dimensions. Comme si Dieu voulait préparer ainsi du neuf au sein de son humanité »,
écrit le P. Christoph Theobald, jésuite lui aussi, dans un numéro de Médiasèvres de
2007 sur la « Conscience du péché ». À oublier, donc, le principe de la « machine à
laver les péchés » ou l’idée selon laquelle par la confession, on remettrait les compteurs
à zéro, suggère le P. Grieu : « Car si on est dans cette perspective, on va manquer
l’essentiel, à savoir que le sacrement de réconciliation réactualise notre baptême,
ce cadeau fait une fois pour toutes qui nous rappelle que nous sommes déjà
sauvés par Dieu. » Autrement dit, Dieu ne bouge pas à l’égard du pécheur, il
continue de l’aimer sans jamais faillir. C’est le pécheur qui s’éloigne de Dieu
par le péché.
René, architecte, 44 ans, a parfaitement compris cet enseignement. Le voici qui sort
d’un des confessionnaux de Saint-Louis d’Antin, une église de Paris où ne cessent de
défiler chaque jour les fidèles: « Si je regarde la confession à la dimension vraiment
évangélique du Christ, alors il n’y a plus de raison d’avoir peur du regard du prêtre sur
moi. Le baptisé que je suis doit se mettre dans la condition de ne pas regarder son
humanité mais cette vie divine du Christ qui est en moi. Du coup, ça change tout. » Ici,
même le confessionnal a changé de forme. Il s’agit d’un petit salon privé où se déroule
la rencontre. Marie, 42 ans, vient d’en sortir à son tour : « La pénitence ? C’est juste un
mot un peu sévère. En fait, si je viens là à peu près une fois par mois, c’est pour trouver
une réponse à cette grande question que je me pose : qu’est-ce que le Seigneur
veut de moi ? Me reconnaître pécheresse m’aide à faire preuve d’humilité vraie, à ne
pas décider moi-même de la vie que je voudrais avoir, spirituelle, familiale, sociale,
mais à vivre selon sa volonté. »
Samantha, 21 ans, esthéticienne, est entrée pour la première fois ce jour-là dans un
confessionnal : « J’étais trop stressée, je ne me sentais pas bien, alors je suis venue là
avec deux copines. Un peu perplexe, apeurée, je suis quand même entrée. Quand on ne
sait plus à qui parler, on se tourne de tous les côtés. Au moins, ici, on n’est pas jugé.
On nous écoute et on peut se libérer, dire ce qu’on pense. Et là, je me sens
comme un oisillon qui commence à voler. Maintenant, je viendrai de temps en temps
mettre un cierge, faire un signe de croix, dire à Jésus que je pense à lui, des choses
comme ça… » À la « névrose » liée au sentiment de culpabilité dont parle Mgr André
Dupleix, secrétaire de la Commission épiscopale pour la pastorale liturgique et
sacramentelle, succède peu à peu le besoin d’une libération intérieure. Dans cette
perspective, indique-t-il, « faire pénitence, c’est revenir sur la voie tracée par le Christ,
celle qui sauve et où jamais la personne même la plus exclue n’est écrasée ».
Le P. François Blondel, 69 ans, confesseur au Sacré-Cœur de Montmartre, et qui a
une longue expérience en ce domaine, confirme le changement des mentalités : « On
pratique de moins en moins sa religion par conformité à une habitude sociale, mais de
plus en plus à partir d’une expérience personnelle de Dieu. » Le plus étonnant, dans
cette expérience, c’est qu’elle engage également le confesseur, qui cesse alors d’être le
« fonctionnaire du pardon » comme on pouvait le penser alors. Et le P. Blondel de se
livrer : « À travers ce ministère, le Seigneur m’a transformé et uni davantage à Lui : le
sacrement de réconciliation est un trésor de rencontre humaine et spirituelle
où le prêtre et le pénitent sont témoins l’un pour l’autre de l’amour de Dieu qui
nous sauve. »