible de savoir ce que vous auriez été
profondément si vous n'aviez pas été dans la prostitution ?
Comment reconnaître un état ne l'ayant jamais vécu soi-même ?
Ce que vous êtes est ce qui existe, pas ce qui aurait pu exister dans un univers parallèle
auquel vous n'avez pas accès.
Ce que j'identifie sont les petites traces qui indiquent le recul par rapport à la prostitution,
mon moi dans la prostitution et celui qu’il a été.
Souvent je me suis poser la question, qui es-tu quand personne ne te regarde.
C'était sans doute pour entendre que j'étais une bonne personne. Quand personne ne
regarde ce qu'on est, on est rarement quelque chose de négatif.
Quand personne ne me regardait, j'aimais bien lire et écouter de la musique avec des
chandelles.
À l'inverse quand j'étais regardée, j'étais soit en compagnie d'autres prostituées, parfois
bien, ou avec des clients, psychologiquement malade.
Chapitre 15 : le mythe de la prostituée heureuse
Même si les recherches ont montré des perspectives différentes sur la prostitution
personne ne laisse croire que les femmes apprécient la prostitution.
La liberté est universellement reconnue comme une nécessité fondamentale pour la
satisfaction d'une vie humaine.
Le mythe de la prostituée heureuse n'a pas de sens. La caractéristique distinctive de 2
personnes libres est par le fait que leur corps est inviolable alors que celui d'une prostituée
ne l'est pas.
C'est vrai qu'il y a des femmes qui ont écrit être heureuses dans la prostitution, mais moi
je n'en n'ai jamais rencontré.
Il est aussi vrai que certaines femmes se sont prostituées à partir de l'image attirante qui
en est faite.
22
On a aussi parlé de libération sexuelle. Cette opinion montre soit que la personne est
inexpérimentée sur la prostitution, soit qu'elle n'a aucune idée sur ce qu'implique la
libération sexuelle. La seule libération que m'a apportée la prostitution est de celle d'être
sans abri.
En lisant les articles sur les prostituées où sont les anciennes prostituées, ce qui me
choque est cette tentative de rendre la prostitution plus acceptable. Je ne sais pourquoi
certaines femmes ont besoin de faire cela. Je pense que nier est facile, là c'est dire la
vérité qui est difficile.
Une autre explication sur la raison d'agir ainsi est que le monde de la prostitution est
totalement incompréhensible pour ceux qui ne le fréquentent pas. Je pense qu'elles
seraient aussi plus disposées à être honnêtes si la question leur est posée d'une
façon non menaçante ou par une personne ne porte pas de jugement.
Le problème pour ceux qui cherchent des réponses, quelle que soit la façon de laquelle la
question est posée, c’est que ces questions sont par nature intrusives.
Elles sont agressives parce qu'elles sont reçues comme intrusives. La personne prostituée
a été agressé par tous les fronts pour son implication sur ce sujet. Toute la société l’a
condamnée.
On dit aussi que toutes les personnes qui rentrent dans la prostitution devraient chercher
à y mettre fin. Mais quelle fin ? Il n'y a pas de fin. La plupart des prostituées ne sont
pas dans une position où il peut y avoir une fin.
Vous ne pouvez pas avoir une véritable discussion sur cette expérience avec une
personne qui ne l'a pas vécu. Vous pouvez discuter, examiner faire part de votre
expérience, écouter, considérer les suggestions parfois lumineuses, regarder la personne
extérieure, mais vous ne pouvez pas discuter sa structure, vous ne pouvez pas discuter
la composition de sa nature, parce que cela sera plein de suppositions et cela conduit à
une impasse. Selon le proverbe anglais « celui qui porte une chaussure est celui qui sait
le mieux où cela lui fait mal. » Voir page 154
L'idée que la prostitution rapporte beaucoup d'argent n'est pas juste. Certaines fois nous
n'arrivons pas à faire assez d'argent dans la nuit. Le stress particulier d'un bordel plein de
clients est dépassé par celui du bordel vide avec cette atmosphère particulière de ce
groupe de femmes attendant l'occasion d'être utilisées.
On ne se mentait pas entre nous dans la prostitution. C'est pourquoi je suis frappée
lorsque j'entends des propos radicalement différents de notre expérience à propos de la
prostitution.
Une des réalités est que les hommes physiquement attractifs ont moins souvent
recours à des prostituées alors que ceux qui sont physiquement laids le font plus
souvent. J'aimerais entendre comment celles qui sont supposées heureuses
23
prostituées réagissent à la question de l’apparence physique et sexuelle tellement
intégrée à l'expérience de la prostitution.
La révolution sexuelle est une expérience quotidienne dans la prostitution, c'est quelque
chose qui était reconnu par tous et toutes. J'ai remarqué le silence des femmes qui ont
apprécié la prostitution sur ce sujet.
La dissociation fonctionne pour se retirer mentalement de cette réalité physique mais aussi
profondément pour la rendre invisible.
Je ne le reproche pas de pas mentionner ces expériences, je critique plutôt le fait qu'elles
disent ce qu’est la prostitution sans présenter l'expérience telle qu'elle se vit
réellement.
Elles ne défendent pas la prostitution, elles défendent une version incomplète de celle-ci.
Elles connaîssent ce qu'est la prostitution, mais elles n’en reconnaissent pas tout
le contenu.
La première condition pour être une prostituée heureuse serait d’y consentir. Le
consentement est vu d'une façon mono dimensionnel. Dans la réalité il est souvent
surdéterminé.
Je n'ai jamais rencontré de situations où la personne ne tentait pas de se sortir d'une
situation plutôt que de rentrer dans une autre. J'ai rencontré beaucoup de femmes qui sont
rentrées dans la prostitution pour sortir de problèmes financiers pas parce qu’elles avaient
un penchant particulier pour les sacs à main de grandes marques.
Le présupposé choix conduit à la conclusion d'un consentement. Mais choix et
consentement sont des concepts erronés ici. L’invalidité repose sur le fait que l’accord
d’une femme à la prostitution est la réponse à des circonstances qui ne sont pas
sous son contrôle et que cela produit un environnement qui empêche même la possibilité
d'un vrai consentement. Il y a une différence entre consentement et soumission à reculons.
Lire page 160 et 161.
Je me souviens du cas d'une femme rencontrée dans une agence d'escorte, rentrée dans
la prostitution à 35 ans, parce que son mariage avait cassé et que son mari l'avait laissée
avec plusieurs enfants et un emprunt. Qu'est-ce qu'il y avait conduit cette femme à la
prostitution ?
Elle avait été marié à 20 ans n'avait pas eu de relation sexuelle avant, ni d’autres qu'avec
son mari. Elle était timide et calme. Quelques vodkas lui facilitait la vie. Il n'y avait aucun
véritable consentement quand elle écartait les jambes homme après homme,
hommes qui étaient convaincus qu’une femme qui avait exprimé tout un
consentement ne pouvait pas être abusée par eux.
Les défenseurs de la prostitution oublient souvent de considérer qu'une absence
de possibilités c'est un manque de choix. Quand une femme n’a pas la possibilité, ne
peut pas choisir entre deux options viables, elle peut difficilement consentir vraiment au
choix unique qui se propose à elle.
24
Le mythe de la prostituée heureuse repose sur l'ignorance ou le refus de regarder
la nature ambiguë de la notion de choix dans la prostitution.
Aussi longtemps qu'un choix est considéré sans être mis en relation avec le
contexte dans lequel il est fait, on peut dire qu'on choisisse n'importe quoi et être
heureux à propos de ce choix.
Chapitre 16 : le mythe du plaisir sexuel des prostituées
Personne ne peut dire qu'il y a du plaisir à avoir une relation sexuelle avec
quelqu'un à qui on n’accorderait pas une minute si on le rencontrait autre part.
Peggy Morgan
L'idée générale est que les femmes éprouvent du plaisir dans la prostitution. C'est
une contre-vérité. La femme éprouve en général un sentiment qui se situe entre une
désapprobation et un dégoût total. S'il peut arriver qu'elle éprouve du plaisir, c’est
excessivement rare, cela s'est produit deux fois pour moi et encore dans des
circonstances particulières.
Le mythe du plaisir dans la prostitution est entretenu pour normaliser cette prostitution. La
raison est simple, si cela peut être du plaisir pour certaines femmes sous certaines
conditions, pourquoi cela ne sera pas possible pour toutes les prostituées dans les mêmes
conditions ? C'est un non-sens. Et comme pour la plupart des non-sens il y a une raison.
Il s'agit de présenter la prostitution comme acceptable et cette raison ce n'est pas la
seule tactique utilisée à cette fin il y en a plusieurs.
Le mythe du plaisir sexuel dans la prostitution est associé parfois à un autre mythe social,
celui que les femmes dans la prostitution désirent être sauvées par un homme.
Ce mythe est entretenu par des hommes et non pas par des femmes. Nous sommes
totalement conscientes que si nous devons être sauvées celle qui doit nous sauver c'est
nous-même.
Pour résumer tout une expérience, un homme qui a payé 20 ou 200 euros pour vous
triturer le clitoris avec les doigts, en enfonçant ces doigts dans votre vagin et en
mordant vos seins avec sa langue. Vous pouvez ressentir beaucoup de choses,
vous vous débrouillerez pour bloquer beaucoup de réponses internes, mais
l'excitation sexuelle n'en fait pas partie.
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Chapitre 17 : le mythe du contrôle sur les prostituées
Témoignage d'un client : une des choses est l'aspect du contrôle dans la relation avec une
prostituée. Vous avez le contrôle de ce que vous faites, quand, comment, dans quel ordre
et j'aime ça.
Étude comparant les clients avec ceux qui ne sont pas, par Melissa Farley, etc.
À aucun niveau et quelle que soit la forme de prostitution on a un total contrôle, le
client non plus d'ailleurs.
À 16 ans agressée par un client j'avais été me plaindre à la police il n'avait pas voulu
prendre en compte cette plainte ne pensant pas une prostituée pouvait être agressée.
Cela me laissant un sentiment d'abandon d'être dépossédé socialement.
Si les prostituées ne sont pas protégées par la société par la loi, par qui le seront t-elles ?
L'homme qui m'avait entraîné et tiré par les cheveux n'était pas coupable.
Le seul contrôle que nous avions à l'époque c'était de choisir ou de ne pas choisir d'aller
avec un client qui se présenter dans la rue.
De façon plus générale, la personne prostituées a peu de contrôle sur beaucoup de
choses : choisir ses relations, son futur, les effets du passé, l'image qu'elle laisse auprès
de ceux qui sauront ce qu'elle a fait, les maladies sexuelles, les perceptions auprès du
public, cela continue d'ailleurs après, il n'est pas facile de parler publiquement, on doit
utiliser un pseudonyme.
La prostitution est essentiellement un problème dû à un déséquilibre de pouvoir,
déséquilibre avec le pouvoir masculin. Beaucoup de femmes rentrent dans la prostitution
à cause de difficultés financières. Il y a une exploitation. Une exploitation c'est un abus de
pouvoir. Les femmes ne sont pas en contrôle dans ce domaine. Si c'était le cas les
hommes ne pourraient pas abuser d'un pouvoir qu'ils n'auraient pas.
La croyance que les personnes prostituées contrôlent, n'a pas de base dans la réalité, mais
a une fonction pratique : c’est une excuse pour normaliser et excuser l'exploitation
sexuelle économique des femmes par des hommes et rendre obscure la nature
profonde de la prostitution qui est la commercialisation d'un viol.
Certaines prostituées elles-mêmes rentrent dans ce mythe du contrôle par les prostituées.
Je l'ai fait moi-même. Nous disons que nous sommes en contrôle, mais j'ai remarqué
que nous ne disons jamais ce que nous nous disons entre nous. Certains
mensonges sont embarrassants évidemment. Dire qu’on est en contrôle est moins triste
qu'accepter une absence de pouvoir sexuel. Cela ne prouve pas que nous ne sommes
pas victimisées, mais cela prouve que nous n'aimons pas qu'on nous le rappelle.
26
Pendant très longtemps j'ai eu honte de ma propre collusion dans cette fantaisie de
contrôle par les prostituées, j'étais en colère contre moi à cause de ça.
Je comprends mieux maintenant que je cherchais à me protéger de la vérité. Un abus
sexuel provoque de la honte.
Il faut dire la vérité, la prostitution se définit par un manque de contrôle.
Si la prostitution était un domaine dans lequel les femmes avaient le contrôle, nous
n'aurions pas à endurer le nombre inquantifiable d'abus sexuels qui résultent de ce
manque de contrôle.
Ces situations sont entrées dans nos vies par notre pauvreté, notre absence de pouvoir,
et plus particulièrement par les décisions d'hommes de capitaliser dessus.
Le nombre de clients qui tirent un grand plaisir de notre manque de contrôle ne saurait
tromper leur interprétation de la situation. Ils sont tout à fait au courant de notre
absence de pouvoir et cela les excite sexuellement.
Il n'y a aucun doute sur l'excitation que produit leur élévation de pouvoir dans la prostitution
même si la majorité d'entre le nieront.
Ce déni atteste de leur propre lecture de leurs actions qu'ils considèrent comme
mauvaises dans le fond.
Cette omission de la nature d'une relation non équilibrée dans la prostitution est très
commune parmi les clients de prostitution mais ce n'est pas la seule.
Il y a une minorité d'hommes clients qui croient ou veulent croire que la prostituée est en
contrôle de la relation.
Ils citent comme exemple le fait que la prostituée peut fixer des limites dans la relation.
La plupart des prostituées fixent des limites dans les actes qu'elle accepte. Il y a
ceux qui la rend complètement malade et ce qu'elle tolère. Cela ne veut pas dire que
cela ne la rend pas malade, cela la rend moins malade. Ce point est souvent discuté
entre prostituées.
Pourquoi avons-nous mis des barrières ? D'abord parce que nous ne sommes pas en
contrôle.
Les partisans de la prostitution font référence à l'autodétermination dans l'utilisation de son
corps. C'est un thème sur lequel nous devons faire attention. L'autodétermination est le
processus par lequel une personne contrôle sa vie. Mais il y a une différence significative
entre contrôler ses finances et contrôler la totalité de sa vie.
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De nombreuses études sur la prostitution montrent qu'une majorité des personnes
aimeraient en sortir. 29 personnes sur 30 interrogées dans une étude à Dublin
souhaiteraient quitter la prostitution à salaire égal.
L'autonomie financière est la seule autonomie dont on peut parler.
Une autre fantaisie populaire chez les partisans de la prostitution est que les femmes
prostituées puissent utiliser leur corps comme elles le choisissent. Le problème est
que ce ne sont pas elles qui choisissent utilisation qui est fait de leur corps. C'est
l'intention, l'objet et la fonction de la prostitution que de mettre le corps de l'autre à
disposition. Il n'y a pas un gramme d’autonomie dans tout cela.
C'est attristant pour moi de regarder en arrière et de voir comment on utilise le peu de
contrôle qu'on pouvait exercer et l'importance qu'on voudrait lui donner.
Très souvent nous acceptions de monter dans une voiture parce que nous avions froid,
nous étions humides, nous étions fatiguées, nous nous embêtions, nous étions déprimées,
nous n'avions pas de clients. Tous ces facteurs jouent un rôle important dans la décision.
Le manque de contrôle est évident ?
Certaines acceptent de travailler en intérieur parce qu'elles pensaient être plus en sécurité.
Les proxénètes disaient que les clients étaient ainsi observés. Les clients ne sont pas
observés, ce n'est même pas possible qu'ils le soient. La seule observation qui pourrait
t'être fait efficace serait une vérification de son passé à partir des informations de la police
pour s'assurer qu'il n'a pas d'histoire de violence envers les femmes et ça je peux vous
assurer que cela ne se fait pas.
Une agence peut seulement dire qu'il n'y a pas de passé de violence dans son agence
mais cela n'offre aucune garantie qu'il n’y ait pas d'autres histoires de violence ailleurs.
Les hommes appellent plusieurs agences en particulier les hommes violents. On le sait
en travaillant avec des agences différentes et en rencontrant le même homme.
Certaines études indiquent qu'il y a plus de violence dans les lieux fermés que dans la rue.
Le point à retenir est que la femme qui travaille dans un salon de massage ou une agence
n'a pas la possibilité de choisir ses clients.
Le seul moyen dont je disposais était de me reposer sur l'attitude et le ton de la voix au
téléphone.
Chapitre 18 : les pertes de la prostitution
Par une image, on garde un peu ses trésors perdus. Colette
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Le sentiment récurrent en réfléchissant sur l'expérience de la prostitution est celui-ci de
perte : perte d'innocence, perte de temps, perte d’occasions, de crédibilité, de
respectabilité, de connexion avec soi-même. Perte d'estime personnelle, il n'y a pas de
retour en arrière le jour où l'on arrête la prostitution. Combien reste ? Combien est altéré ?
Je ne peux pas identifier ce qui reste après ce carnage moral et émotionnel de la
prostitution. Ce livre vient d'un endroit en moi qui rejette pour moi-même et pour
les autres cette prostitution. Ce qui m'a conduit à écrire est quelque chose que la
prostitution n'a pas réussi à détruire. Il m'en reste suffisamment pour écrire ce livre et
j'en suis heureuse.
L'appréciation générale est que la prostitution implique une perte d’une partie très privée.
Elle en provoque d'autres.
Le business de la prostitution se réalise dans un environnement fortement dépersonnalisé.
L'importance de la marchandisation amène à accepter la dépersonnalisation de soi.
Les ravages pour la personne prostituée sont sans limites. Pas seulement, parce qu'ils
sont innombrables, mais parce qu'ils n'ont pas de direction, pas de toit, pas de limites
dans le temps. Quand cessent-ils de faire intrusion dans la vie de la femme ?
Il n'y a aussi pas de barrières sociales qu'une femme puisse mettre entre la prostitution et
elle-même.
Le dicton « une fois putain toujours putain » fait référence à cela. Dans un cas comme le
mien les pertes sont : la sécurité, la dignité, la réputation et le statut social.
Ce sont de vieilles blessures, mais elles sont projetées sur ceux que nous aimons.
Il y a aussi une perte d'humanité. Dans la prostitution, les hommes déshumanisent
les femmes et les femmes se déshumanisent elles-mêmes afin de pouvoir réaliser
les actes que des hommes leur demandent. Cela ne signifie pas que les femmes sont
moins humaines. Cela signifie qu'elles sont traitées comme telles et opérent dans un
environnement où elles doivent non seulement accepter de tels traitements d'autres mais
les rechercher et apprendre et les délivrer.
Et là, il y a une perte dans la croyance et dans l'expérience de votre propre humanité. J'ai
perdu mon humanité parce que j'ai perdu de ma connexion avec elle.
Il y a aussi une exclusion des femmes prostituées en tant que groupe. Manque de statut
social et de respect.
La prostitution promeut clairement la dépersonnalisation du sexe ce qui ne peut
jamais être une bonne nouvelles pour les femmes. Elle colporte l'idée d'une femme peut
être un récipient sexuel pour les hommes.
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Quand les femmes tolèrent la prostitution, elles tolèrent en fait la déshumanisation
de leur genre au sens large.
La légalisation de la prostitution se développe de façon rapide. Où est la révolte des
femmes? Il n'y a pas de mouvement large de révolte parce que la sexualité de la femme
a été vue depuis longtemps comme une commodité si bien que les femmes
commencent à croire en la nécessité d’une classe de femmes spécifique pour la
fournir.
Voir page 184
Chapitre 19 : concepts faux sur la prostitution
Qu'est-ce que c'est que la prostitution c'est l'utilisation du corps d'une femme pour avoir
du sexe par un homme contre de l'argent.
Andrea Dwokin
Pourquoi il y a t-il une telle haine de la prostitution ?
La femme est poursuivie pour conduite sexuelle déviante.
Il y a pourtant beaucoup plus d'hommes clients.
En Thaïlande et au Cambodge des études montrent que c'est 60 à 75 pour cent des
hommes utilisent des prostituées. En Europe les chiffres varient de 10 pour cent en
Angleterre à 18 pour cent en Allemagne.
En Italie 17 pour cent, neuf millions d'hommes utilisaient 50.000 prostituées. on arrive à
180 hommes par prostituée.
En Irlande je dirais 50 au moins.
La prostitution est une industrie fortement dominée par les hommes.
S’il n'y avait pas autant de clients le business diminuerait et disparaîtrait.
Dans les bordels on s'arrange toujours pour que les hommes ne se croisent pas entre
eux. Qu’est-ce que ça signifie ? Ne pas être à l'aise d'être vu par d'autres ? Ne pas être à
l'aise par la vue des autres ?
Qu'est-ce qu'ils n'aiment pas ? Ce qu'ils voient d’eux-mêmes renvoyé par cette vue?
30
Puisque il y a tant d'hommes impliqués, il n'y a pas de raison de limiter la
prostitution à une question féminine.
Je crois que parce que l'acte de la prostitution est si aliénant aux êtres humains que ceuxci sont fascinés mais que cela est ignoré.
Dans quelle autre activité commerciale, le sexe du vendeur dit l'identité de genre de
l'Industrie ?
En se centrant exclusivement sur les femmes, ce qui disparaît est l'implication et la
responsabilité des hommes qui sont largement majoritaires dans l'existence de la
prostitution.
Certains mythes sur la prostitution ne sont absolument pas logiques, d'autres des nonsens.
J'affirme avec force qu'on ne peut pas traiter des femmes de cette façon dans cette
sphère, d'une manière dont on ne traiterait pas toutes les femmes, même si on
voulait le faire.
L'argument « on les paient pour les quitter », est l'une des nombreuses falcifications pour
rendre plus obscure la réalité du cash for sex, de l’échange argent contre sexe.
C'est un des nombreux arguments répétés par l'alliance pro-prostitution que les
prostituées ne vendent pas leur corps mais des services sexuels.
Ils ne nous expliquent pas quelles sont les compétences que ceci est supposé
contenir. Écarter les jambes, bouger les hanches pour le faire éjaculer? Toute
femme qui a eu une fois un rapport sexuel dans sa vie connait le job de base une
prostituée.
Quant à l’homme, il paye pour sa naïveté sexuelle.
Seules les dominatrices dans les exercices sadomasochistes ou quelques compétences
pour ces pratiques un peu particulières.
Il y a deux choses fausses :
Cela ne demande pas beaucoup de compétences pour faire venir un homme. Il en
faut beaucoup plus pour le stopper tout pour le faire venir.
31
Deuxièmement, les hommes ne sont pas intéressés par les supposés compétences
sexuelles, ils sont intéressés pour utiliser le corps de la femme et d'éjaculer dessus
ou dedans. Il n'y a pas de compétences dans tout cela.
Autre idée fausse commune : dire que les prostituées sont des mères déficientes ou
inférieures. Ce n'est pas vrai, à part les femmes droguées. Pour ma part j'ai éduqué mon
enfant éloigné de tout cela et vivant dans un environnement respectable.
Beaucoup de femmes étaient prostituées d'abord parce qu'elles étaient mères et
devaient subvenir financièrement au besoin de leur enfant.
Elles faisaient leur job de mère ainsi que leur job de prostituée et veillaient à bien séparer
ces deux univers, par exemple ne pas ramener de clients à la maison.
Une extrême minorité engagera sa fille dans la prostitution. Je n'ai connu qu'un cas
d'une personne qui était malade mentalement.
Autre idée fausse : que les personnes prostituées ne veulent pas s'intégrer dans la
société. C'est beaucoup plus une question d'incapacité. On leur reprocherait
facilement d'être feignantes et de ne pas vouloir travailler. En ce qui me concerne c'était
loin d'être le cas. On a tous tendance à poser des jugements négatifs sur les autres. C'est
un peu réducteur.
Je voulais un vrai job, je voulais une validation sociale, je voulais une place dans
la société, je voulais une sorte de normalité et de légitimité sociale, je me sentais
affamée de cela.
Voir page 199.
Les idées fausses sur la prostitution les plus fortes viennent des clients aux mêmes.
Il avait dépensé près de 20.000 euros auprès de prostituées. Il expliquait qui n'avait
aucune confiance avec les femmes. Bien entendu, en ne fréquentant que des
prostituées, sa confiance à continuer de se réduire.
Un client admis avoir passé un an avec des prostituées avec des dommages et des
bénéfices réciproques. Une femme lui dit un jour que heureusement qu'il était là car
elle pouvait payer son gaz facture. Il prit conscience des motivations de la
personne, car jusqu'ici il avait cru que toutes les filles qui se prostituaient le
faisaient de leur propre volonté.
Sa crainte la plus grande n'était pas d'attraper une maladie sexuellement transmissible
mais d'avoir un rapport avec une travailleuse du sexe qui ne voulait pas être
travailleuse du sexe.
32
Les conclusions sont que le monde n'est pas noir ou blanc que les hommes ne sont pas
honorables ou pervers. En tant qu'espèce humaine le besoin d’enfreindre est fort à
l'intérieur de nous c'est à nous d'être plus fort que lui.
Voir page 202
La distinction entre prostituées victimes de trafic et les autres prostituées ne tient
pas. On considère immoral l'exploitation de certaines femmes. Beaucoup de groupes de
Droits de l'homme acceptent cette distinction comme si c'était un fait : il y aurait celles qui
ont été trafiquées et celles qui auraient choisi ceci par manque de choix viable. D'un point
de vue moral il n'y a pas de distinction et oui c'est une question morale comme les
questions de droit de l'homme le sont toujours.
Les libertaires disent ce que nous devons retirer la prostitution de l'immoralité. Je
pense que nous devons vraiment penser à ce que cela signifie. Il faudrait retirer de
notre pensée que l'achat d'êtres humains pour du sexe n'est pas conforme avec des
normes acceptables de comportement humain.
Cela veut dire que nous devrions accepter environ 40 millions de femmes qui sont
consumées dans la prostitution au niveau mondial. Ce n'est non seulement intolérable
mais il faut le considérer en dehors des questions morales donc il n'y a pas de raison que
cela pose des problèmes.
L'idée selon laquelle nous devons retirer la prostitution de l'immoralité est une idée qui
dans son objectif cherche à nous rendre en tant qu'être humain ayant des
comportements inhumains. Et aussi d'accepter d'être traités comme inhumains et bien
sûr de refuser tout signe que cela nous ennuie.
Cela consiste à se retirer de soi-même c'est-à-dire se comporter exactement comme
la prostitution le demandait.
Les femmes dans la prostitution étaient caractérisées à tort d'immorales depuis des siècles.
Ajoutez à cela la fiction selon laquelle elles trouveraient la prostitution plus tolérable que
les femmes normales le feraient.
La vérité est que les femmes prostituées ne sont pas par nature immorales. Elles n'ont
pas connu une transition simple et sans difficulté vers l'autonomie. La décision de vendre
sa viande ne se prend jamais sans peine.
C’est la prostitution elle-même qui corrompt et les femmes qui sont abusées par elle
devraient non seulement porter le poids de cette corruption sur leur corps, mais sur leur
personnalité aussi. Ceci est faux et injuste car l'acte de se prostituer n'a rien à voir avec
la nature de la femme, il a à voir avec des circonstances.
Enfin un des arguments les plus ridicules des pro-prostitution est que c’est le seul secteur
où les femmes sont mieux payées que les hommes.
33
Nnn là, les femmes sont seulement payées comme instruments de masturbation.
Chapitre 20 : légalisation et décriminalisation
La prostitution est une forme extrême de discrimination de genre. La légalisation de
cette violence restreint la liberté et les droits des femmes. Si les femmes sont autorisées
à devenir un produit consommable légitime, elles sont réduites à un statut de
citoyens de seconde classe. La démocratie alors est trahie.
Donna Hugues
En Irlande il est illégal le faire fonctionner un bordel mais pas illégal de le fréquenter.
Certaines prostituées défendent la légalisation de l'activité ce qui d'après elles l'a
rendrait plus sûre. Cette notion est encore un autre mythe de la prostitution
particulièrement dangereux. Depuis la légalisation de la prostitution en Australie elle
a explosée.
Les statistiques de l'ONU évaluent à deux millions le nombre de personnes trafiqués dans
le monde pour l'exploitation sexuelle par an.
La légalisation de la prostitution en Australie dans l'Etat de Victoria a entraîné une
explosion du nombre de bordels avec une augmentation du crime organisé, des
trafics et de la corruption.
Loin d'être une protection, la légalisation de la prostitution facilite les trafics.
Les bords des autoroutes en Australie sont remplis de publicité sur les bordels.
Les femmes dans les entreprises travaillent dans une atmosphère où leurs
collègues masculins conduisent des meetings dans les bordels ce qui les met dans
une position où elles doivent choisir entre être exclues des clubs masculin ou
devoir supporter l'exploitation de leur genre.
La légalisation en Australie, en Allemagne, aux Pays Bas a normalisé la prostitution,
familiarisé l'opinion publique, tandis que les souffrances des femmes et des enfants se
sont développées dans le même temps.
Les arguments selon lesquels quand la prostitution est légalisée, il y a une éradication des
proxénètes ne sont pas vrais.
34
La Suède a mis en place une loi cohérente qui interdit la prostitution. La Norvège l’a
suivi et l'Irlande est le troisième pays en cours.
Quand la prostitution n’est pas combattue, elle se développe. Dans les pays où elle
est légalisée elle explose. L'exemple en Allemagne du Pacha, bordel de 12 étages
de neuf mille mètres carrés pouvant servir jusqu'à 1000 clients par jour en est
l'exemple. Lors d'une intervention de police 4 des 23 prostituées arrêtées avaient entre
14 et 15 ans.
Les effets de légalisation sur la prostitution sont clairement illustrés par les propos du
propriétaire du bordel de Berlin qui dit son droit de présenter la prostitution comme
un job aux femmes. « Pourquoi ne pourrais-je pas chercher des employées à travers
l’agence d'emploi, je paye les taxes de comme n'importe qui ? »
La nouvelle régulation en Allemagne revient à dire que travailler dans l'industrie du
sexe n'est plus immoral.
Un magistrat de Hambourg M. Garweg interroge les conséquences de cette
légalisation et du modèle de société auquel elle conduit : est-ce que c'est la société
dans lequel nous voulons que nos filles grandissent ? Est-ce que c'est une vue de
la femme que nous voulons promouvoir auprès de nos fils ?
Quand la question de la dissuasion de la demande est, soulevée les pro-prostitution
demandent que la société consulte aussi les femmes prostituées. il y a un problème
avec cela. Comme le signale une enquête suédoise la perspective des femmes sur
la criminalisation de la demande est totalement différente selon qu'elles sont encore
impliquées dans la prostitution ou si elles en sont sorties.
Voir page 214
Quand j'étais dans la prostitution, j'aurais été heureuse que mes clients soient
pénalisés, mais je me serais posée des questions concernant mes revenus et
comment cela allait affecter ma vie. Je ne suis donc pas surprise que beaucoup de
prostituées exerçant soit opposées à la pénalisation de leurs clients.
Cela force le client à accepter la réalité de son rôle d abuseur.
C'est une réalité que les clients rejettent, contestent, ignorent. Cela les force à
considérer que leur comportement n'est pas acceptable.
Même en étant dans le bain, je pense que j'aurais pensé que c'était la bonne chose
que devait faire le gouvernement.
Les lobbies pro prostitution ont tenté de démontrer que c'était pas juste et que cela
ne fonctionnait pas.
35
Malheureusement les résultats ne correspondent pas à leurs positions.
Les enquêtes suédoises révèlent que la prostitution a diminué depuis la mise en place de
cette loi de moitié pour la prostitution de rue.
La publicité pour la prostitution en ligne a augmenté dans les mêmes proportions
que les autres pays européens compte tenu du développement des technologies.
Ceci ne signifie pas que la prostitution de rue a été transférée sur Internet.
Comme résultats, les proxénètes et les trafiquants regardent maintenant la Suède comme
un lieu non propice pour leur trafic.
Les mêmes résultats ont été observés en Norvège.
Cela ne s'est pas passé de la même façon en Islande. Après la légalisation de la
prostitution les femmes ont refusé d'accepter la loi. Un mouvement clandestin Big
Sister s'est développé et à collecter les données des clients pour les transmettre à
la police.
Voir page 217
Une autre tactique utilisée par les promoteurs de la prostitution est de définir la
prostitution comme un droit humain.
Être violée n'est pas un droit humain, et tout groupe qui le demande n’a aucune
attention à la dignité et aux droits humains en tant que concept.
Défendre les droits humains d'une minorité est perçu positivement. Dans ce cas c'est une
manœuvre, considérant que la prostitution est une violence.
C'est une nouvelle démonstration que l'alliance pro prostitution tente de détourner
les droits humains et de les utiliser dans une tentative dans sa tentative de
normalisation de la prostitution
C'est une preuve supplémentaire que sa position est toxique.
Il faut se dire ou se souvenir qu'il n'y a rien d’immuable dans la prostitution. Ce n'est
pas n'est pas une caractéristique humaine. Elle ne peut pas être comparée à la peau
d'une personne ou à des attributs inaltérables. En fait, c'est une insulte à l'humanité
que de tenter de la comparer à cela.
La politique qui cherche à promouvoir la prostitution fondée sur des droits civils de
tout être humain à se prostituer n'est rien d'autre qu'une tentative de retirer toute
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barrière pour développer la prostitution. Ce n'est en aucun cas fondé sur les droits
humains des femmes prostituées.
Au contraire, le droit humain suppose un seul droit, le droit de pouvoir sortir la
prostitution
Les partisans de la prostitution ont une seule perspective, la normalisation de la
prostitution. Ils se cacheront derrière les raisonnements qui considèrent que c'est
bénéfique pour les personnes prostituées.
C'est frustrant et triste pour moi de savoir que des personnes qui à partir d idées
généreuses pour les personnes prostituées défendent des positions à partir
d’hypothèses fausses et que cela aura des conséquences mauvaises alors que
pensent qu'elles sont bonnes.
Voir page 218
Ceux qui défendent la légalisation sont quelquefois des proxénètes Mais très
souvent des clients.
Ils n'ont souvent pas de réelle compréhension des conséquences de la prostitution
sur la vie des femmes prostituées où ils s'en moquent quand ils réalisent que cette
connaissance mettrait en opposition leur plan.
Ils parlent des bénéfices pour les personnes prostituées n'ayant aucun fondement
pour le faire. Les seuls bénéfices qui les intéressent sont les leurs.
Sur le plan personnel, ma propre soeur pensait que la législation était la meilleure solution.
Quand elle a compris que c'était payer pour un viol elle n’a plus pas soutenue cela
car elle ne peut pas supporter un abus sexuel sous quelque forme que ce soit.
Aucune femme ne veut des mains sur elle, sur son corps, que ce soit pour un viol
avec paiement ou pas.
Il y a là ce qui doit être compris j'ai répondu aux arguments pro légalisation qui donnent
le sentiment de disparaître à la personne prostituée.
Quand la prostitution a été légalisée, pays après pays il y a eu un problème pour le lobby
prostitution. C'est le refus des femmes prostituées de s'engager dans une prostitution
légale. Il y a eu une croissance forte de prostitution illégale. Les femmes dans ces
pays refusent de s'enregistrer et travail en secret pour éviter d'être fichées comme
prostituées. Le lobby pro prostitution tente d'expliquer cela en expliquant que les femmes
refusent le stigmate de la prostituée.
Au Pays-Bas le syndicat des travailleurs du sexe s'est mobilisé pour protester contre la
demande d'enregistrement des travailleurs du sexe il considère comme dégradant et
stigmatisant.
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Ils contestent par ailleurs l'efficacité de cette mesure pour combattre la traite
Je comprends parfaitement la position de celles qui refusent d'être fichées.
Autre point à considérer : dans le cas de légalisation, les hommes sont absous de toute
responsabilité parce que c'est légal et nous avons alors assumé moralement qu'il est
parfaitement acceptable de payer pour utiliser le corps d'un autre pour une gratification
sexuelle. Etre prostituée est suffisamment humiliant, le légaliser renforce encore cette
humiliation
Chapitre 21 : la normalisation de la prostitution
Il n'y a rien de plus dur que de voir ce qui est faux considéré comme normal.
Jane Fonda
Pour que la prostitution soit normalisée, elle doit être rendue saine. Plusieurs
tactiques sont utilisées pour arriver à ça
La première a été la tentation de présenter la prostitution comme un travail ordinaire.
Les mots travailleurs du sexe et travail du sexe ne semblent pas naturels ceci parce
qu'ils suggèrent une relation entre deux notions qui ne vont pas ensembles.
La nature humaine ne met pas d'association entre le sexe et le travail.
Cependant cela ne choque pas d’avoir des mots prostitution ou prostituées qui font
référence à un imaginaire mental correspondant à une exploitation d’un échange sexuel.
La travailleuse du sexe imaginaire fait penser à une femme dans une situation saine.
Une masseuse une infirmière avec une blouse blanche avec une jupe bien plus
courte bien sûr.
Tout est propre dans l'imagination que cette terminologie suggère.
Mais quand on regarde précisément à ce qu’une travailleuse du sexe fait il y a un
problème:
La prostitution est la seule activité où la personne est à la fois fournisseur de
services et le produit en même temps.
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Chez McDonald's vous n'êtes pas la viande, dans la prostitution vous êtes aussi la
viande.
Le terme de travailleurs du sexe est une arme rhétorique de la normalisation de la
prostitution.
À son apparition, nous n'avons pas pensé que cela était fait pour glorifier les femmes dans
la prostitution, mais nous avons bien compris que c'était pour glorifier la prostitution
elle-même.
Les prostituées et les anciennes prostituées sont restées insensibles face à ces
manipulations. Pour elles, ce n’est pas plus important ce qu'un moustique sur un taureau.
Si la prostitution était un travail ordinaire nous devrions être capables d'en d'écrire
les compétences
Whisper une association de femmes survivantes. Elles ont listé les compétences
possibles :
 réaliser des actes sexuels
 feindre du plaisir
 supporter toutes les formes de viol du corps
 permettre que votre corps soit utilisé de n'importe quelle façon par une autre
personne là où les actes sont appelés du harcèlement ou de l'abus quand il n'y a
pas d'échange d’argent,
La prostitution est une réalité que l'industrie du sexe tente de cacher et que celles qui ont
la possibilité d'agir autrement ne choisirait pas.
La prostitution comme moyen de vie n'est pas recommandée comme une carrière à de
jeunes femmes
Elle n'est pas promu comme une option de carrière par les conseillers professionnels et
les parents.
L'expérience de travail dans les bordels n'est pas recommandée
Les personnes sans emploi ne sont pas obligés de travailler dans la prostitution
La réalité que l'industrie du sexe s’efforce de cacher est que ceux qui ont les possibilités
de faire autrement ne choisiraient pas cette activité comme moyen de vie.
A suivre.
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