Mise au point mt 2011 ; 17 (1) : 34-40 Cellules Natural Killer : une cible thérapeutique potentielle au cours des maladies auto-immunes ? Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 26/05/2017. Nicolas Schleinitz Service de médecine interne, AP-HM Hôpital de la Conception, Université de la Méditerranée, 147, boulevard Baille, 13385 Marseille Cedex 5, France <[email protected]> Les cellules Natural Killer (NK) ont une fonction, connue de longue date, dans les défenses anti-infectieuses et antitumorales. Leur rôle anti tumoral est actuellement l’objet de travaux de développement clinique dans le domaine thérapeutique. Plus récemment, leur rôle dans les pathologies inflammatoires et auto-immunes a été évoqué sur des données expérimentales chez l’animal et chez l’Homme. Des anomalies des cellules NK circulantes ont notamment été décrites au cours du lupus érythémateux systémique. Des travaux futurs devront préciser comment les cellules NK interviennent dans l’apparition, le maintien ou l’aggravation des pathologies inflammatoires et/ou auto-immunes afin d’envisager une modulation de leur fonction à visée thérapeutique. Mots clés : cellules Natural Killer, pathologie inflammatoire, pathologie auto-immune, lupus érythémateux systémique L Tirés à part : N. Schleinitz 34 Les cellules Natural Killer Les cellules Natural Killer (NK) sont des lymphocytes différenciés à partir d’un précurseur commun avec les lymphocytes T, dont ils partagent certaines caractéristiques phénotypiques. Ces cellules sont des acteurs importants de la réponse immunitaire innée. Leur appellation de « tueuses » vient de leur capacité, connue de longue date, à détruire une cible cellulaire par cytotoxicité directe, sans « immunisation » préalable contrairement à la cytotoxicité des lymphocytes T ou à la cytotoxicité anticorps dépendante (ADCC). En cytologie rien ne les distingue des autres lymphocytes cytotoxiques : il s’agit de grands lymphocytes granuleux. Les inclusions azurophiles cytoplasmiques contiennent les molécules granzyme et perforine, effecteurs de la cytotoxicité cellulaire. Phénotypiquement les cellules NK se Pour citer cet article : Schleinitz N. Cellules Natural Killer : une cible thérapeutique potentielle au cours des maladies auto-immunes ? mt 2011 ; 17 (1) : 34-40 doi:10.1684/met.2011.0311 doi:10.1684/met.2011.0311 mt es cellules Natural Killer (NK) sont un des acteurs majeurs de la réponse immunitaire innée et leur rôle a été démontré de longue date dans les défenses anti infectieuses et anti tumorales. Leur meilleure caractérisation et la meilleure connaissance des mécanismes de régulation de leurs fonctions a permis leur exploration dans les pathologies auto-immunes. De nombreuses modifications fonctionnelles ont été rapportées et suggèrent que les cellules NK ont soit un rôle promoteur soit un rôle protecteur au cours des différentes maladies auto-immunes. L’objectif de cette revue est de rappeler les connaissances actuelles sur la physiopathologie de ce compartiment cellulaire et les données des études menées sur les cellules NK au cours des maladies auto-immunes chez l’Homme. Ces résultats permettent de formuler des hypothèses quant à l’implication des cellules NK au cours de ces affections et laissent envisager leur rôle en thérapeutique. Lymphocytes NK CD3- CD56bright 104 Lymphocytes NK CD3- CD56dim 103 CD56 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 26/05/2017. distinguent des lymphocytes T car ils n’expriment pas le CD3/TCR (T-Cell receptor), mais les marqueurs CD16 (récepteur de faible affinité pour les IgG) et CD56 (isoforme de N-CAM) qui ne leur sont pas spécifiques. Les cellules NK doivent être différenciées des lymphocytes T exprimant des récepteurs NK et des cellules NKT qui expriment le CD3 et un récepteur de l’antigène invariable exprimant les chaine V␣24 et V11 du TCR (figure 1). Une certaine confusion a pu exister dans la littérature du fait de l’appellation et de certaines similitudes phénotypiques entre ces sous-populations lymphocytaires dont les fonctions sont cependant très différentes. Un triple marquage (CD3- CD16+ CD56 + ) permet d’évaluer quantitativement le compartiment NK du sang circulant. Le niveau d’expression du CD56 permet de distinguer deux sous-populations de cellules NK présentant des différences fonctionnelles. La population CD56dim (expression faible) est majoritaire et représente 90% des cellules NK circulantes. Elle se caractérise par une forte cytotoxicité naturelle, un faible pouvoir prolifératif en culture et une faible production de cytokines. La population CD56bright (forte expression) est minoritaire dans le sang (10%). Elle est peu cytotoxique, a un fort pouvoir prolifératif en présence d’IL-2 et produit de l’IFN␥ et du TNF␣ [1]. Les cellules NK sont une source cellulaire importante pour la production d’IFN␥. Les cellules NK CD56bright sont celles que l’on retrouve au niveau des organes lymphoïdes secondaires [2] et au niveau de la muqueuse utérine Lymphocytes T CD3+ CD56+ (NKT) 102 101 Lymphocytes T CD3+ CD56100 100 101 102 103 104 CD3 Figure 1. Individualisation des lymphocytes NK en cytométrie de flux. Les cellules NK sont définies phénotypiquement par l’expression de deux marqueurs non spécifiques, CD56 et CD16 et l’absence d’expression du CD3. Le diagramme présente les résultats d’une analyse des populations lymphocytaires d’un individu sain par un double marquage par un anti-CD56 et anti-CD3. On isole très bien les cellules NK qui sont CD56+ et CD3- et on différencie bien les deux sous populations CD56bright et CD56dim . Ce diagramme montre bien la présence d’une sous-population lymphocytaire T définie par l’expression du CD3 qui exprime également le CD56. Les cellules dites NKT font partie de cette sous population. pendant la gestation. Le compartiment NK du sang circulant est bien caractérisé mais la répartition tissulaire des cellules NK chez l’homme reste encore mal connue et fait l’objet de travaux de recherche. Les cellules NK sont par leurs caractéristiques et leurs propriétés fonctionnelles impliquées dans la réponse immunitaire anti virale et anti tumorale. De nombreux arguments suggèrent également une implication dans les maladies autoimmunes et inflammatoires. Fonctions des cellules NK Les fonctions des cellules NK sont multiples : cytotoxicité naturelle, cytotoxicité dépendante des anticorps, production de cytokines et interactions cellulaires notamment avec les cellules dendritiques. Ainsi les cellules NK sont à la fois un acteur des la réponse immunitaire innée, un lien entre la réponse innée et adaptative par leur interaction avec les cellules dendritiques et la production précoce de cytokines et un « effecteur » de la réponse immunitaire adaptative par le biais de l’ADCC. Cytotoxicité naturelle Les effecteurs de la cytotoxicité NK sont non spécifiques. Cette cytotoxicité est liée soit à la dégranulation des granules cytotoxiques contenant de la perforine et du granzyme soit à l’induction de l’apoptose via l’expression de FasL ou TRAIL [3]. Cette dégranulation peut-être analysée directement en cytométrie de flux par l’expression à la membrane cellulaire du CD107a (figure 2) en présence d’une cible cellulaire. Le déclenchement de cette cytotoxicité cellulaire naturelle est induite par la reconnaissance de ligands sur la cellule cible. Plusieurs récepteurs NK activateurs sont impliqués dans cette reconnaissance. Les NCR (Natural Cytotoxicity Receptors) NKp44, NKp46, NKp30 et NKG2D [4]. NKG2D reconnaît des molécules induites par le stress cellulaire (infection virale ou transformation tumorale) : MICA, MICB et ULBPs [5]. Les ligands des autres NCR, NKp44 et NKp46, sont actuellement mal caractérisés. Certains travaux ont montré que NKp46 et NKp44 reconnaissent l’hémagglutinine du virus influenzae et des tests in vitro ont montré que des lignées tumorales expriment des ligands pour ces récepteurs. NKp30 intervient dans la coopération entre les cellules NK et les cellules dendritiques. L’activation cellulaire après engagement de ces différents récepteurs est liée à leur association à des protéines transmembranaire. Ces protéines KARAP/DAP-12, CD3 et FcR␥ possèdent des motifs ITAM (Immunoreceptor Tyrosine-based Activation Motif) permettant le recrutement, après activation, de tyrosines kinases dont syk. NKG2D quant à lui est associé à DAP10, un adaptateur de signalisation dépourvu d’ITAM. [12,17rmi]. Les cellules NK expriment également à leur mt, vol. 17, n◦ 1, jan-fév-mars 2011 35 Mise au point A Cellule NK L’impact des immunoglobulines polyvalentes humaines sur les cellules Natural Killer a été peu étudié. Un travail a cependant montré qu’elles entrainaient une diminution d’expression du CD16 et une modulation des fonctions cytotoxiques NK [9]. Cellule Cible + Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 26/05/2017. B C IFNγ IL-10, IL IL-5, IL13, TNFα GM-CSF MIP1α, MIP1β, IL-8, RANTES Figure 2. Fonction des cellules NK. A) La cytotoxicité naturelle des cellules NK est sous le contrôle de récepteurs inhibiteurs et activateurs. Les récepteurs inhibiteurs reconnaissent les molécules du CMH de classe I. Les réceoteurs activateurs ou NCRs reconnaissent des ligands induits par le stress cellulaire. Le décelenchement de la cytotoxicité NK dépendra de la balance des signaux inhibiteurs et activateurs. B) Les cellules NK peuvent ecxercer la cytotoxicité par un mécanisme d’ADCC via l’expression du CD16 qui est le récepteur de faible affinité pour le fragment Fc des IgG. C : Les fonctions NK sont aussi liées à la production de cytokines. Cette production de cytokines est importante dans le cadre des défenses anti infectieuses et notamment antivirales (IFN␥). Les cellules NK sont une source précoce de production de cytokines. surface d’autres molécules d’activation: CD2, NKp80 et 2B4 (CD244) ; des molécules d’adhérence : LFA-1, DNAM-1, CD62-L, Pen5/PSGL-1 et CD44; des récepteurs aux cytokines : IL-1R, IL-2R␣␥, IL-12R, IL-15R, IL-18R et IL-21R et des récepteurs pour certaines chimiokines : CXCR3, CXCR1, CXCR4 et CCR7 [1]. Cytotoxicité dépendante des anticorps Les cellules NK CD56dim expriment fortement le CD16 ou Fc␥RIIIa qui est le récepteur de faible affinité pour le fragment Fc des IgG, responsable de l’ADCC. Ce récepteur permet l’acquisition d’un répertoire par la fixation des IgG. L’activation des cellules NK via le CD16 induit la dégranulation et la production d’IFN␥. L’importance de l’ADCC sur le plan thérapeutique à été démontrée par l’impact du polymorphisme 158VF [6] du Fc␥RIIIA, qui augmente l’affinité pour les IgG, dans la réponse aux anticorps monoclonaux notamment en oncologie [7, 8]. Ces travaux soulignent également l’importance des cellules NK sur la réponse thérapeutique aux anticorps monoclonaux. 36 Interactions avec les cellules dendritiques (DCs) L’interaction entre les cellules dendritiques et les cellules NK peut avoir lieu dans les ganglions, où peuvent migrer les cellules NK, mais également au niveau des sites inflammatoires tissulaires. Cette interaction est complexe [10]. Les cellules NK détruisent par cytotoxicité les cellules dendritiques immatures. La reconnaissance des cellules dendritiques immatures repose sur leur faible niveau d’expression du CMH de classe I contrairement aux cellules dendritiques matures qui l’expriment fortement. Les cellules NK induisent également la maturation des DCs et réciproquement les DCs induisent la prolifération des NK [11]. Ainsi les cellules NK sont supposées exercer un contrôle sur la maturation des cellules dendritiques et donc l’initiation et l’orientation de la réponse immunitaire adaptative. Il existe en fait un contrôle réciproque entre les cellules NK et les cellules dendritiques. Ainsi les cellules dendritiques via la production d’IL12 peuvent induire par les cellules NK la production soit d’IFN␥, soit d’IL-10 qui est une cytokine immunorégulatrice. Contrôle et éducation des cellules NK Contrôle de l’activation des cellules NK La cytotoxicité naturelle (figure 3)est dépendante de l’expression du CMH de classe I par les cellules tumorales, c’est la théorie du « soi manquant » (missing self) [12]. Les cellules NK lysent les cellules tumorales qui n’expriment pas le CMH de classe I alors que les mêmes lignées qui l’expriment sont résistantes. Cette théorie du « soi manquant » s’explique par l’expression de récepteurs inhibiteurs par les cellules NK : récepteurs KIR-L (Killer cell Immunoglobulin-like Receptor), CD94/NKG2 et ILT (CD85) (Immunoglobulin-Like Transcript) reconnaissant différentes molécules du CMH de classe I [13]. La reconnaissance par ces récepteurs de molécules du CMH de classe I sur une cible cellulaire permet d’inhiber la cytotoxicité NK. Les cellules NK contrôlent ainsi la qualité de l’expression du CMH de classe I par les cellules de l’organisme. L’engagement de ces récepteurs permet, par le recrutement de tyrosines phosphatases, de bloquer la transduction du signal activateur. Une affection rare, dénommée « pseudo-Wegener », liée à un défaut d’expression des molécules du CMH de classe I, illustre ce fait puisque les lésions tissulaires sont en partie liées à un défaut de contrôle par les CMH de classe I des cellules NK autologues [14]. mt, vol. 17, n◦ 1, jan-fév-mars 2011 Contrôle négatif Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 26/05/2017. CD107 104 4.97 ADCC En présence de K562 104 0.32 10.5 8.34 104 103 103 103 102 102 102 101 101 101 100 3.47 91.2 100 101 102 103 104 100 4.75 76.4 100 101 102 103 104 100 13.4 9.53 70.1 100 7 101 102 103 104 IFNγ Figure 3. Analyse par cytométrie de flux de l’activation des cellules NK. L’activation des cellules NK peut se mesurer par leur production d’IFN␥ et par la quantification de la cytotoxicité naturelle ou dépendante des anticorps (ADCC). On analyse en routine l’expression à la surface des cellules NK du CD107a pour évaluer la dégranulation qui est l’étape indispensable à la cytotoxicité. On analyse dans un même temps la production d’IFN␥. A : cellules NK en présence d’un milieu contrôle, il y a très peu de cellules NK exprimant le CD107a ou produisant de l’IFN␥. B : En présence de cellules K562 (lignée tumorale sensible à la cytotoxicité naturelle NK) on note la dégranulation (CD107a + ) et la production d’IFN␥ par une partie des cellules NK. C : On note également une dégranulation et un production d’IFN␥ dans un test d’ADCC. Ces récepteurs inhibiteurs possèdent une contrepartie activatrice les KIRs dont la portion extracellulaire est d’une grande homologie. La balance entre les signaux inhibiteurs principalement liés à la reconnaissance du CMH de classe I sur la cible et les signaux activateurs NCR ou KIRs va réguler les fonctions des cellules NK et notamment leurs fonctions cytotoxiques. Les gènes codant pour les récepteurs KIRs (activateurs et inhibiteurs) et ILT sont localisé sur un même locus sur le chromosome 19. Un polymorphisme génétique existe quant au nombre de gènes présents dans le locus (il existe surtout une variation dans le nombre de gènes KIR activateurs) et sur des variations de séquences allèliques pour plusieurs de ces gènes. Cette variabilité génétique est à la base des études d’associations avec certaines pathologies auto-immunes ou inflammatoires. Education des cellules NK Cette découverte relativement récente ne fait pas référence au même processus que celui, complexe, de la maturation lymphocytaire B ou T. Ce terme d’éducation fait référence au fait que les cellules NK seront capables de cytotoxicité ou de production d’IFN␥ lorsqu’elles rencontreront une cible que si au préalable les récepteurs inhibiteurs reconnaissant le CMH de classe I (KIR-L) ont été en contact avec leur ligand. Ce n’est donc qu’en cas de reconnaissance d’un ligand inhibiteur qu’une activation de la cellule NK pourra survenir dans un deuxième temps lors de la reconnaissance d’un ligand activateur. Les cellules NK en pathologie auto-immune chez l’homme Basé sur les connaissances fondamentales acquises on peut proposer plusieurs modèles d’implication théorique des cellules NK dans la physiopathologie des maladies auto-immunes (figure 4) : 1) autoréactivité NK naturelle par défaut ou anomalie d’expression du CMH de classe I (défaut de signal inhibiteur) ; 2) prédisposition génétique aux maladies autoimmunes liée aux haplotypes ou gènes KIR ; 3) orientation de la réponse immunitaire adaptative par le biais, soit du contrôle de la maturation des cellules dendritiques, soit par un rôle de cellule présentatrice de l’antigène soit par la production de cytokines ; 4) une interaction avec les cellules T régulatrices ; 5) un rôle de cellule effectrice notamment par l’ADCC. Les données en pathologie auto-immune chez l’homme Des anomalies du compartiment NK circulant ont été rapportées par plusieurs auteurs, au cours du lupus érythémateux disséminé (LED), du syndrome de GougerotSjögren, de la sclérose en plaque, de la polyarthrite rhumatoïde, de la thyroïdite auto-immune et du diabète de type I. Jusqu’à présent il a été mis en évidence, par plusieurs équipes et de façon répétitive, une diminution significative du nombre de cellules NK dans le sang mt, vol. 17, n◦ 1, jan-fév-mars 2011 37 Mise au point A Contrôle de la réponse auto-immune NK IL-10 B DCs T - Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 26/05/2017. Autoantigène B Rôle promoteur de la réponse auto-immune NK Lésions tissulaires B NK ADCC DCs Autoantigène T + + Macrophage Figure 4. Rôle potentiel des cellules NK dans la physiopathologie des maladies auto-immunes. A) Les NK peuvent avoir un rôle protecteur vis-à-vis des maladies auto-immunes : 1/ Destruction des cellules dendritiques immatures qui pourraient potentiellement présenter des auto antigènes ; 2/ Contrôle négatif sur la réponse auto réactive lymphocytaire T et B par la production e cytokines immunorégulatrices. Un défaut de fonctions NK pourrait ainsi favoriser les maladies auto-immunes. B) Les NK peuvent avoir un rôle promoteur dans les maladies autoimmunes : 1/ Maturation des cellules dendritiques présentant des auto antigènes 2/ Activation des macrophages au niveau des tissulaire entrainant les lésions tissulaires 3/ Rôle effecteur par les biais de l’ADCC et la reconnaissance de cibles recouvertes d’autoanticorps. circulant, associée à une baisse des fonctions cytotoxiques vis à vis de cibles cellulaires naturellement sensibles à la lyse par les cellules NK. Ces anomalies pourraient être corrélées à l’activité de la maladie lupique [15-17]. De telles anomalies ont également été rapportées au cours du syndrome d’activation macrophagique et de l’arthrite juvénile [18]. Il n’est pas clair aujourd’hui si ces anomalies sont la conséquence de la pathologie, du traitement immunosuppresseur, ou si elles participent aux désordres immunitaires sous-jacents à celle-ci. Dans le pemphigus contrairement aux données observées dans les autres maladies auto-immunes il a été rapporté une augmentation du compartiment NK circulant [19]. L’étude de l’implication des cellules NK, ou plus justement des récepteurs KIR (nous avons vu que ces récepteurs pouvaient être exprimés par des sous-populations lymphocytaires T) dans les pathologies auto-immunes a également été abordée par une approche génétique analysant l’association entre les génotypes ou haplotypes KIRs, du CMH de classe I et les pathologies. Il a ainsi été retrouvé une association entre 38 certains génotypes KIR/CMH et la survenue d’un rhumatisme psoriasique [20, 21] ou encore d’une sclérodermie systémique [22]. Les pathologies associées à un CMH de classe I particulier sont un champ d’exploration intéressant dans ce contexte. L’exemple du lupus érythémateux disséminé Les lupus érythémateux disséminé (LED) est une pathologie associée à une réponse auto-immune non spécifique d’organe. La physiopathologie est sous tendue par un excès de corps apoptotiques induisant l’apparition d’autoanticorps dirigés vis-à-vis d’antigènes nucléaires. Comme pour les autres maladies auto-immunes la réponse immunitaire adaptative est donc primordiale dans la physiopathologie. L’implication des cellules NK au cours du LED est fondée sur les mêmes bases hypothétiques que celles avancées précédemment pour les maladies auto-immunes. Par ailleurs le rôle joué par les facteurs environnementaux, et notamment les infections virales, mt, vol. 17, n◦ 1, jan-fév-mars 2011 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 26/05/2017. dans le déclenchement des poussées de LED doit être mis en parallèle avec la réduction des fonctions cytotoxiques et du nombre des cellules NK circulantes observées au cours du LED. L’étude du compartiment Natural killer au cour du LED n’a jusqu’à présent porté que sur l’étude des cellules « accessibles » de la circulation sanguine, il n’y a pas de données tissulaires. Au cours du LED il existe de façon constante une diminution significative des cellules NK circulantes [15-17]. Cette anomalie quantitative est associée à une anomalie qualitative puisque la cytotoxicité NK est également diminuée. Certains travaux suggèrent que la diminution des cellules NK circulantes serait liée à un excès d’apoptose NK. L’analyse phénotypique complète de l’expression des différents récepteurs NK sur des cohortes de patients LED ne montre que peu de modification et ne permet donc pas d’expliquer cette diminution de la cytotoxicité. Il semblerait que la population CD56bright , minoritaire et peu cytotoxique, soit augmentée chez les patients LED [23]. Ces résultats ne démontrent pour l’instant en aucun cas une implication directe des cellules NK au cours du LED mais les anomalies observées, même en l’absence de traitement chez certains patients [24], le suggèrent. Cette hypothèse est renforcée par l’association entre certains génotypes KIR et le LED. L’étude d’une cohorte de 304 LED retrouve une association significative avec le génotype KIR2DS1 + / KIR2DS2–[25]. Proche du LED, des anomalies du compartiment circulant NK on été retrouvées dans le syndrome de Gougerot Sjögren mais aussi dans le syndrome des antiphospholipides. Cette dernière association est à rattacher à l’importance des cellules NK utérines au cour de la grossesse. Killer). Dans le domaine de la greffe allogénique les cellules NK sont associés à l’effet anti tumoral du greffon contre la leucémie en greffe haploidentique. Une autre approche développe le blocage des voies inhibitrices de la cytotoxicité naturelle par le « blocage » des récepteurs inhibiteurs. La manipulation des Cellules NK en thérapeutique 1. Cooper MA, Fehniger TA, Caligiuri MA. The biology of human natural killer-cell subsets. Trends Immunol 2001 ; 22 : 633-40. Comme nous l’avons vu dans le domaine des maladies auto-immunes chez l’homme les données concernant les modifications du compartiment cellulaire NK et leur rôle dans ces pathologies est encore loin d’être établi avec certitude. Il est donc difficile d’envisager à ce stade une action thérapeutique ciblée sur les cellules NK même si l’on doit avoir la notion d’une modification de leur fonction par les stéroïdes et certains immunosuppresseurs. Par contre il est établi que l’efficacité de certains traitements par anticorps monoclonaux est liée à l’action cytotoxique NK via le CD16 et l’ADCC [6] et peut avoir une implication directe dans la prise en charge des maladies auto-immunes. C’est dans le domaine de l’oncologie que les développements thérapeutiques semblent prometteurs avec des essais thérapeutiques déjà en cours. L’objectif est d’utiliser l’effet anti tumoral des cellules NK. Cet effet anti tumoral peut être stimulé, ce qui se produit dans les protocoles thérapeutiques par IL-2 (effet LAK pour lymphokine activated Conclusion Nos connaissances sur la régulation des fonctions cellulaires NK sont relativement récentes. Leur potentiel cytotoxique est remarquable et associé à une fonction d’immuno surveillance. Cette propriété est à la base des travaux de développement d’études cliniques en oncologie ayant pour objectif l’utilisation des cellules NK à visée anti-tumorale. Par ailleurs la complexité de la régulation de leur fonctions et la découverte de leur implication dans l’orientation de la réponse immuniatire adaptative à ouvert un champ d’exploration dans le domaine des maladies auto-immunes et inflammatoires. Les données actuelles montrent dans la très grande majorité des ces affections des modifications significatives des cellules NK, laissant envisager leur implication directe dans ces maladies. Cela laisse envisager à terme que les cellules NK pourraient être une nouvelle cible thérapeutique au cours des maladies auto-immunes. Remerciements et autres mentions. Financement : aucun ; conflits d’intérêts : aucun. Références 2. Fehniger TA, Cooper MA, Nuovo GJ, et al. 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