LCR Formation 72
Travail et politiques
d'immigration
La France se prépare à la relance d'une politique d'immigration légale. Une partie du patronat, PME, est favorable à l'emploi d'une
main d'oeuvre étrangère. Grâce au regroupement familial, les emplois types, comme les aides familiales ou le travail de femmes de chambres dans
les hôtels que les autres refusent, ont trouvé preneurs. Le patronat a besoin de travailleurs saisonniers (+31 %) et de manoeuvres pour les travaux
les plus durs comme dans le bâtiment.
D'autre part en 2002, des circulaires émanant des ministères de l'Emploi et de l'intérieur prennent acte de la demande de main d'oeuvre qualifiée : »
pour demeurer compétitif dans le contexte de mondialisation et de concurrence exacerbée, les Entreprises doivent pouvoir recruter des étrangers
présentant pour elles un intérêt technologique et commercial elles envisagent un assouplissement des modalités de séjour. Sont bien venus, les
étudiants étrangers en fin de parcours et les techniciens hautement qualifiés.
La législation, depuis l'ordonnance de 45, a cherché à lier la politique d'immigration aux besoins de main d'oeuvre du système capitaliste. Après-
guerre, la très forte demande de main d'oeuvre au service de la reconstruction économique permet l'arrivée massive de migrants sur le sol français.
Certaines grandes firmes recrutent directement dans le pays d'origine (colonies ou anciennes colonies). Dans ce contexte, obtenir un titre de séjour
posait peu de problème.
La publication de la circulaire Marcelin Fontanet en 1972 marque la fin de la croissance et de l'ouverture des frontières. Elle fera plonger 85 % de
travailleurs étrangers dans l'illégalité. Sous prétexte d'éradiquer le travail clandestin, elle fixe des critères de régularisation très stricts. : contrat de
travail, attestation de logement, elle instaure primauté des nationaux pour l'emploi (ANPE).
L'histoire de l'organisation des travailleurs en situation irrégulière en vue d'obtenir un titre de séjour va être rude (expulsions, arrestations, blessures,
séparation)
De plus, le patronat, va en profiter pour renforcer sa conception utilisatrice de l'immigration du travail, en abaissant encore plus le coût du travail et
en augmentant la flexibilité.
Deux façons d'exploiter les étrangers au travail vont se côtoyer : le travail légal sans égalité des droits et le travail illégal sans les droits sociaux qui
sont attachés à l'emploi. Au fur et à mesure des régularisations interviennent. Un petit nombre constant de sans papiers rejoignent les titulaires d'un
titre de séjour et par là deviennent des candidats légaux au travail, mais les inégalités de traitements demeurent. Entre autres, des discriminations
légales excluent les étrangers non-communautaires des emplois de service
public. Mais, ces emplois ne leur sont pas interdits puisque l'embauche va se faire hors statut, par exemple : les maîtres auxiliaires dans l'éducation
nationale, les médecins hospitaliers et les entreprises de sous-traitances qui emploient des étrangers pour EDF dans les centrales, pour la SNCF à
la construction des voies, pour la Poste au tri...Sans statut, ce sont des emplois précaires, mal payés, avec horaires élastiques et mauvaises
conditions de travail.
On peut constater qu'il n'y a pas besoin de papiers pour travailler, puisque l'offre de travail non déclaré est abondante. C'est à ce niveau que, du
point de vue du capitalisme, le rôle de l'immigration est important. Rendre l'immigration illégale lui a permis d'organiser une frange de travailleurs
super flexibles.. Dans ce sens, l'immigration illégale peut être considérée comme utile et bénéfique pour les entreprises. Elle permet de créer des
entreprises de sous-traitance, qui se développent massivement, grâce au volant de main d'oeuvre illégalé.
Cette offre de travail illégal rend l'exploitation des sans-papiers profitable au maximum et les expulsions réalisées tous les ans, créent un climat
d'insécurité qui renforce les possibilités d'exploitation, permettant : des salaires très faibles, une durée du travail sans limites, l'absence du paiement
des charges sociales de la part des employeurs ce qui entraîne la suppression des droits afférents à l'emploi, (Sécurité Sociale, retraite, allocations
chômage, couverture des accidents du travail...), des licenciements abusifs, sans possibilité de recours.
Cette situation dramatique, crée un climat de peur et de vulnérabilité accrue par crainte de la délation et des expulsions. L'absence totale de règles
de la part des employeurs est une des caractéristiques du travail des sans papiers. Rendre I'immigration illégale en refusant les régularisations
permet d'organiser précarisation et flexibilité, et contribue à les ériger en norme. Le système libéral trouve ainsi son compte en accroissant
considérablement ses profits.
Les sans-papiers font partie de la classe ouvrière la plus exploitée, taillable et corvéable à merci, sans aucune garantie. En acceptant qu'existe une
catégorie de salariés surexploités, on laisse tirer le droit par le bas. Ces manquements au droit représentent une menace pour les travailleurs dans
leur ensemble, et sont utilisés comme un moyen de pression par les employeurs sur l'ensemble des travailleurs.
La lutte des femmes de ménage des hôtels Accor est exemplaire à ce titre. Ces femmes font un travail d'esclave, qui n’a pu se perpétrer que grâce
au volant de sans-papieres utilisé par l'employeur, travaille et tais toi. Elles mènent un mouvement revendicatif depuis plusieurs mois, avec toutes
les difficultes relatives au fait d'être femmes et immigrées.
Le poids de l'existence du travail non réglementé des sans droits n'est pas sans répercutions sur le travail des salarié; il contribue à faire reculer le
contenu des garanties collectives.
C'est pour toutes ces raisons, et pour l'intégration de la lutte des sans papiers dans les luttes des salariés, qu'une campagne autour de l'exploitation
liée au travail non déclaré trouverait toute sa place dans les batailles à venir.
La mondialisation des mouvements de capitaux et des échanges s'accompagne d'une limitation de mouvement des personnes, et de la
précarisation constante des conditions d'existence des immigrants.