le grappin dessus. Une fois seulement, à dix-sept ans,
il avait éprouvé un vague sentiment pour une jeune
femme répondant au nom de Délia qui l’avait initié
aux mystères du sexe. Sa mauvaise haleine mit un
terme précoce à leur relation.
Puis, arrivé à la trentaine, il fit la connaissance
d’une femme plus âgée que lui et loin d’être attirante ;
cependant, elle devint sa maîtresse régulière et
accepta, sans chercher à s’immiscer dans la vie privée
de cet amant singulier, une entente limitée à des
relations sexuelles hebdomadaires, d’habitude le
vendredi soir. Ziegler avait toujours considéré le sexe
au même titre qu’une activité physique telle que se
nourrir, dormir, déféquer, et menait sa vie en accord
avec cette déontologie. Curieusement, cette liaison
privée de couleur et d’émotion, mais d’effet lénitif se
révéla stable et durable à la suite de journées
consacrées aux soins de conflits psychiques le plus
souvent aberrants.
C’était un vendredi et Ziegler avait été débordé de
travail toute la journée. Mme Charikoski, une
richissime cliente d’origine polonaise avait exigé une
séance de deux heures, et devant son refus, avait
proposé de doubler le tarif habituel. Il avait enfin cédé
et pendant deux heures interminables il dut supporter
les diatribes enflammées de sa cliente ainsi que le
récit de nombreuses relations adultérines suivies de
ses multiples repentances. Déjà à mi-séance, il en
avait par-dessus la tête. Si Mme Charikoski pouvait
seulement accepter que son seul attrait résidait dans la
situation sociale et le pouvoir politique de son époux !
De plus, afin de s’épargner la vue d’une verrue
pileuse lui défigurant le menton, à chaque séance,
Ziegler enlevait ses lunettes dès que la patiente