Pr Patrick Hohlfeld Pr Patrick Pétignat Réseau Romand de Cancer et Fertilité Coordination : Dr Alexandra Ambrosetti-Jenny et Dr Marina Bellavia Contact: 079 503 60 99 http://www.grssgo.ch Pour la gynécologie et la médecine de la reproduction Dr Chahin Achtari, MER, Département de gynécologie et d’obstétrique, CHUV Dr Alexandra Ambrosetti-Jenny, Hôpital Cochin, Paris Dr Olivier Bachelard, Hôpital de Nyon Dr Marina Bellavia, Département de gynécologie et d’obstétrique, CHUV Dr Pierre-Alain Brioschi, Nyon et Genolier Pr Jean-François Delaloye, Département de gynécologie et d’obstétrique, CHUV Pr Patrick Petignat, Département de gynécologie et d’obstétrique, HUG Dr Gabriel de Candolle, Genève Dr Marc Germond, CPMA, Lausanne Dr Magdalena Kohlik, Département de gynécologie et d’obstétrique, HUG Dr Marie-Pierre Primi, Département de gynécologie et d’obstétrique, CHUV Dr Dorothea Wunder, PD, Département de gynécologie et d’obstétrique, CHUV Pour l’urologie: Dr Laurent Vaucher, Service d’Urologie, CHUV Pour l’oncologie médicale : Dr Lucien Perey, Médecin chef d’oncologie, Hôpital de Morges, GHOL Dr Khalil Zaman, Centre Pluridisciplinaire d’Oncologie (CePO), CHUV Membre Fondateur: Pr Dominique de Ziegler, Hôpital Cochin, Paris Références bibliographiques : 1) G. R. Dohle, Male infertility in cancer patients: Review of the literature, Int. J. of Urology, 17, 327-331, 2010 2) M. Trottmann et al., Semen quality in men with malignant diseases before and after therapy and the role of cryopreservation, Eur.Urology, 52, 355-367, 2007 3) A. Agarwal and S. S. R. Allamaneni, Disruption of spermatogenesis by the cancer disease process, J. of the Nat. Ca. Inst. Monograhs, 34, 9-12, 2005 4) N. J. van Casteren et al., Gonadal dysfunction in male cancer before cytotoxic treatment, Int. J. of Andrology, 33,73-79, 2010 5) K. Jahnukainen et al., Testicular function and fertility preservation in male cancer patients, Best Practice & Research Clinical Endocrinol. & Metabol., 25, 287-302, 2011 6) F. Montorsi et al, Summary of the recommendations on sexual dysfunctions in men, J Sex Med.,7(11), 3572-88, Nov. 2010 7) A. M. Ragheb and E. S. Sabanegh Jr., Male fertility-implications of anticancer treatments and strategies to mitigate gonadotoxicity , Anti-Cancer Agents in Medicinal Chemistry, 10, 92-102, 2010 8) P. J. Stahl et al, Indication and strategies for fertility Preservation in Men, Clin. Obst. Gynecol., 53, 4: 815-27, 2010 9) C. Wyns et al, Options for fertility preservation in prepubertal boys, HR Update, 16, 3: 312-328, 2010 10) J. P. Ginsberg, New advances in fertility preservation for pediatric cancer patients, Current Opinion in Pediatrics, 23: 9-13, 2011 11) W. Hsiaio et al., Successful treatment of postchemotherapy azoospermia with microsurgical testicular sperm extraction: the Weill Cornell experience, J. of Clin. Oncol., 29, 1607-1611, 2011 CANCER CHEZ L ’HOMME ET FERTILITÉ • Avoir un enfant est possible après un cancer. • Les questions de fertilité doivent être abordées le plus tôt possible. • Le Réseau Romand guide le patient et son médecin. Introduction Les traitements du cancer (chirurgie, radiothérapie et chimiothérapie) ont pour but de guérir le patient, tout en conservant sa qualité de vie. Ainsi, par exemple, lors de cancer des testicules, de lymphomes ou de leucémies, le taux de guérison peut dépasser les 90%. Cependant, en fonction de la maladie, du type et de la durée du traitement, la fertilité du patient peut être affectée de manière transitoire ou définitive (1). Préserver la fertilité Bien que la préservation de la fertilité chez l’homme paraisse moins complexe que chez la femme, par la possibilité relativement aisée de congeler des spermatozoïdes issus d’éjaculats, plusieurs facteurs peuvent influencer négativement la fertilité avant les traitements oncologiques (2). Les facteurs les plus souvent évoqués sont des sécrétions d’hormones et de cytokines par la tumeur, des perturbations de l’axe hypothalamo-hypophysaire ou des dommages de l’épithélium germinal (3). Il est important de relever que l’annonce du cancer peut avoir des répercussions négatives sur la fertilité. Lors d’examens de l’éjaculat avant le traitement oncologique, environ 65% des patients présentent des anomalies du sperme, et chez 12% d’entre eux, le sperme ne peut pas être congelé (absence de spermatozoïde ou numération insuffisante) (4). Chimiothérapie La plupart des chimiothérapies affectent rapidement toutes les cellules en division. En conséquence, la spermatogenèse est extrêmement vulnérable à cette forme de thérapie. La récupération de la spermatogenèse est dépendante du type de médicaments, des doses utilisées et de l’âge du patient. Dans les cas favorables, la fonction spermatique peut être restaurée dès la 12ème semaine après la chimiothérapie, alors qu’avec des traitements plus agressifs, une azoospermie définitive est identifiée chez 50% des patients (5). Radiothérapie Les radiations, même à faibles doses, s’avèrent toxiques pour la spermatogenèse. Les traitements impliquant des irradiations de la zone pelvienne peuvent endommager de façon définitive les fonctions testiculaire et érectile. De plus, l’irradiation crânienne peut affecter l’axe hypothalamo-gonadique. La récupération de la spermatogenèse est dépendante de la dose et du site d’irradiation (5). Chirurgie La chirurgie affectant les organes génitaux ou pelviens peut avoir des effets négatifs sur la fertilité (orchidectomie unilatérale), entraîner une dysfonction érectile ou une éjaculation rétrograde (6). Stratégies de protection de la spermatogenèse Des approches hormonales (agonistes LH-RH) ou à l’aide de molécules interagissant avec les mécanismes de l’apoptose (7) ont été proposées mais leur efficacité n’a pas été démontrée. L’amélioration des protocoles de chimiothérapie et radiothérapie (8) pour réduire leur gonadotoxicité n’a toujours pas permis de trouver des facteurs prédictifs de la récupération de la spermatogénèse. Prise en charge de l’adulte et de l’adolescent post-pubère Bien qu’elle soit de plus en plus recommandée par les médecins (oncologue, urologue, médecin traitant du patient), la congélation de sperme devrait devenir systématique. En cas d’absence de spermatozoïdes dans l’éjaculat (azoospermie), la congélation de biopsies testiculaires peut être une méthode efficace envisageable avant le traitement curatif chez les patients qui le désirent. Prise en charge de l’enfant et l’adolescent pré-pubère Les adolescents commencent à produire des spermatozoïdes pouvant être congelés à partir de l’âge de 12-13 ans. La production d’un éjaculat contenant des spermatozoïdes dépend du stade pubertaire et du volume testiculaire. Chez le patient ne pouvant pas produire d’éjaculat, le recours à une extraction chirurgicale de spermatozoïdes dans le testicule peut être envisagé. La cryoconservation de tissu gonadique chez les jeunes enfants est une méthode déjà pratiquée dans des centres spécialisés de PMA , dans le cadre de protocoles d’études. Cette approche pourrait permettre dans le futur de réaliser des autogreffes de tissu testiculaire, des transplantations autologues de cellules souches ou de faire de la maturation in vitro de spermatogonies (9, 10). Evaluation de la fertilité après traitement gonadotoxique. Suite à certains traitements oncologiques, des dommages de l’ADN spermatique ont été rapportés jusqu’à deux années après la fin de la thérapie. Ces résultats montrent l’importance de conseiller les patients dans l’usage d’une contraception pendant cette période. L’utilisation du sperme préalablement congelé est alors recommandée. La consultation pluridisciplinaire prend ici toute son importance. Procréation médicalement assistée (PMA) après cancer Quelques mois après la fin du traitement, des examens de sperme peuvent être effectués pour vérifier si le patient retrouve sa fertilité. Lorsque le patient reste azoospermique, dans le cas où une cryoconservation a été réalisée, et en fonction de l’évolution oncologique, une conception pourrait être obtenue à l’aide du sperme conservé. Le choix de la technique dépend de la quantité et de la qualité du sperme congelé: insémination intra-utérine (IIU), fertilisation in vitro (FIV) ou injection intracytoplasmique de spermatozoïdes (ICSI). Il est également possible de recourir à une TESE (testicular sperm extraction) chez des hommes présentant une azoospermie persistante après chimiothérapie et d’obtenir des spermatozoïdes chez un tiers d’entre eux, avec un taux de grossesse de 50% (11). Loi sur la Procréation Médicalement Assistée (LPMA) Le sperme cryoconservé avant traitement gonadotoxique peut être conservé au delà des cinq années prévues par la LPMA, du fait de la situation particulière des patients oncologiques.