l'Église catholique, Luther n'a d'autre choix que de soutenir l'autorité princière de l'État comme autorité
suprême.
Cette évolution apparaît très nettement quand la réforme religieuse entreprise par Luther fait naître des
idées et des mouvements plus radicaux. En 1524 - 1525, des révoltes paysannes éclatent en Allemagne
centrale et méridionale : Luther les dénonce avec véhémence, craignant d'en être rendu responsable, et
publie même en 1525 une Exhortation à la paix . Au même moment, le radicalisme religieux et social
conduit aux positions extrêmes des anabaptistes qui rejettent le baptême de l'enfant et réclament la
communauté des biens. Ils ont été férocement persécutés.
IV. La guerre religieuse en Allemagne
L'affrontement entre catholiques et luthériens en Allemagne est inévitable, avec des succès divers. En
1529, les princes luthériens et des villes libres protestent contre la décision de Charles Quint, prise lors de
la deuxième diète de Spire, cherchant à leur enlever la liberté religieuse qu'il leur avait concédée lors de la
diète de 1526. De cette réaction vient le nom de "protestant", qui désigne depuis tous ceux qui pratiquent
la religion réformée. L'Église luthérienne, souvent en grand péril, ne réussit à s'implanter que parce que
Charles Quint ne consacre pas tous ses efforts à combattre l'hérésie. En fait, les princes allemands, qu'ils
soient protestants ou catholiques, ne souhaitent nullement que Charles Quint devienne trop puissant. Pour
la même raison, la France catholique est prête à s'allier aux luthériens afin d'affaiblir la puissance
impériale.
Luther meurt en 1546 à Eisleben, mais les guerres continuent en Allemagne jusqu'à la signature de la paix
d'Augsbourg en 1555. Cette paix consacre le partage de l'Allemagne entre le luthéranisme et le
catholicisme. Elle montre aussi que les Européens sont encore loin de l'idée de tolérance : dans chaque
État, c'est le prince qui choisit la religion et l'impose à ses sujets. À cette époque, la plus grande partie du
nord de l'Allemagne est luthérienne et le luthéranisme devient la religion officielle des États scandinaves.
En Suisse, Ulrich Zwingli (1484 - 1531) introduit en 1522 - 1523 à Zurich une légère variante de la
religion réformée : il est en désaccord avec Luther sur certains points doctrinaux. De fait, les divisions
religieuses se multiplient à travers l'Europe. En Angleterre, c'est le roi Henri VIII qui rompt avec le pape
et se proclame chef de l'Église d'Angleterre. Après une période de changements et de revirements, la reine
Élisabeth Ire qui accède au trône en 1558 institue définitivement l'Église anglicane.
L'avènement du calvinisme
Le protestantisme devient non seulement la religion officielle de ces États mais, au milieu du siècle, il
s'étend aussi à l'Écosse, à la France, aux Pays-Bas, à la Lituanie et à la Bohême. Dans ces pays et dans
d'autres régions où l'issue du conflit est encore incertaine, le luthéranisme débouche sur une forme de
protestantisme plus austère et plus militante : le calvinisme, fondé sur les enseignements issus du livre du
Français Jean Calvin, Institution de la religion chrétienne (1536). Calvin (1509 - 1564) est encore plus
influent après 1541, lorsqu'il s'installe dans la cité-État de Genève, en Suisse, et la transforme en une "cité
de Dieu", considérée par de nombreux protestants comme un modèle de société.
Calvin affirme que le salut (ou la damnation) ne relève pas du choix humain mais qu'il est décidé à
l'avance par Dieu. Les "Élus" sont ceux que celui-ci a choisi de sauver. Malgré son pessimisme apparent,
cette doctrine de la prédestination incite les calvinistes à se conduire comme s'ils faisaient partie de ces
élus, s'obligeant ainsi à un niveau élevé de moralité et de discipline.
Le calvinisme se caractérise aussi par son organisation, qui, au lieu de permettre à l'État de gouverner les
Églises, donne le pouvoir religieux, politique et social au pasteur et à la congrégation. L'État calviniste