s’élevait alors à 36 000 milliards de dollars
. » C’est assurément le pire du capitalisme. Plus besoin de
s’intéresser à l’économie réelle, de créer des entreprises et de générer des emplois. Plus besoin de
vanter les vertus du travail et de l’effort. .« Pour la première fois dans l'Histoire, l'ensemble des êtres
humains est de moins en moins nécessaire au petit nombre qui façonne l'économie et détient le
pouvoir
. » L’argent tout seul - entendez bien : sans travail - génère de l’argent, et beaucoup d’argent.
Bien sûr qu’il y a des risques. Mais où n’y en a-t-il pas ? On tombe aussi en faillite dans l'économie
réelle et c'est encore nous qui en savons quelque chose en ces temps de mévente. Les affaires Bernard
Madoff existent et vont exister. Les effondrements de systèmes bancaires aussi, vite renfloués par les
Etats qui vont chercher des crédits, au besoin, jusqu'en Chine communiste et dont on se dépêche de se
débarrasser en les remboursant en un éclair. Mais tout ne se réduit pas au système Ponzi, à l’ « épargne
pyramidale», qui consiste à payer les intérêts des anciens épargnants avec l’argent des nouveaux
arrivants. Manifestement, ICC Services reposait sur un tel système avec l’appui et la complicité de nos
dirigeants, qui se trouvent pourtant être des banquiers, et cela au plus haut niveau de l’Etat. On
apprend qu’Armand Zinzindohoué, le ministre de l’intérieur qui vient d’être limogé, « recevrait
chaque vendredi la somme de vingt millions (20 000 000) de francs CFA. Des proches à lui avancent
que cette somme ne constitue pas un pot-de-vin mais plutôt les ristournes de ses actions. En effet, ces
derniers expliquent que le ministre Zinzindohoué est actionnaire dans ICC-Services. Un acte dont la
gravité dépasse l’entendement humain
. » Si l’acte du ministre dépasse l’entendement humain, ce n’est
pas du fait des grosses ristournes raflées hebdomadairement ; c’est parce qu’il s’agit d’ICC-Services,
de système Ponzi-Madoff, d’épargne pyramidale
, et que l’ex ministre était bien placé pour le savoir.
Encore une fois, le capitalisme est devenu total, financier, spéculatif, le pire du capitalisme. Mais nous
y sommes. Notre idéologie depuis la Conférence des forces vives en 1990, c’est bien le libéralisme
économique, non ? Le libéralisme sauvage, avec ses douceurs pour quelques uns et ses grincements de
dents pour le plus grand nombre. N’est-ce pas pour cette raison que nous avons choisi le banquier
Nicéphore Soglo pour diriger la transition et pour conduire le premier régime du renouveau dit
démocratique, conformément aux diktats du capital financier ? N’est-ce pas pour cette même raison
que nous avons donné toute notre confiance - du moins à 75% -, sur les conseils diligents de la société
civile si bien éclairée et si neutre, au banquier Thomas Boni Yayi qui est venu changer le renouveau et
qui veut maintenant refonder la république? La vérité, dans cette situation, pour nous autres d'en-bas,
c'est que le système nous laisse pour compte, se passe de plus en plus de nous. Nous devenons
superflus, inutiles ! Nous découvrons, effarés, « qu'au-delà de l'exploitation des hommes, il y a pire :
l'absence de toute exploitation
» ! Pris d'angoisse et de désespoir, nous nous sommes livrés, en
hypothéquant ceci et cela, aux sociétés de placements descendues comme par enchantement jusqu'à
nous. Dans ces conditions, ce que nous étions en droit d’attendre de nos dirigeants qui, Dieu merci,
sont avertis des choses de la finance internationale, ce n’est pas de pleurnicher. Mais de nous dire qui
est qui, qui est effectivement dans le système Ponzi-Madoff et qui est effectivement dans l’e-business
mondialisé, qui est trader international et qui ne l’est pas, et de nous protéger des escrocs tout en nous
laissant prendre à notre petit tour, à notre petit niveau comme eux à très grande échelle, les risques que
nous impose le pire du capitalisme. Celui-ci nous garantit au pire des cas de nous rembourser notre
capital augmenté de 2%. Trêve d’hypocrisie et de fausse vertu ! Et qu’on cesse de nous prendre à ce
point pour des gogos !
Jean Peyrelevade, Ibidem, p.39.
Viviane Forrester, L'horreur économique,Paris, Fayard, 1996, 2e de couverture.
Quotidien La Nouvelle Tribune, n°1919 du jeudi 8 juillet 2010, p.3.
« Déclaration du PCB » in le Quotidien La Nouvelle Tribune, n°1919 du jeudi 8 juillet 2010, p.10.
Viviane Forrester, Op. Cit., p. 22.