NOVEMBRE 2014
VOL. 35 / NUMÉRO 4
URBA LE MAGAZINE DE L’UNION DES MUNICIPALITÉS DU QUÉBEC
PARLONS AUTONOMIE MUNICIPALE :
ENTRETIENS AVEC ARTHUR FAUTEUX ET RÉGIS LABEAUME
PROGRAMME DE COOPÉRATION MUNICIPALE HAÏTI-CANADA :
UNE HISTOIRE DE SOLIDARITÉ
STRAGIE MARITIME
QUELLES RETOMBÉES POUR
LES MUNICIPALITÉS ?
NOVEMBRE 2014 // P 14
DDOSSIER
DU
MOIS
NOVEMBRE 2014 // P 15
Le gouvernement du Québec vient de lancer la toute première stratégie maritime de son histoire. Lobjectif
est clair : développer le potentiel maritime du Québec et créer de l’emploi, tout en assurant la protection
de ce cours d’eau unique au monde. Pour les municipalités, les enjeux sont cruciaux et les retombées
potentielles nombreuses. Au menu du dossier : un entretien avec le ministre Jean D’Amour et le portrait
de différentes municipalités le long du fleuve, de l’estuaire et du golfe du Saint-Laurent.
Par Jules Chamberland-Lajoie et Jean-François Théorêt (Photos : Ville de Rimouski, Ville de Sept-Îles, Port de Sept-Îles)
QUELLES RETOMBÉES POUR LES MUNICIPALITÉS ?
STRAGIE MARITIME
NOVEMBRE 2014 // P 16
ENTREVUE AVEC LE MINISTRE
JEAN D’AMOUR
Afin de mieux conntre les orientations du gouvernement dans le
déploiement de sa stratégie maritime, URBA a rencontré monsieur
Jean DAmour, autrefois maire de Rivière-du-Loup, aujourd’hui ministre
délégué aux Transports et à l’Implantation de la stratégie maritime.
URBA : Monsieur le ministre, pouvez-vous nous
présenter les grandes lignes de la stratégie
maritime ?
Je vais vous raconter l’histoire telle que je l’ai
vécue. Revenons au mois de juin 2013. Je suis à
Rivière-du-Loup sur la terrasse de l’Auberge de
la Pointe et mon futur premier ministre, Monsieur
Couillard, me parle pour la première fois de sa
vision maritime pour le Québec. Il me propose,
séance tenante, de chapeauter le groupe de travail
pour élaborer cette première stratégie maritime
pour le Québec. « Notre stratégie doit toucher
tous les aspects de la vie maritime au Québec,
mais surtout qu’elle ait pour objectif de créer des
emplois », m’a-t-il mentionné à ce moment-là.
La première politique maritime dont s’est doté le
Québec remonte à 2001, et elle n’est pas complète.
Le mandat du premier ministre est simple : tout ce
qui est favorable au développement des commu-
nautés locales est bon dans la stratégie maritime.
Différents projets pullulent de partout au Québec
et l’élan qu’on veut donner au transport maritime,
c’est 30 000 emplois sur un horizon de quinze ans.
C’est aussi quatre milliards d’investissement privé
et public sur la même période.
Prenons l’industrie des croisières. Que ce soit
aux Îles, à Gaspé, à Trois-Rivières, à Québec ou
à Montréal, l’industrie des croisières est en pleine
explosion ! Il faut donc s’interroger pour identifier
les infrastructures dont l’industrie a besoin pour
bien se développer. Nos ports de mer peuvent
être développés davantage. On veut consolider
nos ports, développer nos chantiers maritimes et
former le monde dont on a besoin. On veut relan-
cer l’industrie du cabotage. Toute la question de
l’économie bleue et des biotechnologies marines
constituent un enjeu majeur. La stratégie fait appel
au savoir, à l’expertise et à la main d’œuvre.
La stratégie veut aussi saisir les opportunités.
Parmi celles-ci, il y a l’entente de libre-échange
avec l’Union européenne, qui nous donnera accès
à un bassin de consommateurs supplémentaires
de 350 millions de personnes ! Avec notamment
l’élargissement du canal de Panama, le fleuve
Saint-Laurent va forcément accueillir des navires
de plus grande dimension et notre industrie devra
s’y adapter.
La stratégie maritime, c’est aussi l’occasion de
supporter les communautés locales, que ce soit
une petite municipalité ou une ville de plus grande
dimension. Nous voulons épauler les communau-
tés dans leurs négociations avec le gouvernement
fédéral lorsqu’elles souhaitent acquérir des
infrastructures portuaires. Il y a peut-être aussi
des ports que le Québec aurait intérêt à récupérer.
Tout cela fait partie de notre réflexion.
Je terminerai avec la Société des traversiers du
Québec (STQ), un moteur économique et social
fabuleux dont on ne parle pas assez souvent.
Au cours de la dernière année d’opérations, pas
moins de 5,2 millions de personnes ont pris place
dans nos bateaux ! On veut élargir le mandat de
la STQ pour reconnaître d’autres traverses sur le
Saint-Laurent ou sur les lacs. Nous voulons les
supporter et en bénéficier économiquement par
l’arrivée de nouveaux touristes.
Plus spécifiquement, quel rôle donnez-vous
aux municipalis dans cette stragie, et quel
mandat souhaitez-vous que l’UMQ remplisse ?
Le monde municipal au Québec possède un
pouvoir qui n’est régi par aucune loi, un pouvoir
qui est incontesté parce qu’incontestable. C’est
ce que moi j’ai toujours appelé à l’époque
j’étais maire, le pouvoir de l’initiative. Le monde
municipal a le pouvoir de proposer des projets de
développement qui sont collés à nos réalités. Ce
que je souhaite, c’est que la stratégie maritime
au Québec prenne les couleurs des régions. À
Trois-Rivières, le développement maritime se fait
d’une manière, à Sept-Îles il se fait d’une autre
manière et à Rimouski, c’en est encore une autre.
Alors identifions les projets ou les infrastructures
que l’on détient présentement qui permettront au
Québec d’aller plus loin !
DDOSSIER DU MOIS
LE RÔLE DES MUNICIPALITÉS SERA DE
PROPOSER ET NOUS, DE LES ACCOMPAGNER.
LA MUNICIPALITÉ, C’EST UN PARTENAIRE, C’EST
UN NIVEAU DE GOUVERNEMENT DE PROXIMITÉ
DONT ON SE DOIT DE SE PRÉVALOIR.
NOVEMBRE 2014 // P 17
Rimouski, véritable lieu de convergence
de l’industrie, joue un rôle vis-à-vis des
communautés de la Côte-Nord. Est-ce que
Valleyfield, par exemple, peut nous amener
ailleurs dans la desserte de chacune des
communautés nordiques ? Ainsi, moi ce que
je souhaite au niveau municipal, c’est que
les municipalités soient davantage parte-
naires et collées à l’industrie, que ce soit
par des administrations portuaires ou une
présence au Forum maritime du Québec.
Elles ont des choses à dire !
Je regarde Rivière-du-Loup, ma ville,
on me propose actuellement le projet d’un
Carrefour maritime, un lieu de convergence
et de concertation pour mieux développer
le fleuve, pour mieux développer Rivière-
du-Loup à partir du fleuve. Pourquoi ne pas
multiplier cela à Matane, à New-Richmond
ou à d’autres communautés ?
Je pense que le rôle municipal est très
important. C’est pour cela que je parle du
pouvoir de l’initiative. Le rôle des munici-
palités sera de proposer et nous, de les
accompagner. Si le fédéral est appelé, on
ira négocier, ensemble, sur la même ligne
de front. Je me réjouis du fait que l’Union
des Municipalités du Québec soit là, que
non seulement elle tende la main, mais dise
aussi : « on est là et on veut aider ». La muni-
cipalité, c’est un partenaire, c’est un niveau
de gouvernement de proximité dont on se
doit de se prévaloir.
Quand on parle de stimuler le dévelop-
pement économique, pouvez-vous nous
donner des exemples plus concrets
dont bénéficieront directement les
municipalités ?
Notre gouvernement aborde le développe-
ment maritime sous l’angle de l’intermoda-
lité et nous voulons mettre à contribution
la complémentarité des réseaux ferroviaire
et routier. À ce sujet, nous comptons établir
un pôle logistique en Montérégie dans les
secteurs de Vaudreuil-Soulanges et de
Contrecoeur. Le Québec a construit l’Auto-
route 30, mais encore faut-il en bénéficier
économiquement ! Nous voulons donc
maximiser les retombées tout au long de
ce parcours dans Vaudreuil-Soulanges.
Contrecoeur quant à elle, très liée au déve-
loppement du port de Montréal, se doit de
connaître un bon développement.
Cela passe aussi par la formation. L’École
des pêches et de l’aquaculture de Grande-
Rivière en Gaspésie, c’est un moteur
économique auquel on doit s’attarder pour
lui donner un nouveau souffle. L’Institut
maritime à Rimouski est non seulement bon
pour la ville, mais aussi pour tout le Québec.
On a une pénurie de main d’œuvre dans le
milieu maritime, il va bien falloir s’y attarder
et l’Institut maritime va jouer un rôle de pre-
mier plan. Il en va de même pour le réseau
universitaire.
Je pense que le bénéfice ultime, c’est
la création d’emplois. Je vous donne un
exemple. Un bateau de croisière se présente
aux Îles-de la-Madeleine. Une fromagerie et
une poissonnerie se trouvent près du port.
On y a acheté en un seul coup pour 5 000 $
de fromage et 8 000 $ de poisson !
Ce dont les municipalités ont besoin, c’est
d’activité économique. Parfois cela passe par
des parcs industriels mais dans d’autres cas
il y a des ports de mer qui accueillent des
croisières et des bateaux qui font du trans-
port de marchandises. Le port de Québec,
pas seulement au niveau des croisières, est
en pleine effervescence. De mon bureau,
je vois arriver au quotidien des navires de
partout dans le monde qui viennent procéder
à des chargements de vrac.
Mais davantage d’activi économique
sur le Saint-Laurent implique davantage
de circulation maritime, et forcément
davantage de risques environnementaux.
Prévoit-on dans la stratégie des mesures
visant à mieux protéger l’environnement et
mieux outiller les municipalités dans un tel
mandat ?
S’il y a une société dans le monde qui est
bien équipée, c’est le Québec, sur différents
fronts et différents volets. Tout d’abord,
nos chantiers maritimes figurent parmi
les plus performants et honnêtement, ils
sont capables d’en recevoir davantage.
Aussi, Urgence-Environnement est une
escouade extraordinaire qui fait un travail
fabuleux. Ultimement, si un accident ou
un déversement de quelque matière que
ce soit arrivait, on exigerait de la part des
utilisateurs du fleuve qu’ils soient aussi
payeurs. Et n’oublions pas qu’une respon-
sabilité fédérale existe dans de tels cas.
Nous sommes donc structurés à tous les
niveaux. Maintenant, pour donner un nouvel
élan, il faudra probablement qu’on s’ajuste
dans le temps. Mais nous sommes une des
sociétés dans le monde qui, sur le plan de
l’environnement, avons le mieux planifié
ce type d’intervention. S’il y a un niveau de
transport qui est à la fois respectueux de
l’environnement mais surtout sécuritaire,
c’est bien le secteur maritime.
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