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— Plus à l’est, au nord-est des Balkans, se constitue alors la confédération gothique, dont l’origine est peut-
être l’île du Gotland, territoire aujourd’hui suédois. Il s’agit de la première population germanique à avoir
constitué un semblant d’État, parfois en guerre, parfois allié à la puissance romaine. Bousculés par les Huns
au IVe siècle, ils seront repoussés vers l’ouest et divisés en deux groupes, Wisigoth et Ostrogoth.
— Les premiers, après avoir saccagé Rome en 410 sous la conduite d’Alaric, poussent au-delà de la péninsule
italienne, fondant un royaume dans la région de Toulouse, d’où ils seront éventuellement expulsés par les
Francs au-delà des Pyrénées. Refoulés en Espagne, ils contrôleront une grande part de la péninsule ibérique
pendant deux siècles, jusqu’à la conquête arabe.
— Les seconds s’imposeront d’abord comme intermédiaires entre Romains et Uns puis, après l’effondrement
de l’empire d’Attila, prendront eux aussi la route de Rome, qu’ils captureront des mains d’Odoacre, un
Hérule (autre population germanique), qui s’en était emparé en 476, date marquant conventionnellement la
fin de l’Antiquité.
— Le chef ostrogoth Théodoric, après avoir conquis la péninsule italienne en 488 et fondé à Ravenne un État
sur la base d’une cohabitation entre Romains et Goths, meurt en 526, permettant à Constantinople de
reprendre l’Italie au terme de la guerre gothique (536 à 562), entrainant l’anéantissement des Goths.
— C’est aussi au Ve siècle que les Vandales, peuple ni plus ni moins pillard que les autres populations
germaniques, avaient passé sur le territoire italien, avant de traverser la mer méditerranée et de se faire pirates
pendant un siècle, pour finalement succomber eux aussi à la reconquête entreprise par Byzance en 534.
— L’empire chrétien n’aura cependant guère le temps de jouir de la réunification italienne, car un autre
peuple particulièrement brutal, car n’ayant jamais eu de contacts avec les civilisations du sud, déferle alors au
sud des Alpes : les Langobards (ou Longues barbes) feront regretter la douceur des mœurs gothiques aux
populations locales et joueront plus tard un rôle fondamental dans le couronnement de Charlemagne.
— Plus à l’Ouest, en même temps que les Suèves (qui se rendent alors dans la péninsule ibérique) et les
Vandales, les Burgondes franchissent le Rhin pour s’installer en Savoie, dans le Dauphiné, en Franche-Comté
et en Bourgogne et y fonder un État peu puissant qui sera détruit par les Francs.
— Malgré sa brièveté, la dynastie burgonde laissera dans l’histoire une trace littéraire importante, constituant
le thème principal de la Chanson de Nibelungen, la plus célèbre geste allemande, composée au XIIIe siècle et
mêlant aux exploits de Gunther, Gernot et Gisleher d’autres légendes germaniques anciennes. Et elle laissera
aussi bien sûr son nom à la région, la Bourgogne.
3.2 — Les grands Stämme : Alamans, Bavarois, Saxons...
— À côté de ces nombreuses et variées populations qui sont passées rapidement dans l’histoire (on aurait
aussi pu parler des Vénètes), ou encore qui se sont retrouvées à l’extérieur de la zone de construction des
États allemands (on pense ici aux Frisons) la tradition historiographique allemande, du moins jusqu’au XIXe
siècle, en ajoute quelques autres (entre trois et cinq, mais plus souvent quatre), dont le destin est particulier et
qui, aux dires de ces historiens, constituent le socle sur lequel se sont bâtis les États germaniques.
— Mais cela fait aujourd’hui débat, car il est difficile d’affirmer avec certitude si ces Stämme constituaient
d’abord des entités ethniques ou politiques. En d’autres termes, si l’on voit bien apparaître au IXe siècle ces
quatre duchés ethniques, tel qu’on les nomme dans l’historiographie, on ne peut pas dire s’il s’agit de
créations politiques ayant produit des identités ethniques, ou bien si ces structures politiques se sont
constituées pour rendre compte de singularités ethniques préalables.
— Quoi qu’il en soit, il est un fait que l’Allemagne contemporaine est diverse et, au moins partiellement, que
cette diversité se structure autour de pôles géographiques distincts, lesquels déterminent les caractéristiques
de ces spécificités : le nord protestant, le sud catholique, le nord commerçant, le sud agricole, etc. même s’il
s’agit ici bien sûr de critères généraux. Or, ces régionalismes recoupent au moins partiellement les territoires
des anciens duchés ethniques.
— Au sud-ouest, d’abord, il y a les Allamands, absorbés éventuellement par l’expansion franque venus du
nord et dont le territoire donnera naissance à la Souabe. Les Allamands, on l’a vu, s’étaient pour leur part
installés sur ce territoire autour du IIIe siècle, où ils formèrent de nombreux petits royaumes guerroyant
généralement les uns contre les autres. Terre d’origine de la dynastie des Hohenstaufen, elle a joué un rôle
politique fondamental au cours du Moyen-âge central.