Basile Valentin LES DOUZE CLEFS DE PHILOSOPHIE 4
particulier, eux seuls sont nés et naissent tous les jours. Mais notre Pierre
que j'ai eu par succession des anciens Philosophes, est faite et composée de
deux choses, et d'une, en qui la troisième est cachée, et elle est la vérité
vraiment publiée sans aucune ambiguïté et fraude, car le mari et la femme
n'étaient pris par les anciens Philosophes que pour un même corps, non pas
à cause de ses accidents externes qu'ils eussent, mais à cause de leur amour
réciproque, et la vertu uniforme produite de leur semblable, née et inférée à
l'une et à l'autre, dès leur première naissance. Et tout ainsi qu'ils ont une
vertu conservative et propagative de leur espèce, tout de même la matière de
laquelle est produit notre Pierre, se peut multiplier et étendre par la vertu
séminale qu'elle a. C'est pourquoi si tu es vrai amateur de notre science, tu
ne feras pas peu d'estime de ce que je viens de dire, et tu le considéreras
attentivement, de peur de te laisser tirer avec les autres sophistes, aveuglés
en cet endroit en la fosse d'ignorance, et te précipiter en ce gouffre, et enfin
n'en pouvoir jamais revenir. Or mon ami, afin que je t'enseigne d'où cette
semence, et cette matière est puisée, songe en toi même à quelle fin et usage
tu veux faire la Pierre, alors tu saura qu'elle ne s'extrait que de racine
métallique, ordonnée du Créateur à la génération seulement des Métaux. Or
comprend en peu de paroles comment cela se fait.
Au commencement; alors que l'esprit du Seigneur était porté sur les eaux, et
que toutes choses étaient enveloppées dans les obscurités ténébreuses du
Chaos, alors Dieu puissant et Eternel, commencement sans fin, la sagesse
duquel est dès le commencement, et dès l'Eternité, par ses conseils
inscrutables et providents, créa de rien le Ciel et la terre, et tout ce qui est
en iceux contenu visible et invisible, quel nom que tu leur baille ou leur
puisse bailler. Car Dieu fit toutes choses de rien. Or comment fut faite cette
merveilleuse création, j'estime que ce n'est ici le lieu de s'en enquêter car
telles matières doivent être plutôt confirmées par la foi et par la sainte
Ecriture. En cette création Dieu donna et comme versa à chaque nature de
peur qu'elles ne périssent, étant sujettes à corruption, à chacune sa
semence, afin que par telle vertu séminale elle se puisse garantir de mort, et
que les hommes, les animaux, les plantes et les métaux, puissent être
perpétuellement conservés, et ne fut pas donné à l'homme telle vertu, que de
pouvoir à son plaisir, contre la volonté de Dieu, faire de nouvelles semences,
mais seulement lui permis de pouvoir étendre et multiplier son espèce. Et
Dieu se réserva la puissance de faire de nouvelles semences, autrement la
création serait possible à l'homme, comme étant la plus noble créature, ce
qui ne se peut pas faire, mais doit être réservée au seul Créateur de toutes
choses.
Quant à la vertu séminale des Métaux, je veux qu'ainsi tu la connaisses.
Premièrement l'influence céleste par la volonté et commandement de Dieu,
descend d'en haut, et se mêle avec les vertus et propriétés des Astres,
d'icelles mêlée ensemble, il se forme comme un tiers entre-terrestre. Ainsi est
fait le principe de notre semence, et telle est sa première production, par
laquelle elle peut donner assez suffisant témoignage de sa race. De ces trois
se font les éléments, à savoir l'Eau, l'Air, et la Terre, lesquels moyennant
l'aide du feu, continuellement appliqué, l'on régit et gouverne jusqu'à ce