Note d’intention Emmanuel van Cappel
Un musicien pendant toute sa vie peut se vouer entièrement à son art, à la musique, à son instrument. Que se
passe-t-il quand tout à coup, tout s’arrête ? Quelle sont les raisons qui font que soudainement, il n’a plus envie de
jouer ? Quand bien même sa vie comporte des hauts et des bas, il arrive parfois un point de non-retour. De la
même manière qu’une relation amoureuse, celle avec son instrument peut s’éteindre aussi violemment. L’amour
décroît parce que l’envie disparaît sans qu’on en cherche véritablement les raisons.
Et s’il s’agissait de mettre en parallèle ces deux situations pour qu’elles s’éclairent, afin de comprendre l’élé-
ment déclencheur et les répercussions qui en découlent ? Est-ce à l’intérieur ou à l’extérieur de soi qu’il faut cher-
cher ? Toujours en quête de sens, le musicien comme le comédien n’échappe pas à ce paradoxe, le connais-toi
toi-même est peut-être une des voies…
Sans doute la première étape est de revenir au point de départ et reparcourir tout ce chemin avec « ELLE » pour
mieux le comprendre, le prolonger autrement et/ou le quitter définitivement mais en pleine conscience.
Doit-on par la suite en déduire qu’une fin de cet ordre laisse présager un mauvais choix dès le début ?
Pas forcément, c’est peut-être tout simplement une étape nécessaire, indispensable pour un nouveau départ.
La nomenclature et le choix des instruments
Le choix des instruments retrace chronologiquement les différentes étapes d’apprentissage de la vie d’un
trompettiste. Plusieurs types d’instruments sont utilisés : les coniques, les cylindriques, les instruments naturels
ou d’ordonnance et ceux avec des pistons. Tous les trompettistes qui se destinent à une carrière professionnelle
doivent se familiariser avec tous ces instruments pour découvrir le répertoire.
Pourquoi utiliser tous ces instruments et qu’est-ce qui les différencie ?
Bien que de la même famille, ces instruments pourtant très proches comportent bien des différences et leur son
révèle bien souvent la nature et l’identité de celui ou celle qui l’a choisi.
Une raison physique
Plus l’enfant grandit et plus son physique lui permet de porter un instrument grand et lourd. Par exemple :
il est plus difficile pour ses mains et l’écart des doigts de tenir une trompette qu’un cornet. Concernant la longueur
du tuyau d’un instrument en sib il ne varie pas, qu’il s’agisse de la trompette de poche, de la trompette en Sib, du
bugle ou du cornet à pistons, elle reste de 1,40 m env. Le tube est plus ou moins « enroulé » pour être porté plus
aisément. Concernant le souffle, il est plus facile de souffler dans un instrument conique que cylindrique
ce pourquoi il est plus facile de débuter au cornet à pistons qu’à la trompette. Le bugle (conique lui aussi) avec une
perce plus petite est bien souvent plébiscité par les plus anciens qui manquent de souffle car l’émission est plus
facile.
La trompette piccolo fait figure d’exception, plus légère, son tuyau étant beaucoup plus court, elle sonne une oc-
tave plus aigüe. La pression du souffle est telle qu’on la joue plutôt à l’âge adulte, après l’acquisition d’une bonne
maitrise.
Une raison technique
La vibration dans l’embouchure est commune à tous les instruments. L’utilisation du clairon ou de la trompette
de cavalerie ne nécessite pas de connaissance en matière de doigtés puisqu’il n’y a pas de pistons. Le
plus souvent utilisés dans les musiques militaires, ce sont des instruments plus abordables et leur répertoire est
beaucoup plus restreint. Avant la décentralisation et l’éclatement de l’enseignement musical sur le territoire, bien
souvent le trompettiste débutait au clairon dans une fanfare. N’ayant pas de piston, ces instruments dits « naturels
ou d’ordonnance » développent très bien l’oreille du musicien débutant car chaque son se joue à l’oreille, ainsi
il découvre les 5 premières notes aisément. La piccolo, seule à avoir 4 pistons et pouvant se jouer en La ou Sib,
nécessite une parfaite connaissance de la transposition d’où sa difficulté et son apprentissage très tardif.
Une raison artistique et personnelle
Le choix des instruments n’est pas lié qu’à l’apprentissage musical, il retrace aussi le parcours et les
attentes d’une vie entière. Si l’on commence par la recherche simple du son (au clairon ou au cornet) avec l’ex-
périence on tend souvent vers la performance avec la trompette en ut ou la piccolo - toujours plus vite, plus aigu,
plus fort- . Si Maurice André a débuté au cornet à pistons (comme Louis Armstrong) puis à l’apogée de sa vie avec
la piccolo, c’est bien avec le bugle et quelques balades ou mélodies simples qu’il a terminé. Si l’on regarde Miles
Davis qui a traversé pas moins de sept courants différents de jazz, après le be-bop et une profusion de notes ra-
pides, il a lui aussi fini sa vie dans un style très épuré avec très peu de notes se contentant du souffle et d’un son
mystérieux... Et que dire de Chet Baker dont la technique à la fin de sa vie était plus que secondaire…
L’instrument qu’on choisit doit nous aider à raconter ce qu’on souhaite au moment voulu, certains comme
le cornet ou le bugle sont plus veloutés, ronds et touchants, d’autres comme la trompette de cavalerie ou la piccolo
se veulent plus brillants, éclatants. Tout dépend de ce qu’on veut raconter.
Nous pouvons aussi faire le lien avec le vernis brillant mat ou argenté utilisé sur les instruments : chacun a
une particularité qui permet de faire passer des émotions et un discours différent.