Les voies alimentaires d`une meilleure nutrition Marbre

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/S.Trè
© IRD
Les voies alimentaires
d’une meilleure nutrition
2
rganisé conjointement par les
universités de Ouagadougou
et de Wageningen, l’IRD et la FAO,
l’atelier international de Ouagadougou a réuni 189 participants en
provenance du Burkina Faso (91),
de 18 autres pays africains (61), de
5 pays européens (33), des ÉtatsUnis, du Canada, du Mexique et du
Viêt-nam. Par rapport aux objectifs
du premier atelier tenu en 1999 sur
les petites industries agroalimentaires pour une nutrition saine en
Afrique de l’Ouest, cette deuxième
rencontre a pris en compte l’ensemble des approches alimentaires
susceptibles de contribuer à améliorer les situations nutritionnelles
en Afrique. Douze chercheurs ou
ingénieurs et 10 doctorants de l’IRD
y ont présenté leurs travaux. Les
résumés des 105 contributions
orales ou posters et les textes intégraux d’une cinquantaine de ces
contributions sont accessibles sur le
site Internet de l’atelier
Un concours de posters réservé
aux jeunes scientifiques a également été organisé. Parmi les
22 candidats, le jury international a choisi de récompenser Ayassou Kossiwavi
(ancienne stagiaire de DEA de
l’IRD Burkina Faso), Tahirou
Traoré, allocataire de
recherche de l’IRD, et
Lynda Njongmeta, doctorante de l’université de
●
Ngaoundéré (Cameroun).
E
n Afrique de l’Ouest, des
retards de croissance touchent
plus d’un tiers des enfants de
moins de 5 ans et environ 10 %
d’entre eux présentent un poids insuffisant pour leur taille. Parallèlement,
des carences en micronutriments, en
particulier en vitamine A, fer, zinc et
iode, affectent les groupes les plus vulnérables, enfants, femmes enceintes
ou allaitantes. Ces carences sont responsables d’un ralentissement de la
croissance et du développement intellectuel et physique des
enfants, d’une augmentation de la mortalité infantile et de
manifestations plus
spécifiques
(cécité,
goitre,
anémie…).
Dans de nombreux
pays d’Afrique, la situation est particulièrement
préoccupante dans la
mesure
où,
contrai-
rement à ce que l’on observe sur les
autres continents, l’état nutritionnel
des populations s’est aggravé au cours
de la dernière décennie.
La lutte contre les carences en micronutriments fait classiquement intervenir deux types de stratégies : la supplémentation ou les voies alimentaires. La
supplémentation consiste à distribuer
les micronutriments sous la forme de
médicaments (capsules, comprimés…)
dont les fréquences de distribution
dépendent de la nature du micronutriment concerné. Les voies alimentaires
encore appelées approches fondées sur
l’alimentation (« food-based approaches ») considèrent les aliments, qu’ils
soient à l’état brut, transformés ou
enrichis, comme le principal moyen de
prévenir les déficiences nutritionnelles.
Cela correspond à un ensemble de
stratégies complémentaires qui impliquent les secteurs de l’agriculture, de
la technologie alimentaire et de l’éducation/communication. Parmi les différentes voies proposées, on distingue
généralement : la diversification de la
production des aliments ; l'amélioration des procédés technologiques utilisés pour la transformation, le stockage et la commercialisation des
aliments riches en nutriments ;
et la fortification qui a pour
objectif d’enrichir
en micronutriments,
dans les unités de production, certains
aliments d’usages fréquents. Depuis
peu, les Centres Internationaux de
Recherche Agronomique (CIAT, IFPRI)
développent une nouvelle voie, la biofortification. Elle consiste à créer, sélectionner et diffuser, pour les principaux
aliments de base, des variétés ayant
des teneurs naturelles en micronutriments considérablement plus élevées
que les variétés traditionnelles.
Par rapport à la supplémentation, les
voies alimentaires sont considérées
comme durables et d’un meilleur rapport coût/efficacité. Elles présentent, par
ailleurs, l’avantage de permettre la prise
en compte simultanée de plusieurs
types de carences. Elles diffèrent néanmoins de manière importante selon les
niveaux d’implication des (bio)technologues et des éducateurs et par les coûts
nécessaires pour leur mise en œuvre.
L’atelier international qui vient de se
tenir à Ouagadougou a principalement
permis d’analyser l’état actuel des
connaissances, les expériences et les
leçons sur les voies alimentaires élaborées et mises en œuvre en Afrique de
l’Ouest, en s’intéressant tout particulièrement au rôle des technologues alimentaires et des nutritionnistes. Il en
est principalement ressorti que, pour
chaque contexte, le choix des voies à
privilégier devrait s’appuyer sur des
diagnostics précis de situation. En
Afrique de l’Ouest, compte tenu de
l’importance de l’autoconsommation
pratiquée par les populations encore
très majoritairement rurales et du faible
niveau de développement des industries agroalimentaires, les voies les plus
prometteuses restent la diversification
et l’amélioration des procédés technologiques traditionnels. La supplémentation et la fortification restent cependant souvent préférées par les
gouvernements et les bailleurs de
fonds persuadés de leur plus grande
efficacité à court terme. Enfin, comme
tous les ateliers s’intéressant à l’amélioration des situations nutritionnelles, la
réunion de Ouagadougou a insisté sur
l’impérieuse nécessité de favoriser l’interdisciplinarité ainsi que la circulation
de l’information entre chercheurs et
acteurs du développement.
●
Contact
Serge Trèche
[email protected]
WEB
http://lombila.univouaga.bf/fn2ouaga2003
© IRD/J.-J. Lemasson
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Olivier Blot ([email protected])
Correspondants
Fabienne Beurel-Doumenge (Montpellier),
Jacqueline Thomas (Dakar),
Mina Vilayleck (Nouméa)
Ont collaboré à ce numéro
Cédric Duval
Michel Dukhan
Photos IRD – Indigo Base
Claire Lissalde
Danièle Cavanna
Photogravure, Impression
Jouve, 18, rue Saint-Denis,
75001 Paris - Tél. : 01 44 76 54 40
ISSN : 1297-2258
Commission paritaire : 0904805335
Dépôt légal : février 2004
Journal réalisé sur papier recyclé.
Marbre, sel, et rubis
Pourquoi, dans certaines régions d’Asie, les gisements
de rubis se trouvent-ils toujours inclus dans des
marbres ? C’est la question à laquelle des géologues
ont essayé de répondre en étudiant les mécanismes
tectoniques et géochimiques impliqués dans la
formation des gisements. La solution est plutôt salée.
À
l’image du célèbre gisement
de Mogok au Myanmar (exBirmanie), d’où sont extraits
les rubis de la plus haute qualité
gemme, les régions d’Asie Centrale et
du Sud-Est hébergent les gisements de
rubis les plus prisés.
Ces gisements présentent une particularité qui intéresse les scientifiques de
l’IRD et CRPG/CNRS1 depuis plusieurs
années : les cristaux de rubis qu’ils
recèlent se présentent systématiquement inclus dans des marbres, qui sont
des calcaires transformés à haute température. Or, certains constituants
majeurs du rubis – principalement
l’aluminium, le chrome et le vanadium
– sont normalement absents des
marbres. Sur le plan minéralogique en
effet, le rubis est la variété chromifère
du corindon gemme, c’est-à-dire un
oxyde d’aluminium dont quelques ions
aluminium ont été substitués par du
chrome. Celui-ci contribue avec le
vanadium à donner au cristal sa couleur rouge. Des recherches ont donc
Sciences au Sud - Le journal de l’IRD - n° 23 - janvier/février 2004
été lancées pour comprendre les
mécanismes de formation de ces
gisements, leur âge et leur signification dans le fonctionnement des zones
profondes de la couche terrestre. En
combinant les données de terrain et les
résultats d’analyses géochimiques réalisées au laboratoire sur des échantillons
provenant des différents gisements
répertoriés de l’Afghanistan au ViêtNam, les chercheurs sont parvenus à
établir un modèle génétique inédit,
valable pour l’ensemble de ces gisements de rubis associés aux marbres2.
Ainsi, l’analyse des inclusions liquides
piégées par les rubis lors de leur cristallisation a révélé l’intervention de
fluides nourriciers salés et riches en gaz
carboniques. Ces derniers proviennent
de la dissolution à hautes températures
de sels contenus dans des couches
dites à évaporites3 que l’on retrouve
dans les marbres impurs de certaines
régions d’Asie, riches en argiles et en
matières organiques. Ces fluides ont
ensuite été mis en mouvement à la
© IRD/ G. Giuliani
Actualités
O
© IRD/S.Trèche
Du 23 au 28 novembre 2003, Ouagadougou accueillait un atelier international sur les
Voies alimentaires d'amélioration des situations nutritionnelles en Afrique de l'Ouest : le
rôle des technologues alimentaires et des nutritionnistes.
Contact
Gaston Giulini
[email protected]
faveur
des contraintes
tectoniques, provoquant ainsi des réactions chimiques qui ont permis la mobilisation de l’aluminium et des éléments
chromophores du rubis, présents en
très faible quantité. La dissolution des
sels des couches à évaporites a
entraîné au sein des marbres la création de cavités dans lesquelles du rubis
très pur, aux facettes bien développées
a pu cristalliser.
Contrairement aux études précédentes,
le modèle proposé met donc en évidence l’intervention de sels et de fluides
minéralisateurs d’origines métamorphiques. Inédit pour le rubis naturel, il se
révèle par ailleurs proche de la méthode
des sels fondus utilisée dans l’industrie
●
pour la production d’aluminium.
1. Ces recherches associent l’UR 154,
Déformation de la lithosphère continentale
en zones de convergence et transferts de
matière, de l’IRD, le Centre de recherches
Pétrographiques et Géochimiques / CNRS de
Nancy, l’UMRG2RR de l’Université HenriPoincaré de Nancy et l’UMR 5025 LGCA
(Laboratoire de géodynamique des Chaînes
Alpines) de Grenoble. Le projet de recherche
sur les gemmes, développé au sein de l’UR
154 de l’IRD est orienté sur l’étude des gisements de rubis en Asie du Sud-Est. Depuis
1998, des partenariats ont été établis au
Viêt-nam avec l’Institut des Sciences Géologiques de Hanoï et avec le service géologique du Pakistan et le soutien du Service
culturel de l’Ambassade de France à
Islamabad.
2. Ces travaux ont fait l’objet de la thèse de
Virginie Garnier.
3. Ces évaporites correspondent à de l’anhydrite (sulfate de calcium) et des sels
comme la halite et la sylvite (chlorures de
sodium et de potassium).
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