Publié par : En cooperation avec : Ministère de l’Agriculture L’écosystème subéraie face au changement climatique Contexte En Tunisie, les écosystèmes forestiers du Nord sont déjà très fragilisés par une surexploitation séculaire et parfois anarchique des ressources. Le 4ème rapport du Groupement Intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) rapporte que le changement climatique va affecter directement les écosystèmes entrainant une diminution de la productivité, une augmentation de la fréquence des incendies et une augmentation du dépérissement. Ceci entrainerait une réduction des productions du bois, du liège, du fourrage et la dégradation de l’écosystème et les services qu’il fournie. L’écosystème subéraie dans la région des Kroumirie-Mogods n’est pas à l’abri. Les techniques d’aménagement, de conduite et d’exploitation du liège sont mise en œuvre d’une manière standard et ne prennent pas en considération la vulnérabilité des séries forestières au changement climatique. protection contre les inondations, contrôle de l’érosion des sols et la fertilité, pollinisation, lutte biologique. Services de soutien : Habitat pour les espèces, maintien de la diversité génétique. Services culturels et d’agrément : Recréation, qualité du paysage, cultures et traditions. Projections climatiques – Kroumiri-Mogods Modèle Climatique : HadCM3 Scénario B2 Horizon Augmentation de la Température (°C)* Baisse des précipitations (%)* 2020 0,6 -4% 2050 1,4 -10% Augmentation de la Température (°C)* Baisse des précipitations (%)* Scénario A2 Faits et chiffres clés La forêt de chêne liège (subéraie) occupe une superficie de 90.000 ha dans la région de Kroumirie-Mogods qui s’étend sur les gouvernorats de Jendouba, Béja et Bizerte (DGF, 2005). Elle fournit de nombreux services écosystèmiques : Services d’approvisionnement : Liège, fourrage, champignons, myrte, bois de feu, souches de bruyère, chasse, glands, escargots, miel, autres plantes aromatiques et médicinales. Services de régulation : protection des sols et des ressources en eau, purification de l’eau, séquestration du carbone, Horizon 2020 0,8 -6% 2050 1,8 -11% * : par rapport à la période de référence 1961-1990 L’analyse de la vulnérabilité face au changement climatique effectuée en 2011 a montré que les séries forestières très vulnérables de la subéraie ont une surface d’environ 41600 ha, avec un risque de perdre à l’horizon 2050 l’équivalent de 18500 ha en cas de non action selon le scénario A2 du GIEC (cf. tableau). En effet, la baisse de la disponibilité en eau entrainerait une diminution de la productivité, une augmentation de la fréquence des incendies et une augmentation du dépérissement. Ceci Vue d’ensemble sur un peuplement de chêne liège dans la région des Kroumirie-Mogods Arbres de chêne liège démasclés. Photo: © Ghazi Gader Peuplement de chêne liège clairsemé avec un maquis abondant, à la lisière des terrains agricoles. entrainerait une réduction des productions du liège, du fourrage et du bois et la dégradation de l’écosystème et par conséquent des services qu’il fourni. Les forestiers ont toujours adopté des techniques d’aménagement et d’exploitation standardisées à l’ensemble des séries de la subéraie sans tenir compte de leur état de vulnérabilité. Analyse de vulnérabilité de la subéraie face au changement climatique L’approche utilisée pour l’analyse de la vulnérabilité de l’écosystème subéraie face au changement climatique est une approche spatiale multifactorielle. Elle permet de définir la vulnérabilité actuelle et aux horizons 2020 et 2050 selon deux scenarii du changement climatique : B2 qualifié comme moyen et A2 qualifié comme sévère. Cette vulnérabilité est rapportée à la série forestière qui est l’unité d’aménagement de base appliquée par les gestionnaires forestiers (figure 1). L’analyse combine cinq (05) principaux facteurs ; à savoir : le stress hydrique, l’état de vieillissement des peuplements, la pression pastorale, les feux de forêts, les conditions biophysiques. L’évaluation économique des biens et services de l’écosystème considéré a été effectuée selon l’approche proposée par le Millenium Ecosystem Assessment -2005. Elle a permis dans un premier temps d’estimer la valeur économique totale de l’écosystème et d’évaluer dans un deuxième temps la valeur économique potentielle perdue sous l’effet des différents scénarios du changement climatique analysés. Résultats L’évaluation de cet écosystème selon les approches proposées a permis d’avoir les principaux résultats suivants : Le changement climatique est un facteur aggravant de la vulnérabilité de l’écosystème subéraie. Quel que soit le scénario climatique adopté, la subéraie souffrirait énormément de l’action anthropique et surtout des pâturages sous forêt. A l’horizon 2020, la subéraie devrait faire face à une surcharge pastorale sur 81% de sa superficie. Cette surcharge sera encore plus forte et plus étendue à l’horizon 2050. Sous l’effet du changement climatique, le chêne liège risque de migrer progressivement en altitude pour occuper des stations plus fraiches qui d’habitude sont colonisées par le chêne zeen (Quercus canariensis). Dans ces mêmes conditions, les unités à chêne liège occupant les étages les plus thermophiles évolueront vers des formations basses de maquis. La subéraie sera soumise à une recrudescence des feux des forêts et une apparition plus précoce des parasites et autres ravageurs. Les séries très vulnérables au changement climatique (extrêmes Nord et Sud de la subéraie) auront une surface de 41600 ha, avec un risque de perdre l’équivalent de 18500 ha en cas de non action en 2050 et selon le scénario A2. Les pertes économiques subies par l’écosystème subéraie seraient de 2,5 millions DT selon le scénario B2 et de 38 millions DT selon le scénario A2 sur la période 20102050 ; ceci correspond à une réduction de la valeur de la production cumulée 2010-2050 entre 0.4% et 5.6%. Il faut toutefois noter que ces estimations ne tiennent pas compte de l’accroissement des risques d’incendies, d’érosion Vieillissement Densité de Population Cheptel (UPB) Incendies 2 Seuillages Altitudes Seuillages Bois • 13% Ressources en eau • 18% Recommendations d’adaptation de la subéraie au changement climatique Appliquer une planification des interventions et leur zonage en fonction de la vulnérabilité des forêts au changement climatique. Clarifier les droits d’accès au pâturage et au prélèvement de bois de feu, et appliquer la règlementation en cas de dommages environnementaux causés. Faire participer les éleveurs dans l’amélioration fourragère et la gestion du pâturage : application des frais d’accès au pâturage pour les parcours améliorés. Année 2000 ETP Vulnérabilité au CC Seuillages Déficit Hydrique Intégration Réserve Utile Pondérations Facteurs Biophysiques Seuillages Intégration Intégration La grande marge d’incertitude sur les pertes en 2050, conduit à privilégier des solutions d’adaptation de non regret qui seraient peu coûteuses mais pourront avoir des impacts positifs à long terme. Emission du carbone • 27% Seuillages Températures Intégration Pluviométries Vieillissement Intégration Texture des sols Pondérations Profondeur des sols Pondérations Nature des sols Extrapolations Profondeurs des sols Seuillages Pentes Extrapolations Expositions Au-delà des chiffres, il convient de noter que les pertes de l’écosystème sont irréversibles en termes de biodiversité. L’importance des impacts directs et indirects du changement climatique sur les forêts de chêne liège, nécessite de prendre des mesures d’adaptation pour augmenter la résilience de l’écosystème et garantir sa durabilité et les services qu’il fourni aussi bien pour la population locale que pour l’état, la société et les autres secteurs. Figure 2 : Répartition des pertes économique dues au changement climatique Liège • 79% Figure 1: Schéma simplifié de la méthode spatiale multifactorielle et de l’impact social de la perte des bénéfices locaux de l’écosystème. Ces pertes sont composées principalement des valeurs du liège (29%), des émissions de carbone (27%), des ressources en eau (18%) et du bois (13%). En conséquence, les pertes sont subies en premier lieu par l’Etat, propriétaire des forêts, à hauteur de 37%, puis, par la communauté globale (28%), la société tunisienne en général (19%) et la population locale avec une proportion de 16%. Pression pastorale Incendies Effet du vent sur un arbre de chêne liège dans la région de Sidi Mechreg. Photo: © Ghazi Gader 3 Contact Direction Générale des Forêts [email protected] GIZ en Tunisie, [email protected] Références Sur le plan technique, trois propositions concrètes de mesures d’adaptation peuvent être mises en œuvre pour augmenter la résilience de l’écosystème subéraie face au changement climatique : standardisés et adaptés tel que préconisé par ladite stratégie. Par exemple, tenir compte des possibilités de diminution de la croissance des arbres due au changement climatique et réviser ainsi les rotations des coupes et des déliégeages. Accompagner la stratégie nationale de développement durable de la subéraie par une composante transversale qui visera essentiellement l’atténuation des coûts socioéconomiques et environnementaux des perturbations aggravées par le changement climatique et le maintien des valeurs sociales des systèmes écologiques et économiques actuels de la subéraie en préservant les économies liées au liège et les moyens de subsistance des populations qui en dépendent. Daly, H., Gader, G., Potthast, M. 2011 : Towards an economic assessment of ecosystem services under climate change : Cases of cork oak forest and alfagrass in Tunisia. Daly, H. 2013 : Economic valuation of forest goods and services, Migration assistée de la forêt de chêne liège vers la forêt de chêne zeen et transformation en Déhésa sur 3000 ha. Le système de gestion Déhésa consiste en une réduction de la densité des arbres (taux de recouvrement à 25%), et une amélioration pastorale. Maintien de la subéraie claire jusqu’à 25 % de couvert et son orientation vers un système type : « Déhésa » ou « Montado » sur 24000 ha. Evolution vers une pinède mixte de pin maritime à chêne liège où le chêne liège joue surtout un rôle de protection et d’amélioration des stations (taillis sous futaie de pin et de chêne liège) sur 15000 ha. Tunisia, http://browse.feedreader.com/c/TEEB_The_Economics_ of_Ecosystems_and_Biodiversity/410899984. Direction Générale des Forêts 2005 : Inventaire Forestier et Pastoral National, Minstère de l’Agriculture. Ministère de l’Agriculture et GTZ 2007 : Stratégie Nationale d’adaptation de l’Agriculture tunisienne et des écosystèmes au changement climatique. Ministère de l’Environnement et GIZ 2011 : Etude sur la vulnérabilité de la subéraie face au changement climatique. Pour le reste des subéraies , appliquer les règles de conduite sylvicoles et d’aménagement selon des systèmes Publié par Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) GmbH En coopération avec Ministère de l’Agriculture (Tunisie) Sur mandat du Ministère fédéral de la Coopération économique et du Développement (Allemagne) Projet « Appui à la mise en œuvre de la Convention Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique en Tunisie» B.P. 753, 1080 Tunis-Cédex, Tunisie T +216. 70 728 622 F +2016 70 728 417 www.giz.de Division Afrique du Nord, Politique de la méditerranée Adresses des Bureaux du BMZ BMZ Bonn Dahlmannstraße 4 53113 Bonn, Deutschland T +49 228 99 535 - 0 F +49 228 99 535 - 3500 Responsable Anselm Duchrow [email protected] www.bmz.de Texte Ghazi Gader Mise à jour Août 2013 Siège de la société : Bonn et Eschborn Impression/ Conception Kréa - 1002 Tunis Le contenu de la présente publication relève de la responsabilité de la GIZ. 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