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Du coup la perception des distorsions interactives ,la réflexion sur l’économie et la
signification des conduites n’a plus lieu d’être
Le « toujours déjà là »de la pathologie inscrit l’enfant vulnérable dans une prédiction
négative avec un risque,me semble-t-il d’enkystement inexorable des troubles
Dans le champ de la psychiatrie précoce, nous pensons habituellement que les
processus pathogènes sont d’abord « souples ,plastiques, et probablement réversibles »
(GOLSE) .Ce regard ici s’évanouit ;la « prédiction auto réalisatrice » contenue dans l’énoncé
même du diagnostic à hypothèse génétique peut se vérifier.
J’ai parlé jusqu’ici des effets singuliers ,individuels ,de ces hypothèses ;ce mouvement
est tout aussi repérable dans le discours médical ou institutionnel sur ces mêmes
pathologies :
pour exemple ,le chapitre « étiologie » dans un livre sur l’autisme infantile des année
70 (F TUSTIN) il n’y a pas un mot sur une participation génétique à ce trouble et dans une
réédition de 1992, ,tout juste concède-t-elle qu’il y a peut–être une base organique dans
certains cas ; tous les autres ,elle les appelle des « autismes psychogènes » et on reconnaît ici
la doxa prègnante pendant plusieurs décennies.
On est bien loin de ce numéro récent de la très sérieuse revue « la Recherche » qui
titrait « la vérité sur l’autisme :une maladie génétique » … ,même si le contenu était
beaucoup moins plein de certitudes que ce titre -accrocheur parce que reflet des attentes
supposées du public .
Ce mouvement de bascule qui va de l’enfant fou –soignable donc ,à l’enfant fixé
dans un handicap dès l’origine est tout à fait en miroir de ce que M FOUCAULT décrit dans
son cours déjà cité sur « la psychiatrisation de l’enfance » .
Il y montre de façon convaincante comment apparaît au début du 19ème siècle la
notion d « idiotie » , absolument distincte de la folie telle qu’on la décrivait jusque-là (fureur
,manie ,agitation).,quand.Esquirol ,puis Seguin introduisent la notion de
« développement » .Il s’agit d’une représentation nouvelle d une faculté que l’on a ou que
l’on a pas, c’est-à-dire d’un état constitutionnel relié à « des vices organiques de
constitution » comme le dit la terminologie de l’époque .L’idiotie ,radicalement hétérogène à
la « maladie mentale » est donc préexistante, ,primaire , et incurable et s’oppose en tous
points à la folie, secondaire ,accidentelle , et curable.
Plus tard , l’idée de développement sera construite dans une temporalité commune à
tous ,arrivant à un point idéal : « le développement normal »,et une nouvelle distinction sera
possible entre les idiots –absence de développement -,et les imbéciles,pour qui le
développement est seulement retardé.
Est introduit alors une double normativité,d’une part par rapport à l’adulte ,comme
point d’aboutissement idéal ,et d’autre part par rapport à la moyenne des enfants du même
âge.
C’est d’ailleurs à ce moment que naissent, avec les savoirs de l’époque les hypothèses
sur l’étiologie génétique de ces troubles du développement,qui conduiront par le biais des
pathologies héréditaires à ce grand mouvement que nous regardonsà présent avec horreur :
celui des conceptions sur la dégénérescence. .
A partir de cette nosographie du 19° , la psychiatrisation de l’enfance ,c’est à dire son
appropriation par le discours et les institutions psychiatriques ,se fait non pas sur la folie
,mais bien sur l « anomalie », sur l’arriération pour laquelle « les soins relèvent de
l’éducation » (on entendra ici l’écho actuel de ces formulations…)
Soulignons que cette médicalisation de l’idiot, ,selon la thèse de FOUCAULT. se fait
pour des raisons économiques ,.