L’origine du maïs, les premiers éléments Au début du XXe siècle, un botaniste, le Russe Nicolaï Ivanovich Vavilov, parcourt le monde à la recherche de plantes cultivables utiles. Au cours de ses voyages, il comprend que la zone d'origine d'une plante est probablement celle où poussent le plus grand nombre de variétés de celle-ci. En suivant ce raisonnement, il situe en particulier l'origine du maïs en Mésoamérique (du Mexique au Costa-Rica). Après Vavilov, plusieurs botanistes américains s'intéressent à l'origine du maïs, et certains émettent l'hypothèse que son ancêtre sauvage est la Téosinte, une plante fourragère qui pousse notamment au Mexique et au Guatemala. Des découvertes archéologiques : Dans les années 2000, de nombreux Dolores Piperno et Kent Flannery identifient des échantillons fossiles de Maïs dont les caractéristiques sont assez variables. Ces échantillons sont datés de -6000 à 4250 ans. Leurs caractéristiques montrent que l’homme a participé à la modification de ces plantes en recherchant les variétés présentant les épis les plus grands et les plus fournis. A gauche, la photographie montre ces 3 échantillons sous différents angles. L’échantillon a est plus ancien que b, lui-même plus ancien que c. A droite, une carte présentant l’emplacement du site. Les variétés de maïs, les différentes espèces proches du Maïs et leur génétique Classification botanique Le maïs correspond au genre Zea qui fait partie de la famille des Poacées et comprend cinq espèces : - 1 espèce « maïs cultivé » : Zea mays (Zm) et ses 4 sous espèces Zm mays, Zm parviglumis, Zm mexicana, Zm huehuetenangensis - 4 espèces de téosinte : Zea luxurians, Zea nicaraguensis, Zea diploperennis, Zea perennis Génétique Toutes les espèces et sous-espèces du genre Zea ont le même nombre de chromosomes (2n=20) sauf Zea perennis qui est tétraploïde (4n=40). Presque toutes les espèces de téosintes sont hybridables avec le maïs. Les Tripsacum sont un genre proche originaire d'Amérique nord et sud et pouvant former des hybrides le plus souvent stériles avec Zea. Données morphoanatomiques sur le maïs Données morphoanatomiques sur la téosinte L’aspect des épis et des grains La structure d’un grain de maïs Le fruit du maïs (Zea mays L.) comme celui de toutes les Graminées est un caryopse. C'est un fruit sec non déhiscent contenant une seule graine : le péricarpe du fruit et le tégument de la graine sont soudés. Le grain d’amidon contient un embryon qui se développe lors de la germination. Cet embryon peut se nourrir grâce aux réserves accumulées dans l’albumen (tissu nourricier). Interprétation Observation Vue externe Coupe transversale Germination La production mondiale de maïs Importations et exportations de maïs Mise en évidence des réserves du grain de Maïs MANIPULATION : Afin d’identifier les réserves présentes dans le grain de maïs, utilisez les différents réactifs à votre disposition : Lugol (amidon), Rouge Soudan (lipides), Réactif du Biuret (protéines), Liqueur de Fehling (sucres simples). L’albumen du maïs présente des réserves qui sont exploitées par l’Homme et qui ont une importance économique considérable pour l'alimentation humaine et animale. Le maïs doux est consommé en grains (essentiellement en conserve) sous forme de salades ou d'accompagnement de viandes, ou encore transformé en pop-corn ou corn flakes. Avec la farine de maïs, on prépare la polenta, plat typiquement italien qui est servie en plat salé ou utilisée en pâtisserie. Par ailleurs, le maïs en grains ou en farine est largement utilisé en alimentation animale. Coloration par le lugol (spécifique de l'amidon). Les réserves d'amidon sont localisées dans l'albumen. Un nombre réduit de gènes majeurs sont impliqués dans la domestication Les différences dans la morphologie de la plante, dans celle des inflorescences femelles et des semences entre le maïs cultivé et la téosinte sont très nettes, ce qui a fait supposer que le passage d’une forme à l’autre au cours de la domestication a fait intervenir des mutations de nombreux gènes. Au début des années 70, Beadle a testé cette idée en exploitant le fait que les hybrides entre maïs et téosinte sont fertiles ; il a examiné 50000 plantes F2 résultant d’un croisement entre hybrides. Il a constaté que la fréquence de réapparition de maïs et de téosinte de type parental chez ces plantes de seconde génération était approximativement de 1 pour 500. Il a confronté ces résultats avec des prévisions théoriques. En admettant que les maïs et les téosintes sont de lignée pure pour les caractères envisagés et que les gènes en jeu sont situés sur des chromosomes différents, il a pu déterminer le nombre de gènes pouvant expliquer le passage de la téosinte au maïs. Comment a-t-il fait ? Combien de gènes pourraient être impliqués ? Durant les 20 dernières années, les spécialistes, notamment l’équipe de Doebley, ont recherché la nature des innovations génétiques en cause, confirmant l’idée que des mutations affectant un petit nombre de gènes étaient à l’origine des caractères de la domestication. Ce sont ces recherches qui peuvent servir de support pour l’étude d’un exemple sur la diversification des êtres vivants. Un mutant de maïs : le mutant tb1 (teosinte branched 1) Les chercheurs ont isolé un mutant du maïs présentant une architecture étrange. Les images en montrent les caractéristiques par rapport à un pied de maïs normal et par rapport à la téosinte. A : plant de téosinte C : Pied de maïs normal E : Pied de maïs mutant (tb1) REMARQUE : Le croisement entre maïs normal et mutant (jouant le rôle de plante mâle) engendre une population d'hybrides F1 ayant tous le phénotype normal. En F2 (F1 x F1) sur 99 plantes, 72 ont le phénotype normal et 27 le phénotype mutant. Les différences principales entre les 3 types de plantes sont schématisées cicontre. Source : The genetics of Maize evolution .John Doebley Annual review of genetics 2004 38.37-59 La fonction du gène TB1 Chez ce mutant, la séquence de l'allèle TB1 est altérée par l'insertion d'un segment d'ADN qui a pour effet d'introduire un codon stop anticipé et donc à une protéine non fonctionnelle. Ce mutant ne produit pas de protéine fonctionnelle TB1. La comparaison des phénotypes des maïs normal et mutant conduit à dire : - que la protéine TB1 normale inhibe la croissance des ramifications à partir de leurs bougeons axillaires ; - que la protéine TB1 est indispensable à la formation d'inflorescences femelles. On a montré que la protéine codée par le gène est un facteur de transcription qui en se fixant à des séquences régulatrices de gènes impliqués dans le cycle cellulaire et l’élongation des rameaux en contrôle l’expression, en ayant un effet inhibiteur. Puisque l'architecture du mutant de maïs est semblable à celle de la téosinte, on peut faire l'hypothèse que le passage du phénotype téosinte au phénotype maïs est dû à un changement dans le gène TB1 d'où résulte un effet répressif sur les bourgeons axillaires. Or, on dispose des séquences nucléiques de plusieurs téosintes. On peut comparer ces séquences à celles des différents allèles de maïs (retrouvez les séquences dans le logiciel ANAGENE : fichier TB1-CDS.edi). On constate qu'elles ont une très forte similitude malgré 2 nucléotides qui différent légèrement. Si on compare les protéines TB1 des téosintes (obtenues après traduction) à celles du maïs, on constate que les deux différences nucléiques ne se traduisent pas au niveau protéique. Cela indique que les protéines TB1 du maïs et de la téosinte ont la même fonction ! La différence morphologique entre la plante cultivée et la plante sauvage ne s'explique pas par des mutations au niveau de la séquence codante du gène TB1 mais par des différences d’expression.