ENTRETIEN AVEC L’AUTEURE ET
INTERPRÈTE AMÉLIE CORNU
Colombe Calmettes - Décembre 2016
Pouvez-vous nous résumer Le Cri des Anges, et nous dire en quelques
mots quelles ont été vos motivations pour écrire et interpréter ce texte ?
L’histoire est très simple : Ally, une jeune femme solaire, tombe amoureuse
d’Hugo au cours d’une soirée. Leur idylle tourne court quand le jeune
homme est déclaré en état de mort cérébrale. En une fraction de seconde,
tous les repères d’Ally basculent entraînant avec eux ce qui jusque-là lui
semblait acquis. Elle engage alors un monologue intérieur et évreux, plus
proche de l’ode à la vie que de l’éloge funèbre, où l’humour fait sans cesse
contrepoint à l’émotion.
Comme de nombreuses personnes, j’ai dû affronter différentes formes de
deuils au cours de ma vie. Je voulais notamment parler de la difculté à
faire le deuil de quelqu’un qui n’est pas encore mort. Mais c’est avant tout
le travail de résilience que j’ai souhaité mettre en lumière. Valoriser la
pulsion de vie qui traverse, transforme et transcende toute expérience de deuil.
Votre première pièce Tri(s) Sélectif(s), créée en 2011, était un huis clos
à quatre personnages. Pourquoi avoir voulu cette fois-ci écrire un monologue
et l’interpréter sous forme de seule en scène ?
J’avais initialement commencé à écrire une pièce à deux voix, celles d’Ally
et d’Hugo. Et puis au cours de l’écriture, ce que j’avais imaginé comme un
dialogue s’est intuitivement transformé en monologue. Pour traiter de
l’absence, il m’a nalement semblé plus fort d’évoquer Hugo sans qu’il ne
soit jamais incarné physiquement. Même si Ally parle de plusieurs
personnages hauts en couleurs, que j’interprète sur scène !
Quelles ont été vos inuences pour écrire cette pièce ?
Deux textes se sont imposés à moi en références : Le Vieux Juif Blonde
d’Amanda Sthers, et Confidences à Allah de Saphia Azzedine. Deux
monologues, deux personnages féminins qui refusent de se soumettre face
à l’adversité. Et qui usent de l’humour et du décalage comme boucliers
pour tenir à distance le désarroi. J’ai eu à cœur de privilégier une écriture
emprunte de poésie et d’humour. Parfois crue et dérangeante.
Ce texte est écrit à la première personne. Est-ce une autobiographie
ou une ction ?
Ma problématique en tant qu’auteure et comédienne était justement de trouver
cette juste distance entre un texte écrit à la première personne et la composition
d’un personnage de ction, d’un autre je curieusement étranger et familier.
Pour ce faire, je me suis appuyée sur ce que le deuil a de protéiforme pour
me l’approprier et faire mienne cette expérience qui s’écrit en miroir.
© Jean Ritter