les a rassemblés, c’est à dire qu’on se soit dit : tiens au fond, ça veut dire un peu la même
chose, ou en tout cas, entre les deux la conséquence est bonne, signifie un véritable problème,
qu’il s’agira ni de poser, ni de contourner, mais de TRAVERSER.
Si je réussis, au cours de cette année, quand vous entendrez, pris sur un mode quasi
synonyme, théorie de la connaissance et pensée sur les sciences - ou épistémologie, un des
autres mots pour ça est épistémologie, et personnellement quand je suis entrée en philo après
avoir fait de la chimie, c’était le premier mot que je n’avais pas compris : épistémologie.
C’était mon destin, mais je ne l’accepte toujours pas. Donc quand vous entendrez une
conséquence trop directe entre ‘qu’en est-il de la connaissance ?’ et ‘philosophie des
sciences’, vous aurez la puce à l’oreille, et vous direz : tiens ben voilà encore un exemple de
ce qu’Isabelle Stengers tente de mettre en cause. Mettre en cause, ça signifie plus que
critiquer, ça veut dire : mettre en CAUSE de penser. Fabriquer une cause qui vous fait penser.
Ca, c’est une des idiosyncrasies que j’introduirai. J’aime bien employer le mot ‘cause’, non
pas comme en physique : relation de cause à effet, comme une boule de billard, la cause étant
le mouvement d’une boule qui … l’autre, qui prend comme effet du choc une certaine vitesse.
Ca c’est une relation de cause à effet. Mais n’oubliez pas qu’en français, faire de la
philosophie c’est souvent profiter du génie d’une langue, qui dit des choses plus compliquées
que ce qu’on en retient. Ben le mot ‘cause’ peut aussi être employé au sens : cela me FAIT
penser. Et à ce moment-là votre pensée n’est pas l’effet. On pourrait dire que la cause a un –
j’aime bien le mot aussi – ‘efficace’, au sens où ça SUSCITE votre pensée. Mais ce n’est pas
de l’ordre de la ressemblance, il n’y a pas d’homogénéité. Donc j’espère que mon cours sera
pour vous une CAUSE de pensée, au sens non pas que vous pensez comme moi, mais que
vous pensez sur votre mode à cause de moi. Vous voyez ? Ca veut dire que je vous aurais
donné matière à penser, et appétit à penser autrement.
Et donc je peux vous donner appétit à penser CONTRE la normalité de la relation entre
théorie de la connaissance et philosophie des sciences. Qu’est-ce que c’est que cette
normalité ? Que signifie cette normalité ? Elle signifie en gros que, pour beaucoup de
philosophes, et même pour beaucoup de non philosophes – et alors c’est une habitude de
pensée, que lorsque certains philosophes l’acceptent, c’est un thème de pensée, mais pour
beaucoup, c’est simplement une habitude de pensée. Eh bien, le succès des sciences dites
modernes – donc ça veut dire : dites apparaissant quelque part au début du XVIIe siècle,
Galilée associé à la fondation de la science moderne, j’en ai parlé en candis, j’y reviendrai un
tout petit peu (Galilée initie une nouvelle science) – traduirait que, enfin, l’homme (parce que
quand on parle de la connaissance, l’homme n’est pas loin), la femme, l’humain a découvert
(un peu tard, il est vrai, puisqu’il avait déjà quelques milliers d’années d’expérience derrière
lui, mais tout de même, finalement) au XVIIe siecle ce qu’il en était de la connaissance enfin
rationnelle. Il a ENFIN réussi à démêler le mélange terrible de superstitions, d’opinions, de
passions, et de savoir, où il était enfermé. Et donc la réussite des sciences nous dit – et c’est
seul aux philosophes d’ENTENDRE ce discours; les scientifiques TRAVAILLENT, les
scientifiques sont enfin dans la bonne voie, c’est eux qui le font. Les philosophes regardent les
scientifiques travailler, et doivent dégager (c’est ça l’épistémologie, en la caricaturant) la
morale de ce travail, c'est-à-dire en quoi ces sciences qui progressent nous disent quelque
chose d’une connaissance enfin rationnelle. Et donc entre philosophie des sciences ou
réflexion sur les sciences, et théorie de la connaissance, la conséquence est bonne, elle est …
immédiate.
C’est une position qui peut être illustrée directement : pe vous avez rencontré certainement
aux candidatures Immanuel Kant. Bon ce qu’il appelle la ‘révolution copernicienne’ dans la
préface de la 2e édition de la CRP : il cite des scientifiques modernes. Il y a Galilée et ses
boules, il y a Stahl, chimiste (bon, Kant est allemand, s’il aurait été français il aurait dit