1 Introduction
La majorité des problèmes environnementaux auxquels la société fait face aujourd’hui sont le résultat de la
transformation des différents flux de matières dans les différents secteurs de l’économie [OECD, 2000]. Le
secteur bâtiment est le plus gros consommateur de ressources et un des plus forts générateurs de déchets
[Dorsthorst, 2004]. La pratique du développement durable dans ce secteur est donc essentielle pour le
développement durable de nos sociétés. L’application de ce concept passe, entre autres, par l’amélioration de la
gestion des ressources et déchets liés à ce secteur. Malheureusement, les ressources sont consommées
aujourd’hui d’une manière presque irrationnelle, sans se préoccuper des besoins futurs. Par ailleurs, la gestion
actuelle des déchets n’est pas optimale. Des 180Mt de déchets de chantiers générés annuellement par l'Europe
des 15, seulement 25% sont valorisées. Le reste des déchets est enfoui dans les centres d’enfouissement
techniques (CET) et dans certains cas illégalement [Commission Européenne, 2000].
Concevoir une gestion optimale des flux entrant (les ressources) et sortant (les déchets) d’un ou plusieurs
bâtiments demande la connaissance des flux présents et futurs. Cela signifie connaître leurs quantités, leurs
caractéristiques, leur localisation dans le temps ; depuis l'extraction des ressources nécessaires à leur
fabrication jusqu’à leur élimination en tant que déchets. Cette connaissance demande de mettre en place une
traçabilité des flux.
Dans le secteur bâtiment, dans les faits, aujourd'hui, on ne connaît pas avec certitude quel type de matériaux et
de produits sont finalement introduits dans quel type de bâtiment. C’est pourquoi, quand on veut connaître leur
stock dans le bâtiment, il est nécessaire de réaliser des enquêtes sur le terrain [CIB 1981] [Thuvander] ou de
supposer leur composition à l’aide des informations disponibles dans les permis de construire, qui varient d’un
pays à l’autre [Ruch, 1995] et qui en général sont collectées et traitées par un organisme administratif (la DAEI
[2001] en France).
Concernant les déchets, plusieurs études, encouragées par la Commission Européenne, ont été mises en place.
L’étude française a été développée par Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Energie [ADEME,
2002]. Le groupe Symonds [1999] a réuni les résultats de tous les pays de la communauté. D’autres recherches
sur les déchets de démolition et de déconstruction d’un bâtiment ont été développées [Ruch, 1995][Rentz,
1998][CIB, 2002]. Une étude du Comite Scientifique et Technique des Industries Climatiques (COSTIC) a
réalisé une étude prédictive des déchets générés par les équipements des bâtiments en considérant leur durée de
vie [Audegond, 1997]. Seules les quantité de déchets ont été considérée dans ces études. Concernant les
caractéristiques, la seule description est l’indication du type de déchet, qui malheureusement ne correspond pas
toujours à la classification européenne, rendant ces études difficilement comparables [Commission Européenne,
2000]. On peut reprocher à ces études une approche trop technique des durées de vie des composants de bâtiment
et une connaissance trop superficielle de la façon dont les déchets sont générés. Par exemple, la réhabilitation
d'un bâtiment, qui n'est pas toujours décidé pour des considérations techniques, génère des déchets de chantier.
Le mode d’assemblage des composants, qui peut affecter le temps de séjour du composant dans le bâtiment, est
un autre exemple de paramètre non pris en compte généralement.
L’objectif de cet article est de présenter une nouvelle méthode (ELDORADO), qui permet d’une part d’établir la
traçabilité des composants entrant dans les bâtiments et d’autre part de prévoir les déchets générés par un ou
plusieurs bâtiments au cours de leur cycle de vie. Elle vise à mieux décrire les caractéristiques des déchets. Elle
s’appuie, pour prévoir les déchets, sur la connaissances de flux de composants (leurs quantités, leur
caractéristiques, leur durée de vie, leur mode d’assemblage…) et de leur évolution dans le bâtiment. Cette
méthode permettra aux maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre d’estimer les déchets de leur bâtiment (dès la
conception) pour ainsi améliorer leur gestion. Ils pourront identifier plus facilement les filières de traitement des
déchets. Les résultats de l’application systématique à plusieurs bâtiments (lotissement, quartier, ville,
département, région…) permettront aux autorités d’identifier la quantité de ressources utilisées et prévoir les
déchets de chantier qui seront générés sur un territoire. La gestion des déchets de chantier (envisager les
meilleures filières de traitement existantes, planifier la localisation de nouvelles filières, estimer les coûts …)
sera alors facilitée.
2 Méthode
2.1 Méthode au niveau micro
Ce niveau a trois objectifs :
1- établir une traçabilité des composants du bâtiment
2- prévoir les déchets de chantier du cycle de vie d'un bâtiment
3- collecter les informations pertinentes pour une extension possible à plusieurs bâtiments.