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Conformément à la territorialisation des politiques publiques, un projet d’intervention dans le
domaine du paysage doit prendre en compte les spécificités du contexte local (notamment le
système d’acteurs qui y œuvre) et les caractéristiques du territoire. La nature des actions qui
seront finalement menées peut donc différer selon les sites, en fonction des enjeux pris en
compte et des priorités retenues par les acteurs impliqués. Ce traitement circonstancié est
d’autant plus nécessaire que les dispositifs choisis obligent à la mise en place d'une démarche
participative pour l’élaboration du projet. C’est le cas pour les Chartes paysagères et
architecturales ou les Contrats de Paysage.
Plusieurs facteurs concourent à ce que le niveau intercommunal soit privilégié pour la mise en
œuvre de tels programmes paysagers locaux. D’un point de vue administratif, on peut
souligner le lien entre les préoccupations paysagères et les compétences d’aménagement et de
planification dorénavant exercées à l’échelon intercommunal. Un raisonnement de type
fonctionnel conduit par ailleurs certains spécialistes à recommander de travailler à l’échelle
d’entités paysagères suffisamment larges. Même si les découpages administratifs et paysagers
ne concordent jamais, le niveau intercommunal paraît de ce point de vue offrir suffisamment
de recul pour identifier les grandes caractéristiques paysagères du territoire et, le cas échéant,
énoncer des priorités cohérentes. Il offre un compromis entre la proximité du terrain, gage
d’une bonne connaissance et prise en compte du contexte d’intervention, et un certain recul
permettant une vision plus large, une agrégation des informations et des aspirations et une
concentration des moyens d’intervention.
Comme toutes les problématiques d’aménagement et de développement, les enjeux paysagers
impliquent des acteurs socioprofessionnels, sur lesquels reposera pour partie la mise en œuvre
des actions. Les interventions paysagères supposent donc a minima une concertation ou mieux
l’établissement d’un partenariat. Des relations plus ou moins équilibrées vont s’établir entre
acteurs privés et publics, tout comme, au sein de la sphère publique, entre différentes
collectivités locales, administrations ou organismes parapublics. Notons à ce propos que le
niveau municipal reste très présent dans les institutions intercommunales, qui sont gérées par
des délégués des communes.
Dans l’un et l’autre de nos cas d’étude, l’implication finale des élus municipaux diffère très
sensiblement. Dans le Pays des Feuillardiers, l’initiative a été lancée par une chargée de
mission « paysage » de la Direction Régionale du ministère de l’environnement qui a sollicité
le syndicat mixte de développement local (le Codeso) afin d’engager une action visant à
freiner l’enrésinement de la zone et à restaurer les taillis de châtaigniers où se produisaient des
feuillards3 il y a encore quelques années. Les deux institutions ont proposé à l’équipe
administrative du futur PNR de prendre en charge ce projet, le paysage étant le champ
d’intervention privilégié de ces institutions régionales depuis la promulgation de la loi
Paysage en 1993. Ce qu’elle a accepté. L’élaboration du Contrat a duré cinq années (1995-
2000). Chacun des 17 maires a été contacté individuellement par le cabinet d’études chargé de
faire le diagnostic paysager pour savoir quels problèmes lui paraissaient les plus cruciaux sur
sa commune. Mais collectivement, ils n’ont ni réfléchi ni discuté du projet, notamment parce
que le dispositif de discussion mis en place ne le permettait pas4. Le comité technique
responsable du suivi ne comptait pas d’élu (il était composé de l’animateur du PNR, de
l’animateur du Codeso et de l’agent de la Diren) ; la présidente du comité de pilotage, une
3 Le feuillard est une repousse de châtaignier fendue sur sa longueur, qui sert au cerclage traditionnel des
barriques de vin. Ils sont encore quelque peu utilisés dans le Bordelais pour les barriques dites de transport. Le
feuillardier désigne le métier, toujours saisonnier, des personnes qui les fabriquent.
4 Voir l’annexe 2 pour une présentation synthétique du dispositif de discussion mis en place pour l’élaboration de
chacun des deux projets.