Les paradoxes de l’Iran - 2 -
- les inventions religieuses sont aussi marquées par cette dualité : le zoroastrisme développé depuis le VIIe
avant JC et devenu religion officielle avant la conquête arabe, est une tentative d’organiser le monde pour faire
triompher le bien du mal. Le manichéisme, né en Perse au IIIe siècle après JC, est également une doctrine basée
sur l’idée que l’univers est divisé entre le royaume des ténèbres et celui de la lumière, le bien et le mal.
L’homme doit renoncer au matériel pour fuir les ténèbres et accéder à la lumière. Le chiisme apparu au VIIe
siècle après JC, est une religion de l’apparent et du réel et ses adeptes peuvent cacher leur appartenance s’ils se
sentent menacés. Cette attitude se répercute dans les arts, notamment le cinéma (le cinéaste Kiarostami sait bien
rendre le visible et l’invisible) ;
- le comportement des Iraniens est lui-même marqué par une certaine schizophrénie : il existe chez chacun
d’entre eux une identité privée et une identité publique. Alors que la police des mœurs impose un code à
l’extérieur, les Iraniens se défoulent à l’intérieur dans les soirées privées (utilisation de la drogue, de l’alcool…).
B/ Des contradictions inscrites dans la géographie iranienne
L’Iran est entourée de nombreux voisins (une quinzaine si l’on compte ceux accessibles par voie
maritime comme l’Arabie Saoudite ou Oman). Tous sont de confession sunnite et l’on peut comprendre que
l’Iran se sente submergée et qu’elle les considère comme des ennemis héréditaires. C’est pourquoi elle mène
une guerre d’influence avec ses voisins surtout depuis que les Etats-Unis ont recommandé de débaptiser le golfe
Persique pour l’appeler golfe Arabique. Très présomptueux de leur force, les Iraniens, habiles en informatique,
ont réussi à bloquer cette appellation sur Google !
L’Iran est une terre de contrastes, grande comme trois fois la France, composée d’un plateau central
(d’environ 800 m d’altitude) entouré de montagnes qui culminent à plus de 4000 m. Des plaines étroites et
humides composent le nord-ouest en bordure de la mer Caspienne. A la frontière irakienne, se trouvent les zones
pétrolifères stratégiques. Le centre est souvent appelé le « Grand lac salé » mais l’Iran ne manque pas vraiment
d’eau : le système d’irrigation, très ancien, a consisté à collecter l’eau descendue des montagnes dans des
aqueducs (qanâts) pour arroser les plaines arides. Cela a permis l’aménagement d’oasis très prospères avec des
jardins extraordinaires comme à Yazd. L’eau est une richesse que les Iraniens vendent au prix du pétrole et qui
constitue un véritable pari pour l’avenir. Mais les conditions physiques ne constituent pas les seuls paradoxes.
II/ L’évolution de la démographie, reflet des contrastes internes
La population iranienne présente des spécificités particulières.
A/ Un pays multiethnique
Le pays comporte aujourd’hui 67 millions d’habitants qui parlent une multitude de langues. A Téhéran, 60% de
la population est bilingue, parlant le persan et souvent le turc (notamment dans la région iranienne
d’Azerbaïdjan). La turquicité est une histoire ancienne, liée à de nombreuses dynasties qui se sont succédé :
Seldjoukides, Safavides, Kadjars, Pahlavi. La diversité linguistique explique l’intérêt des Iraniens pour l’étude
des langues.
B/ Une grande diversité religieuse
L’immense majorité des Iraniens est chiite mais il existe d’autres religions très minoritaires à l’intérieur du
pays : Sunnites, Chrétiens, Juifs, et 45 000 Zoroastriens, qui ont la liberté de culte mais qui subissent des
discriminations considérables, sont exclus de certaines fonctions officielles comme la magistrature, tout en étant
représentés au Parlement. Une autre communauté, les « Baha’is » (environ 300 000) sont mis à l’écart, privés
de droits civils et considérés comme apostats.