MAPAR 2006
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Plus les patients cumulent les facteurs de risque, plus le risque de présenter
un évènement cardiaque péri-opératoire est important.
En fonction du risque lié au patient, du risque lié à la chirurgie, de la capacité
du patient à réaliser un effort, et de son score de risque clinique, l’anesthésiste
pourra apprécier le risque de présenter une complication postopératoire. Si ce
risque semble modéré, un traitement préventif médicamenteux (ß-bloquants,
statines) pourra suffire. Si ce risque semble très important, et si le patient a une
suspicion de coronaropathie sévère dont il faudra envisager la revascularisation
éventuelle, alors dans ce cas, un examen de stress non invasif pourra permettre
de quantifier la sévérité de l’atteinte coronarienne. Le clinicien a le choix entre
faire réaliser une échocardiographie de stress à la dobutamine et une scintigra-
phie myocardique au thallium-dipyridamole. La tendance actuelle est de préférer
l’échocardiographie de stress à la scintigraphie du fait de son coût faible, de sa
disponibilité, de l’absence d’exposition aux produits radioactifs. De plus, une
méta-analyse a montré une meilleure sensibilité et une meilleure spécificité de
l’échocardiographie de stress pour prédire les complications péri-opératoires [8].
L’échocardiographie de stress va permettre de quantifier la coronaropathie en
fonction du nombre de segments anormaux.
Lorsque l’examen de stress préopératoire est positif, faut-il envisager une
revascularisation coronarienne préopératoire avant la chirurgie ? L’étude CARP
a montré dans le cadre d’une étude randomisée que la revascularisation systé-
matique préopératoire des patients présentant un examen de stress positif est
inutile [9]. Cependant, les patients les plus graves, tels que les patients présentant
une sténose du tronc commun gauche n’ont pas été inclus dans cette étude. En
2001, Boersma a montré que les ß-bloquants sont d’autant plus efficaces que
les patients ont des facteurs de risque [10]. Cependant, les ß-bloquants ne sont
plus efficaces lorsque les patients cumulent les facteurs de risque et qu’ils ont
une échocardiographie de stress fortement positive, ceci correspond aux patients
présentant probablement soit une sténose du tronc commun gauche, soit une
atteinte tritronculaire, ces patients représentent un nombre très restreint chez
lesquels une revascularisation est probablement envisageable.
Ainsi, il faut donc considérer une revascularisation préopératoire chez les
patients qu’on aurait revascularisé en dehors du contexte chirurgical, c’est-à-dire
tous les patients qui présentent un angor d’effort important à l’interrogatoire
et chez qui on a une suspicion d’atteinte coronarienne proximale ou étendue.
Bien que l’intérêt de la revascularisation préopératoire ne soit pas démontré, la
question doit être envisagée dans un contexte multidisciplinaire.
Plutôt que de réaliser des examens de stress non invasifs inutiles et trop
nombreux, Grayburn et al [11] préconise avant tout de réaliser des scores
cliniques et d’envisager des examens complémentaires en posant la question
suivante : feriez-vous une coronarographie ou une revascularisation en dehors
du contexte chirurgical ? Si la réponse est non, un traitement par ß-bloquants et
éventuellement statines pourrait être suffisant. Il faut garder à l’esprit que les
examens de stress non invasifs sont caractérisés par une forte valeur prédictive
négative, aux alentours de 90 % (ce qui fait que lorsque l’examen est négatif,
on peut réaliser l’intervention chirurgicale sans risque), mais aussi par une très
faible valeur prédictive positive, d’environ 20 à 30 %.