Introduction
Le virusdel’hépatiteE(VHE) se distingue desautresvirus deshépatites
(A,B,CetDelta)par sa capacité àinfecter l’Homme et plusieurs
espèces animales dontleporc[1].Longtempsconsidérée comme une
maladieexotiqueimportéedes régions endémiques(Afrique, Asie,
Amérique Centrale), le nombreélevé de cas d’hépatiteviraleEsans
relation avec cesrégions aconduit àrevoircette notion et àdéfinir les
cas sporadiquesautochtones en régions nonendémiques(États-Unis,
Europe et Japon). Dans la plupartdeces cas autochtones, lessouches
isoléeschez l’Hommeetl’animalappartiennentaux mêmesgénotypes
(3 et 4) et possèdentdeforteshomologiesdeséquences, suggérant
quedes transmissions zoonotiques ontlieu. Jusqu’à récemment,ily
avaitencorepeu de données sur lesvoies de contaminations et sur
lesliens quiexisteraiententre cesdeuxréservoirs.
Réservoirs et transmission du VHE
Plusieursétudesont étéréaliséesafindecaractériser lesdifférents
réservoirsanimaux potentielsduVHE.Des enquêtes de sérologies ont
étémenéeschez desespèces animales très variées, allantduchatàla
mangouste ;des anticorpsanti-VHE,oucontreunagent très proche,
ontété mis en évidencechez lesporcs,les sangliers, lescervidés, les
lapins, lesrats, lesmangoustes, leschevaux,les chats, leschiens,les
moutons,les chèvresetles bovins (tableau1)[2]. Cependant,levirus
ou desséquences viralesont étéisolés uniquementchez lesporcs,
lessangliers, lescervidés, leslapins, lesratsainsi queles mangoustes,
confirmant qu’ils’agit d’espèces dans lesquelles il yaune multiplication
active du virus. De manière plus anecdotique, on peut noterlaprésence
de VHE chez leschevaux égyptiens,mais ce résultatresteàconfirmer.
L’étudedelaprévalenceduVHE dans lesélevages de porcs de nombreux
pays amontréque 30 à80%desanimaux présentent desanticorps
anti-VHE.EnFrance, 50 %des porcsenâge d’être abattussontpositifs
[3], confirmant égalementqu’il est iciunréservoir majeur du VHE.
Chez lesmammifères, lesquatregénotypes(1-4) du VHE peuventinfecter
l’Hommeetconduire àune hépatite aiguë, mais seulsles génotypes3et
4infectentl’animalqui resteasymptomatiquelaplupart du temps. Les
modèlesexpérimentaux développés chez le singe et le porc ontpermis de
montrer quedes souchesisoléeschez le porc (génotype 3ou4)peuvent
infecter lesprimates et quedes soucheshumaines (génotype 3ou4)
peuventinfecter le porc [2].Encequi concerne lesisolatsrécemment
caractérisés chez le lapinetlerat,les premièresdonnées de séquencene
permettent pasdeles classer formellementdans un desquatregénotypes
connus.Deplus, il n’yapas actuellementdedonnéessur leur transmission
éventuelleàl’Hommeouàd’autresespèces.Ilexisteégalementun
génotype aviaire, responsable d’hépato-splénomégalie chez le poulet.
Cettesoucheaviaire n’est pastransmissible au primateniauporc[4].
Transmissiondel’animal àl’Homme
Outrelaproximitéphylogénétiqueentre lessouches humaineset
animales, plusieursautreséléments sontenfaveur de l’origineanimale
de certains cas humains.Enparticulier, lespersonnesencontact
avec lesporcs domestiquesoulafaune sauvage(sangliers),comme
lesvétérinaires, leséleveurs, leschasseurs ou encoreles personnels
d’abattoir,ont uneséroprévalenceVHE significativementplusélevée
quelapopulation générale, suggérantque le contactdirect avec des
animauxinfectés est un facteur de risque de contracter le VHE [2].
Résumé
La particularité du virusdel’hépatiteE(VHE) estqu’il peut
infecter aussi bienl’Homme quel’animal.Des éléments
nouveaux, commelagrandeproximité génétiquedes
souchesprésentes chez l’Homme et l’animal,ainsi quedes
casconfirmés d’infection aprèsconsommation de denrées
contaminées, établissent qu’ilexistebienunrisquede
transmissions zoonotiques.Ces transmissions peuvent
survenir paringestion de viande infectée ou parcontact avec
le réservoiranimal.LaprésenceduVHE aété démontrée
dans lesdenréesalimentaires issues du porc, commele
foie.Demême,lafaune sauvage, tels queles sangliers et les
cerfs, représenteunréservoirimportantduVHE.Face àune
prévalence élevée du VHEdans lesélevages de porc et dans
la faune sauvage, une surveillancedeces réservoirs, ainsi
queledéveloppementdenouvelles techniques en procédés
alimentaires doiventêtreenvisagés.
Mots clés
HépatiteE,réservoiranimal,maladied’origine alimentaire,
zoonose
Abstract
Hepatitis E: newinsightonanimal reservoirs
Unlikeotherhepatitisviruses,HepatitisEvirus(HEV)can infect
both human and animals. Recentevidence, suchasthe genetic
proximity between human and animal strainsand casesof
infectionafter consumption of contaminated food,establish
therisk of zoonotictransmission. This transmissionmay occur
by ingestionofinfectedmeatorpossiblybydirectcontactwith
theanimal reservoir.Various studieshavedemonstratedthe
presenceofHEV in food product derived fromswine (liver).
Similarly wildlife,suchaswildboarsand deer,isanimportant
reservoir of HEV. Facing thehighprevalenceof HEVinpigfarms
and wildlife, aclose surveillance of thesereservoirs, as well as
thedevelopmentofnew techniquesinfood processing,must
be considered.
Keywords
Hepatitis E, animal reservoir,foodborne disease,zoonosis
Hépatite E
:nouvelles connaissancesdu
côté animal
Nicole Pavio (npavio@vet-alfort.fr),Aurélie Lunazzi, Elodie Barnaud, Jérôme Bouquet,Sophie Rogée
Agencenationale de sécuritésanitaire de l’alimentation,del’environnementetdutravail (Anses),Laboratoire de santéanimaledeMaisons-Alfort,
UMR1161Virologie,INRA-ENVA-Anses, Maisons-Alfort,France
Tableau 1. Réservoirs animauxpotentielsduvirus de l’hépatite E
Table1.Possibleanimal reservoirsofHepatitis Evirus
AnimauxPaysSéroprévalence %
Porc Monde 30-80
Sangliers Japon,France, Allemagne,
Italie, Espagne,Hongrie 5-42
Cervidés Japon,Hongrie 2,6
Lapin Chine57
Rat Inde, Brésil,USA 50-80
Mangouste Japon 8,3
Cheval Chine, Egypte 13-16,3
Chat Japon,Espagne11,1-33
ChienBrésil,Chine 7-17,8
Mouton Chine, Espagne 1,9
Chèvre Chine, Espagne 0,6-24
BovinBrésil,Chine,Inde1,42-6,9
Poulet USA, Australie, Hongrie 20-30
CanardChine 12,8
22 Bulletin épidémiologiqueN
o38/Spécial zoonoses