Fondement philosophique de l’esthétique I. La conception philosophique du monde : Etymologiquement la conception du monde signifie un système de conception, une vision globale du monde. Elle comprend les principales attitudes des hommes, leurs convictions, leurs idéaux socio politiques, éthique et esthétique. Elle porte sur une série de question déterminée : quel est le rapport de l’esprit à la matière ? Qu’estce que l’homme ? Que sont le bien et le mal ? Qu’est-ce que le beau dans la vie et dans l’art ? La conception du monde est orientée vers le système homme – monde. Elle peut s’établir au niveau pratique. Elle est non seulement un contenu mais un mode de pensée, un prisme à travers lequel on définit les notions du bien, du beau, du mal... Elle est science, art, philosophie en un mot. II. Art et Philosophie : a) Art : Pour éviter des indéterminations inutiles, précisons ces trois occurrences du mot art qui fournisse matière à réflexion : Galerie d’art : est un magasin où sont exposés pour être vendus des œuvres d’art. Une œuvre d’art : est œuvre qui manifeste la volonté esthétique d’un artiste. Un artiste : au sens moderne c’est le créateur d’une œuvre d’art. Les beaux arts « c’est principalement les arts plastiques, visant l’expression sensible du beau ». « Plastique se dit de tous les arts dont le but principal est l’expression des formes et dans ces arts de ce qui concerne les formes ». Qu’est ce donc l’art ? Au singulier, c’est un terme dit Lalande qui s’applique aux caractères communs des autres d’art. Est-il un langage ? Quels sont ses rapports à la réalité ? Pour être en effet dans le domaine de l’art, il faut faire un ouvrage, produire une œuvre : l’artiste est un démiurge, un artisan dont la connaissance consiste dans l’imitation, « ou l’imitation approche le plus des objets qu’elle présente, et parle le plus directement au sens », interpelle notre faculté de juger, d’apprécier. L’œuvre d’art nous provoque, nous défie en suscitant, en fonction du temps, toujours différemment un nouveau jugement. b) Art et réalité : La référence de la réalité artistique à la création divine est constante, explicite dans l’art contemporain : « on voit bien disait d’Abbé Morel que le bon Dieu a pétré de ses propres mains la nature ». Il y a là une référence aux « six jours mis par Dieu pour créer le monde ». L’artiste est lui Cheikh Ould Ebnou | Professeur SY Alassane 1 aussi un créateur, mais ses œuvres d’arts ne sont jamais des restitutions à l’identique et la réalité. Le tableau abstrait le plus irréel nous présentés « quelque chose de si nouveau que jamais nous n’ayons rien vu de semblable » Descartes. Il est « une surface plane recouverte de couleurs et de lignes, un certain ordre assemblé », composé d’éléments empruntés à la réalité. C’est pourquoi nous admirons sans efforts la représentation des choses ou d’être dans un tableau dont nous supporterions males la présence physique réelle. « L’art est à l’homme ce que la nature est à Dieu », Victor Hugo. L’œuvre d’art est le produit d’un jugement critique et d’une insatisfaction active à l’égard du monde tel qu’il est et à l’égard de cette nature qui est pourtant un modèle pour l’artiste. A la nature, il emprunte des éléments pour créer une nouvelle synthèse, une œuvre qui se veut impérissable. La nature présente ainsi à l’artiste des fragments, des ébauches, des esquisses à terminer, à achever ; mais aussi et surtout de l’accidentel du fortuit, du provisoire à changer du définitif. L’artiste se propose de faire du nécessaire à partir du contingent, c’est-à-dire il ajoute à son modèle l’immortalité. L’artiste est à la recherche de ce meilleur rapport entre ce travail visible et le résultat acquis qui est le propre des chefs d’œuvres : il goute en s’affrontant aux matériaux qui lui résiste le vrai plaisir du demi urge. La matière est pour l’artiste à la fois un obstacle et un moyen. « La nature est un dictionnaire » disait Delacroix. A la différence de l’artisan qui vise l’utilité pratique en réponse à une demande précise et à des besoins bien définis, l’artiste crée en vue de satisfaire de façon désintéressée un désir indéfini. c) Art et langage : L’art exprime ce que la parole, comme mode communicatif, ne peut pas exprimer. Il prétend justement combler les lacunes du langage usuel : il s’adresse directement à chacun et à tous aux mépris des bienséances restrictives, des catégories logiques et des méditations conceptuelles. Si un tableau nous retient comme s’il avait été peint par nous, comme s’il avait quelque chose à nous dire, non pas avec des mots mais avec des valeurs, c’est que le tableau existe se situe dans une région que le langage n’épuise pas : le beau, c’est-à-dire ce que nous éprouvons. Van Gogh disait à son frère Théo : « tu verras ces toiles te diront ce que je ne peux pas exprimer par la parole ». Dans ce monologue, ce silence plus éloquent que tout discours se situe en monde ou la distinction du sujet et de l’objet, du vrai et du faux n’a plus cours : « le leurre et le vrai viennent ensemble, non comme des contraires dans un système, mais au moins comme l’épaisseur qui a ensemble son recto et son verso ». d) Le chef d’œuvre : Au moyen Age le chef d’œuvre est synonyme d’ouvrage capital « devait faire un apprenti pour être reçu maitre de ce métier. » Aujourd’hui, il est un merveilleux, ouvrage distinct par sa qualité de toutes les productions naturelles, un prodige qui nous interpelle comme s’il était l’œuvre non d’un homme mais d’un dieu. C’est une œuvre provocatrice, défit nos facultés de jugées. Le chef d’œuvre sort de l’ordinaire et nous arrache un jugement sous forme d’aveu : « c’est beau », « c’est magnifique », « c’est prodigieux ». Il confère une aura (qualité distinctive) à tout ce qui est placé sous le signe de l’art. le chef d’œuvre vise à emporter l’assentiment, à balayer les réticences, à toucher au cœur de la Cheikh Ould Ebnou | Professeur SY Alassane 2 sensibilité. La concentration du chef d’œuvre se trame dès la suite des jugements que provoquent les chefs d’œuvres d’art et qui sont immédiats, sincères, spontanés. III. L’art est il lié à la philosophie ? a. Art et métaphysique : L’art conçu comme une valeur devant aboutir à un chef d’œuvre qui défit le temps repose sur la foi en une immortelle, à une réalité immuable, en une vérité du beau idéal et divin dont les beautés terrestres ne sont que les copies. Le fondement philosophique de l’art s’exprime ici par les chefs d’œuvres faits pour durer, bien au-delà de nos brèves existences. Parce que, tenant leur plénitude en peu de la vraie beauté : « Hors, si la foi en une telle vérité plait, les couleurs de l’arc en ciel plaise au tour des fins extrêmes de la connaissance et de l’illusion humaine : ainsi cette espèce d’art ne peut plus refleurir qui, comme la divine comédie, les tableaux de Rafael, les fresques de Michel Ange, les cathédrales gothiques, suppose non seulement une signification cosmique, mais encore une signification métaphysique des objets de l’art. Il se fera une émouvante légende de ce qu’il est pu exister un tel art, une telle foi d’artiste. » ‘Humain trope humain ‘ Nischeanthropologieculturelle2.doc b. Philosophie : « Les philosophes ne s’accordent pas sur ce qui est la philosophie et la philosophie n’a jamais dit nettement et unanimement ce qu’elle voulait. C’est pourquoi je la considère comme un art ». L’art est aussi à l’image de la philosophie un lieu idéale où les jugements des goûts sont des esquisses, des brouillons qui appellent des retouches : le centre Pompidou, que certains appellent de rusions la « raffinerie » est considérée par d’autres comme une réussite architecturale exceptionnelle. Ainsi, des cavernes jusqu’à la foire internationale de l’art contemporain, l’humanité n’a cessé de dessiner et de provoquer sans fin des commentaires définitifs et contradictoires ». Cheikh Ould Ebnou | Professeur SY Alassane 3