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Denis Le Pesant
M 1 Éducation et formation
Cours Magistral de syntaxe
Semestre 1 de 2011-2012
CHAPITRE 1
Catégories de base en syntaxe
1.1 Deux sortes de verbes : les verbes auxiliaires et les verbes prédicatifs
1.1.1 Les verbes auxiliaires : auxiliaires de conjugaison (être, avoir), auxiliaires aspectuels
(ex. commencer à), auxiliaires modaux (ex. pouvoir, devoir).
Leur propriété : ils n’ont pas de sujet ni de complément(s) essentiel(s). Soit par exemple :
(1) Pierre est sorti hier soir
(2) Pierre aura gagné beaucoup d’argent cet été
(3) Beaucoup d’argent aura été gagné par Pierre cet été
Dans la phrase (1), le nom propre Pierre n’est pas le sujet du verbe être, mais celui du verbe
sortir (au passé composé de l’indicatif). Dans la phrase (2), le nom propre Pierre n’est pas le
sujet du verbe avoir, mais celui du verbe gagner (au futur antérieur de l’indicatif actif). Dans
la phrase (3), le Groupe Nominal « beaucoup d’argent » n’est pas le sujet du verbe avoir,
mais celui du verbe gagner (au futur antérieur de l’indicatif passif).
Les verbes être et avoir sont en effet, dans ces phrases, des auxiliaires de conjugaison. On
traitera plus tard des autres sortes d’auxiliaires.
1.1.2 Les verbes dits prédicatifs
Ce sont de ces verbes qu’on va parler pendant la plus grande partie des séances du
Semestre 1.
Leur propriété est la suivante : ils ont un sujet et d’éventuels compléments essentiels, qui sont
majoritairement le complément d’objet direct (COD) et le complément d’objet indirect (COI).
Dans la phrase (1), le nom propre Pierre est le sujet du verbe sortir (au passé composé de
l’indicatif).
Dans la phrase (2), le nom propre Pierre est le sujet du verbe gagner. Le Groupe Nominal
« beaucoup d’argent » est le complément d’objet direct du verbe gagner.
Dans la phrase (3), le Groupe Nominal « beaucoup d’argent » est le sujet du verbe à la voix
passive gagner. Le nom propre Pierre, régi par la préposition par, est le complément d’agent
du verbe à la voix passive gagner.
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1.2 Notions de sujet et de complément essentiel
Le sujet et les compléments essentiels sont les éléments dont le verbe (prédicatif) « a besoin »
pour faire en sorte qu’on obtienne une phrase, c’est-à-dire un énoncé grammatical et ayant un
sens. Par exemple, si on supprime les compléments essentiels dans les phrases (2) et (3), on
obtient les structures agrammaticales ou non signifiantes suivantes :
* Pierre aura gagné cet été
* Beaucoup d’argent aura été gagné cet été
Les types les plus connus et le plus répandus de compléments essentiels sont les Complément
d’objet direct (COD) et les complément d’objet indirect (COI). Ces derniers (les COI) sont
ceux qui sont régis par une préposition.
On verra ultérieurement que les compléments essentiels de certains verbes peuvent être sous-
entendus, mais dans des conditions particulières.
1.3 Notion d’ajout
Les ajouts feront l’objet du CM de syntaxe du Semestre 2. Mais il est nécessaire que vous
soyez capables de les reconnaître à coup sûr dès maintenant.
En plus du verbe prédicatif, de son sujet et de ses éventuels compléments d’objet (COD ou
COI), il y a souvent dans les phrases des éléments qui ne sont ni le sujet, ni le(s)
complément(s) essentiel(s). Ce sont les ajouts.
En général, ils peuvent être supprimés sans que le sens général de la phrase soit modifié ; de
plus, ils sont le plus souvent mobiles dans la phrase. Dans les phrases (1) et (2), l’adverbe hier
soir et le Groupe Nominal cet été sont des ajouts, puisqu’ils sont très mobiles :
Pierre est sorti hier soir = Pierre, hier soir, est sorti = Hier soir, Pierre est sorti
Pierre aura gagné beaucoup d’argent cet été = Pierre aura gagné, cet été, beaucoup
d’argent = Pierre aura, cet été, gagné beaucoup d’argent = Pierre, cet été aura gagné
beaucoup d’argent = Cet été, Pierre aura gagné beaucoup d’argent
De plus, ils peuvent être supprimés sans que le reste de la phrase devienne agrammatical
Pierre est sorti
Pierre aura gagné beaucoup d’argent
Beaucoup d’argent aura été gagné par Pierre
1.4 Notion de structure élémentaire de la phrase
On appellera structure élémentaire de la phrase, la structure composée du verbe (prédicatif),
de son sujet et de ses éventuels compléments essentiels. Autrement dit, la structure
élémentaire, c’est la phrase sans les ajouts.
1.5 Nature et fonction
Les termes employés ci-dessus appartiennent à deux catégories différentes : la nature et la
fonction.
Les termes de sujet, complément essentiel (COD, COI, complément d’agent par exemple) et
d’ajout (compléments circonstanciels par exemple) désignent des fonctions syntaxiques.
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Les termes de Nom (propre, commun), pronom, Groupe Nominal (GN), adverbe désignent les
entités qui sont porteuses d’une fonction. On parle de la nature d’un élément ayant telle ou
telle fonction. Soit par exemple la phrase (4) :
(4) (cf. (3)) Beaucoup d’argent aura été gagné par Pierre
On analysera « beaucoup d’argent » de la façon suivante :
Nature : Groupe Nominal
Fonction : Sujet du verbe gagner (à la voix passive)
On analysera « Pierre » de la façon suivante :
Nature : Nom propre
Fonction : Complément d’agent régi par la préposition par
1.6 Phrase et proposition subordonnée
Une phrase peut être emboîtée (on dit aussi « enchâssée ») à l’intérieur d’une phrase ou d’un
Groupe Nominal. C’est le cas dans (5)a :
(5)a Marie croit que Pierre reviendra
la phrase « Pierre reviendra » est emboîtée à l’intérieur de la phrase « Marie croit que
Pierre reviendra », dont voici l’analyse schématique :
(5)b [ Marie croit que [Pierre reviendra]Proposition ]Phrase
On appelle proposition (subordonnée) toute phrase qui est emboîtée (enchâssée) à l’intérieur
d’une phrase ou d’une autre proposition.
Soit maintenant la phrase (6)a :
(6)a Marie m’a dit qu’elle croit que Pierre reviendra
Dans (6), la proposition « Pierre reviendra » est emboîtée (enchâssée) à l’intérieur de la
proposition « elle croit que Pierre reviendra ». Cette même proposition « elle croit que Pierre
reviendra » est elle-même emboîtée (enchâssée) à l’intérieur de la phrase tout entière « Marie
m’a dit qu’elle croit que Pierre reviendra », dont voici l’analyse schématique (incomplète) :
(6)b [ Marie m’a dit qu’[elle croit [que Pierre reviendra]Proposition ]Proposition ]Phrase
Dernier exemple. Soit la phrase (7).
(7)a J’ai croisé un homme qui courait
La proposition « qui courait » (proposition relative, dans laquelle le verbe courir a pour sujet
le pronom relatif qui) est emboîtée (enchâssée) dans le Groupe Nominal « un homme qui
courait » ; ce dernier est le COD du verbe croiser :
(7)b [J’]Pron. personnel-sujet ai croisé [un homme [qui courait]Prop. relat. ]GN-COD
1.7 Simplicité des bases de la syntaxe
On veut montrer dans ce paragraphe que les bases de la syntaxe forment un système
extrêmement simple.
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On se limite pour le moment aux phrases dont l’élément principal est un verbe (pdicatif),
en éliminant un certain nombre de cas particuliers.
A. Le verbe (prédicatif) forme une structure élémentaire (cf. § 1.4) en s’associant à un
élément ayant la fonction sujet et, éventuellement, à des éléments ayant la fonction
complément essentiel (cf. § 1.2).
B. On appelle intransitifs les verbes qui n’ont pas de compléments essentiels (ex. le
verbe fonctionner).
On appelle transitifs les verbes qui ont au moins un complément essentiel, tels les
verbes croire (qqch) et donner (qqch à qq)
C. En règle générale, il n’y a pas plus de 2 compléments essentiels (rares sont les verbes
qui en ont 3).
D. Le sujet et les compléments essentiels appartiennent à 2 et seulement 2 catégories (=
leur « nature », cf. § 1.5) : le Groupe Nominal et la Proposition subordonnée
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.
Remarque importante sur le § 1.7.D ci-dessus
La notion de Groupe Nominal incorpore aussi bien celle de groupe au sens courant du terme (plusieurs
éléments) que celle plus technique de « groupe comprenant un seul élément ».
Dans la phrase (2) « beaucoup d’argent » est le COD du verbe gagner. Sa nature est celle de Groupe
Nominal, parce que le mot principal est un nom (le nom « argent »). On analysera de la façon suivante :
Nature : Groupe Nominal
Fonction : COD du verbe gagner
Dans la phrase (1) « Pierre » est le sujet du verbe gagner. On dira, par convention, que sa nature est celle
de Groupe Nominal, parce qu’il est composé d’un nom. On analysera de la façon suivante :
Nature : Groupe Nominal (Nom Propre)
Fonction : Sujet du verbe sortir
Dans la phrase (6) « elle » est le sujet du verbe croire. On dira par convention que sa nature est celle de
Groupe Nominal, parce qu’il est composé d’un pronom (il s’agit d’une catégorie qui, comme son nom
l’indique est proche du nom). On analysera de la façon suivante :
Nature : Groupe Nominal (Pronom Personnel)
Fonction : Sujet du verbe croire
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On verra plus tard que la proposition subordonnée prend parfois la forme d’un Groupe Verbal à l’infinitif.
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CHAPITRE 2
Quelques autres notions importantes en syntaxe
2.1 Notion d’enchaînement (ou concaténation)
Il arrive que des catégories syntaxiques soient enchaînées (ou concaténées), comme dans :
(1)a Pierre et Marie se sont mariés en 1980 et ils ont divorcé 3 ans après
En (1), on observe que les deux phrases « Pierre et Marie se sont mariés en 1980 » et « ils ont
divorcé 3 ans après » sont enchaînées (on dit aussi « coordonnées ») ; elles sont reliées par la
conjonction de coordination et :
(1)b [Pierre et Marie se sont mariés en 1980]Phrase et [ils ont divorcé 3 ans après]Phrase
Au sein de la première de ces deux phrases, le Groupe Nominal sujet est « Pierre et Marie ».
On constate qu’il est formé de deux noms propres coordonnés par et.
2.2 Notion d’emboîtement (ou enchâssement)
Contrairement aux apparences, la structure la plus courante dans les langues n’est pas la
concaténation, mais l’enchâssement (ou emboîtement). Soit la phrase :
(2)a Mon mari a visité une maison qui était minuscule
Son analyse schématique (au moyen de parenthèses) est :
(2)b [[Mon (mari)]GN [a visité [une maison [ [qui]GN [était [minuscule]]GV ]Prop.rel. ]GN ]GV ]P
Si on symbolise les catégories par des « boîtes » au lieu de les mettre entre crochets, on
visualise mieux la notion d’« emboîtement » :
(2)c
mon a visité une maison
mari qui était [minuscule]
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