80 - Veille info tourisme

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1.0 Introduction
Les évènements sportifs de dimension internationale représentent des enjeux
économiques importants en raison de l’implication sur le terrain de divers acteurs, au
premier rang desquels figurent : les équipementiers sportifs, annonceurs, médias,
assurances, constructeurs, entreprises commerciales, institutionnels, comité du tourisme,
chambre de commerce, pays organisateur etc. Tous ces acteurs du <sport business>
élaborent des stratégies de marketing et de communication, mettent en place des
politiques de sponsoring, organisent sur place manifestations et animations diverses afin
de pouvoir bénéficier des retombées économiques qu’entraînent ces manifestations
sportives.
Comment alors identifier et apprécier au plan économique et social les véritables
retombées de tels évènements?, les pays d’accueil en tirent-ils réellement profit?, la
population locale se sent-elle véritablement concernée?. A ces interrogations majeures, il
convient de fournir des réponses claires. Pour nous aider, la route du rhum, célèbre
course transatlantique en solitaire, reliant tous les quatre ans depuis 1978 St Malo à
Pointe-a-Pitre est utilisée et analysée ici comme étude de cas pour déterminer à la fois le
poids de cette organisation ainsi que les impacts touristiques et économiques tels que : le
volume des visiteurs étrangers, les flux financiers, et surtout les incidences
macroéconomiques induites par ce type d’évènement. En conséquence, le bilan tiré de
l’expérience de la route du rhum après sa neuvième édition (novembre 2010) devrait
permettre de fournir des enseignements et indiquer si cet évènementiel sportif soutient
ou non le tourisme local et s’il peut-être considéré aujourd’hui comme un levier pour le
développement régional?
L’analyse des impacts économiques et sociaux des évènements sportifs a donné lieu dans
le passé à plusieurs publications et suscité nombre de controverses et débats. Des
évaluations grossières sont quelquefois réalisées avant même la tenue de l’évènement.
Les calculs sont assez souvent approximatifs et surévalués. Cependant, des contributions
récentes et pertinentes ont vu le jour, notamment celles de: J.J Gouguet, E. Barbe et B.
Lapasset (2010) qui, dans une analyse de recherche comparative ont mis l’accent sur des
études d’impact économique relatives à différents sports.
Soulignons également celle entreprise par J.J Gouguet et Barget sur l’analyse d’impact
économique de la coupe du monde de rugby de 2007. Ces auteurs utilisent comme
méthodologie les résultats d’une méta- analyse pour tirer la valeur des multiplicateurs des
régions impactées par l’évènement. Une méta-analyse a de même été employée par S,R.
Baaijens, P Nijkamp, et K.V Montfort (2000) pour estimer à partir d’un échantillon de 11
territoires (dont les Bermudes, les Bahamas, Kiribati, Tonga, Vanuatu, la Turquie..) la
valeur du multiplicateur de revenu touristique de l’île grecque de Lesvos. Les variables
explicatives introduites dans cet exemple ont été: le nombre d’habitants, la superficie, le
nombre d’arrivées de touristes, le pourcentage d’arrivées en provenance du plus
important pays émetteur, l’indice touristique, exprimé par le rapport du nombre de
touristes à la population locale, enfin des variables muettes ont été également intégrées
dans ce modèle telles qu’une variable géographique, prenant la valeur de 1 si la région
concernée est une île ou un archipel et 0 ailleurs, et une variable politique prenant la
valeur de 1 si la région en question est une nation indépendante et 0 ailleurs . Par ailleurs,
J. Fourie et M.S Gallego (11/10/2010) ont pour leur part utilisé un modèle de gravité
1
standard appliqué a 200 pays (dont la Guadeloupe et la Martinique) pour mesurer sur la
période 1995-2006 les bénéfices directs liés à des méga-évènements sportifs. Rappelons
que les modèles de gravité représentent les flux bilatéraux (ici les arrivées de touristes)
entre deux pays. Les variables explicatives employées dans ce modèle sont : le PIB par
habitant, la distance entre les pays pris deux à deux, l’existence ou non d’une frontière
entre eux, d’une langue commune ou non entre-eux, d’une monnaie commune, et
l’existence ou non de liens coloniaux entre ces pays. Quant à Burns et al (1986), ils ont
dans leur évaluation d’impact du grand prix d’Adelaide en Australie utilisé une analyse
coûts-bénéfices, en prenant en compte non seulement les impacts économiques mais aussi
des effets sociaux ou environmentaux comme le bruit engendré par cet évènement, les
temps perdus par les résidents dans les transports ainsi que les accidents routiers
occasionnés par la manifestation. Enfin, concernant la route du rhum proprement dite, la
seule évaluation d’impact économique connue à ce jour est celle réalisée en 2002 par la
chambre de commerce et d’industrie de Pointe-a-Pitre avec l’appui de la cellule Europe.
Cette évaluation présente une méthodologie axée sur les flux de dépenses, fournit des
données chiffrées sur les différentes contributions financières allouées par les organismes
officiels ainsi que leurs incidences notamment en termes de fréquentation. Cependant,
sans nier le mérite de cette étude, force est de constater qu’elle n’appréhende pas dans sa
globalité les différents aspects et impacts de l’évènement au plan macroéconomique.
Aussi, notre périmètre d’étude sera plus large et notre démarche méthodologique plus
rigoureuse afin d’apprécier le plus complètement possible les principaux impacts
économiques engendrés par cet évèment en Guadeloupe. Ce faisant, le présent document
est organisé comme suit:
La deuxieme section aborde le cadre analytique de l’étude avec comme point d’appui les
fondements théoriques appliqués aux principales études d’impact économique dans le
domaine sportif. Le soubassement théorique étant ici le choix des principales injections
dans la determination de l’impact.
La troisieme section est consacrée au calcul de l’impact économique régional et à la
méthodologie utilisée à cet effet, méthodologie qui suit une démarche séquentielle, qui
commence par l’analyse de l’impact de l’évènement en termes de fréquentation, avantpendant et après l’evenement, puis par celle des dépenses touristiques associées, pour
aboutir à l’application des principaux modèles d’impact économique.
La quatrième section introduit la synthèse des principaux résultats ainsi que les
enseignements y découlant.
Enfin, la cinquième section présente la conclusion générale de l’étude.
2
2.0 Le cadre analytique
L’évaluation de l’impact économique de tout évènement requiert un cadre qui tienne
compte de (1) la source des dépenses (2) l’identification du lieu d’émission de la dépense
(3) la destination de la dépense et (4) la raison de la dépense. Cette section a donc pour
but de fixer le cadre analytique à partir duquel s’établiront les fondements théoriques de
l’étude, et plus particulièrement les principaux contours du circuit économique spatialisé
de la route du rhum. Ce cadre conceptuel dans lequel devra s’inscrire le travail de
rassemblement des données et la recherche évaluative permettra d’identifier et
d’expliquer les différentes injections des dépenses effectuées à l’occasion de la route du
rhum , et d’être par la suite en mesure d’évaluer les effets directs, indirects et induits de la
dépense des visiteurs étrangers sur le territoire de Guadeloupe.
2.1 Fondements théoriques des études d’impact économique
En choisissant les évènements sportifs ou culturels à financer et le niveau de financement
à leur allouer, les gouvernements et autres autorités locales souhaitent souvent obtenir
une image complète des coûts de l’évènement mais aussi et surtout du retour sur
investissement qu’ils réalisent. Pour ce faire, ils entreprennent quelquefois des études
d’impact économique qui cherchent à identifier toutes les dépenses engagées dans les
différentes étapes de l’évènement, et de déterminer leurs retombées sur l’ensemble de
l’économie. Les impacts économiques d’un évènement proviennent selon Faulkner
(1993) de trois sources principales : (i) les dépenses effectuées par les visiteurs étrangers
(ii) les dépenses en équipements et infrastructures diverses (iii) les dépenses
d’organisation et d’animation.
Aussi, une étude d’impact économique a pour objectif d’estimer l’ampleur des revenus et
emplois locaux supplémentaires créés à l’occasion d’un évènement qui peut être sportif
ou non. Elle cherche à répondre à la question suivante: de combien l’activité économique
de court terme diminuerait dans une zone considérée si cet évènement n’existait plus dans
cette zone?, et dans le cas contraire, de combien cette activité augmenterait dans la zone
si l’évènement existait? (Y. Nicolas 2006). L’évaluation de ces impacts répond donc à un
besoin de rationalité et de transparence. En conséquence, un responsable politique ou
administratif doit chercher à connaître les conséquences de ses décisions ou de son action
de manière à en assumer toute la responsabilité. Autrement dit, il doit pouvoir répondre
aux questions suivantes : les ressources financières mobilisées par la politique ont-elles
été bien utilisées?, les résultats de la politique engagée sont-ils à la mesure des sommes
dépensées?. En clair, l’étude d’impact économique s’intéresse plus particulièrement à la
hausse nette de l’activité économique due aux injections externes en raison de l’existence
d’une manifestation donnée.
Par ailleurs, il faut admettre que l’évaluation des impacts économiques de grands
évènements sportifs donne quelquefois lieu à des controverses parmi les analystes. On
observe assez souvent des divergences entre les résultats de bureaux d’études qui
prévoient des retombées économiques très élevées et ceux notamment d’universitaires qui
revoient à la baisse de telles évaluations.
Ces résultats contrastés sont obtenus pour l’essentiel avec des méthodes liées à des
fondements théoriques différents. Pour notre part, afin d’éviter un certain nombre
3
d’erreurs de calcul, nous adopterons dans le cas de la route du rhum, une démarche
théorique spécifique adaptée à l’évènement, à savoir le choix approprié des principaux
flux du circuit spatialisé.
Le circuit économique de la route du rhum fait apparaître trois sources principales
d’injection et de fuites qu’il convient d’expliquer. Il s’agit des injections liées aux
dépenses d’organisation et d’animation, des injections relatives aux dépenses sur place
des visiteurs étrangers, et des dépenses d’investissement qui concernent principalement
certaines rénovations. Ces injections se traduisent en général en différentes dépenses qui
engendrent à leur tour des effets indirects et induits. Enfin, rappelons que dans le cadre
d’une analyse coûts-avantages, les subventions accordées par les collectivités publiques
pour financer ces dépenses sont considérées en termes économiques comme un coût pour
ces collectivités, mais comme un avantage pour les agents qui les recoivent. Ne pas tenir
compte de l’ensemble des coûts conduit à une surestimation incorrecte de l’impact. Il est
donc nécessaire de mettre en balance les coûts et les bénéfices dans l’analyse. Malgré les
difficultés à mesurer correctement les coûts et à les opposer aux bénéfices, ce type
d’analyse apparaît comme le plus recommendable pour informer le contribuable et aider à
la décision. Parmi ces coûts, il faut distinguer les coûts monétaires tels que: les
investissements dans les équipements locaux, les abattements fiscaux, les subventions
locales aux organisateurs ainsi que les dispositifs de sécurité publique (police,
gendarmerie, pompiers) associés à la manifestation. S’y ajoutent des coûts en termes
d’encombrement de voies, d’accidents de la route, de vandalisme, de dégradation
environnementale, d’hygiène publique etc..Une autre catégorie de coûts est celle intitulée
‘coûts de déplacement’, observé lorsque des visiteurs étrangers attirés par un évènement
y sont écartés soit parce qu’ils n’ont pas pu trouver d’hébergement, soit parce qu’ils ne
sont pas disposés à s’intégrer à la foule.
En conséquence, l’efficacité de toutes ces dépenses publiques doit être recherché à l’aide
d’une analyse coûts-bénéfices, destinée à évaluer leur retour sur investissement, mais
aussi leur retour sur experiences de manière à optimiser les retombées territoriales de
l’évènement et à les apprécier au plan économique, social et environnemental, et donc à
rechercher les limites de la manifestation au plan humain et environnemental. En deux
mots, il s’agit de déterminer les véritables effets multiplicateurs de ces dépenses.
2.1.1
Injections liées aux dépenses d’organisation et d’animation
Ces dépenses reflètent la spécificité de l’organigramme établi pour l’évènement. Un
groupement d’intérêt public (GIP) destiné à superviser l’organisation générale de la
manifestation peut être créé dans ce but, avec en parallele la mise en place dans la région
concernée d’un comité local de coordination ayant pour mission d’élaborer et mettre en
oeuvre les actions de valorisation. Dans le cas de la route du rhum, la structure de
financement est specifique et les fuites proportionnellement plus élevées que dans des
compétitions comme la coupe du monde football ou les jeux olympiques.
Pour sa 7eme édition (2002), la route du rhum avait comme organisateur et proprietaire
de la course, PROMOVOILE, et pour sa 9eme édition (2010), le groupe PEN DUICK qui
a repris l’organisation de la course depuis 2006. La Banque Postale en tant que partenaire
majeur exécutif de PEN DUICK est aujourd’hui associée à l’évènement. En 2002,
4
Promovoile s’etait adjoint les services de: Royale Production, délégataire de la gestion
sportive et responsable de la production audiovisuelle, et de Havas Advertising Sports
pour les activités de marketing et de communication. Le budget global consacré à cette
opération était de 5.2 millions d’euros. Au plan local, une quinzaine de partenaires y
étaient associés.
Selon la chambre de commerce et d’industrie de Pointe-a-Pitre, la contribution financière
du conseil régional de Guadeloupe aux organisateurs de la course et aux manifestations
diverses s’élevait en 2002 à 1249 milliers d’euros. Les subventions du conseil régional
de l’époque se répartissaient comme suit:
Tableau 1. Route du rhum 2002: Subventions du conseil régional de Guadeloupe
Bénéficiaires
En k(euros)
Parrainage sportif
Parrainage du projet <Région Archipel Guadeloupe>
352
352
Animations locales
Ville de Pointe-a-Pire (Animations de Pointe-a-Pitre)
Image Prod’ (Animation nautique Darse en folie)
Communauté de communes de Sud Basse-Terre (Animations)
254.6
94.6
80
80
Animations à Saint-Malo
Staff and line (Animations culturelles)
Guadexport (Village artisanal Saint-Malo)
Avan Van du Moule (Animations carnavalesques)
98.2
60.5
30
7.7
Promotion touristique
Réalisation et diffusion d’emissions télévisées
81.2
81.2
Echanges culturels
Echanges socioculturels écoliers St-Malo/Guadeloupe
Association les Alizes: échanges entre Malouins et Saintois
13
7.5
5.5
TOTAL
799
Source: Chambre de commerce et d’industrie de Pointe-a-Pitre. 2002
2.1.2
Injections liées aux dépenses des visiteurs
Il s’agit de dépenses de consommation effectuées sur place par les visiteurs étrangers. En
règle générale, seules les dépenses des visiteurs non locaux, dont le motif principal de
présence sur place est l’existence de la manifestation doivent être comprises dans
l’estimation de l’impact économique. Les dépenses des résidents locaux ne contribuent
pas à l’impact économique de l’évènement car elles représentent une remise en
circulation de sommes qui existaient deja dans la région, dépenses qui, localement
auraient eu lieu de toute facon pour divers motifs. Il y a par conséquent de la part des
5
résidents locaux une simple ré-allocation de dépenses dans l’économie locale plutôt
qu’une hausse nette réelle de l’activité économique. Ces dépenses sont donc non
contributives et n’offrent aucun stimulus économique net. Par conséquent, on ne
retiendra en termes de dépenses que celles effectuées sur place par les consommateurs
extérieurs à la région. Selon la CCI de Pointe-a-Pitre, le nombre de visiteurs étrangers
s’élevait lors de la 7eme édition de la route du rhum entre 2358 et 3996 , ils auraient
dépensé dans l’hôtellerie traditionnelle, en hébergement, restauration et autres, entre 652
000 et 1105000 euros, dans les structures para-hôtelieres entre 155000 et 262000 euros,
et entre 292000 et 495000 euros dans les entreprises de location de voitures. Enfin, pour
des motifs divers, les sommes dépensées seraient comprises entre 353000 et 599000
euros. Au total, les visiteurs extérieurs auraient dépensé en Guadeloupe durant cet
évènement entre 1452000 et 2461000 euros.
2.1.3
Injections liées aux dépenses d’investissement
Les dépenses d’investissement englobent essentiellement certaines rénovations ainsi que
la mise en place de quelques équipements et le raccordement d’installations électriques
diverses, etc. 260000 euros avaient été programmés pour ces investissements en 2002.
En résumé, l’objectif est d’identifier parmi tous les flux précédents, ceux qui émanent
d’agents extérieurs au territoire régional, de retrancher ensuite toutes les fuites hors
territoire afin d’aboutir à un multiplicateur régional de revenu, de production, de valeur
ajoutée et d’emploi qui soit fiable. Pour y parvenir, le recours à l’analyse des effets
indirects et induits de la dépense touristique est nécessaire.
2.1.4
Effets directs, indirects et induits de la dépense touristique
Lorsque l’on cherche à évaluer les retombées d’un évènement sportif comme celui de la
route, il est important d’opérer une distinction entre critères d’évaluation quantitatifs et
qualitatifs. L’accent sera porté dans cette section sur les critères d’évaluation quantitatifs
et plus particulièrement sur les effets directs, indirects et induits de la dépense touristique.
Les dépenses effectuées sur place par les visiteurs étrangers donnent naissance au plan
économique à des effets directs, indirects et induits.
Les effets directs sont les effets de premier tour des dépenses effectuées par les visiteurs,
en particulier en hébergement, restauration, transports, commerce de détail,
divertissements, souvenirs etc.. L’injection initiale de ces dépenses constitue donc
l’impact ou l’effet économique direct. Ces fonds initiaux recus par des établissements tels
que: hôtels, restaurants, entreprises de transports, de location de voitures, commerces de
détail, etc sont ensuite réinjectés sous forme de dépenses dans d’autres entreprises
locales, notamment pour le réapprovisionnement des stocks, l’entretien des batiments, les
achats divers et bien d’autres objets. Ces dépenses se diffusent ensuite progressivement
par tours successifs dans l’économie locale. Ces tours successifs d’activité économique
sont appelés <impact ou effet indirect>. Il s’agit donc d’effets de second tour.
La proportion du revenu des ménages locaux qui est dépensée localement en biens et
services est appelée <impact ou effet induit>. En clair, il s’agit de la hausse de l’activité
économique locale résultant de l’augmentation de la consommation locale, découlant elle
même de celle des différents types de revenus des ménages locaux.
6
En définitive, une étude d’impact économique a pour but d’estimer l’importance de ces
trois types d’effets à l’aide de trois critères: les chiffres d’affaires additionnels au profit
des entreprises locales, les revenus individuels locaux, et les emplois locaux
supplémentaires créés.
Les effets directs, indirects et induits doivent être estimés en respectant plusieurs règles
économiques de calcul, en excluant plusieurs types de dépenses, et en cherchant à tenir
compte des coûts associés à l’évènement.
3.0 Calcul de l’impact économique régional de la route du rhum: Méthodologie
Il existe différentes méthodologies pour évaluer l’impact économique d’un évènement
sportif sur un pays ou une région. Celles les plus utilisées aujourd’hui sont: les modèles
d’équilibre tels que le modèle input-output (entrées/sorties), le modèle d’équilibre général
calculable (MEGC), l’analyse coût-bénéfice, l’analyse économétrique, et l’apport des
multiplicateurs d’impact tels que : le multiplicateur de la base, le multiplicateur
keynésien de revenu, l’analyse du multiplicateur proportionnel de Archer < Proportional
Multiplier Analysis (PMA) >.
Aussi, pour évaluer de manière raisonnable l’impact économique de la route du rhum,
nous aurons recours à trois d’entre-eux : le modèle entrées/sorties, l’analyse
économetrique, et l’apport des multiplicateurs d’impact, en particulier celui des
multiplicateurs de base. Au préalable, il est nécessaire d’évaluer l’incidence de la route
du rhum en termes de fréquentation touristique et ce, avant-pendant, et après
l’évènement, de manière à pouvoir déterminer le niveau de dépenses touristiques
engendré par la manifestation.
3.0.1
Impact en termes de fréquentation touristique, avant-pendantaprès l’évènement.
L’objectif de cette section est d’examiner l’évolution de la fréquentation touristique liée
à la route du rhum depuis ses cinq dernières éditions, d’en tirer un bilan et des
enseignements au plan statistique, par une analyse de la tendance évolutive du nombre
d’arrivées des visiteurs en provenance de l’Europe de 1993 à 2010 et ce, avant-pendant,
et après l’évènement. En l’absence de données fiables sur le nombre de touristes de
séjour enregistrés lors de la route du rhum, le recours aux statistiques de trafic aérien
(arrivées hors réseau local) a été indispensable à cette fin. Seules les données du trafic
transatlantique avec l’Europe et singulièrement avec la France ont été retenues, car la
route du rhum est avant tout un évènement franco français, fréquenté pour l’essentiel par
les visiteurs de ce pays qui composent selon l’Insee 95% de la clientèle de séjour de la
Guadeloupe. Le tableau suivant retrace sur la période 1993-2010, l’évolution de ce trafic
en Guadeloupe, en se focalisant sur les statistiques relatives aux différents mois de
novembre (mois de l’évèment) et aux années précédant et succédant chacune des
éditions de la route du rhum (les années route du rhum ainsi que leurs données figurent en
caractères gras).
7
Tableau 2: Evolution du trafic passagers en Guadeloupe (arrivées hors réseau local) de 1993 à 2010.
Trafic
mensuel
novembre
Evolution
(%)
Trafic
annuel
Evolution
(%)
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
ND
ND
ND
ND
37875
40540
44395
37663
30344
35683
27940
28059
26415
32838
37414
34907
34114
34858
+7%
369700
44263
7
+19.7
%
488278
545669
557589
570456
+2.3%
+17.6%
602223
643941
550878
543736
-1.3%
+24.3%
47614
0
496686
490041
495756
+2%
53625
4
53789
9
48259
4
+11.6%
510135
+5.7%
Sources : Direction générale de l’aéroport Pôle-Caraibe et calculs de l’auteur
8
En premier lieu, l’étude et l’analyse de ces statistiques font ressortir que la clientèle
touristique de la route du rhum provient à 95% de la France hexagonale. En second lieu,
sur les quatre dernières éditions de la route du rhum, on observe tant en base mensuelle
qu’en base annuelle une baisse tendancielle des arrivées. En effet, on dénombre en
provenance de l’Europe et principalement de la France 40540 arrivées en novembre 1998
contre 34858 en novembre 2010 soit une baisse de 14% sur cette période, et au plan
annuel, 570456 arrivées en 1998 contre 510135 en 2010 soit une baisse de 10.6%. En
troisième lieu, en rythme mensuel, sur le taux de croissance des arrivées de novembre pré
et post-évènement, on observe également une baisse entre la 6ème édition (1998) et la 9ème
édition (2010) de la route du rhum (+7% contre 2%).
Par ailleurs, selon l’Insee (tableaux économiques régionaux), les vols transatlantiques de
l’Europe à destination de la Guadeloupe sont composés en moyenne à 70% de Français
de l’hexagone. Cependant, il est difficile de vérifier de telles données statistiques, étant
donné que les touristes en provenance de l’Union Européenne ne sont pas tenus de
remplir une fiche signalétique pour les services de l’immigration, informations qui
auraient été utiles et auraient facilité la compilation et l’analyse des données statistiques
de la fréquentation touristique. Dans ces conditions, le marché touristique de la route du
rhum est difficile à évaluer. Cependant, nous avons tenté de procéder à des recoupements,
en partant entre autres d’une enquête aéroportuaire de janvier 2003 réalisée par la CCI de
Pointe-a-Pitre. Enquête selon laquelle, une majorité des sondés (50.8%) déclarent que le
choix de la destination Guadeloupe a été arrêté avant la compétition. Par conséquent, la
route du rhum n’a pas influencé leur choix de voyage et que leurs décisions sont peu
influencées par les campagnes promotionnelles. Dans cette hypothèse et de tout ce qui
précède, le nombre d’arrivées liées à la route du rhum peut être estimé raisonnablement
entre 2400 et 3000 visiteurs.
En définitive, ces résultats laissent apparaître, qu’à ce jour, la route du rhum n’a pas
atteint un rythme et un seuil de fréquentation touristique dignes d’un grand évènement
sportif comme l’est, par exemple la semaine de la voile à Antigua, rendez-vous
international incontournable qui attire chaque année pour cette régate des milliers de
visiteurs de toutes nationalités. Enfin, ajoutons que toute planification dans un secteur
quelconque nécessite la connaissance précise de données variées concernant l’activité en
cause or, aucune statistique précise n’existe en Guadeloupe pour pouvoir apprécier avec
exactitude le marché touristique de la route du rhum. Il s’agit donc d’une lacune grave
qu’aucune activité commerciale ou industrielle classique ne saurait tolérer.
3.0.2
Calcul des dépenses touristiques directes
Le calcul des dépenses touristiques directes s’appuie sur une logique d’évaluation
comportant trois étapes:
-
Etape 1: La détermination du nombre de visiteurs
X
Etape 2: L’évaluation des dépenses par visiteur
=
Etape 3: Le calcul de la dépense totale des visiteurs
9
En suivant cette logique et en s’appuyant sur les statistiques de fréquentation de l’époque
communiquées par l’Insee et la CCI de Pointe-a-Pitre, le nombre de touristes qui se
seraient déplacés en Guadeloupe pour cet évènement s’élèverait environ à 3000. L’Insee
estime par enquête que ces touristes dépensent en moyenne hors billet d’avion, par
personne et par sejour la somme de 638 euros. La dépense moyenne par jour s’élèverait à
52 euros. Par conséquent, ces visiteurs, en séjournant une dizaine de jours en moyenne
lors de cette manifestation, et en dépensant sur place environ 52 euros par jour,
injecteraient directement dans l’économie locale entre 1560000 et 1914000 euros.
Somme dont il conviendra de déterminer ci-après l’impact.
3.0.3
Impact par l’analyse input-output
L’utilisation d’un modèle <entrées-sorties> permet d’obtenir une estimation des trois
types d’effets décrits précédemment. Ce modèle est avant tout un outil de simulation qui
reconstitue les échanges entre les secteurs d’une économie, et qui suit la trace des flux de
toute nouvelle somme sur l’ensemble de cette économie. Il s’agit d’un système comptable
composé de tableaux qui désagrègent l’économie étudiée en un certain nombre de
secteurs et branches et examinent les flux monétaires de biens et services entre eux.
En fournissant des informations complètes et détaillées sur les chiffres d’affaires et les
achats de biens et services entre les differents secteurs de l’économie, les tableaux
entrées-sorties offrent un outil analytique utile aux économistes, planificateurs, et
décideurs dans (i) l’analyse d’une grande variété de problèmes touchant notamment le
développement économique régional (ii) la formulation de nouvelles politiques
économiques et environnementales et l’évaluation de leurs impacts, en particulier sur la
production (iii) l’impact de variations de facteurs exogènes tels que dépenses touristiques,
développement de nouvelles exportations .
Une version condensée ou agrégée du tableau entrées-sorties 2003 de Guadeloupe est
utilisée ci-après pour déterminer l’impact économique de la dépense touristique effectuée
en Guadeloupe lors de de la route du rhum en 2002. L’objectif principal est de décrire les
effets directs, indirects, et induits engendrés par cette dépense, en suivant successivement
trois étapes : l’analyse des liens intersectoriels du tourisme en rapport avec la route du
rhum, l’exploration de l’effet demande et de l’effet offre pour la détermination des
multiplicateurs d’activité et de capacité des secteurs de l’économie Guadeloupéenne,
enfin l’évaluation proprement dite de l’impact économique de la route du rhum.
Les liens intersectoriels du tourisme
Un des problèmes que cette étude cherche à explorer est l’ampleur par laquelle le
tourisme (à travers la route du rhum) est capable de stimuler et de développer des liens
avec d’autres secteurs de l’économie Guadeloupéenne. Le modèle entrées-sorties et plus
particulièrement la matrice inversée de Leontief fournit à ce propos le cadre approprié qui
permet un examen de ce problème. Aussi, l’estimation de l’impact économique de
variations de facteurs exogènes tels que la dépense touristique est une tâche importante et
intéressante à analyser. Par conséquent, ses effets d’entraînement sur l’économie
régionale de Guadeloupe doivent être évalués de manière rigoureuse. En 2003, la dépense
touristique réalisée en biens et services en Guadeloupe s’élevait selon l’Insee à 265
millions d’euros, représentant 3.9% du PIB de la région. L’année précédente (2002), la
10
Guadeloupe accueillait la route du rhum, manifestation sportive d’envergure qui a attiré
environ 3000 visiteurs étrangers pendant une dizaine de jours. Quel est donc le bilan et
l’impact de cet évènement sur l’économie de la Guadeloupe?. Pour estimer cet impact,
nous partons de l’hypothèse que les 3000 visiteurs supplémentaires attirés par
l’évènement ont dépensé en biens et services la somme de 1914000 euros.
La dépense touristique additionnelle réalisée est répartie sur les différents secteurs
d’activité qui produisent des biens et services achetés par les visiteurs. Pour analyser
spécifiquement la valeur et la nature des effets d’entraînement que procure cette dépense,
on calcule le <multiplicateur input-output> qui repose sur l’estimation du tableau entréessorties 2003 de Guadeloupe qui a été agrégé pour l’occasion en 16 branches et 16
secteurs. Le logiciel IOW développé en 2003 par West,G.R de l’université Queensland
d’Australie est utilisé à cette fin, il permet de calculer et d’effectuer les analyses du
multiplicateur, d’évaluer l’impact de la demande finale sur l’ensemble de l’économie et
d’analyser les liens intersectoriels en amont comme en aval. L’objectif à travers ce
multiplicateur est d’estimer à l’aide de la < matrice inversée de Leontief >, l’ensemble
des effets d’entraînement sur l’économie Guadeloupeenne., en retracant les
interdépendances entre les différentes branches. La formule permettant de déterminer
cette matrice s’exprime comme suit:
Y= (I – A) -1 E
Où,
Y= vecteur de la production sectorielle
I= la matrice identité
A= la matrice des coefficients régionaux
(I – A) = la matrice inversée
E = vecteur de la demande finale
La matrice inversée permet de dégager, pour une certaine demande finale, les différentes
productions nécessaires. Les coefficients de la matrice inversée sont donnés dans le
tableau suivant.
11
Tableau 3. Inverse de la matrice de Leontief (année 2003)
12
Secteurs
1 Agriculture
2 Sucre, rhum et autres alcools
3 Autres IAA
4 Industries des biens de consommation
5 Industries de biens d’équipements
6 Autres industries des biens intermediaires
7 Energie
8 Construction
9 Commerce
10 Transports, poste et télécommunications
11 Activités financières
12 Activités immobilières
13 Autres services aux entreprises
14 Hôtels et restaurants
15 Autres services aux particuliers
16 Services non commerciaux
Ainsi, en effectuant une lecture de la colonne < hôtels-restaurants > de la matrice
inversée de Leontief, on constate que pour satisfaire une demande finale de 1 euro de
produit touristique, il faut produire en Guadeloupe 0.04 de produit agricole, 0.02 de
sucre, rhum et autres alcools, 0.07 d’énergie, 0.06 de transports et télécommunications,
0.08 d’autres IAA, 0.08 de commerce, 0.12 d’autres services aux
entreprises….Globalement, une unité de demande finale de produit touristique provoque
une répercussion totale de 1.53, appelée < effet multiplicateur d’activité >, comprenant
l’unité de produit touristique même et la répercussion indirecte s’élevant à 0.53. les
quatre meilleurs multiplicateurs d’activité ou quatre meilleurs fournisseurs d’intrants pour
le tourisme sont dans l’ordre : le secteur des autres services aux entreprises, celui des
autres IAA (autres industries agro-alimentaires), celui de l’énergie, et celui des transports,
poste et télécommunications.
En revanche, le < multiplicateur de capacité > d’une branche montre de combien
augmente la production de cette branche lorsque la demande finale augmente d’une unité.
Pour saisir ce multiplicateur, une lecture en ligne du tableau est nécessaire. Par exemple,
en effectuant une lecture de la ligne < hôtels-restaurants > du même tableau, on observe
qu’à l’exception des coefficients du commerce (0.052), des autres services aux
entreprises (0.012), et des transports, poste et télécommunications (0.010), les autres
secteurs présentent des coefficients et donc un multiplicateur de capacité tout à fait
négligeable. Par conséquent, ces derniers pour leur survie ne dépendent directement et
indirectement que très faiblement de l’activité touristique. A partir de ce tableau, il est
donc possible d’explorer les liens intersectoriels du tourisme en Guadeloupe et d’évaluer
ainsi l’ampleur par laquelle la dépense touristique à travers la route du rhum stimule
l’économie Guadeloupeene. Le modèle entrées-sorties et plus particulièrement la matrice
de Leontief fournit à cet égard un cadre approprié.
Les résultats issus de l’application du logiciel aux données de ce TES montrent qu’un
évènement comme la route du rhum qui a attiré en 2003 pendant 10 jours environ 3000
visiteurs étrangers supplémentaires en Guadeloupe a permis d’accroître directement et
13
indirectement les revenus d’activité et les revenus du travail pour un montant de 2.9
millions d’euros environ.
Effet demande et effet offre < Backward and Forward linkages >
Comme indiqué précédemment, la somme des coefficients de chaque colonne de la
matrice inversée fournit une mesure de l’importance de l’effet demande ou du
multiplicateur d’activité de chacun de ces secteurs, tandis que la somme des coefficients
en ligne indique l’ampleur par laquelle chaque secteur est lié au reste de l’économie,
dans ce cas, il s’agit de l’effet offre, exprimé à travers le multiplicateur de capacité. Les
deux tableaux suivants présentent successivement les indicateurs de l’effet demande et les
indicateurs de l’effet offre.
Tableau 4 : Indicateurs de l’effet demande < Backward linkages >
Le tableau 4 montre clairement dans sa dernière colonne, intitulée < Backwage Spread >
que ce sont les branches commerce, autres services aux entreprises, transports, poste et
télécommunications qui affichent en Guadeloupe les meilleurs indicateurs de l’effet
demande et donc les meilleurs multiplicateurs d’activité
14
Tableau 5 : Indicateurs de l’effet offre < Forward linkages >
En revanche, le tableau 5 indique dans sa dernière colonne, intitulée < Forward Spread >
que ce sont les branches sucre, rhum et autres alcools, commerce, autres IAA qui
présentent les meilleurs indicateurs de l’effet offre et qui par conséquent apparaîssent le
plus lié au reste de l’économie Guadeloupéenne.
Impact de la route du rhum sur la production sectorielle
En dernier lieu, Il convient d’estimer à travers les dépenses touristiques liées à la route du
rhum, l’impact en 2003 de cette attraction sur la production de chacun des 16 secteurs du
TES de Guadeloupe. Pour cela, on se fonde sur le postulat économique selon lequel il est
possible, à partir de la matrice inversée de Leontief d’estimer le vecteur de la production
sectorielle nécessaire au soutien d’un vecteur de la demande finale (Birch.A, Singh.D.R,
Mc David.H, 2006). Les productions sectorielles obtenues par cette approche sont
présentées dans le tableau 6 suivant.
15
Tableau 6 : Impact de la route du rhum sur la production sectorielle
Secteurs
Agriculture
Sucre, rhum, et
autres alcools
Autres IAA
Industries de biens
de consommation
Industries de biens
d’équipement
Autres industries
Energie
Construction
Commerce
Transports, poste et
télécommunications
Activités
financières
Activités
immobilières
Autres services aux
entreprises
Hôtels et
restaurants
Autres services aux
particuliers
Services non
commerciaux
Total de l’impact
(I-A)-1
Impact
0.046997
0.021585
Dépenses
touristiques
(route du rhum)
0
0
0.084112
0.009417
0
0
159813
17892
5.50
0.60
0.013171
0
25025
0.85
0.015539
0.071598
0.006159
0.018566
0.066326
0
0
0
0
0
29524
136036
12272
35275
126019
1.00
4.65
0.42
1.21
4.31
0.024372
0
46307
1.60
0.022287
0
42345
1.44
0.120161
0
228306
8.00
1 915 977
65.50
1.008409
1 900 000 €
89294 €
41012
%
3.00
1.40
0.003456
0
6566
0.20
0.005757
0
10938
0.40
2 922 601 €
100.00
Les résultats issus de ce tableau indiquent que l’injection initiale de 1.9 millions € de
dépenses touristiques au titre de la route du rhum (impact direct) engendrent 2.9 millions
€ (impact direct et indirect) de revenus d’activité dans l’économie Guadeloupéenne,
confirmant ainsi la valeur du multiplicateur de revenus (2.9/1.9=1.53) trouvé
préalablement dans la matrice inversée de Leontief. Ce multiplicateur d’activité
comprend l’unité de produit touristique elle-même ainsi que la répercussion indirecte qui
s’élève à 0.53. Il en résulte que la richesse (valeur ajoutée) directe créée par le tourisme
international à la Guadeloupe génère une valeur ajoutée supplémentaire de 53% pour
l’économie Guadeloupéenne. Cependant, soulignons que l’augmentation de la demande
finale de produits touristiques liés à la route du rhum contribue en même temps à faire
augmenter les importations de 0.7 millions €, et les recettes fiscales de 0.2 millions €.
Par ailleurs, indépendamment de la branche tourisme (hôtels et restaurants) qui apparaît
comme étant le premier bénéficiaire de cet impact (65.5%), on constate que la part des
autres secteurs dans l’impact est tout à fait mineure, puisque viennent ensuite par ordre
d’importance: les autres services aux entreprises (8%), les autres IAA (5.5%), l’énergie
(4.65%), les transports, poste et télécommunications (4.31%)... Enfin, notons que
l’impact sur l’emploi est également négligeable puisque cette manifestation qui ne dure
16
en moyenne que 10 à 15 jours ne nécessite pas de la part des entreprises et établissements
d’accueil un recrutement conséquent.
3.0.4
Impact par l’analyse économétrique
La présente section se propose d’explorer à travers un modèle économétrique simple (un
modèle log-log), l’influence d’un certain nombre de variables (dont celle de la route du
rhum) sur la croissance économique de la Guadeloupe, de saisir l’importance des effets
respectifs de chacune de ces variables sur la croissance de cette région, à partir d’un
modèle empirique qui s’inspire des travaux réalisés sur le même thème par Antonio
Almeida et Carlos Santos pour l’archipel des Açores et de Madère.
L’originalité de ce modèle vient du fait que pour l’essentiel, il fait dépendre la croissance
du PIB de la Guadeloupe de l’influence de facteurs tels que: la variation du PIB de la
France, la variation de la demande touristique adressée à la Guadeloupe dont 95%
émanent de la France hexagonale, la variation des dépenses publiques, dépenses
financées en grande partie par les subventions européennes et par celles de la France, ces
deux sources intervenant conjointement pour compenser les coûts de l’insularité. Enfin,
l’effet de la route du rhum sur la croissance économique de la Guadeloupe est également
saisi à l’aide d’une variable muette qui prend la valeur de 1 pour les années durant
lesquelles l’évènement a lieu, et 0 ailleurs. Soulignons que les difficultés à collecter sur la
période d’analyse des données relatives à d’autres variables explicatives nous ont
contraints à des limites dans le choix de la méthode d’estimation, nous conduisant ainsi à
l’application d’un modèle économétrique simple. Néanmoins, la prise en compte d’un tel
modèle, permet de metttre en évidence de nombreux aspects occultés par les autres
méthodologies d’évaluation abordées dans l’étude. Ce faisant, ce modèle permet
d’appréhender les effets instantanés et de saisir l’évolution et l’influence de ces
différentes variables.
Les estimations du modèle sont réalisées par la méthode des moindres carrés ordinaires
(MCO). Ce modèle s’exprime par la fonction suivante:
Yt = f (YFt, DPt, TOURt, Dum)
Où:
Yt = PIB régional de Guadeloupe
YFt = PIB de la France
DPt = Dépenses publiques de Guadeloupe
TOURt = Trafic passager de Guadeloupe exprimé en nombre d’arrivées (hors réseau
local)
Dum = variable muette exprimant l’existence ou non de la route du rhum
Le modèle est ensuite transformé en logarithme comme suit:
log Yt =  + 1 log YFt + 2 log DPt + 3 log TOURt + Dum + t
17
où:
Yt = PIB régional de Guadeloupe à prix constants de 1992-2008
YFt = PIB de la France à prix constants de 1992-2008
DPt = Dépenses publiques de Guadeloupe à prix constants de 1992-2008
TOURt = Trafic passager de Guadeloupe, en nombre d’arrivées (hors réseau local) de
1992-2008
Les données sont extraites des comptes économiques de la Guadeloupe, publiés par
l’Insee ainsi que des rapports statistiques de la Direction générale de l’aéroport Pôle
Caraibe. Cependant, en raison de l’insuffisance des données statistiques disponibles, nous
n’avons pu couvrir que la période allant de 1992 à 2008, période au cours de laquelle
figurent quatre éditions de la route du rhum (1992, 1998, 2002, 2006). Les différentes
séries sont intégrées d’ordre 1 et sont par conséquent cointégrées, garantissant ainsi la
signification des tests statistiques employés généralement dans le contexte des
régressions par MCO. Après estimation, l’équation de régression devient:
Log Yt = - 6.14 + 0.29log(DPG) + 0.88log(YF) + 0.003log(TOUR) + 0.001Dum
(0.0388)
(0.1462)
(0.0119)
(0.9456)
(0.9060)
R2 adj = 0.99
DW= 1.27
Les nombres entre parenthèses expriment le degré de signification des variables
La capacité explicative du modèle est satisfaisante si l’on en juge par la valeur élevée du
coefficient de détermination (0.99). Les signes, les amplitudes des coefficients
apparaîssent aussi théoriquement satisfaisants et statistiquement significatifs. Le modèle
indique que 99% de la variation du PIB de la Guadeloupe peuvent être expliqués à la fois
par la variation du PIB de la France, par la variation des dépenses publiques en
Guadeloupe, par la variation du nombre de touristes, et par l’évènement de la route du
rhum. Le coefficient relatif aux dépenses publiques de Guadeloupe est de signe positif et
montre l’influence de ces dépenses sur la croissance économique de la région (+ 0.29), ce
coefficient signifie qu’un accroissement de 1% de ces dépenses se traduit par une
augmentation de 0.3 du PIB de la Guadeloupe. De même, On observe comme prévu une
influence positive de la croissance du PIB de la France sur celle de la Guadeloupe (+
0.88)). En revanche, les coefficients relatifs à l’activité touristique (nombre d’arrivées) et
à la route du rhum, tout en étant de signe positif, exercent tous deux une influence tout à
fait négligeable sur la croissance économique de la Guadeloupe, (0.003) pour le nombre
d’arrivées), et (0.001) pour la route du rhum.
Les deux derniers résultats ne sont pas surprenants. Ils s’expliquent pour l’essentiel par le
caractère exclusivement franco francais de la route du rhum. Les études et rapports
réalisés récemment (Dupont. L, 2008, 2007, 2006. CES 2007…) ont montré que les
ménages français dans une grande proportion ne considèrent plus la Guadeloupe et la
Martinique comme des destinations privilégiées, préférant aujourd’hui orienter leur choix
de destination de vacances sur d’autres lieux et d’autres évènements.
18
Les faibles performances compétitives réalisees par ces deux destinations sur les
différents marchés en sont la parfaite illustration (voir rapports statistiques 2003-2010
de la CTO).
3.0.5
Impact par les multiplicateurs de la base
Un multiplicateur régional désigne un opérateur qui permet de mesurer directement sur le
revenu et la production, les effets attendus d’une injection initiale de ressources dans
l’économie regionale. De ce fait, les multiplicateurs cherchent à évaluer un effet de
levier. L’analyse des multiplicateurs a été largement utilisée comme méthode
d’évaluation d’impact economique régional.
Dans cette section, nous nous inspirons des résultats d’une méta-analyse provenant des
travaux de Baaijens, Nijkamp, et Montfort pour déterminer par transfert, la valeur du
multiplicateur de revenu touristique de la Guadeloupe.
Rappelons que la méta-analyse est une méthode appliquée aux résultats d’études qui
utilisent le modèle de la base pour estimer les effets multiplicateurs des activités
économiques motrices comme l’exportation ou le tourisme.
Cette méthode est destinée à des synthèses de recherche. Un aspect important de la métaanalyse qui est aujourd’hui d’un grand interêt est la transférabilité sur d’autres territoires
des conclusions de recherches entreprises auparavant. C’est ainsi que Baaijens, Nijkamp,
et Montfort ont, à partir des résultats d’une méta-analyse portant sur 10 territoires
insulaires plus la Turquie, tirer la valeur du multiplicateur de revenu touristique de l’île
Grecque de Lesvos en méditerranée. Aussi, les méta-modèles élaborés à partir de ces
résultats permettent d’évaluer par transfert les multiplicateurs de base de d’autres régions
présentant des caractéristiques proches. Ces modèles ont été construits et analysés en
utilisant deux méthodes: l’économétrie (régressions linéaires multiples), et l’analyse des
ensembles approximatifs ou ‘Rough Set Data Analysis (RSDA)’.
Transférer la connaissance existante à une situation identique qui n’a pas été explorée
avant est un domaine de recherche intéressant. Aussi, pour déterminer la valeur du
multiplicateur touristique de la Guadeloupe, nous partirons des mêmes équations
proposées par Baaijens, Nijkamp et Montfort dans le cas de l’île Grecque de Lesvos.
19
Les fonctions proposées par ces auteurs sont les suivantes:
K = f (lnPOP, TU, lnSUR, BE, TU, GEO, POA)
K = f (lnPOP, TU, MO, lnTOA, TI, LSC, EL)
Où,
POP = nombre d’habitants
SUR = superficie en km2
GEO = 1 si la région est une île ou un archipel, 0 ailleurs
POA = 1 si la région est une nation indépendante, 0 si elle n’est pas indépendante
TU = 1 si la région est la Turquie, 0 ailleurs
BE = 1 si la région concerne les Bermudes, 0 ailleurs
MO = 1 si la méthode de Archer est utilisée, 0 si le modèle input-output est utilisé
TOA = nombre d’arrivées de touristes durant l’année
TI = indice touristique (nombre d’arrivées/population locale)
LSC = Part des arrivées du plus important pays émetteur
EL = dépense touristique dans les entreprises à capitaux locaux/dépense touristique
totale
Ce faisant, une analyse de régression est employée en deux étapes. En premier lieu, 8
équations de base sont estimées, dans lesquelles le multiplicateur d’économie touristique
est lié à des caracteristiques géographiques telles que la superficie (exprimée en milliers
de km2) ainsi qu’au nombre d’habitants (en milliers). Ces deux variables servent
d’indicateurs de diversité de l’activité économique dans chaque région. L’hypothèse
retenue est qu’il existe une relation positive entre le degré de diversité économique et le
multiplicateur, et par voie de conséquence entre le multiplicateur et la superficie, mais
également avec le nombre d’habitants. Une autre hypothèse de base retenue est que les
régions politiquement indépendantes affichent en moyenne selon les auteurs un
multiplicateur relativement plus élevé que celui des régions dépendantes et ce, en raison
de l’absence de barrières douanières entre ces dernières et leur métropole, rendant ainsi
ces régions moins autosuffisantes et leur degré de diversité économique plus faible.
En second lieu, 8 autres équations de base viennent compléter les précédentes, en y
intégrant d’autres variables telles que les flux touristiques, car une corrélation positive est
supposée exister entre le nombre de touristes accueillis et le multiplicateur. Cependant, le
nombre de touristes accueillis par rapport au nombre d’habitants (l’indice touristique)
pourrait exprimer en même temps l’existence d’un phénomène d’envahissement ou effet
de foule (crowding-out) si le nombre de touristes accueillis est considérablement plus
élevé que le nombre d’habitants. En outre, le multiplicateur de revenu touristique est
supposé relativement plus faible lorsqu’un pays émetteur accapare à lui seul une
proportion très importante des flux touristiques d’une region donnee, comme semble être
le cas de la France en Guadeloupe comme en Martinique. Les investisseurs en
provenance de cette catégorie de pays accaparent en même temps une large portion du
secteur touristique du pays récepteur. En conséquence, une grande partie de leur profit
réalisé sur place est délocalisée, réduisant ainsi les effets directs de la dépense touristique.
Enfin, rappelons que plus grandes seront les dépenses touristiques effectuees dans les
entreprises à capitaux locaux, plus grand sera le multiplicateur de revenu.
20
Au total, 16 équations différentes ont été estimées par les auteurs afin d’identifier celles
qui, statistiquement présentent une plus grande robustesse dans l’évaluation du
multiplicateur.
Le tableau 7 affiche les résultats des huit dernières estimations qui ont servi à évaluer le
multiplicateur de revenu touristique de l’île Grecque de Lesvos et que nous utiliserons à
notre tour pour déterminer celui de la Guadeloupe. Offrant moins d’intérêt, les huit
premières estimations ne sont pas présentées car elles ne prennent pas en compte les
variables touristiques.
Tableau 7: Résultats de l’estimation des modèles de base
Il ressort de ce tableau que les équations allant de (11) à (15) fournissent plus
d’informations sur les variables touristiques que les autres. Par conséquent, nous nous
concentrerons d’avantage sur ces équations, et plus particulièrement sur les modèles (14)
et (15) qui serviront de base pour le calcul du multiplicateur de revenu touristique de la
Guadeloupe. En définitive, le modèle (14) sera choisi car offrant un plus grand coefficient
de détermination (0.93) que le modèle (15) et donc un meilleur pouvoir explicatif. Le
multiplicateur issu du modèle (14) s’exprime dans le tableau comme suit:
Modèle (14): K = -0.57 + 0.096ln(POP) + 0.86TU + 0.039TI
21
Quelle est donc la valeur du multiplicateur de revenu touristique de Guadeloupe que l’on
peut déduire de cette equation? et quelles sont les inférences interprétatives qui en
découlent?
Pour y répondre, les données statistiques suivantes de Guadeloupe sont utilisées et
intégrées à l’équation précédente:
Population (en 2008): 404 000 hab
Superficie: 1750 km2
Statut politique: Département-Région d’outre-mer de la France
Nombre de touristes de séjour (2008): 366000
Part du plus grand pays emetteur (France): 95%
Indice touristique: 0.90
Une fois ces donnees intégrées à l’équation, il en ressort pour la Guadeloupe un
multiplicateur (K) de revenu touristique de 0.89 contre par exemple 0.98 pour l’île de
Lesvos, 1.09 pour les Bermudes et 1.98 pour la Turquie. Ce résultat apparaît
statistiquement raisonnable et proche de celui obtenu à l’aide du multiplicateur keynésien
de revenu (0.85) dont la formule est la suivante:
K=
1
1-c (1-t) + m
où,
c = la propension marginale à consommer;
t = le taux de fiscalité
m = la propension marginale à importer
En effet, pour une propension marginale à consommer estimée pour la Guadeloupe à 1.6,
un taux de fiscalité (taux des prélèvements obligatoires) à 30% (0.3), et une propension
marginale à importer à 1.3, le multiplicateur keynesien de revenu s’élève en Guadeloupe
à 0.85 et est donc très proche de celui du multiplicateur de base précédemment évalué.
En résumé, ce résultat signifie que pour tout euro extérieur injecté dans l’économie
locale, 89 ou 85 centimes de revenus individuels reviendraient dans celle-ci sous forme
de salaires, de rémunérations ou de dividendes pour les résidents locaux.
22
4.0 Synthèse des résultats et principaux enseignements
La route du rhum présente un impact en volume par l’injection des consommateurs
extérieurs (tourisme). Cette injection est considérée comme la source principale de
l’impact et comme une ressource nouvelle pour la destination. Le reste de l’impact
provient des dépenses nettes d’organisation et d’investissement réalisées par l’état et les
collectivités locales, dépenses considérées en revanche comme un coût pour ces derniers.
L’ampleur respective de ces deux types d’impact mérite d’être commentée en termes
d’analyse coût-bénéfice car au delà du constat général, quatre conclusions émergent de
cette analyse.
1- sur les neuf dernières éditions, la route du rhum affiche une baisse tendancielle de
la fréquentation touristique.
2- la manifestation engendre un faible ratio coût-bénéfice (dépenses des
visiteurs/budget) et par conséquent un faible retour sur investissement puisque les
dépenses touristiques ne couvraient en 2002 que 36% du budget consacré à
l’évènement.
3- le multiplicateur de revenu touristique (0.89) apparaît faible par rapport à
l’importance de l’évènement
4- cette manifestation a une incidence mineure sur la croissance économique de la
Guadeloupe.
En clair, en dépit de sa large couverture médiatique, de l’engouement sportif qu’elle
suscite, et de l’importance des sommes consacrées à son organisation et à sa promotion,
la route du rhum induit des impacts économiques tout a fait modestes sur l’ensemble de
l’économie de la Guadeloupe. En effet, on observe depuis les cinq dernières éditions de la
route du rhum, une baisse tendancielle de la fréquentation de visiteurs étrangers qui se
seraient déplacés pour cette manifestation, baisse se traduisant à la fois par une réduction
des taux d’occupation des établissements d’accueil et par une baisse de leur chiffre
d’affaires.
Cette baisse de fréquentation s’explique pour l’essentiel par le fait que la Guadeloupe en
tant que destination touristique accuse depuis plusieurs années un déficit d’image, et une
perte de compétitivité sur le marché du tourisme international. Les touristes Français qui
composent à 95% la clientèle des structures d’accueil de la région ne considèrent plus la
Guadeloupe et la Martinique comme des destinations élitistes. A la recherche de plus
d’authenticité et d’originalité ainsi que de meilleur rapport qualité/prix dans les pays
récepteurs, ces touristes préfèrent aujourd’hui orienter leur choix de destination de
vacances sur d’autres lieux et d’autres évènements, il en découle ainsi un faible retour sur
investissement de la route du rhum.
Par ailleurs, au delà des données statistiques de fréquentation, l’impact économique
proprement dit de la manifestation apparaît également mineur si l’on en juge par le
niveau relativement faible du multiplicateur de revenu touristique affiché et par la
médiocre incidence de l’évènement sur la croissance économique de la Guadeloupe. Par
conséquent, cette manifestation n’exerce pas une influence quantitative significative sur
l’ensemble de l’économie Guadeloupeenne et ce, en raison d’un d’un fort taux de fuite
régionale qui découle pour l’essentiel de l’ampleur des importations dérivées, et du
23
caractère faiblement intégré de l’économie locale. Enfin, toutes choses égales par ailleurs,
comparée en termes de ‘rentabilité’ et de compétitivité à d’autres manifestations sportives
et culturelles de la Caraibe, les impacts économiques de la route du rhum sont
notoirement inférieurs à celles-ci (voir tableau 8) et notamment à celles de : la semaine de
la voile à Antigua (sailing week), des tournois internationaux de golf et de cricket
organisés à la Barbade, à la Jamaique et aux Bermudes, du cropover de la Barbade,
carnaval célébrant annuellement la fin de la récolte de la canne à sucre, du reggae
sunplash de la Jamaique, festival d’une durée de cinq nuits à la gloire du reggae et à ses
plus grandes stars, du carnaval de Trinidad et Tobago, du festival du merengue de la
République Dominicaine etc..
Tableau 8 : Impacts économiques comparatifs de quelques évènements sportifs et
culturels dans la Caraibe (1998).
Carnaval de Trinidad
Festival de Jazz Cropover
de Ste Lucie de Barbade
Budget (millions US$)
2.0
1.55
1.021
Route du
rhum
(2002)
3.8
Arrivées de visiteurs
32071
9929
4428
3000
Part dans les arrivées
annuelles
9.2
3.9
0.86
0.57
Dépenses des visiteurs
étrangers (millions $)
14.08
14.15
2.42
1.4
Ratio coût-bénéfice
(dépenses visit/budget)
704
913
237
Sources : ITC Executive Forun (2005) et calculs de l’auteur
36
Le principal enseignement qui émerge de ce tableau est que la route du rhum, par rapport
à d’autres évènements de la Caraibe est à l’évidence une manifestation sportive ‘no
profitable’ et ‘no competitive’ si l’on se base par le faible ratio coût-bénéfice qu’elle
réalise, ratio qui ne lui permet pas de couvrir par les recettes touristiques l’ensemble des
dépenses d’investissement, d’organisation et d’animation qu’exige cette attraction. Par
conséquent, la question de l’efficacité de ces dépenses et de leur rendement doit être posé
aujourd’hui plus que jamais. En revanche, on constate que la plupart des festivals et
carnavals de la Caraibe ont un bon retour sur investissement et génèrent un chiffre
d’affaires qui représente le plus souvent plus de 10% de la dépense touristique annuelle,
faisant ainsi de ces activités le pivot des industries culturelles de ces destinations. Enfin,
ce tableau nous enseigne également que parmi les pays analysés, l’évènement culturel qui
présente le ratio coût-bénéfice le plus élevé est le festival de jazz de Ste Lucie avec 9.1, le
carnaval de Trinidad et Tobago est classé second avec un ratio de 7, le cropover de la
Barbade affiche un ratio de 2, tandis que la route du rhum, évènement sportif ne réalise
qu’un ratio de 0.3.
24
5.0 Conclusion
Cette étude s’est attachée à saisir l’impact de la route du rhum sur l’économie de la
Guadeloupe en ayant recours à trois approches: deux en niveau, dont l’une détermine les
multiplicateurs input-output par application d’un TES de l’économie Guadeloupeenne, et
l’autre, les valeurs du multiplicateur de la base, par utilisation des résultats d’une métaanalyse.
La troisième approche qui est dynamique, spécifie à l’aide d’un modèle économétrique,
l’influence d’un certain nombre de variables (dont celle relative à la route du rhum) sur la
croissance économique de la Guadeloupe. Les résultats obtenus convergent et montrent
que malgré la forte couverture médiatique de l’évènement, la ferveur sportive suscitée, et
l’importance des sommes consacrées à son organisation , globalement les retombées
économiques de la manifestation, et plus particulièrement ses effets d’entraînement sur le
tissu productif local sont faibles, en raison notamment du faible degré d’intégration du
territoire autour de sa structure productive (plus le degré d’intégration est fort et plus les
fuites sont faibles).
L’analyse révèle également qu’au plan touristique, cet évènement est avant tout perçu
comme un vecteur de communication et de notoriété, or la route du rhum, manifestation
franco française par excellence subit en termes de fréquentation touristique un effet de
débordement ou de contagion négatif (spillover effect) résultant du déficit d’image
qu’accuse depuis plusieurs années la destination Guadeloupe sur le marché du tourisme
international en général et sur celui de la France en particulier. A cela, ajoutons que les
ménages Français dont plus de 30% constituent une clientèle ‘affinitaire’, séjournant aux
Antilles en famille et chez des amis ne considèrent plus la Guadeloupe et la Martinique
comme des destinations élitistes, préférant pour des raisons tenant à de meilleurs
rapports qualité/prix affichés dans d’autres pays, orienter leur choix de vacances sur
d’autres lieux et d’autres évènements. De plus, le développement touristique du territoire
n’est pas la priorité de l’organisateur, l’impact touristique de l’évènement est alors
considéré comme un effet induit, marginal par rapport à sa finalité première qui est avant
tout sportive. Aussi, le 9e anniversaire de la route du rhum (2010) devrait être l’occasion
pour les autorités nationales et locales d’envisager une nouvelle manière de gérer cet
évènement afin d’aborder avec franchise les véritables enjeux de cette manifestation.
Dans ces conditions, il est nécessaire de disposer à l’avenir d’une meilleure visibilité sur
la valeur ajoutée touristique de l’évènement, de mieux évaluer au plan local ses
retombées touristiques et économiques, et de sortir définitivement du seul schéma:
médiatisation – fréquentation – consommation proposé jusqu’ici.
Enfin, cette étude, si elle a permis d’évaluer sous differentes formes les effets
multiplicateurs des dépenses effectuées à l’occasion de la route du rhum, elle mérite
cependant d’être complétée dans le futur par une recherche nouvelle, portant cette fois
sur une analyse coût-bénéfice plus approfondie de la manisfation, analyse qui
combinerait à la fois les effets économiques et environnementaux de l’évènement.
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