Samedi 26 janvier 2013
17h et 20h
Conservatoire de Genève
Constellation Boulez
CONCERT À 17H
Pierre Boulez
Douze notations pour piano (1945)
Première Sonate pour piano (1946)
Claude Debussy
Apparition pour voix et piano (1884)
Trois poèmes de Stéphane Mallarmé pour chant et piano (1913)
Pierre Boulez
Troisième Sonate pour piano (1955-1957)
Benedicte Tauran, soprano
Georges Starobinski, Michael Wendeberg, Stefan Wirth, piano
CONCERT À 20H
Pierre Boulez
Incises pour piano (2001)
Une page d’éphéméride pour piano (2005)
Deuxième Sonate pour piano (1947)
Michael Wendeberg, Stefan Wirth, piano
Concert enregistré par Espace 2
Dans le cadre du centenaire de la Comédie (1913-2013)
En coproduction avec la Comédie et la Haute École de Musique de Genève
1913 - 2013
Le centenaire de la Comédie
Le 24 janvier 1913, la Comédie de Genève ouvre ses portes, après deux années de chantier conduit par
l’architecte Henri Baudin, le directeur Ernest Fournier et l’administrateur William Viollier. Avec l’avo-
cat Albert Richard, ils sont les principaux protagonistes de la création de ce théâtre.
Qu’est-ce qui les réunit ? Tous les quatre sont membres, depuis 1903-1904, de l’Union pour l’Art So-
cial, qui a pour but « d’initier à l’Art le public très nombreux qui, par suite de sa situation écono- mi-
que, est tenu éloigné du mouvement artistique. Cette société n’est pas destinée à procurer des distrac-
tions ou des amusements à bon compte : elle poursuit avant tout un but d’éducation esthé- tique. Le
terme d’Art social marque cette idée que le Beau ne doit pas être l’apanage d’une classe, mais que les
jouissances qu’il procure doivent être le patrimoine de tous. »
Fondée en 1902, cette association – dont fait aussi partie Émile Jaques-Dalcroze – organise des mani-
festations artistiques de qualité, abordables par les foyers les plus modestes. Elles se déroulent dans
différents lieux de Genève, en particulier au Théâtre de la Place Neuve et au Théâtre de Plainpalais.
C’est dans ce cadre qu’Ernest Fournier met en scène L’Avare en 1903 à la Brasserie Handwerk. Située
4 avenue du Mail, elle est le lieu de réunion de l’Union pour l’Art Social, mais aussi celui des révolu-
tionnaires et des syndicalistes. C’est là que Lénine prononça sa première conférence à Genève.
Ces précisions font apparaître une donnée singulière. La Comédie n’a pas toujours été le rendez-vous
des notables. Elle est issue du grand mouvement philanthropique qui a marqué le début du XXe siècle.
Mieux, elle a croisé les aspirations d’hommes et de femmes qui rêvaient de changer le monde et qui
souhaitaient donner un commencement de réalité aux idéaux démocratiques.
Cette origine a été longtemps refoulée, et ce théâtre a pris durablement dans les esprits l’identité d’un
théâtre bourgeois – ce qu’il fut, mais pas avant la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Il ne s’agit pas
de remplacer ce refoulement par une légende, en faisant de ses quatre fondateurs des militants radi-
caux préparant la révolution ! Leur ambition, plus modeste, mérite pourtant d’être prise en compte :
inscrite dans les murs du théâtre, elle oriente son centenaire vers des chemins inatten- dus.
Les cent ans de la Comédie seront l’occasion de découvrir cette histoire méconnue et de mesurer les
grandes évolutions de la vie théâtrale tout au long du siècle. Les festivités réuniront spectateurs, ar-
tistes et chercheurs autour d’une série de concerts, d’une publication et d’un spectacle créé par Nalini
Menamkat, intitulé 1913.
1913 - 2013
Musique
Quel est l’héritage de la modernité du début du siècle? Telle est la question posée à travers ces jour-
nées exceptionnelles pour célébrer le organisées à l’occasion du centenaire de la Comédie. Sur les
traces En s’inspirant des initiateurs de la Comédie de Genève, soucieux de mettre l’art au service de la
population, le programme musical 1913-2013 imaginé par Philippe Albèra présente une sélection parmi
les grandes œuvres de la modernité entend mettre en relation des œuvres significatives de 1913 avec
deux démarches contemporaines: celles de Pierre Boulez et de Ste- fano Gervasoni.
1913 est une date symbolique et forte : elle marque l’apothéose d’une évolution artistique qui, de- puis
les premières années du XXe siècle, a bouleversé les formes de l’art dans tous les domaines. Dans tous
les arts, ce sont les fondements mêmes des langages qui sont repensés. Ce moment de créativité inten-
se et de reconfiguration de la sensibilité précède de peu la guerre de 14-18, qui mettra fin aux élans
novateurs: il en résultera, en 1918, une tendance généralisée au néoclassi- cisme, loin de l’imaginaire
flamboyant de l’année 1913.
C’est ainsi que Schoenberg présente son Pierrot lunaire, composé pour une diseuse de cabaret litté-
raire berlinois, expérimentant le fameux Sprechgesang (parlé-chanté); mais il compose aussi un bref
opéra, Die glückliche Hand (La Main heureuse), où il tente de lier certaines structures musi- cales à la
projection de lumières colorées, dans l’esprit d’un art total. Les deux œuvres consacrent une écriture
libérée de la tonalité, tout en cherchant l’une comme l’autre à trouver des points d’appui formels.
Parallèlement, Stravinski compose le Sacre du printemps pour les Ballets russes, chorégraphié de Ni-
jinski, qui provoquera un scandale mémorable au Théâtre des Champs-Élysées à Paris. L’œuvre boule-
verse non seulement les conceptions traditionnelles de la danse – c’est un rituel ancestral reconstitué –
mais aussi celles de la musique. Stravinski y développe un langage rythmique entiè- rement neuf, dont
la portée sera immense.
Plus discret, Debussy compose un chef-d’œuvre orchestral, Jeux, conçu lui aussi pour les Ballets de
Diaghilev, et compose Trois Poèmes de Stéphane Mallarmé, une œuvre qui annonce sa dernière pé-
riode. Il reprend au poète l’idée d’un absolu poétique, mais à travers la musique. Bien d’autres œuvres
marquent cette époque, comme les Six Bagatelles pour quatuor à cordes de Webern ou les Quatre
Pièces pour clarinette et piano de Berg, œuvres aphoristiques qui atteignent, de façon différente, la
quintessence de l’expression.
Il ne s’agit pourtant pas de porter un regard purement historique sur cette période, mais de mettre en
perspective ce moment de la création musicale à partir du présent. C’est une belle occasion de célé-
brer celui qui est non seulement l’un des héritiers de cette modernité d’avant-guerre, mais aussi son
médiateur et promoteur le plus inspiré, Pierre Boulez (né en 1925). Le compositeur ita- lien Stefano
Gervasoni (né en 1962) offrira quant à lui une lecture différente de cet héritage et de la sensibilité
contemporaine.
Philippe Albéra
Les œuvres
Pierre Boulez
Douze notations pour piano (1945)
Longtemps restée à l’état de « fond de tiroir », retirée du catalogue, la partition des Douze notations
pour piano fut tirée de l’oubli pour servir de matière à une adaptation pour grand orchestre (dont
seules les quatre premières ont été présentées depuis leur création en 1980).
Sous sa forme originale, pour piano, elle se présente comme un cycle de variations sans thème, mieux :
dont le thème se réduirait à la structure des intervalles consécutifs d’une série dodécaphonique. Le
titre invite à se figurer une musique écrite, ou plus précisément notée autant pour l’œil que pour
l’oreille : chacune des douze pièces compte douze mesures, présentant divers aspects d’une même
série de douze sons. Celle-ci est traitée en permutation circulaire (première pièce commençant par la
note initiale, deuxième pièce commençant par la deuxième note pour reporter la première après la
douzième…) : de sorte que, au moyen d’une figure rythmique appropriée, chaque intervalle initial va
contribuer à caractériser les premières mesures de chaque Notation.
Cette apparente rigidité de conception est cependant nuancée par un maniement assez souple du
matériau dodécaphonique : l’auteur ne renonce pas à la répétition de certaines valeurs non moins qu’il
ne subordonne souvent la polyphonie au rythme, de même que la répartition verticale des registres
est amenée à jouer un rôle capital dans la différenciation des figures. On relèvera la tendance à faire
alterner les pièces à caractère méditatif, intériorisé, à celles où une certaine exubérance rythmico-
métrique se donne libre cours : trait que Boulez développera ultérieurement dans des œuvres de plus
grande envergure.
Ce sont probablement des considérations autant techniques que stylistiques qui auront amené jadis
Boulez à décider de les retirer momentanément de son catalogue. Influences trop immédiatement
perceptibles (Pièces pour piano opus 11 d’Arnold Schoenberg, Mana de Jolivet), canons à l’octave,
mélodies accompagnées : autant de survivances et de contradictions qu’il allait se donner pour tâche
de surmonter dans ses compositions suivantes. Il devait pourtant garder une certaine affection
pour ces pièces brèves, car on en retrouve la trace dans des œuvres plus tardives : une première
orchestration en 1946, une musique de scène pour une pièce radiophonique en 1957, et surtout les
interludes instrumentaux de la Première Improvisation sur Mallarmé, où les Notations 5 et 9 forment
le commentaire du « transparent glacier des vols qui n’ont pas fui ».
Plus récemment, en 1985, conscient de la maîtrise désormais acquise, il s’est penché une nouvelle fois
sur ce souvenir de jeunesse, en tenant précisément compte des ambiguïtés stylistiques et techniques
que son évolution antérieures l’avait amené à dissoudre.
Robert Piencikowski, avec l’accord de l’Associazione musicale Umberto Micheli.
Pierre Boulez
Première Sonate pour piano (1946)
La Première Sonate de Pierre Boulez, composée et créée en 1946, représente la première œuvre
importante pour piano du compositeur. Elle est néanmoins précédée par les Trois Psalmodies, plus tard
désavouées, et les Notations, retravaillées pour orchestre en 1980 à l’intention de l’Orchestre de Paris.
Ces deux œuvres ont également été créées par Yvette Grimaud, qui sera encore la première à défendre
la Deuxième Sonate en 1950.
La distance considérable qui sépare la Première Sonate de ses devancières s’explique au moins en
partie par la découverte par Boulez de la musique de Schoenberg et de Webern, auprès de René
Leibowitz. Et si la Sonatine pour flûte et piano, contemporaine, explore la forme en un mouvement de
la Symphonie de chambre opus 9 de Schoenberg, la Sonate, quant à elle, se réfère explicitement aux
Trois pièces pour piano, opus 11, et particulièrement à la troisième, où Schoenberg poussait, dès 1909,
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