Recommandations de l’Afssaps Collyres et autres topiques antibiotiques dans les infections oculaires superficielles Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Downloaded by a robot coming from 88.99.165.207 on 26/05/2017. Recommandation de bonne pratique (Juillet 2004) 360 Groupe de travail Pr Decazes de Glucksbierg Jean-Marie, Coordinateur, infectiologue, Paris Pr Cochereau Isabelle, Présidente du groupe de travail, ophtalmologiste, Angers Dr Robert Pierre-Yves, Chargé de projet, ophtalmologiste, Limoges Dr Dumarcet Nathalie, Responsable de projet, Afssaps Pr Bodaghi Bahram, ophtalmologiste, Paris Pr Bouvet Anne, microbiologiste, Paris Pr Budowski Max, généraliste, Paris Dr Cathelineau Béryl, ophtalmologiste, Paris Pr Cavallo Jean-Didier, bactériologiste, Saint-Mandé Dr Chaumeil Christine, microbiologiste, Paris Dr Denis Catherine, Afssaps Dr Diraison Marie-Christine, ophtalmologiste, Issy-les-Moulineaux Dr Garraffo Rodolphe, pharmacologue, Nice Dr Longuet Pascale, infectiologue, Paris Dr Pellanne Isabelle, Afssaps Mme Roche Cécile, Afssaps Groupe de lecture Dr Acquart Bernard, généraliste, Prouvy Pr Adenis Jean-Paul, ophtalmologiste, Limoges Pr Andremont Antoine, microbiologiste, Paris Dr Barre Jérôme, pharmacologue, Créteil Pr Bron Alain, ophtalmologiste, Dijon Pr Burillon Carole, ophtalmologiste, Lyon Dr Chichmanian Rose-Marie, pharmacologue, Nice Dr De Barbeyrac Bertille, ophtalmologiste, Bordeaux Dr Doan Serge, ophtalmologiste, Paris Pr Eb François, microbiologiste, Amiens Pr Hoang-Xuan Thanh, ophtalmologiste, Paris Pr Labalette Pierre, ophtalmologiste, Lille Dr Labetoulle Marc, ophtalmologiste, Le Kremlin Bicêtre Dr Lagarde Jacques, généraliste, l’Isle Jourdain Dr Lautier Frau Marie, ophtalmologiste, Paris Dr Menerath Jean-Marc, ophtalmologiste, Clermont-Ferrand Dr Pariente Olivier, ophtalmologiste, Paris Pr Pisella Pierre-Jean, ophtalmologiste, Tours Pr Renard Gilles, ophtalmologiste, Paris Dr Salvanet-Bouccara, ophtalmologiste, Villeneuve-Saint-Georges Mr Wierre Patrick, pharmacien, Jeumont Comité de validation Pr Caulin Charles, Président, thérapeutique, Paris Pr Bergmann Jean-François, Vice-Président, thérapeutique, Paris Pr Caron Jacques, pharmacologue, Lille, Président de la Commission de Pharmacovigilance Pr Bouvenot Gilles, thérapeutique, Marseille, Président de la Commission de Transparence Pr Ambrosi Pierre, cardiologue, Marseille Dr Atlan Pierre, généraliste, Paris Pr Bannwarth Bernard, pharmacologue, Bordeaux Dr Camelli Bruno, généraliste, Paris Dr Cucherat Michel, pharmacologue, Lyon Pr Diquet Bertrand, pharmacologue, Angers Dr Gueyffier François, cardiologue, Lyon Dr Hanslick Thomas, interniste, Boulogne-Billancourt Dr Le Roux Gérard, généraliste, Epinay-sous-Sénart Dr Lièvre Michel, pharmacologue, Lyon Dr Meyer François, Afssaps Pr Petit Michel, psychiatre, Sotteville-lès-Rouen Dr Reveillaud Olivier, généraliste, Bièvres Dr Rostoker Guy, Afssaps Pr Riché Christian, pharmacologue, Brest Dr Tremolières François, infectiologue, Mantes-la-Jolie Pr Trouvin Jean-Hugues, Afssaps Dr Wong Olivier, généraliste, Paris mt, vol. 10, n° 5, septembre-octobre 2004 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Downloaded by a robot coming from 88.99.165.207 on 26/05/2017. Méthode générale Les recommandations de bonne pratique et les références médicales définissent une stratégie médicale optimale en fonction de l’état actuel des connaissances et précisent ce qui est utile ou inutile, voire dangereux, de faire dans une situation clinique donnée. Les recommandations de bonne pratique et les références médicales résultent de l’analyse des données actuelles de la science issues de la littérature et prennent en compte les évaluations réalisées pour délivrer l’autorisation de mise sur le marché des médicaments (AMM) concernés, apprécier le service médical rendu (SMR) et élaborer les fiches de transparence. Le groupe de travail de l’Afssaps a regroupé des experts de compétence (ophtalmologie, microbiologie, pharmacologie, infectiologie et médecine générale), de mode d’exercice (hospitalo-universitaire, hospitalier ou libéral) et d’origine géographique divers. Les experts ont analysé la littérature et rédigé le document sous la direction d’un président de groupe et l’encadrement d’un responsable de projet. Plusieurs sociétés savantes : Société française d’ophtalmologie, Société d’ophtalmologie du nord de la France, Sfoalc, Syndicat national des ophtalmologistes de France, Société de pathologie infectieuse de langue française, Société nationale française de médecine interne, Société française de pédiatrie, Groupe de pathologie infectieuse pédiatrique, Groupe d’infectiologie pédiatrique, Association de pédiatrie ambulatoire, Société des urgentistes, Société française de microbiologie, Société française de gériatrie et de gérontologie, Société française de pharmacologie, ainsi que diverses associations de formation des médecins (Association nationale de coordination des actions de formations continues et d’évaluation en médecine, Unaformec, Formunof, Alfediam, MG Form, CMPNMG, Association confédérale pour la formation des médecins, Société de formation thérapeutique du généraliste, Société française de médecine générale, Centre de documentation et de recherche en médecine générale (CDRMG), Collège national des généralistes enseignants (CNGE), Comité d’éducation sanitaire et sociale de la pharmacie française, Collège des médecins de réanimation et d’urgence de France, ont été consultées pour proposer des représentants susceptibles de participer à l’élaboration de cette recommandation. La recherche bibliographique a été réalisée par interrogation systématique des banques de données Medline et Cochrane. Elle a identifié préférentiellement les recommandations thérapeutiques, les conférences de consensus, les essais cliniques, les méta-analyses et les revues de synthèse, publiés en langue française ou anglaise après 1997. La recherche bibliographique automatisée était basée sur les mots clés suivants : bacterial, antibiotics, topical, eye (ocular) drops, eye (ocular) ointment, eye gel, ocular treatment, meibomianitis, dacryocystitis, conjunctivitis, blepharitis, hordeolum, chalazion, keratitis, corneal ulcers, corneal abscess, canaliculitis, scleritis, episcleritis, dacryoadenitis, ophthalmia neonatorum, trachoma et tous les antibiotiques de la révision d’AMM. Elle a été complétée par une recherche manuelle. Au total, 461 références ont été consultées pour l’élaboration du texte et 78 ont été utilisées pour l’élaboration du texte. L’argumentaire et les recommandations de ce travail ont été établis par le groupe selon la méthodologie de la médecine fondée sur les preuves proposée par l’Anaes (Anaes : Les recommandations pour la pratique clinique– Base méthodologique pour leur réalisation en France – 1999 ; Guide d’analyse de la littérature et gradations des recommandations – 2000). Les grades A, B et C sont attribués aux recommandations selon le niveau de preuve scientifique attribué aux études sur lesquelles elles reposent (tableau 1). Lorsque les données de la littérature sont insuffisantes ou incomplètes, les recommandations sont basées sur un accord professionnel pour prendre en compte l’état des pratiques et les opinions d’experts. Le texte a été soumis à un groupe de lecture avant d’être finalisé par le groupe de travail. Le groupe de lecture était composé d’experts de compétence, de mode d’exercice et d’origine géographique divers. Les experts de ce groupe de lecture, consultés par courrier, ont apprécié la qualité méthodologique et la validité scientifique des propositions, ainsi que la lisibilité, la faisabilité et l’applicabilité du texte. Le texte a été soumis à l’approbation du Comité de validation des recommandations et références médicales de l’Afssaps et a été transmis pour avis à la Commission de transparence. Tableau 1. Niveau de preuve scientifique de la littérature et force des recommandations selon l’anaes Niveau de preuve scientifique des études Niveau 1 – Essais comparatifs randomisés de forte puissance – Méta-analyse d’essais comparatifs randomisés – Analyse de décision basée sur des études bien menées Niveau 2 – Essais comparatifs randomisés de faible puissance – Études comparatives non randomisées bien menées – Études de cohorte Niveau 3 – Études cas-témoin Niveau 4 – Études comparatives comportant des biais – Études – Séries de cas – Études épidémiologiques descriptives (transversale, longitudinale) mt, vol. 10, n° 5, septembre-octobre 2004 Force des recommandations (grade) A Preuve scientifique établie B Présomption scientifique C Faible niveau de preuve scientifique 361 Recommandations de l’Afssaps Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Downloaded by a robot coming from 88.99.165.207 on 26/05/2017. Introduction Les traitements topiques ophtalmologiques comprennent des collyres, des pommades et des gels. La prescription d’un antibiotique local en ophtalmologie correspond à des indications précises et relève du bon usage des antibiotiques, en particulier en regard de l’écologie microbienne, avec le risque de sélection des mutants résistants au même titre que la prescription d’antibiotiques par voie générale. L’antibiothérapie favorise sur le lieu de l’infection la sélection de mutants et/ou l’implantation de souches résistantes. L’antibiothérapie doit donc être courte, sauf cas particuliers. Dans les infections oculaires superficielles, l’antibiothérapie topique offre une biodisponibilité égale ou supérieure à celle de l’antibiothérapie générale et permet de traiter la plupart des infections graves de la surface oculaire. Ces recommandations ont pour but de rappeler le diagnostic clinique et bactériologique des différentes infections de la surface oculaire ; préciser les indications des antibiotiques topiques (traiter ou ne pas traiter) ; situer la place des différentes molécules et formes pharmaceutiques. Ont été exclues de cette réflexion : les dacryocystites et les endophtalmies bactériennes, dont le traitement ne relève pas d’un traitement par collyre. Les spécificités de l’antibiothérapie oculaire superficielle Spécificité microbiologique La résistance aux antibiotiques des bactéries responsables d’infections de la surface oculaire a augmenté régulièrement au moins jusqu’en 1999, même si depuis des chiffres non publiés paraissent plus encourageants (Grade B). La sélection est favorisée par des concentrations insuffisantes d’antibiotiques. Aussi le respect d’un schéma thérapeutique correct lors du traitement est important. Spécificité pharmacocinétique des antibiotiques de surface Le principe d’une antibiothérapie superficielle est d’obtenir des concentrations efficaces supérieures aux concentrations minimales inhibitrices (CMI) et inférieures aux concentrations toxiques pendant un temps de contact maximal, qui dépend de la viscosité, du pH, de l’osmolalité, du type de molécule et des excipients contenus dans le collyre. Même si la documentation n’apporte pas un bon niveau de preuve dans ce domaine, les formes gel et pommade sont reconnues pour leur rémanence. Il s’y associe une protection mécanique. 362 Tolérance des antibiotiques locaux utilisés en ophtalmologie Toxicité du chloramphénicol En raison de sa toxicité hématologique potentielle, il faut réserver l’usage du chloramphénicol aux infections où les autres antibiotiques sont inefficaces (Accord professionnel). Allergie Afin de prévenir une réaction allergique, il est recommandé de ne pas prescrire un traitement par voie locale en cas d’intolérance au produit lors d’une administration systémique préalable (Accord professionnel). Parmi les aminosides, la néomycine paraît être la molécule la plus allergisante (Grade C). Association antibiotiques et vasoconstricteurs Du fait de leur toxicité, les vasoconstricteurs ne doivent pas être prescrits pour plusieurs jours. Les associations fixes antibiotiques/vasoconstricteurs ne sont donc pas recommandées pour traiter les infections oculaires de surface (Accord professionnel). Cas de la femme enceinte ou allaitante Les recommandations de prescription chez la femme enceinte ou allaitante tiennent compte des données de toxicité disponibles pour les antibiotiques administrés par voie générale mais aussi des quantités modiques utilisées en traitement local. C’est ainsi que certains antibiotiques déconseillés voire contre-indiqués par voie générale peuvent être utilisés par voie locale. En cas d’augmentation des doses ou de la fréquence d’instillation des antibiotiques topiques, le passage systémique augmente et peut avoir des effets toxiques que l’on ne rencontre pas en cas d’utilisation aux doses préconisées par l’AMM. Au cours de la grossesse : – sont déconseillés : kanamycine, chloramphénicol ; – sont à éviter par prudence : triméthoprime, aminosides (sauf kanamycine), colistine, acide fusidique, tétracyclines à partir du deuxième trimestre de grossesse ; – peuvent être prescrits : tétracyclines au cours du premier trimestre de grossesse, rifamycine, fluoroquinolones (ciprofloxacine, norfloxacine, ofloxacine). Au cours de l’allaitement, les recommandations sont les suivantes : – est contre-indiqué : chloramphénicol ; – sont à éviter par prudence : tétracyclines au-delà de 10 jours de traitement, colistine, acide fusidique, fluoroquinolones (ciprofloxacine, norfloxacine, ofloxacine) ; – peuvent être prescrits : tétracyclines si traitement de moins de 10 jours, triméthoprime, aminosides, rifampicine. mt, vol. 10, n° 5, septembre-octobre 2004 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Downloaded by a robot coming from 88.99.165.207 on 26/05/2017. Pathologies infectieuses en ophtalmologie Sont abordées ici les infections oculaires accessibles à un traitement local, donc de surface : conjonctivites, kératites, blépharites. Certains facteurs de risque favorisent la survenue d’infections graves : immunodépression ; diabète mal équilibré ; pathologie locale sous-jacente (syndrome sec, dystrophie cornéenne) ; greffe de cornée, chirurgie oculaire récente ; corticothérapie locale ; port de lentilles de contact ; obstruction des voies lacrymales, trouble de la statique palpébrale. D’autres sont liés à des situations particulières : monophtalmie, nouveau-né. Conjonctivite bactérienne Rappel clinique La conjonctivite est une inflammation de la conjonctive, sans atteinte cornéenne. Sa présentation la plus fréquente est un œil rouge, larmoyant, sans baisse d’acuité visuelle, peu ou pas douloureux, avec sensation de grains de sable dans les yeux. Les étiologies les plus fréquentes sont virales, allergiques ou liées à un syndrome sec. Le diagnostic de conjonctivite bactérienne est porté sur la présence de sécrétions purulentes. Les critères de gravité d’une conjonctivite bactérienne sont : sécrétions purulentes importantes, chémosis (œdème de la conjonctive), œdème palpébral, larmoiement important, baisse de l’acuité visuelle (même modérée), photophobie. En présence de critère(s) de gravité et/ou de facteurs de risque, une consultation d’ophtalmologie est recommandée et un traitement antibiotique local est nécessaire. Indication de l’antibiothérapie Les antibiotiques abrègent la durée des symptômes dans les conjonctivites bactériennes, mais leur effet à 8 jours n’est pas significativement supérieur à celui du placebo (Grade A). Ce gain de confort individuel doit être mis en balance avec le risque de sélectionner des souches résistantes à certains antibiotiques si ceux ci sont utilisés à grande échelle. Le rapport bénéfice/risque s’inverserait alors à l’échelon collectif, avec un risque accru d’infections éventuellement sévères à germes résistants en raison de traitements antibiotiques abusifs des conjonctivites, pathologie bénigne dans la grande majorité des cas. Aussi, en l’absence de critère de gravité ou de facteur de risque, le recours à un antibiotique ne doit pas être systématique. Le traitement des conjonctivites bactériennes doit comprendre avant tout un lavage oculaire au sérum physiologique associé à un antiseptique, le traitement antibiotique étant réservé aux formes graves. Cependant, dans certains contextes particuliers, comme les pays en voie de développement, l’antibiothérapie locale évite les graves complications cornéennes génératrices de cécité. • Chez l’adulte. Les conjonctivites bactériennes non graves (cf critères de gravité dans « rappel clinique »), en l’absence de facteur(s) de risque, doivent être traitées par lavage au sérum physiologique associé à un antiseptique (Accord professionnel). Les conjonctivites bactériennes doivent être traitées par un antibiotique local si elles sont graves et/ou s’il existe des facteurs de risque. L’antibiothérapie est alors probabiliste ou guidée par une analyse microbiologique (Accord professionnel). Tout antibiotique adapté au germe supposé en cause peut être prescrit. Tous les antibiotiques commercialisés ont globalement la même efficacité. Cependant, pour des raisons d’écologie microbienne, les fluoroquinolones ainsi que les associations d’antibiotiques sont à réserver aux conjonctivites bactériennes dites « sévères » ou en deuxième intention (Accord professionnel). Le chloramphénicol doit être réservé aux cas où les autres antibiotiques ne peuvent être utilisés (Accord professionnel). • Chez l’enfant. Les streptocoques et Haemophilus influenzae sont les bactéries les plus fréquemment en cause. En conséquence, la rifamycine, active sur l’ensemble de ces bactéries, et la bacitracine, active sur la plupart des souches de Streptococcus pyogenes, peuvent être privilégiées. Chez le nourrisson, la conjonctivite aiguë doit être traitée par un antibiotique local. En cas de conjonctivite récidivante, il faut rechercher une imperforation des voies lacrymales et demander un avis ophtalmologique (Accord professionnel). • Cas particuliers. Le trachome est la première cause de cécité dans le monde. C’est une maladie infectieuse limitée à l’œil, due à Chlamydia trachomatis (sérovars A à C). La prévalence du trachome diminue après traitement antibiotique oral ou topique (Grade B). Le traitement minute par azithromycine orale en dose unique (20 mg/kg) est le traitement de référence. La rifamycine peut être donnée en deuxième intention (Grade C). Les autres conjonctivites à trachomatis (sérovars D à K) seront traitées préférentiellement par un traitement oral qui a l’avantage de traiter une infection génitale associée. Il doit être préféré ou associé au traitement topique (Grade B). Les tétracyclines constituent l’antibiothérapie de première intention, suivies par la rifamycine (Grade C). Kératite bactérienne Rappel clinique La kératite bactérienne est une infection cornéenne diffuse ou localisée. Elle doit être immédiatement traitée car elle met directement en jeu le pronostic visuel, surtout mt, vol. 10, n° 5, septembre-octobre 2004 363 Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Downloaded by a robot coming from 88.99.165.207 on 26/05/2017. Recommandations de l’Afssaps 364 si elle est dans l’axe optique. Tout patient dont l’œil est rouge, douloureux, photophobe, larmoyant avec une vision abaissée doit bénéficier d’un examen ophtalmologique en urgence. Trois formes cliniques peuvent être définies : – kératite simple, en présence d’un simple œdème cornéen ou d’une kératite ponctuée ; – ulcère de cornée, lorsqu’il existe un défect épithélial visible après instillation de fluorescéine ; – abcès de cornée, lorsqu’il existe une infiltration blanchâtre du stroma cornéen. L’abcès de cornée correspond à la forme suppurative de la kératite. La kératite simple et l’ulcère de cornée correspondent soit à une infection bactérienne débutante présuppurative, soit à une situation (toxique, traumatique ou inflammatoire) pour laquelle une antibiothérapie préviendra la surinfection. Les critères de gravité d’une kératite bactérienne sont les suivants : abcès de taille supérieure à 3 mm de diamètre, abcès situé à moins de 3 mm de l’axe optique, infiltration stromale, réaction inflammatoire en chambre antérieure, aggravation malgré un traitement antibiotique topique adapté de 24 heures. Indication de l’antibiothérapie Tout patient suspect de kératite bactérienne doit avoir un examen ophtalmologique (Accord professionnel). En l’absence de critère(s) de gravité ou de facteur(s) de risque, la kératite bactérienne peut être traitée en ambulatoire avec un traitement antibiotique en mono- ou bithérapie (Accord professionnel). En présence de critères de gravité ou en cas d’échec après 24 h de traitement, un prélèvement pour analyse microbiologique doit être effectué. Il convient de suivre attentivement et, si besoin, d’hospitaliser le patient pour un traitement à fortes doses sous surveillance, impliquant – ou non – des collyres fortifiés (collyres antibiotiques fabriqués dans certaines pharmacies d’hôpital) (Accord professionnel). L’attitude thérapeutique diffère selon que le patient est porteur de lentilles de contact (infections plus souvent liées à des bacilles à Gram négatif) ou non (infections plus souvent liées à des cocci à Gram positif). Il convient d’adapter le traitement aux germes présumés et, s’il s’agit d’un enfant, de prendre en compte Haemophilus influenzae. Si une bactérie a été isolée, l’antibiothérapie sera réajustée selon les résultats de l’antibiogramme. Le traitement peut comporter une double antibiothérapie, associant par exemple : fluoroquinolone et aminoside. Les tétracyclines, la rifamycine, la polymyxine B, ou la bacitracine peuvent également être utilisées (Accord professionnel). Dans l’état actuel des connaissances : – la ciprofloxacine convient pour traiter la plupart des kératites simples, des ulcères et des abcès (AMM) ; – les aminosides, les fluoroquinolones, la bacitracine, la polymyxine B, l’acide fusidique et la rifamycine conviennent pour traiter les kératites simples et les ulcères. Ils peuvent être efficaces sur les abcès dus à des bactéries sensibles (Accord professionnel) ; – les tétracyclines conviennent pour traiter les kératites simples (Accord professionnel). Blépharite bactérienne Blépharite La blépharite est une inflammation chronique liée à un dysfonctionnement du meibum et peut être traitée par des soins de paupières sans antibiotique. L’antibiothérapie locale permet de réduire la flore bactérienne, mais son efficacité à 8 jours n’est pas supérieure à celle des anti-inflammatoires locaux ou des soins de paupières (Grade B). Elle est utile en cas de surinfection associée (Accord professionnel). Dans ce cas, l’acide fusidique, les tétracyclines, les aminosides et la rifamycine sous forme de gel ou de pommade, sont recommandés (Accord professionnel). Il faut éviter de prescrire la rifamycine au long cours en raison du risque de sélection de mutants résistants. En cas de blépharite persistante à l’antibiothérapie locale, un traitement oral par tétracycline peut être justifié (Grade C). Chalazion Le chalazion est une inflammation secondaire à l’occlusion d’une glande de Meibomius. Il se traite par soins de paupières initialement expliqués aux patients par l’ophtalmologiste et, dans les cas graves, par pommade corticoïde (Accord professionnel). L’intérêt d’une antibiothérapie n’est pas démontré. Orgelet L’orgelet est une infection d’une glande sébacée, le plus souvent par des staphylocoques. Dans les formes récidivantes ou chez des sujets à risque, il peut être envisagé d’appliquer un antibiotique antistaphylococcique local, comme l’acide fusidique, les tétracyclines, les aminosides ou la rifamycine sous forme gel ou pommade pendant 8 jours (Accord professionnel). Nous remercions l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé de nous avoir autorisés à reproduire le texte. mt, vol. 10, n° 5, septembre-octobre 2004