Hématologie, vol. 13, n° 4, juillet-août 2007
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Actualités cliniques
Sarcomes à cellules folliculaires dendritiques :
il faut modifi er et intensifi er les traitements
Janine DUMONT
Cela fait plus de 20 ans que
l’utilisation des anticorps sur
coupes, plus encore que la mor-
phologie, a permis de bien distinguer
des lymphomes les tumeurs dévelop-
pées à partir des cellules folliculaires
dendritiques, même si leur localisa-
tion, le plus souvent ganglionnaire,
pourrait évoquer cliniquement une
forme particulière de lymphome.
La première individualisation de ces
tumeurs date de 1986 [1], et quel-
ques « grandes » séries rassemblées
plus tard [2-4] ont confirmé leur
aspect histologique particulier, les
moyens d’en affirmer le diagnostic
grâce à quelques marqueurs spé-
cifiques, et aussi très vite leur fort
potentiel de malignité. Le terme de
« sarcome » a prévalu alors, et son
usage a le mérite, tout en insistant
sur la gravité de ces tumeurs, d’in-
viter les cliniciens à sortir des sché-
mas thérapeutiques efficaces dans
les lymphomes, souvent employés
ici et trop souvent décevants.
Le principal mérite de la série du
MD Anderson Cancer Center [5],
qui vient d’être publiée, ne tient pas
tant au nombre des cas (cela reste
vraiment une tumeur rare), mais au
détail des traitements et du suivi de
ces 14 malades observés entre 1995
et 2005.
Les 14 cas ont fait l’objet d’un dia-
gnostic histologique confirmé par
les marqueurs monoclonaux : CD 21
et CD 23, CD 35, CD 68, mais aussi
EGFR retrouvé 10 fois sur 11, ce qui
représente une piste de réflexion inté-
ressante après la publication de Sun
et al. [6] décrivant l’hyper-expres-
sion de ce facteur dans les sarcomes
à cellules folliculaires dendritiques
(et non dans les cellules folliculai-
res dendritiques normales) et aussi,
à un moindre degré, dans la mala-
die de Castelman. On peut imaginer
pour l’avenir que cette constatation
amène à envisager des traitements
ciblés susceptibles d’améliorer le
pronostic de ces sarcomes. Celui-ci
est en effet loin d’être favorable, et
la description de ces 14 tumeurs, à
la fois ganglionnaires et extra-gan-
glionnaires (dont deux du naso-pha-
rynx), le confirme bien.
Malgré une moyenne d’âge relative-
ment jeune (48 ans), un PS moyen à 1,
et 2/14 seulement de symptomes B,
les rémissions complètes, lorsqu’el-
les sont obtenues, sont dans l’en-
semble de courte durée et il n’y a
qu’un seul patient apparemment
guéri à long terme. Deux facteurs
de mauvais pronostic peuvent inter-
venir : une taille tumorale supé-
rieure à 3 cm dans 9 cas sur 11, et
une extension viscérale dépassant
le stade locorégional dans la moi-
tié des cas. Il n’est pas précisé si
le degré de malignité histologique
(pourtant décrit en trois stades dif-
férents) influence la réponse au
traitement.
Celle-ci est décrite à la fois au stade
initial et lors des rechutes, préci-
sions qui n’existent dans aucune
des séries précédentes. Les conclu-
sions thérapeutiques à en tirer, sous
réserve du petit nombre de malades,
sont importantes :
1. La chimiothérapie seule – ici
toujours par CHOP – n’a jamais
entraîné de rémission complète, et
même, pas de réponse du tout, puis-
que dans 3 cas il y a une progression
sous ce traitement initial.
2. La chirurgie seule, ou complétée
par une radiothérapie locale, peut
entraîner une rémission, mais de
courte durée.
3. Les seuls cas ayant eu une lon-
gue rémission complète (29 mois
à 8 ans) l’ont été après un triple
traitement : chirurgie, puis CHOP,
puis radiothérapie, et c’est dans ce
groupe que s’observe le seul patient
sans maladie visible à plus de 8 ans
du diagnostic.
4. Dans le rattrapage des rechu-
tes, une rémission complète a été
évidence, indépendamment du dia-
gnostic de PV ou de TE, deux popu-
lations de patients différents : les
patients homozygotes sont plus âgés,
ont des leucocytes et un hématocrite
plus élevés, une splénomégalie plus
importante, ainsi qu’une tendance
plus marquée à évoluer vers la myé-
lofibrose. Chez les patients présen-
tant une PV, l’homozygotie n’est
pas un facteur de risque thromboti-
que. Par contre, les patients atteints
de TE et homozygotes ont 1,5 fois
plus de chance de présenter un évé-
nement cardiovasculaire que les
hétéro zygotes, et 4 fois plus que les
TE sans la mutation JAK2 617V>F.
Finalement, une chimiothérapie
est plus volontiers utilisée chez les
patients homozygotes pour contrô-
ler leur maladie.
Ces données rendent la détection des
mutations de JAK2 nécessaire, non
seulement pour le diagnostic mais
aussi pour la prise en charge thé-
rapeutique des patients. Les études
prospectives devront intégrer cette
recherche afin de mieux classer les
patients en fonction de leur risque
thrombotique et d’évolution vers la
myélofibrose.
Référence
1. Vannucchi AM, Antonioli E,
Guglielmelli P, et al. Clinical profile of
homozygous JAK2 617V>F mutation in
patients with polycythemia vera or essen-
tial thrombocytemia. Blood 2007 ; 110 :
840-6.
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