Effets de la cryothérapie corps entier sur la récupération dans le milieu du football C. Tourny1, T. Cotte2 & S. Sangnier12 1 2 CETAPS EA 3832, Université de Rouen, France ASSE, Ligue 1 française, Saint-Etienne, France Sujet correspondant : [email protected] Ce document est publié pour favoriser le partage et le transfert des données techniques. Introduction Pour atteindre le meilleur niveau de jeu, les joueurs de football augmentent progressivement leurs charges d'entraînements et de compétitions. Le football exige certaines caractéristiques physiologiques, car ses activités sont intermittentes par nature. L'entraînement a donc pour objectif d'améliorer la capacité à répéter des exercices extrêmement intenses qui consistent en de brefs sprints, des changements de direction, des sauts, des tacles et des duels (Stolen et al. 2005). La libération d'énergie anaérobie est déterminante et l'objectif principal de l'entraînement est de renforcer toutes les capacités physiques (Bangsbo et al. 2006). Cela dit, la fréquence et l'intensité élevées de l'entraînement et de la compétition peuvent générer une fatigue considérable. Il est donc essentiel que le sportif alterne les périodes de travail et de récupération s'il veut éviter le surentraînement (Halson et Jeukendrup 2004) et les blessures (Versey et al. 2013). L'entraînement idéal doit présenter un équilibre parfait entre stimulus d'entraînement, récupération et une planification. Les entraîneurs utilisent également des techniques spécifiques pour accélérer la récupération et réduire la durée de la fatigue. Une meilleure récupération permet aux joueurs de football de supporter une plus grande charge d'entraînement et d'améliorer leur taux de progression. La cryothérapie corps entier est une technique de récupération qui devient de plus en plus accessible aux athlètes. Elle consiste en une brève exposition, généralement de 2 à 4 minutes, à de l'air très froid dans des chambres cryogéniques à température contrôlée dans lesquelles la température de l'air est maintenue entre –110 °C et –140 °C. Depuis la fin des années 70, la plupart des études se sont focalisées sur les effets de la cryothérapie pour traiter la douleur liée aux maladies inflammatoires (Banfi et al. 2010). Cependant, la cryothérapie corps entier s'est étendue à la médecine du sport pour traiter les blessures et le syndrome de surutilisation (Sutkowy et al. 2014) et pour améliorer la récupération après une blessure (Hausswirth et al. 2011 ; Hausswirth et al. 2012). L'examen des publications de Banfi et al. (2010) parvient à la conclusion que la cryothérapie corps entier n'est pas dangereuse et n'a aucun effet négatif général ou particulier sur les athlètes. Cette technique de récupération n'entraîne aucune modification des paramètres biochimiques ou hématologiques qui puisse éveiller des soupçons de triche chez les athlètes (Banfi et al. 2010). Bien qu'un certain nombre d'études aient signalé des réactions physiologiques à la cryothérapie corps entier, peu ont fait des recherches sur les réactions découlant de l'entraînement dans un sport spécifique. Récemment, Lombardi et al. (Lombardi et al. 2013) ont démontré l'effet de la cryothérapie corps entier sur la réaction hématologique chez les joueurs de rugby. Hausswirth et al. (2011) ont plus particulièrement étudié l'effet de la cryothérapie corps entier sur les lésions musculaires dues à l'exercice chez les coureurs bien entraînés après une simulation de cross. Ces auteurs ont comparé plusieurs techniques de récupération et ont découvert que la force musculaire isométrique maximale et les sensations perçues étaient améliorées grâce à la cryothérapie corps entier (Hausswirth et al. 2011). En 2013, Hausswirth et al. ont étudié la réaction parasympathique après deux types de stimulation cryogénique, la cryothérapie corps entier et la cryothérapie partielle, sur une population d'hommes sains. Ils ont découvert que la stimulation du tonus parasympathique était supérieure après une séance de cryothérapie corps entier (Hausswirth et al. 2013). Toutefois, cette étude n'inclut pas d'exercices physiques préliminaires. Objectif Le but de cette étude était d'examiner l'impact physiologique de la cryothérapie corps entier en tant que technique de récupération après une période d'entraînement de football. En outre, elle compare la cryothérapie corps entier, l'immersion dans de l'eau froide et la récupération passive, en s'attendant à ce que la cryothérapie corps entier après l'exercice entraîne des réactions physiologiques et des sensations bien supérieures. Nous avons testé les hypothèses suivantes : (i) Comparée à l'immersion dans l'eau froide ou le repos passif, la cryothérapie corps entier provoque une amélioration supérieure de la modulation du système nerveux autonome par l'action parasympathique de la fréquence cardiaque ; (ii) la cryothérapie corps entier permet une meilleure restauration de la sensation de confort après la fatigue de l'entraînement que l'immersion dans l'eau froide et le repos passif ; et (iii) la charge d'entraînement peut être définie en fonction de la technique de récupération. Méthodes Dix-neuf footballeurs se sont prêtés à trois techniques de récupération pendant 4 minutes (cryothérapie corps entier, immersion dans l'eau froide et repos passif) 30 minutes après des séances d'entraînement de 90 minutes dans des conditions habituelles. Nous avons mesuré la charge d'entraînement, la performance lors de flexions de jambes suivie d'un saut, la température tympanique, la pression artérielle, la fréquence cardiaque, les indices de variabilité de la fréquence cardiaque, le taux de perception de l'effort, l'apparition retardée de douleurs musculaires et les sensations thermiques et de confort. Des données ont été rassemblées avant l'entraînement (flexions de jambes suivie d'un saut), après l'entraînement (température tympanique, fréquence cardiaque, pression artérielle, taux de perception de l'effort, apparition retardée de douleurs musculaires), après récupération à 5 minutes et à 20 minutes (température tympanique, fréquence cardiaque, pression artérielle, indices de variabilité de la fréquence cardiaque, taux de perception de l'effort, apparition retardée de douleurs musculaires, sensations thermiques et de confort) et le lendemain matin (indices de variabilité de la fréquence cardiaque, flexions de jambes suivie d'un saut). Les intervalles R-R ont servi à évaluer la modulation du système nerveux autonome après l'exercice et après une nuit de sommeil. Dans la présente étude et selon la documentation, l'activité du système nerveux autonome est étudiée au travers de trois composantes issues de la variabilité de la fréquence cardiaque : rMSSD, pNN50 et FC [fréquence cardiaque] (rMMSD : racine signifie différence quadratique des intervalles R-R successifs normaux ; pNN50 : pourcentage des différences de R-R successifs >50-ms, FC : spectre haute fréquence). Ces composantes reflètent au mieux l'activité parasympathique. Résultat La rMSSD augmente de façon considérable après la cryothérapie corps entier. Le pNN50 affiche une différence significative 5 minutes après la comparaison de la cryothérapie corps entier avec l'immersion dans l'eau froide et le repos passif. Pour la cryothérapie corps entier, l'immersion dans l'eau froide et le repos passif, le pNN50 indique une augmentation considérable entre 5 minutes et 14 heures après la récupération. La fréquence cardiaque augmente de façon significative 5 minutes après la récupération avec la cryothérapie corps entier, comparé à l'immersion dans l'eau froide et au repos passif. De la même façon, la différence de fréquence cardiaque entre 5 minutes et 14 heures après la récupération est beaucoup plus élevée avec la cryothérapie corps entier qu'avec les deux autres techniques de récupération. La cryothérapie corps entier stimule la réactivation parasympathique cardiaque et améliore la sensation de confort. La cryothérapie corps entier et l'immersion dans l'eau froide diminuent la fréquence cardiaque et les douleurs musculaires perçues plus efficacement que le repos passif. Le but du processus de récupération est d'accélérer la réactivation parasympathique en restaurant la stimulation de l'homéostasie et du métaboréflexe (Stanley et al. 2013). Ces intervalles R-R correspondent au temps qui s'écoule entre 2 ondes cardiaques de R-R. La variabilité de la fréquence cardiaque consiste à déterminer la fréquence cardiaque à l'instant T. Chaque complexe QRS est identifié et peut isoler les intervalles successifs entre les ondes R-R. L'onde QRS ou le complexe QRS correspond à la dépolarisation ou à la contraction des ventricules cardiaque, droit et gauche. L'onde Q est la première onde négative du complexe, l'onde R est la composante complexe positive et l'onde S est la deuxième composante négative. Pour faciliter la compréhension, nous proposons la figure ci-dessous. Discussion Références Après une seule séance de cryothérapie corps entier, l'enregistrement 5 minutes plus tard montre une augmentation significative de la rMSSD, du pNN50 et de la fréquence cardiaque par rapport aux valeurs enregistrées lors du repos passif (rMSSD : +22,74 %, pNN50 : +28,55 % ; FC : +16,51 %). L'immersion dans l'eau froide ne constitue pas un moyen d'augmenter significativement la rMSSD, le pNN50 ni la fréquence cardiaque par rapport à la récupération passive. L'effet le plus important de la cryothérapie corps entier sur la réactivation parasympathique cardiaque est celui qui est induit par la stimulation des récepteurs du réflex trigemino-cardiaque et du baroréflexe du visage lorsqu'il est exposé à un froid intense (Al Haddad et al. 2010). 1. Al Haddad H, Laursen PB, Ahmaidi S, Buchheit M (2010) Influence of cold water face immersion on post-exercise parasympathetic reactivation (Influence de l'immersion du visage dans l'eau froide sur la réactivation parasympathique après l'effort). Eur J Appl Physiol 108 (3):599-606. DOI:10.1007/s00421-009-1253-9 Conclusion Les avantages physiologiques de la récupération par cryothérapie corps entier sont plus marqués qu'avec l'immersion dans l'eau froide. Dans cette étude, nous avons identifié des différences dans les effets de récupération et présentons de nouvelles preuves que les réactions à la cryothérapie corps entier sont directement liées à la charge d'entraînement. 2. Banfi G, Lombardi G, Colombini A, Melegati G (2010) Whole-body cryotherapy in athletes. (La cryothérapie corps entier chez les athlètes). Sports Med 40 (6): 509-517. DOI:10.2165/11531940-000000000-00000 3. Bangsbo J, Mohr M, Krustrup P (2006) Physical and metabolic demands of training and match-play in the elite football player. (Exigences physiques et métaboliques de l'entraînement et du jeu en match chez le footballeur de haut niveau). J Sports Sci 24 (7):665-674. DOI:10.1080/02640410500482529 4. Halson SL, Jeukendrup AE (2004) Does overtraining exist? (Le surentraînement existe-t-il ?) An analysis of overreaching and overtraining research. (Analyse du dépassement de ses limites et du surentraînement). Sports Med 34 (14):967-981 5. Hausswirth C, Duffield R, Pournot H, Bieuzen F, Louis J, Brisswalter J, Castagna O (2012) Postexercise cooling interventions and the effects on exercise-induced heat stress in a temperate environment. (Interventions de refroidissement après l'effort et les effets sur le stress thermique dû à l'effort dans un environnement tempéré). Appl Physiol Nutr Metab 37 (5):965-975 6. Hausswirth C, Louis J, Bieuzen F, Pournot H, Fournier J, Filliard JR, Brisswalter J (2011) Effects of whole-body cryotherapy vs. far-infrared vs. passive modalities on recovery from exercise-induced muscle damage in highly-trained runners. (Effet de la cryothérapie corps entier par rapport aux infrarouges et aux modalités passives sur la récupération des douleurs musculaires dues à l'effort chez les coureurs de haut niveau). PLOS ONE 6 (12):e27749. DOI:10.1371/journal. pone.0027749 7. Hausswirth C, Schaal K, Le Meur Y, Bieuzen F, Filliard JR, Volondat M, Louis J (2013) Parasympathetic activity and blood catecholamine responses following a single partial-body cryostimulation and a whole-body cryostimulation. (Activité parasympathique et réaction des catécholamines sanguines suite à une seule cryostimulation partielle et à une cryostimulation du corps entier). PLOS ONE 8 (8):e72658. DOI:10.1371/journal.pone.0072658 8. Lombardi G, Lanteri P, Porcelli S, Mauri C, Colombini A, Grasso D, Zani V, Bonomi FG, Melegati G, Banfi G (2013) Hematological profile and martial status in rugby players during whole body cryostimulation. (Profil hématologique et statut martial chez les rugbymen pendant la cryostimulation du corps entier). PLOS ONE 8 (2):e55803. DOI:10.1371/journal.pone.0055803 Pour plus d’informations, veuillez nous contacter: Air Products SAS 45 avenue Victor Hugo Bâtiment 270 Parc des Portes de Paris 93300 AUBERVILLIERS T 0800-480-030 [email protected] 9. Stanley J, Peake JM, Buchheit M (2013) Cardiac parasympathetic reactivation following exercise: implications for training prescription. (Réactivation parasympathique cardiaque après l'effort : implications pour la prescription de l'entraînement). Sports Med 43 (12):1259-1277. doi:10.1007/s40279-013-0083-4 10. Stolen T, Chamari K, Castagna C, Wisloff U (2005) Physiology of soccer: an update. (Physiologie du football : mise à jour des connaissances). Sports Med 35 (6):501-536 Rapport préparé pour Air Products aux droits d'auteur détenus par Air Products tell me more* airproducts.fr/cryotherapie *Pour en savoir plus © Air Products and Chemicals, Inc., 2015 (38386) 331-15-001-FR