Agriculteurs Français et Développement International
REVUE DE PRESSE n° 55. Burkina
Oasis : "quel avenir pour le continent africain face au retour des questions ethniques, aux
révolutions arabes, au risque de délitement des Etats" ? C'est la question posée par Achille
Mbembe dans Jeune Afrique (Hors série n° 35, l'Afrique en 2014). Le Burkina, présenté comme un
pays stable, avec un président Blaise Compaoré confirmé comme médiateur régional dans la
crise malienne (les négociations se sont déroulées à Ouagadougou), serait-il une heureuse
exception, un modèle dans la très instable zone subsaharienne ?
Enigme : "Le Burkina est entré en zone de turbulences en 2013, et cela pourrait durer si
Blaise Compaoré continue de laisser planer le doute sur ses intentions". La Constitution lui
interdit de briguer un nouveau mandat en novembre 2015 (il est au pouvoir depuis 1987), sauf
à la modifier, ce que son entourage propose mais que l'opposition refuse.
Faits et chiffres : contestation sociale et militaire en 2011, incertitude politique, prise de
distance de l'Eglise (les évêques, dans une lettre du 15 juillet 2013, dénoncent la corruption et
une gouvernance de plus en plus déconnectée de la réalité), heurts entre les étudiants et les
forces de l'ordre, tensions au nord avec l'arrivée de réfugiés maliens (un millier de soldats ont
été envoyés pour sécuriser la frontière)… autant de signes faisant craindre pour l'apparente
stabilité du pays.
En même temps, le Burkina fait partie des bons élèves de l'Afrique avec des taux de
croissance élevés (8 % en 2011, 6,5 % en 2013, autant attendus en 2014), même si les
performances des deux secteurs clés de l'économie (le coton et l'or) ont été en-deçà des
espérances. C'est l'un des rares pays ayant inscrit l'agriculture au rang des priorités nationales
en lui consacrant plus de 10% de son budget (une conférence internationale a eu lieu en 2012
pour attirer des investisseurs étrangers dans le secteur agricole). Cependant, ses performances
en matière de développement global (économie, santé, scolarisation et alphabétisation) restent
décevantes depuis de nombreuses années (183° rang mondial sur 187).
Démographie et urbanisation : 4 millions d'habitants en 1960, 9 millions en 1990 et 17
millions aujourd'hui ! Nourrir une population de plus en plus urbaine et procurer un emploi à
des jeunes de plus en plus nombreux (47% de la population a moins de 15 ans), deux défis
redoutables pour un pays enclavé ne disposant pas de structures suffisantes (réseau routier,
eau, assainissement, stockage, froid) avec peu de marge de manœuvre budgétaire.
Les jeunes sont tentés par la ville (Ouagadougou compte actuellement 1,5 million d'habitants,
Bobo-Dioulasso 500 000) ou souhaitent quitter le pays. Compte-tenu des caractéristiques du
pays, beaucoup pensent que l'agriculture familiale est un atout majeur et incontournable pour
sécuriser l'alimentation du pays et fournir une activité décente aux trois-quarts de la
population, celle vivant en milieu rural.
Santé : un programme européen (avec la MSA de Charente-Maritime à la maîtrise d'œuvre
en partenariat avec l'Union des producteurs de coton du Burkina) est à l'essai pour "définir le
panier de soins le plus adapté aux besoins sanitaires de la population et profiler au plus juste
le niveau de cotisations acceptable compte tenu de sa capacité contributive". Ce projet posera
les fondements d'un organisme régional d'assurance maladie obligatoire de type mutualiste,
sur la base d'une adhésion professionnelle pour "améliorer la santé des producteurs de coton
et leur permettre d'assurer l'équilibre économique des revenus de leurs familles".