Abd El-Kader

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Abd El-Kader
L'émir Abd El-Kader (arabe: ‫( )القادر الجزائري عبد‬né en 1808 à Mascara en Algérie - décédé le 24 mai 1883 à
Damas Syrie), est un écrivain, poète, philosophe, résistant militaire et homme politique, fondateur de l'État
algérien. Il se trouve aussi etre un ami de Napoléon III.
Origine
Son père Sidi Mahir Ed-Din était un cheikh de l'ordre soufi Qadiri. Sa mère, Zora, une femme savante de toute la
contrée. Il naquit à La Zaayah, une école religieuse de la Guyathnali (les Tentes), à quatre lieues de Mascara, à
gauche de la route qui va d'Oran à cette ville. La date la plus probable de sa naissance est le 6 mai 1807.
Issu d'une famille de marabouts de la tribu des Hachem-Rh'erïce, située dans les environs de Mascara. Le nom
entier, comprenant la généalogie, de l'émir est : Hadj Abd El-Kader Oulid Sidi El-Hadj Mahir Ed-Din Ben Sidi
Kadah Ben Sidi El-Mokiar ; ce qui signifie : Pèlerin serviteur du Tout-Puissant, fils de mon Seigneur Pèlerin qui
vérifie la religion, fils de mon Seigneur Repos, fils de mon Seigneur le Choisi.
Education musulmane [modifier]
Il eut une éducation religieuse musulmane. Abd-el-Kader était à peine âgé de huit ans que son père l'emmena avec
lui dans un voyage qu'il fit à la Mecque. A leur retour, Achmed-Bilhar, homme lettré et frère de Mahi-el-Din, prit
chez lui le jeune pèlerin et se chargea de son éducation, qui consista dans l'étude du Coran, les principes des
sciences physiques et morales, de la géométrie et de l'astronomie, la gymnastique, l'exercice du cheval et le
maniement des armes.
Mahi-el-Din envoya ensuite son fils à Oran, chez Sidi-Achmed-ben-Kodja, qui le garda dix-huit mois et lui
enseigna la politique.
Pendant ce temps, Mahi-el-Din raconta aux chefs des tribus voisines les visions surnaturelles qu'il avait eues
pendant son voyage à la Mecque et depuis son retour, touchant l'avènement de son fils. Ses prédictions obtinrent
l'effet qu'il désirait ; il avait conquis à sa cause de nombreux partisans, et les idées de réforme qu'il avait semées
étaient prêtes à porter leurs fruits. Pensant que le moment d'agir était venu, il rappela son fils et le présenta aux
Arabes comme le libérateur. Le bruit de cette conspiration s'étant répandu à Oran, le bey Hassan, turc d'origine, et
gouverneur de la province, fit mettre en prison le vieux Mahi-el-Din. Celui-ci ayant su intéresser la femme du bey
en sa faveur, par l'entremise des amis qu'il avait à Oran, obtint d'être libéré à la condition qu'il s'exilerait.
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Voyages
Mahi-el-Din fit une seconde fois le voyage de la Mecque avec son fils. C'était en 1820, le capitaine Jovas,
commandant le Castor, brick du commerce français, prit à son bord le père et le fils, avec un certain nombre
d'aspirants au titre de hadj, et les transporta à Alexandrie.
Mahi-el-Din et son fils, après avoir visité la Mecque et Médine, allèrent faire leurs dévotions à Bagdad, au
tombeau du célèbre marabout Sidi Abd-el-Kader-el-Djelani, qui a des chapelles (koubbah) par toute l'Algérie et
notamment à Alger. Ils recueillirent précieusement tout ce qui pouvait intéresser les populations du désert, et à
leur retour ils racontèrent de vieilles légendes, d'anciennes prophéties, qui annonçaient qu'Abd-el-Kader
deviendrait un jour le sultan des Arabes.
Pendant son séjour en Égypte, Abd-el-Kader avait été frappé des changements que Méhémet-Ali venait de faire
subir à son armée et des améliorations apportées dans l'administration de ses états; il se sentit un immense désir
de le prendre pour modèle, et son père l'encouragea dans ses idées.
Réfugiés tous deux dans leurs tentes, ils passaient leurs journées en prières. La vénération qu'ils s'étaient acquise
avait tellement grandi, que les Arabes arrivaient en foule au Douar des Hachem, apportant comme offrandes du
grain, du bétail, des chevaux, de l'or, de l'argent et des armes. C'est de cette époque que datent les nombreuses
richesses d'Abd-el-Kader et sa haute influence sur toute la contrée.
Hassan-Bey, voulant mettre enfin un terme à ces menées révolutionnaires, prononça la peine de mort contre le
père d'Abd-el-Kader ; mais il était trop tard.
L'arrivée des français
La prise d'Alger par les Français venait de porter un coup terrible à l'empire des Deys et à la domination turque.
Le vieux marabout déchira le voile qu'il n'avait fait qu'entr'ouvrir et se mit à prêcher la guerre sainte. Des milliers
d'Arabes accoururent et se rangèrent sous ses ordres ; on vit bientôt le puissant gouverneur d'Oran, Hassan, réduit
à demander asile à celui dont il avait mis la tête à prix. Le marabout allait lui offrir l'hospitalité et ses services;
mais Abd-el-Kader s'y opposa énergiquement, et le bey d'Oran dût se rendre quelques jours après aux troupes
françaises.
Mahi-el-Din, choisi comme chef de l'insurrection arabe, marcha avec ses troupes contre la garnison turque de
Mascara, et la massacra sans pitié ; plus tard il combattit les français sous les murs d'Oran, et y déploya un grand
courage. Le jeune Abd-el-Kader s'y distingua particulièrement ; il semblait être à l'abri des balles et des boulets; il
eut deux chevaux tués sous lui. Le burnous blanc qu'il y portait, et qui y fut rougi du sang des siens, a été
conservé-comme une relique.
Depuis la prise d'Alger, le parti arabe semblait avoir recouvré sa liberté, mais il était pour ainsi dire sans chef :
Mahi-el-Din, tout influent qu'il était, n'était pas souverain. Quelques tribus ne lui obéissaient pas. D'un autre côté
les Arabes voyaient avec inquiétude la conquête française s'étendre. La soumission d'Ibrahim, bey de
Mostaganem, acheva de les décourager ; il y eut une assemblée générale des chefs de tribus pour procéder à
l'élection du sultan des Arabes. Le rendez-vous eut lieu dans la plaine d'Eghris, dans un lieu nommé Ersebia. Il fut
question de nommer Mahi-el-Din ; mais celui-ci leur dit que le marabout Sidi-el-Arrach était plus digne que lui
d'un si grand honneur. Le conseil se retira pour se réunir le lendemain. Ce jour-là, on vit arriver Sidi-el-Arrach :
Frères, dit-il, en élevant les mains vers le Ciel, cette nuit, le célèbre marabout Mahi Abd-el-Kader m'est apparu au
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milieu de sa gloire, et m'a dit : « Sidi-el-Arrach, retiens bien ces paroles d'où dépend le salut de notre race. Je ne
connais qu'un seul homme qui, par ses vertus, son courage et son intelligence-, soit digne de commander aux
Arabes : c'est Abd-el-Kader, troisième fils de Mahi-el-Din. Je t'ordonne donc de répéter demain au conseil ce que
tu viens d'entendre. Allah et son prophète s'intéressent à la cause de ses enfants et veulent qu'elle triomphe. »
Mahi-el-Din intervint alors et ajouta : « J'ai entendu les mêmes paroles que Sidi-el-Arrach, et j'ai reçu les mêmes
ordres, mais je mourrai dans l'année qui suivra l'avènement de mon fils. Telle est la prophétie de mon aïeul. »
Sultan
Le titre de sultan fut alors accordé à Abd-el-Kader, les chefs s'inclinèrent et lui présentèrent le burnous violet.
Ceci se passait en l'an de l'hégire 1248, (1832), 28 septembre. Le nouveau sultan se mit à prêcher la guerre sainte,
et il réunit autour de lui une foule d'hommes braves et dévoués. Après que l'affaire de la Macta eut consolidé sa
puissance, il songea à se créer une force militaire permanente, déploya une grande habileté, et fit preuve d'une
rare observation. Voyant l'armée française composée en grande partie d'infanterie, il se forma un corps de
cavalerie qui pût attaquer, poursuivre ou éviter un combat inégal. Ce premier corps ne montait d'abord qu'à 400
hommes qui rendirent de grands services au sultan. Pour entretenir des bataillons réguliers, il mit des taxes sur les
marchandises, il leva des impôts; puis fit bâtir des magasins de vivres, d'armes et de munitions.
Lorsqu'il commença à faire la guerre aux français dans l'ouest de l'Algérie, le général Louis Alexis Desmichels
était gouverneur de la province d'Oran ; comme son prédécesseur, il était indépendant du général en chef. Il crut
que les Arabes se laisseraient influencer ou intimider par la supériorité française… Il se trompait; au mois de mai
1833 il battit plusieurs fois Abd-el-Kader, et s'empara de Mostaganem. L'émir, indigné de voir les Musulmans
venir approvisionner les marchés français, fit enlever le chef d'Arzew qui venait de se soumettre, et le conduisit à
Mascara où il fut étranglé. Au mois d'octobre de la même année ses troupes attaquèrent l'escorte de la commission
d'Afrique, forte de 1 800 hommes, mais il fut battu près de Aïn-el-Bidha.
Abd-el-Kader, à la mort de son père (1833), se retira quelque temps à Mascara, puis revint se mettre à la tête de
ses troupes, fit bloquer la ville d'Oran par la tribu des Rharaba et couper toute communication avec Mostaganem
par celle des Hachem. La tactique réussit, les arrivages cessèrent sur les marchés français. Les tribus soumises
cherchèrent à se détacher des français.
Abd-el-Kader, profitant de l'état des esprits, tendit un piége aux français dans lequel quatre d'entre eux furent faits
prisonniers et un cinquièmp tué. Le général Desmichels lui écrivit pour réclamer les soldats victimes d'une
trahison infâme, mais Abd-el-Kader refusa de les rendre et termina sa réponse par un défi.
Le général Desrnichels ne fit pas longtemps attendre la réponse. L'affaire de Tamezouat n'avait pas encore
intimidé les Arabes. On avait, après le combat, renvoyé les femmes et les enfants des douars qui étaient tombés
dans le pouvoir français ; et les indigènes, ne comprenant nullement le motif de cette mesure, pensaient que ceuxci avaient agi, non pas avec générosité, mais avec faiblesse.
Lorsque, après cette sortie, les marchés d'Oran se furent un peu approvisionnés, le général Desmichels écrivit de
nouveau à Abd-el-Kader pour lui demander une entrevue. L'émir n'eut garde de se présenter lui-même, il se
croyait trop au-dessus des généraux français par sa position souveraine : il n'a daigné accorder cette faveur qu'au
maréchal Thomas-Robert Bugeaud, à Louis Christophe Léon Juchault de la Moricière et au duc d'Aumale.
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A la lettre du général Desmichels il répondit que sa religion lui défendait de demander la paix, mais qu'elle lui
permettait de l'accepter si elle lui était proposée. Abd-el-Kader sentait alors le besoin de cesser les hostilités
contre les français, et malgré le léger revers, que les français éprouvèrent près d'Oran, dans un lieu nommé Dasel-Bidah (la Maison blanche), il continua les négociations entamées, en engageant son Aga, Mouloud-ben-Arrach
et le Caïd Ouled-Mahmoud, pour s'entendre en dehors d'Oran, avec le juif Mandoukaï-Amar, sur les bases d'un
traité de paix qui allait être passé entre la France et les Arabes. Abd-el-Kader insistait pour avoir Mostaganem,
mais se voyant refuser sur ce point, il demanda Arzew, où il parvint à établir de fait son autorité sans en avoir
obtenu le droit.
Ils arrivèrent à un accord sur les trois dispositions suivantes du traité :
1. Soumission des Arabes à la France ;
2. Liberté du commerce pleine et entière ;
3. Remise immédiate des prisonniers.
Lorsque les envoyés d'Abd-el-Kader s'occupèrent de la rédaction de cet acte important, conjointement avec les
principaux chefs civils et militaires de la province, on y fit régner une telle obscurité, on négligea des points d'une
si haute importance, tels, entre autres, que la délimitation du sol administré par Abd-el-Kader, enfin les envoyés
de l'émir déployèrent tant de ruse et d'habileté, que les conditions principales posées par les français étaient
comme annulées, et que ce traité, que les français imposaient, semblait être plus favorable aux Arabes.
Traité avec les français
Ce traité fut signé le 24 février 1834. Abd-el-Kader, satisfait, croyait son repos assuré, lorsque de nouveaux
ennemis vinrent l'attaquer dans sa retraite. Mustapha-ben-Ismael, chef des douars, et qui avait été Aga avant la
conquête, ne pouvait se résoudre à se soumettre à un usurpateur, ou, comme il disait, à un pâtre, fils de pâtre. Un
autre chef, qui menait depuis longtemps une vie de brigandage, Kadour-ben-el-Morfy, placé à la tête des Bordja,
ne pouvant s'accoutumer à la paix qui allait régner dans le pays, se réunit à Mustapha pour soulever les BeniAmer, une des plus populeuses tribus de la province. Les Arabes de cette tribu se refusèrent à payer l'achour,
alléguant que la cessation de la guerre rendait cet impôt inutile, et qu'ils ne reconnaissaient pas pour leurs maîtres
les infidèles et leurs alliés. Les Douayers et les Zmelas, tribus accoutumées à vivre au XIXe siècle de pillage, se
joignirent aux Beni-Amer et commencèrent les hostilités.
Abd-el-Kader rassemble au plus vite ses cavaliers dans les environs de Mascara, marche contre l'ennemi et
surprend plusieurs villes laissées sans défense. Mais il eut l'imprudence d'établir son camp sur la lisière de la forêt
de Zétoul, dans le pays des rebelles. Au milieu de la nuit, les Douayers mirent en fuite une partie de ses troupes,
enlevèrent son camp au galop, et le forcèrent à rentrer presque seul à Mascara.
A cette nouvelle, Sidi-el-Arubi leva l'étendard de la révolte, les autres chefs des mécontents imitèrent son
exemple, et Abd-el-Kader se vit entouré d'ennemis.
Au lieu de profiter de ces divisions qui commençaient à naître parmi les Arabes, et tirer parti du coup terrible qui
venait d'être porté à l'émir, par les Beni-Amer, les français intervenaient si maladroitement qu'ils rendirent Abdel-Kader plus puissant après cet échec qu'il ne l'était auparavant.
Mustapha-ben-Ismaè'l et Kadoïuvben-el-Morfy, instigateurs de la révolte, avaient écrit aux généraux Voirol et
Desmichels qu'ils s'engageaient au nom des tribus insurgées à se reconnaître sujets de la France, à renverser Abdel-Kader et à amener la soumission des troupes de l'émir. Mais le général Desmichels, au lieu d'accepter cette
proposition, prit Abd-el-Kader sous sa protection. Celui-ci se voyant soutenu par les français et maître de la
province d'Oran, c'est-à-dire de cette immense contrée qui s'étend depuis le Chlef jusqu'à l'empire de Maroc,
suivit l'exemple du pacha d'Égypte, dont il avait étudié la politique, et il se constitua le négociant de ses Etats. On
apprit qu'un Maure, placé par lui à Arzew, était chargé de lever les taxes sur le blé, l'orge et le sel qui étaient
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vendus à des taux exorbitants. Il prenait d'abord le droit de son maître, le sien, celui de son khpdjah, et enfin celui
de son mesureur. Il était défendu aux Arabes de traiter directement avec les Européens, et la libre concurrence
était interdite sur les marchés.
Abd-el-Kader ne s'en tint pas là : il s'oppposa à ce que les français voulèrent visiter Tlemcen, sous prétexte que
les Arabes, n'aimaient pas à voir des étrangers chez eux.
Bientôt il forma le projet de s'emparer de deux provinces de l'est et du centre et de chasser les français du sol
algérien. Il prit un moyen détourné pour arriver à son but : il écrivit que, grâce à lui, toute la province d'Oran était
maintenant tranquille, que l'est commençait à s'agiter ; mais qu'il engageait les généraux français à ne point s'y
rendre, qu'il se chargeait de faire rentrer lui-même les tribus insurgées dans la soumission. Le général Voirol ne se
laissa pas prendre à ces astucieuses propositions. Il refusa net le concours que l'émir lui offrait.
Une secte de fanatiques vint à se révolter contre Abd-el-Kader. Au lieu de favoriser les révoltés, les français
prirent encore parti contre eux pour Abd-el-Kader.
Cette secte s'était soulevée en préchant la guerre sainte. D'importants personnages étaient à la tête de la ligue, et
entre autres, le frère d'Abd-el-Kader, Sidi-Mustapha, ancien caïd dès Flittas. Grâce à l'énergie de l'émir, grâce
surtout à l'appui des Français, cette révolte fut bientôt complètement écrasée, anéantie.
Abd-el-Kader cherchait depuis longtemps à sortir de sa province, un incident lui en donna l'occasion. Un chéliff,
nommé Hadji-Mouça, prétendait avoir trouvé le moyen d'empêcher les canons et les fusils des infidèles de partir.
Le peuple ajouta foi à ses paroles. Mouça, à la tête des fanatiques, s'empara de Médéa et de Miliana, mais Abd-elKader l'attaqua et le défit entièrement. Il lui prit 200 hommes, 95 femmes, et il coupa 50 têtes qu'il envoya à
Mascara.
L'émir, en passant le Chéliff, avait violé les conventions. Néanmoins, vu le service qu'il venait de rendre, les
français lui laissèrent établir Hadj-el-S'ahit kalifat de Medeah, et réclamer Yachour (dîme). Seulement, le comte
d'Erlon, gouverneur général, envoya auprès de l'émir un officier d'état-major chargé de le tenir au courant de
toutes les entreprises. L'officier ne sachant pas un mot d'arabe, ne faisait guère ombrage à Abd-el-Kader, qui lui
donnait facilement le change.
Le remplacement du général Desmichels par le général Trézel fut le commencement des hostilités. Le premier
soin du nouveau gouverneur fut de travailler à détacher les tribus les plus puissantes de la cause de l'émir. Les
Douayers et les Smela se déclarèrent sujets de la France, sous la condition d'une protection efficace. Le comte
d'Erlon refusa de sanctionner cette mesure, et Abd-el-Kader, instruit des dissentiments qui existaient entre les
généraux, persécuta les tribus soumises : celles-ci s'adressent au général Trézel, qui leur répond : « la parole d'un
général français est sacrée ; dans une heure, je serai au milieu de vous. »
Et sans hésiter, il sort d'Oran à la tête d'une armée, malheureusement trop faible, le 26 juin 1835. Il livre dans la
forêt de Mousa-Ismaël un brillant combat, où le colonel Oudinot trouva une mort glorieuse. Pendant plusieurs
jours une colonne française de deux mille et quelques cents hommes luttèrent contre quinze mille Arabes. Les
français perdîrent près de 800 hommes dont 15 officiers. Dans aucun combat l'émir n'avait perdu autant de
monde.
A la fin de 1835, le maréchal Clausel marcha sur Mascara à la tête de onze mille hommes. Le duc d'Orléans se
distingua par sa bravoure dans cette expédition. Les troupes de l'émir, battues au Sig, à l'Abra, à la Tafna, à Idbar,
se dispersèrent et le laissèrent presque seul.
Le traité de la Tafna
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Abd-el-Kader ne tarda pas à se faire de nouveaux partisans et à rappeler à lui les tribus qui l'avaient abandonné.
Ayant appris le peu de succès de la première expédition de Constantine menée par les français, il crut le moment
propice pour commencer les hostilités dans la province d'Oran ; il sut bientôt que le général Bugeaud devait
marcher contre lui ; mais ce général, éprouvant quelques difficultés dans les moyens de transport, et voulant
restreindre les hostilités à la province de Constantine, qui allait être le théâtre d'une seconde expédition, fit en
1837, avec l'émir, le traité de Tafna, qui sera par la suite source de malentendus.
Les critiques experts dirent que cette convention rendait l'émir maître de l'ancienne régence d'Alger, moins la
province de Constantine ; que dans chacun des articles on le traite d'égal à égal, et on reconnaît sa souveraineté
indépendante ; que la convention n'a aucune garantie, puisqu'elle repose uniquement sur le caractère moral et
religieux d'Abd-el-Kader, etc., etc.
Après l'échange du traité, le général Bugeaud fit proposer une entrevue à l'émir pour le lendemain. Le rendezvous était à neuf heures du matin, à trois lieues des bords de la Tafna. Le général y fut à neuf heures, accompagné
de six bataillons d'infanterie, de dix escadrons de cavalerie et de quelques pièces de campagne. L'émir n'y vint pas
à l'heure convenue. Vers deux heures, des cavaliers arabes annoncèrent qu'il avait été malade et marchait
lentement que si le général s'impatientait, il pouvait pousser en avant. Les français marchèrent sans défiance plus
d'une heure dans le détour d'une gorge étroite, entrecoupée de collines. Enfin le général aperçut l'armée arabe,
rangée en bon ordre sur des mamelons épars. La maladie de l'émir était feinte, et le général français avait l'air
d'être venu pour lui rendre hommage. Les officiers de l'escorte eurent quelques moments d'hésitation, se croyant
dans un guet-apens; Bou-Amedy, chef de la tribu des Oulanahs, qui marchait au milieu d'eux, s'en aperçut et dit
au général Bugeaud : " Sois tranquille, n'aie pas peur. — Je n'ai peur de rien, répondit le général, je suis
accoutumé à vous voir en face. Seulement je trouve indécent que ton chef m'ait fait venir de si loin et m'ait fait
attendre si longtemps. » L'émir était entouré de 150 à 200 chefs, revêtus de riches costumes et montés sur de
magnifiques coursiers. Abd-el-Kader les précédait de quelques pas, guidant un beau cheval noir,
merveilleusement dressé ; tantôt il l'enlevait des quatre pieds à la fois, tantôt il le faisait marcher sur les deux
pieds dé derrière. Dès qu'il fut à portée de la voix, le général Bugeaud lance son cheval au galop, et arrive sur
l'émir en lui tendant cavalièrement la main; celui-ci la presse fortement et lui demande des nouvelles de sa santé.
L'Émir Abd el-Kader
« Très-bonne, et la tienne ? » répondit le général, qui met pied à terre et engage
Abd-el-Kader à en faire autant. Après quelques minutes d'un entretien insignifiant :
« As-tu ordonné, dit-il, de rétablir les relations commerciales à Alger et autour de
toutes nos villes ?
— Non, je le ferai dès que tu m'auras rendu Tlemcen.
— Je ne puis le faire qu'avec l'approbation de mon roi.
— Combien faut-il de temps pour avoir cette approbation ?
— Il faut trois semaines.
— C'est trop long, interrompit Ben-Arrach, lieutenant de l'émir, qui s'était approché : dix à quinze jours suffisent.
— Est-ce que tu commandes à la mer ? répliqua Bugeaud.
— Nous attendrons jusqu'à ce jour, dit l'émir.
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— Tu ne fais tort qu'aux tiens, répliqua Bugeaud, en les privant du commerce dont ils ont besoin. Quant à nous,
nous pouvons nous en passer, puisque nous recevons par la mer tout ce qui nous est nécessaire. »
Le général, ne voulant pas prolonger cet entretien plus longtemps, se leva brusquement : Abd-el-Kader restait
toujours assis, et mettait une espèce d'affectation à échanger quelques paroles avec M. Bugeaud qui était debout
devant lui ; mais ce dernier s'apercevant de l'intention, prit vivement l'émir par la main et l'enleva, en lui disant :
« Parbleu ! lorsqu'un général français se lève, tu peux bien aussi te lever, toi. »
Ainsi se termina cette entrevue qui fut sans résultat, car elle avait été sans but.
Par cette convention, la France reconnaissait son autorité sur l'ensemble du beilik de l'Ouest (sauf Oran, Arzew,
Mostaganem et Mazagran), sur le beilik du Titteri et sur la province d'Alger (à l'exception d'Alger, de Blida ainsi
que de la plaine de la Mitidja et du Sahel algérois). Dans ces territoires, les deux tiers de l'Algérie, Abd El-Kader
s'efforce d'organiser un État sur une base théocratique, avec le Coran pour loi suprême.
Reprise de la guerre avec les français
L'expedition des « Portes de fer », en pays kabyle
Le 5 mai 1839, il demanda et obtint l'appui de l'empereur de Maroc, ainsi que la concession du territoire situé
entre Ouchda et la Tafna.
Il voulut annexer le Constantinois en y nommant un « khalifa ». En réaction, la France organisa l'expédition des
« Portes de Fer » en octobre 1839, expédition qui fut considérée par Abd El-Kader comme une violation du Traité
de la Tafna. À partir de ce moment, la guerre reprit avec violence. Au mois d'octobre, il fait égorger dans l'ouest
de la Mitidja le commandant Raffet et 200 soldats français; ces derniers marchent contre lui et reprennent
Cherchell, Mildah, Milianah, etc.
Le Maroc
En 1841, sous le gouvernement de Bugeaud, Mascara, Tlemcen, Borhan, Thazat, Tekdemt, Saïda et Tafraoùts
tombèrent dans les mains des français. L'émir n'ayant plus ni villes, ni magasins, ni trésors, n'était plus qu'un chef
dé partisans. La prise de la smala par le duc d'Aumale lui porta un coup terrible ; et, poursuivi à outrance par le
général Bugeaud, il fut forcé de chercher un refuge au Maroc. Là, il sut attacher à sa cause le sultan Abd-erRhaman. Comme marabout, il prêcha l'extermination des infidèles et souleva de nombreuses tribus marocaines ; il
parvint aussi à se faire écouter par les premiers fonctionnaires de la cour de Fez, qui ne cherchaient qu'un prétexte
pour déclarer la guerre aux français.
Bugeaud
Le tournant de la guerre fut la nomination du maréchal Bugeaud comme gouverneur général de l'Algérie en 1842.
Celui-ci changea complètement de tactique de l'armée française, aidée de nombreuses troupes composées
d'Algériens : troupes régulières (zouaves et spahis) et corps irréguliers : les goums). Il harcela les troupes d'Abd
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El-Kader, en cherchant à les couper de leur base. L'émir fut refoulé sur les hauts plateaux steppiques avec sa
smala, capitale ambulante estimée à 30 000 personnes.
Abd El-Kader essuya un grave revers le 16 mai 1843, avec la prise de la smala par le duc d'Aumale dans la région
de Boghar. Il rassembla le reste de ses troupes, sous le nom de déïra, et se tourna vers le sultan du Maroc. Celuici, qui avait des visées sur l'ouest algérien, intervint mais fut défait à la bataille de l'Isly (oued près d'Oujda) le 14
août 1844.
Dans le traité de Tanger (10 septembre 1844), il fut convenu qu'Abd-el-Kader serait mis hors la loi aussi bien en
Algérie que dans le Maroc. Ce traité délimita la frontière entre les deux pays.
Les français n'avaient pas oublié le guet-apens de Sidi-Brahim, où leurs soldats, commandée par le colonel
Montagnac, furent égorgés sans pitié par les troupes de l'émir.
En 1845, beaucoup de tribus des Hauts-Plateaux s'étaient soumises aux Français. L'Emir vint les punir. Le Goum
des Ouled Nail, sous le commandement de Si Chérif Bel Lahrech qu'Abdelkader avait nommé khalifa, prit part à
ces opérations. Il alla ensuite en Kabylie où deux combats eurent lieu contre les Français en février 1846. Les
Kabyles ne voulurent pas suivre l'Emir qui vint dans la région de Djelfa et la sillona en tous sens, poursuivi par
les Français, mais aidé par la population. Des combats eurent lieu à Ain Kahla, à Zenina et à l'oued Boukahil.
Abd El-Kader tenta de relancer la révolte en 1847, mais échouant à rallier les tribus kabyles, il dut se réfugier au
Maroc.
Le général de Lamoricière avait appris qu'Abd-el-Kader, refusant de se rendre au sultan du Maroc, s'était entendu
avec ses principaux officiers pour tenter une dernière fois la fortune. Le 13 septembre, un ex-brigadier du 2°
chasseurs d'Afrique qui s'était échappé de la Deïra, accourt annoncer au général que l'émir veut livrer encore un
combat avant de se retirer vers le Sud avec ceux qui voudront l'y suivre.
La défaite
Le 21 décembre 1847, à cinq heures, la Dêïra passe la Kiss et entre sur le territoire détenu par les français. Abdel-Kader, seul à cheval, est en tête de l'émigration; le général Lamoricière, prévenu à temps, ordonne à deux
détachements de vingt spahis choisis, revêtus de burnous blancs et commandés par les lieutenants Bou-Krauïa et
Brahim, de garder le passage que devait prendre la Deïra; pour parer à tout événement, il fait prendre les armes à
sa colonne et se porte sur la frontière ; il avait à peine fait une lieue et demie que des cavaliers-envoyés par BouKrauïa le prévinrent qu'il était en présence d'Abd-el-Kader. On vole aussitôt à son secours. Au bout de quelques
instants, il rencontre Bou-Krauïa lui-même avec des hommes dévoués à Abd-el-Kader, chargés de porter sa
soumission à M. de Lamoricière.
L'émir avait remis à Bou-Krauïa une feuille de papier sur laquelle il n'avait fait qu'apposer son cachet, car le vent,
la pluie et la nuit l'avaient empêché d'y rien écrire. Àbd-el-Kader demandait une lettre d'aman pour lui et ceux qui
l'accompagnaient.
Le général ne pouvait, pour les mêmes causes, répondre à l'émir ; mais il remit aux envoyés son sabre et le cachet
du commandant Bazaïin, en leur donnant verbalement la promesse de l'aman le plus solennel.
Abd-el-Kader renvoya ses deux officiers et le lieutenant Bou-Krauïa avec une lettre dans laquelle il demandait
l'aman, à condition qu'il serait conduit à Alexandrie ou à Saint-Jean-d'Acre. M. de Lamoricière y consentit par
écrit.
Le 24 décembre, Abd-el-Kader fut reçu par les généraux Lamoricière et Cavaignac et le colonel Montauban, au
marabout de Sidi-Brahim, théâtre de ses triomphes. On l'amena ensuite à Nemours (Dgemma-Ghazouat) devant le
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duc d'Aumale qui l'y attendait. Le prince ratifia la parole donnée par le général Lamoricière, en exprimant l'espoir
que le roi lui donnerait sa sanction. Le gouverneur général annonça à l'émir qu'il le ferait embarquer le lendemain
pour Oran, avec sa famille ; il s'y soumit sans émotion et sans répugnance. Avant de quitter le prince, Abd-elKader lui envoya un cheval de soumission, pour consacrer son vasselage et sa reddition.
On rapporte que, lorsqu'Abd-el-Kader remit ses armes au duc d'Aumale, le prince prit le pistolet en disant : « Ceci
est pour le roi ! » puis il donna le sabre à M. de Lamoricière : « Ce sabre est pour vous, général, vous l'avez bien
gagné. »
Prisonnier en France
L'émir demanda avec instance la faveur de quitter Oran le plus tôt possible. On lui offrit de partir immédiatement
sur la frégate à vapeur l'Asmodée, ce qu'il accepta. L'Asmodée mit à la voile emportant l'émir et sa suite,
composée de 61 hommes, de 21 femmes et de 15 enfants des deux sexes, en tout 97 personnes. On y remarquait
sa vieille mère, deux de ses beaux-frères, ses trois femmes et ses deux fils, dont le plus jeune avait huit ans. Parmi
les femmes se trouvait une jeune française nommée Juliette, née à Arles, qui avait été faite prisonnière avec samère. La traversée fut mauvaise et les captifs arabes furent très fatigués. Arrivé à Toulon, Abd-el-Kader fut
déposé au Lazaret, puis transféré au fort Lamalgue, et enfin au château d'Amboise.
La parole de la France n'est pas tenue par les régimes et les gouvernements successifs. L'émir est retenu en
captivité pendant cinq années. Dès son accession à la Présidence de la République, Louis-Napoléon Bonaparte
songe à le libérer.
En janvier 1849 il organise une réunion au Palais de Saint-Cloud, le maréchal Bugeaud est présent, mais les
difficultés du nouveau président avec la Chambre et son Ministre de la Guerre lui font remettre à plus tard ce qu'il
considère comme une affaire d'honneur.
La libération
Ce n'est que le 16 octobre 1852, au retour d'une tournée en France que le futur Napoléon III vient annoncer
solennellement sa liberté à l'émir. L'émir Abd El-Kader n'oubliera jamais ce geste. Par la suite les deux hommes
se revoient régulièrement. En quelque temps, l'entente entre les deux hommes était devenue excellente.
Après avoir fait serment, de sa propre initiative, de ne plus perturber les opérations françaises en Algérie
(décembre 1852), il part pour Brousse puis Damas. Il enseigne la théologie à la mosquée des Omeyyades). En
juillet 1860, les troubles confessionnels du Mont Liban se sont étendus à Damas. Des musulmans et des druzes
attaquèrent les quartiers chrétiens, tuant plus de trois mille habitants. L'émir intervint pour arrêter le massacre et
protégea, au péril de sa vie, la communauté des quinze mille chrétiens de Damas et les Européens qui y vivaient,
grâce à son influence auprès des dignitaires de la ville. Il reçut la grand-croix de la Légion d'honneur et d'autres
marques de reconnaissance venant du monde entier (notamment du Pape, du Tsar de Russie, etc.). Il consacre le
reste de sa vie à des œuvres de bienfaisances, à l'étude des textes scientifiques et sacrés et à la méditation.
Un personnage complexe
Abd El-Kader est également le concepteur de la capitale mobile : la Smala.
Pour la France coloniale de l'époque, il était le modèle de « l'indigène » éclairé ayant compris la vocation
civilisatrice de la colonisation et collaborant avec la France après l'avoir combattu avec honneur. C'était, de la part
de la France, reconnaître l'intelligence et la profonde liberté de l'homme d'honneur qu'il a été durant toute sa vie.
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Malgré ses contradictons, l'" Ami des Français " est aussi considéré dans son pays comme le père de la nation
algérienne, le héros qui ne s'est rendu que pour préserver les Algériens d'un combat inégal et perdu d'avance. En
Algérie, depuis quelques années, la figure du héros national s'est enrichi et les Algériens, grâce à toute une
littérature nationaliste découvrent la dimension soufie du résistant à la conquête française.
Il est aussi et surtout l'un des plus grands mystiques du XIXe siècle, qui a laissé un ouvrage d'une profondeur rare
sur son propre cheminement intérieur : le livre des Haltes, Qitab al-Mawaqif.
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