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industrialisées de l'Ouest. La France tend ainsi à
devenir une grande nation industrielle.
• L’essor du secteur tertiaire. Comme dans les autres
grands pays occidentaux, les services se développent,
en réponse à la demande des ménages et des entre-
prises. Conséquence du baby-boom, l'État recrute
des enseignants (le nombre des professeurs du
secondaire est multiplié par 3 entre 1960 et 1970) et
des personnels hospitaliers (+ 60% entre 1968 et 1975)
pour faire face aux besoins d'éducation et de santé.
Les secteurs du commerce, du transport, du
tourisme, des banques et des assurances recrutent
en masse. En 1972, la moitié des actifs travaillent
dans le secteur tertiaire.
2. Les facteurs d'une croissance exceptionnelle
• La forte hausse de la consommation. Entre 1958 et
1973, la population française passe de 45 à 52
millions, soit une augmentation annuelle moyenne de
plus de 400000 personnes, dont 300000 environ du
fait de l'excédent naturel. Le solde migratoire est
lui aussi largement positif, avec un pic en 1962,
année du retour en métropole de près d'un million
de Français d'Algérie. Le rajeunissement de la
population dynamise la demande intérieure et
contribue à l'évolution des mentalités. Les ménages
français adoptent de nouveaux modes de
consommation (Production et consommation de
masse. Jacques Attali, doc. 10 p.273), encouragés
par l'achat à crédit d'appareils électroménagers, de
téléviseurs et d'automobiles. Ils s'équipent en
logements neufs, pourvus du confort moderne. Cet
essor de la consommation des ménages, dans un
climat de confiance en l'avenir, stimule les
investissements des entreprises. Celles-ci réorganisent
leur production en s'inspirant des méthodes
américaines et renouvellent leurs équipements afin
de répondre à l'expansion de la demande
intérieure. Enfin, les investissements de l'État et des
collectivités publiques en autoroutes, bâtiments
scolaires, hôpitaux et logements sociaux, contribuent
eux aussi, significativement, à cette expansion.
• L’État joue un rôle essentiel dans l'économie
nationale. Depuis les nationalisations de la Libération,
un modèle économique français s'est mis en place,
fondé sur l'économie de marché et sur l'intervention
de l'État. Les gouvernements de la Ve République
conduisent de façon volontariste des politiques
structurelles, orientant à long terme l'économie
nationale, et soutiennent l'expansion par des
politiques conjoncturelles d'inspiration keynésienne,
c'est-à-dire utilisant la monnaie et le budget pour
garantir croissance et plein emploi. Mais ils doivent
également surveiller l'évolution des prix, pour éviter
tout dérapage inflationniste et préserver la valeur du
franc. C'est ainsi qu'entre 1963 et 1965, le plan de
stabilisation limite l'inflation, mais freine la croissance.
• L’ouverture sur les marchés extérieurs.
L'étroitesse relative du marché national risque
d'entraver l'essor de la production française qui
perd, avec les colonies, d'importants débouchés
traditionnels à l'exportation. Il faut donc conquérir de
nouveaux marchés et l'Europe, à cet égard, promet
beaucoup. De Gaulle en est conscient et accepte
d'appliquer, pour le 1er janvier 1959, les premières
baisses tarifaires prévues en mars 1957 par le traité de
Rome.
La France rompt avec la tradition protectionniste. Ses
entreprises s'insèrent dans le réseau des échanges
internationaux, au risque d'y affronter une concurrence
rude, souvent plus habituée et mieux adaptée aux
offensives commerciales.
3. Les limites de la croissance
• L'inflation, un mal français. Une inflation
rampante (autour de 5 % par an) accompagne les
Trente Glorieuses. Certes, elle allège les frais financiers
liés aux investissements des entreprises, aux dettes
des ménages et à celles de l'État, ce qu'apprécie une
France jeune et ambitieuse. Mais la valeur du franc
est érodée. Épargnants, créanciers et rentiers voient
fondre leurs fortunes. Les revendications salariales sont
récurrentes, et l'inflation handicape les produits
français à l'exportation. Néanmoins, dans l'élan de
l'époque, elle semble perçue comme un « moindre
mal ».
• La modernisation rapide fait des victimes. C'est
en 1963 qu'est ouvert, à Sainte-Geneviève-des-Bois,
le premier hypermarché Carrefour ( doc. 19 p.277),
suscitant l'inquiétude des commerçants. Leur
angoisse fait écho à celle des agriculteurs, qui
voient se multiplier les fermetures d'exploitations
familiales et s'amplifier l'exode rural, et à la colère
des mineurs de charbon, mobilisés pour une longue
grève durant l'hiver 1962-1963 : les importations
(pétrole du Moyen-Orient) concurrencent et menacent
en effet de plus en plus les productions nationales
(charbon du Massif central, du Nord et de la
Lorraine).
• La croissance s'atténue au milieu des années
1960. C'est la fin du baby-boom : l'indice de
fécondité chute de 3 à 2,4 enfants par femme entre
1950 et 1970. La demande des ménages, désormais
pourvus en appareils ménagers et en automobiles,
diminue. Pressées par les revendications salariales et
les frais financiers, les entreprises voient leurs
profits se réduire et peinent à s'autofinancer. La
question de l'emploi se pose dès 1967 (« une
orientatrice pour l’emploi dans une ANPE, années
70 » doc. 12 p.274), liée en particulier à l'arrivée
des générations du baby-boom sur le marché du
travail et à la hausse du taux d'activité des femmes.
Or l'industrie, en quête de productivité, réduit
progressivement ses effectifs de personnels non
qualifiés. L'ANPE est créée la même année.