Esaïe, son rôle est donc de préparer un « avenir » que Dieu va réaliser, et d'en favoriser la
mise en oeuvre, en invitant ses auditeurs à s'y préparer dans leur propre existence.
En réponse, ensuite, à une 2ème question, lui demandant pourquoi il pratique un rite de
baptême sur les gens qui s'approchent de lui, Jean-Baptiste précise, toujours dans la
même logique de pensée, que son baptême dans les eaux du Jourdain n'est qu'une
démarche préalable de purification, un préliminaire à la rencontre de quelqu'un d'autre qui
va venir, quelqu'un qu'il ne nomme pas encore, mais dont il déclare qu'il est infiniment
supérieur à lui, dans la mesure où lui-même n'est pas digne d'en être l'esclave, quelqu'un
qui est déjà là, au milieu du peuple, sans pour autant s'être manifesté publiquement. Nous
le constatons : Jean le Baptiste est uniquement et totalement tourné vers un « Autre »,
Jésus le Christ, dont l'Evangile de Jean, comme tous les Evangiles, nous détaille
l'unique Bonne Nouvelle du salut de Dieu qu'il nous apporte. Dans l'interrogatoire qu'il
subit de la part des envoyés des chefs du peuple, Jean-Baptiste est questionné sur son
identification éventuelle à trois figures populaires liées à la fin des temps dans la Tradition
Juive : celle d'un « Messie » royal, fils de David, celle d'un « Nouveau Moïse », celle d'un
prophète, percutant dans sa parole et capable de miracles prodigieux, comme l'avait été le
prophète Elie, prophète non-écrivain, dont le ministère nous est raconté dans les deux
Livres des Rois. A noter que, d'une part, ces trois figures passaient également pour autant
d'aspects de la figure plus ou moins unique du Messie attendu, et que, d'autre part, Jésus
lui-même n'a jamais revendiqué explicitement ce titre de Messie, même s'il a accepté,
semble-t-il, mais avec beaucoup de réserves, qu'on le désigne ainsi. Il faut se rappeler
aussi que le prophète Elie, perçu en vision par Elisée, son disciple et successeur, comme
enlevé au ciel sur un char de feu (cf. 2 Rois 2, 11), était, en conséquence, considéré par la
tradition comme étant toujours vivant, et attendu comme devant revenir avant le Jour du
Seigneur (cf. Malachie, 3, 23-24). Comme Jean-Baptiste portait, un vêtement comparable
à celui d'Elie, on comprend qu’on lui ait été demandé s'il était Elie, ce à quoi il a répondu
négativement. Mais si Jean-Baptiste refuse tout aussi nettement d'être identifié au
« prophète comme Moïse » annoncé dans le Deutéronome, il apparaît que, selon Jean,
les foules aient, à l'occasion, identifié Jésus lui-même à ce prophète (cf. Jean 6, 14 ; 7, 40
et 52).
Le point commun entre Moïse, Elie, et Jean-Baptiste, est d’abord que tous les trois ont fait
l'expérience d'un parcours dans le désert. Quant au rôle de la « voix qui crie dans le
désert », comme l'avait fait le 2ème prophète Esaïe (même si son texte situe le désert
comme le lieu, non de la voix, mais de l'endroit où il faut aplanir une route pour le
Seigneur), rôle que s'attribue ici Jean-Baptiste, il s'agit bien, dans l'un et l'autre cas, d'une
mission de préparation. Chez Esaïe, (Es 40, 3), cette mission était de réaliser une route
dépourvue d'obstacles pour le retour des exilés de Babylone à Jérusalem. En s'exprimant
ainsi à son tour, Jean-Baptiste annonce qu'il prépare la venue de Dieu, ou de quelqu'un de
très associé à sa grandeur, au milieu de son peuple, ce qui indique un événement d'une
extrême importance, et pour lequel le peuple doit se préparer au mieux. Ce rôle précis de
Jean-Baptiste est présenté, de façon unanime, par les quatre Evangiles, mais, l'Evangile
de Jean, est le seul à nous apprendre que Jean le Baptiste se soit défini ainsi
personnellement, de façon directe, et en réponse à une question concernant son identité.
Dans ce contexte, la 2ème question, posée à Jean-Baptiste par des pharisiens qui faisaient
partie de la délégation de prêtres et de lévites envoyée par les autorités Juives, paraît
tout-à-fait logique. Pourquoi donc baptise-t-il, si son rôle n'est que d'être une voix qui crie
un message de conversion dans le désert ? Jean-Baptiste répond qu'il ne baptise que
dans l'eau et avec de l'eau, alors qu'il précisera, plus loin au verset 33 de ce même
chapitre, que Jésus baptisera dans l'Esprit Saint. Cette distinction claire et très affirmée
entre ces deux baptêmes est également commune aux quatre Evangiles, et se retrouve