L’Homme en bonne santé, nous l’avons dit, a trouvé un état d’équilibre
avec le monde microbien, qui lui est conféré principalement par une
gamme importante de moyens physiologiques de défense. Cet équilibre
est constamment menacé : d’abord parce qu’il rencontre à tout moment
de nouvelles bactéries (en serrant la main, en mangeant, en respirant, en
voyageant...) et qu’il lui arrive ainsi de rencontrer des microorganismes
disposant de systèmes de virulence auxquels il ne peut résister ; ensuite
parce que lui-même peut occasionnellement voir certains de ses
mécanismes de défense altérés ou perdus. Tous les paramètres de cet
équilibre instable évoluent perpétuellement, et sans doute aujourd'hui
beaucoup plus qu’auparavant. En voici des exemples:
• La population change et son comportement évolue.
La pyramide des âges a fortement évolué durant le XXème siècle, et la
population vieillit globalement, augmentant la proportion de personnes
plus sensibles à l’infection.
Les transhumances augmentent de façon exponentielle, favorisant le
brassage des populations, tout profit pour la dissémination des
pathologies épidémiques et des souches résistantes.
Les comportements sexuels ont fortement évolué depuis trente ans
favorisant des épidémies nouvelles comme le SIDA.
La médecine a fait d’énormes progrès ces dernières décennies mais il y a
un gros revers à la médaille : le nombre de patients immunodéprimés ou
présentant un déficit des mécanismes de défense ou restant hospitalisés
pour de longues périodes s’est accru très considérablement (les
prématurés, les greffés, les poses de prothèses artificielles, la
malnutrition, les thérapies anti-cancéreuses...)
• Les bactéries changent
Les bactéries ont évolué en manifestant un extraordinaire pouvoir
d'adaptation, surtout dans l'acquisition de mécanismes de résistance aux
antibiotiques, un phénomène qui s’accroît de façon constante et
inquiétante. De nouvelles bactéries sont découvertes, certaines
diminuent d’incidence, voire disparaissent, d’autres réapparaissent ou
montrent des modifications de leur pathogénicité.
• L’environnement change
Toute une série de facteurs dans notre environnement ont évolué et
certaines modifications ont entraîné une augmentation du risque
infectieux et de sa dissémination : la mondialisation de l’industrie, la
pollution, la structure de bâtiments modernes et, en particulier, celle des
hôpitaux. L'hôpital moderne, par beaucoup d'aspects, favorise l'infection :
pression antibiotique importante favorisant la sélection de souches multi-
résistantes, équipes pluridisciplinaires multipliant les contacts des
patients, multiplicité des portes d'entrées (cathéters...)
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