Hémoptysie Jean-Charles GLERANT Exploration fonctionnelle respiratoire, Hôpital Louis Pradel, Université Claude Bernard Lyon 1 1. DEFINITION L’hémoptysie correspond à une expectoration de sang rouge vif, aéré, spumeux provenant des voies respiratoires sous-glottiques suite à une toux. Les diagnostics différentiels de l’hémoptysie sont : l’hématémèse correspondant au rejet de sang d'origine digestive par la bouche; l’épistaxis correspondant à un saignement d’origine nasale; un saignement pharyngé, laryngé, lingual ou une gingivorragie. 2. MECANISMES L’hémoptysie peut être liée à : soit un saignement provenant de la circulation bronchique à haute pression, soit un saignement provenant de la circulation pulmonaire à basse pression. Le passage de sang est lié soit à une atteinte de la membrane alvéolo-capillaire (pathologie infectieuse ou maladie de système) soit à une hyperpression capillaire (insuffisance cardiaque gauche). Concernant les mécanismes physiopathologiques, l’hémoptysie peut survenir sur un thorax normal ou être liée soit à une atteinte du compartiment aérien (tumeur hilaire) ou vasculaire (anévrysme, fistule), soit à une atteinte des deux compartiments liée à une hypervascularisation systémique bronchique ou non bronchique au niveau des bronches distales (dilatations des bronches par exemple). 3. DESCRIPTION L’hémoptysie peut être caractérisée par son abondance : minime à faible abondance (< 50 cc), moyenne abondance (50 à 200 cc), grave (soit en une seule fois > 200ml, soit fractionnée > 500ml en 24 heures). L’hémoptysie grave peut s’accompagner de signes de choc hémodynamique et/ou de signes de détresse respiratoire aiguë. Enfin, l’hémoptysie peut être foudroyante avec mise en jeu immédiat du pronostic vital. L’hémoptysie de moyenne abondance reste la plus fréquente. Elle peut être précédée de prodromes comme un malaise vague, une angoisse, une sensation d’oppression. Initialement, peut être décrit un picotement laryngé ou une chaleur rétro-sternale ou une saveur métallique dans la bouche. Puis survient l’hémoptysie accompagnée d’une pâleur et d’une tachycardie. L’état hémodynamique reste stable. Cet épisode peut être unique ou répétitif puis sera suivie de crachats de sang de plus en plus foncés voire noirâtres les jours suivants correspondant à la queue de l’hémoptysie. Référentiel sémiologie - Collège des Enseignants de Pneumologie 2009 page 1/3 4. DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL L’hémoptysie est un rejet par la bouche de sang en provenance des voies aériennes sous-glottiques. Il convient de la distinguer de ce qui n’est pas une hémoptysie, à savoir un saignement de la sphère ORL, stomatologique ou digestive haute. Un certain nombre d’éléments séméiologiques permet de répondre à la question : Hémoptysie ATCD respiratoires émis lors d’un effort de toux le sang est rouge vif, sauf en fin d’hémoptysie aéré et spumeux (mousseux) Pièges : une hématémèse ou une épistaxis abondant peuvent être inhalés et parfois en imposer à tort pour une hémoptysie. En cas de doute, l’exploration de la sphère ORL, stomatologique et digestive s’impose 5. Hématémèse ATCD digestifs émis lors d’un effort de vomissement le sang est foncé, d’origine veineuse (varices oesophagiennes) non aéré accompagné de débris alimentaires Epistaxis saignement nasal sang rouge vif ORIENTATION DIAGNOSTIQUE Concernant le diagnostic étiologique, il conviendra de tenir compte de l’âge, la notion de tabagisme, la durée de l’hémoptysie, les antécédents médico-chirurgicaux du patient. Les causes les plus fréquentes sont d’origine : - respiratoire : un cancer bronchique, une tuberculose pulmonaire, des dilatations des bronches, une cause infectieuse (bronchite aiguë, pneumopathie aigue, leptospirose, aspergillome ou aspergillose invasive ou semi-invasive, mycobactériose atypique). Plus rarement peuvent être diagnostiqués une tumeur bénigne bronchique, une maladie de système à localisation pulmonaire (sarcoïdose, hémorragie intra-alvéolaire, amylose), une endométriose broncho-pulmonaire, une pneumoconiose (silicose), - cardiaque : insuffisance cardiaque gauche, rétrécissement mitral, cardiopathie congénitale, - vasculaire : embolie pulmonaire, rupture d’un anévrysme artério-veineux ou fistules artério-veineuses isolées ou multiples (maladie de Rendu-Osler), hypertension artérielle primitive, anévrysme de l’aorte thoracique fissuré dans une bronche, séquestration pulmonaire, - troubles de l’hémostase : traitement anticoagulant, troubles de l’hémostase liés à une hémopathie, - iatrogène : traumatisme thoracique responsable d’une plaie pulmonaire (fracture de côtes) ou contusion pulmonaire, gestes médicaux (biopsies bronchiques lors d’une fibroscopie bronchique, ponction pleurale, biopsie pleurale), - corps étranger intra-bronchique, - idiopathique : 15 % des cas. La prise en charge diagnostique inclut la réalisation d’une radiographie thoracique, d’une fibroscopie bronchique et d’une tomodensitométrie thoracique. La figure 1 rapporte la conduite à tenir diagnostique en fonction de l’importance de l’hémoptysie. Référentiel sémiologie - Collège des Enseignants de Pneumologie 2009 page 2/3 HEMOPTYSIE Grave ou si mal supportée quelle que soit l’abondance Minime ou modérée Interrogatoire Examen clinique Radiographie thoracique Si possible : Fibroscopie bronchique TDM thoracique Traitement d’urgence Médicamenteux Embolisation Orientation diagnostique ? Fibroscopie bronchique TDM thoracique ue Localisation de l’hémoptysie Diagnostic étiologique Décision thérapeutique * médicale * chirurgicale * radiologie interventionnelle (embolisation bronchique, vaso-occlusion artérielle pulmonaire) REFERENCES 1. MASSIN F., JEANNIN L. Hémoptysie. Dans « Pneumologie » par Aubier M., Fournier M, Pariente R. Editions Médecine Sciences – Flammarion. Chapitre 33, pages 297-300. 2. HUCHON G. Investigations pneumologiques. Sémiologie clinique. Dans « Pneumologie pour le praticien » par HUCHON G. Editions MASSON. Pages 49-50. 3. CARETTE M. F., KHALIL A., PARROT A. Hémoptysies : principales étiologies et conduite à tenir. Encycl Méd Chir, Pneumologie, 6-090-A-10, 2004, 21 p. Référentiel sémiologie - Collège des Enseignants de Pneumologie 2009 page 3/3