L’art au service de l’apprentissage en formation professionnelle 61
Interactions Vol. 8, no 2, automne 2004
en le modelant... et en tentant d’atteindre son essence, l’énergie qu’il dégage.
Selon elle, l’art est aussi un mode de connaissance de nous-mêmes, que
nous activons par le dessin, la peinture, le modelage… d’images intérieures.
En accord avec Edwards (1987) et McNiff (1992) ), elle propose ici, plutôt
que de dessiner (peindre, sculpter...) ce que nous voyons à l’extérieur, de
dessiner (peindre, sculpter) ce que nous voyons à l’intérieur. En effet, pour ces
art-thérapeutes, la connaissance de soi passe par la connaissance, c’est-à-dire
l’expérience, de ces sources intérieures d’imagerie (Edwards, 1987). Ces ima-
ges sont spontanées, en ce qu’elles font irruption à la conscience à partir de
souvenirs, de rêves ou de rêveries, ou encore durant des états de vigilance où
la conscience est atténuée. Jung (1959,1993), qui favorisait l’émergence et
l’évolution de ces images, encourageait la personne à leur donner une forme,
que ce soit par le dessin, la peinture, la sculpture ou même la danse ou la
musique. Il considérait que la personne se trouvait ainsi mise en action, deve-
nant un agent actif de son propre développement, plutôt qu’un témoin passif.
L’image comme expérience de connaissance de soi
L’image en art-thérapie réfère à une production plastique, qu’elle soit dessin,
peinture, sculpture, collage ou objet en trois dimensions de l’expression la plus
simple à la forme la plus complexe et élaborée. La création ne vise pas nécessai-
rement la production d’oeuvres plastiques achevées et ne comporte pas
d’intention esthétique sinon l’expression et la manifestation de soi au monde.
Un simple gribouillis (Cane, 1959,1983; Gardner, 1980; Kellog, 1970, Kramer,
1971) sera le prétexte à l’expression d’une colère jusque-là réprimée comme il
peut être l’occasion pour un symbole d’émerger si la personne apprend à lire
entre les lignes. Une ligne, une couleur, une forme, définies comme pré-images
(Rhinehart et Engelhorn, 1982; Hamel, 1997), à peine esquissées ou schématiques,
pourront même être, pour la personne, plus significatives qu’une forme plus
complexe et achevée, et seront donc propices à une investigation plus perti-
nente (Rhyne, 1984; Zinker, 1977).
L’image comme projection
Si l’hypothèse projective est à la base de l’approche psychodynamique, les
art-thérapeutes de toutes approches se réclament du concept de projection
(Johnson, 1998). En effet, dans l’art, il y a d’abord une « projection » réelle
dans une création matérielle (sur le papier, dans la matière), qu’on peut obser-
ver directement (Hamel, 1997). De plus, l’image produite (ou l’image choisie,
s’il s’agit d’un collage de photos par exemple) constituerait une projection de
nos désirs, fantasmes, conflits ou émotions, et un reflet de différents aspects
de nous-mêmes (Rhyne, 1984). Nous pouvons regarder l’image que nous
créons à la fois comme un objet réel, extérieur à nous et distinct de nous et